Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-OCI-426
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- des renseignements qui révèlent des
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet d’une blessure grave subie par un homme de 23 ans (le plaignant).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 6 octobre 2024, à 11 h 34, le Service de police régional de Peel (SPRP) a avisé l’UES de ce qui suit.
Le 6 octobre 2024, à 2 h 34, des agents du programme stratégique d’application ciblée (PSAC) du SPRP se sont rendus à un commerce situé à proximité de Torbram Road et de Drew Road. Les agents menaient une enquête. Ils ont trouvé le plaignant en possession d’une arme à feu. Le plaignant a été placé en état d’arrestation, puis il a tenté de désarmer l’un des agents au cours de la lutte qui s’est ensuivie. Les agents ont fini par menotter le plaignant. Alors que les agents l’escortaient vers un véhicule de police, le plaignant a réussi à se dégager et a pris la fuite en courant. Les agents se sont mis à sa poursuite, l’ont rattrapé et l’ont plaqué au sol. Le plaignant s’est plaint qu’il avait mal à la main droite. Il a été transporté à l’Hôpital Civic de Brampton (HCB). Des radiographies ont été prises, mais on ne lui a diagnostiqué aucune blessure. Le plaignant a été transporté à la Division 12 du SPRP, où il a été placé en détention en attendant son audience de mise en liberté sous caution. Vers 11 h 45, juste avant l’audience, le HCB a appelé le SPRP pour les informer que le plaignant avait en fait subi une fracture à l’un des os de sa main droite. Les agents ont ramené le plaignant au HCB et un plâtre lui a été posé.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 7 octobre 2024 à 8 h 52
Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 7 octobre 2024 à 10 h
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4
Nombre d’enquêteurs spécialistes des
sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
Personne concernée (« plaignant ») :
Homme de 23 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés
Le plaignant a participé à une entrevue le 8 octobre 2024.
Témoin civil (TC)
TC A participé à une entrevue
Le témoin civil a participé à une entrevue le 18 octobre 2024.
Agent impliqué (AI)
AI A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
L’agent impliqué a participé à une entrevue le 23 octobre 2024.
Agents témoins (AT)
AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
Les agents témoins ont participé à des entrevues le 10 octobre 2024 et le 11 octobre 2024.
Éléments de preuve
Les lieux
Les événements en question se sont déroulés à l’avant d’un commerce situé près de Torbram Road et de Drew Road, à Mississauga.
Éléments de preuve médico-légaux
Données sur le déploiement du pistolet à impulsion électrique (PIE) de l’AT no 1
À 2 h 31 min 56,844 s[2], le 6 octobre 2024, la détente a été actionnée et la cartouche de la baie 1 a été déployée. Un courant électrique a été déchargé pendant 4,967 secondes.
Données sur le déploiement du PIE de l’AI
À 2 h 31 min 35,410 s, le 6 octobre 2024, la détente a été actionnée et la cartouche de la baie 1 a été déployée. Un courant électrique a été déchargé pendant 3,509 secondes.
À 2 h 31 min 39,217 s, la détente a été actionnée et la cartouche de la baie 2 a été déployée. Un courant électrique a été déchargé pendant 4,964 secondes.
À 2 h 31 min 45,011 s, le bouton d’arc droit a été actionné pendant 4,944 secondes, alors que les deux cartouches avaient déjà été déployées.
À 2 h 31 min 46,076 s, le bouton d’arc droit a été actionné, mais aucune durée n’a été enregistrée.
À 2 h 31 min 57,951 s, le bouton d’arc droit a été actionné pendant 4,938 secondes.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[3]
Enregistrement vidéo — téléphone cellulaire
La vidéo a été enregistrée dans le stationnement avant d’un commerce situé près de Torbram Road et Drew Road. On voit le plaignant assis sur le sol contre un véhicule banalisé du SPRP. Il n’a pas de chaussures et il est menotté derrière le dos. L’AT no 1 se tient debout, dos à la caméra, au-dessus du plaignant. Le plaignant demande à plusieurs reprises qu’on lui desserre les menottes, car il ne sent pas ses mains.
Images captées par les systèmes de caméra intégrée au véhicule (SCIV) de l’agent no 1 et de l’agent no 2
Le 6 octobre 2024, entre 3 h 12 et 3 h 26, le plaignant se trouve dans le compartiment arrière du véhicule de police de l’agent no 1. Il est menotté derrière le dos. Le plaignant demande pourquoi ses effets n’ont pas été transférés avec lui. L’agent no 1 explique au plaignant à plusieurs reprises qu’il n’a pas les réponses à ses questions, car il est seulement là pour le transporter. Le plaignant continue à poser des questions sur ses effets personnels. L’agent no 1 refuse de poursuivre la conversation avec lui et lui demande d’en parler aux agents qui l’ont arrêté.
À 8 h 45, on fait monter le plaignant dans le compartiment arrière du véhicule de police de l’agent no 2. Il est menotté à l’avant et porte un chandail à manches longues. Ils quittent le HCB.
Entre 8 h 55 et 9 h 9, les effets personnels du plaignant sont récupérés à la Division 21 et le plaignant est conduit au Palais de justice William Davis.
Entre 10 h et 10 h 17 min, le plaignant remonte dans le véhicule de police de l’agent no 2 et est ramené au HCB.
Entre 10 h 43 et 11 h 2, le plaignant est ramené au Palais de justice William Davis. Il a maintenant un plâtre à la main et au bras droits.
Enregistrement capté par les caméras d’intervention de l’agent no 1 et de l’agent no 2
Le 6 octobre 2024, à 2 h 58, l’agent no 1 se trouve devant un commerce situé près de Torbram Road et de Drew Road. Le plaignant se tient devant un véhicule de police. Il est menotté derrière le dos. Cinq agents en uniforme se trouvent également sur les lieux. Le plaignant se plaint qu’il ne sent pas sa main et refuse de décliner son identité. Un autre agent arrive. Les menottes sont retirées et on lui passe d’autres menottes. Il déclare qu’il se sent mieux et qu’il veut parler à son avocat.
À 3 h 3 min, la garde du plaignant est confiée à l’agent no 1. Le plaignant ne cesse de demander ses effets et affirme que la police a pris une grosse somme d’argent qui était dans sa poche. Le plaignant refuse de monter à l’arrière du véhicule de police sans ses effets personnels.
Entre 3 h 6 min 36 s et 3 h 7 min 47 s, des agents soulèvent le plaignant par les épaules et les jambes, le placent la tête la première sur la banquette arrière et le tirent sur la banquette depuis l’autre côté. Le plaignant crie [Traduction] « agression » et « je veux mes choses » alors que les agents ferment les portières arrière.
Enregistrement vidéo — Torbram Road
Le 6 octobre 2024, à 2 h 22 min, un VUS GMC banalisé patrouille lentement dans le stationnement avant du commerce. Il marque une pause près de l’entrée, puis fait demi-tour à l’extrémité sud du stationnement. Il revient se garer devant un véhicule blanc situé à l’extrémité nord du stationnement.
À 2 h 30 min 19 s, un homme portant un chandail à capuchon et un masque chirurgical [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] sort du commerce en compagnie d’un homme [on sait maintenant qu’il s’agissait du TC] et marche vers le nord, le long de l’avant du bâtiment.
Entre 2 h 30 min 48 s et 2 h 31 min 7 s, le GMC s’arrête devant le commerce. L’AT no 2 sort par la portière du passager avant et l’AI sort par la portière du passager arrière. L’AT no 2 s’approche du plaignant par l’avant tandis que l’AI s’approche par-derrière. L’AI dit à un autre homme de s’éloigner et parle au TC. L’AT no 2 palpe le sac que le plaignant portait en bandoulière, fouille la poche de son chandail et semble dézipper le sac. L’AI place sa main gauche sur le plaignant. Le plaignant s’éloigne de l’AT no 2 et se retourne pour s’enfuir. Alors qu’il se retourne, l’AI saisit sa main droite et le plaignant tombe à la renverse, en agrippant l’uniforme de l’AI à la poitrine et le tirant au sol avec lui.
À 2 h 31 min 17 s, un véhicule recule contre le côté conducteur de la GMC. L’AT no 1 sort du VUS GMC et discute avec le conducteur du véhicule.
À 2 h 31 min 52 s, l’AT no 2 tente de maîtriser le plaignant et de le maintenir au sol en plaçant son genou droit sur sa hanche gauche et ses deux mains sur son épaule gauche. L’AI reprend pied et, alors que le plaignant se tient voûté entre lui et l’AT no 2, donne deux coups de genou droit dans le visage du plaignant. Ils luttent contre le capot d’une berline pendant que l’AI sort son PIE. Voyant la lutte en cours, l’AT no 1 s’approche du côté passager de la berline en sortant son PIE. Des objets tombent au sol, notamment ce qui semble être un portefeuille, un masque chirurgical et une arme à feu. L’arme à feu glisse sous la berline.
À 2 h 32 min, le plaignant parvient à se libérer de l’AI et de l’AT no 2 et se met à courir vers l’est à travers le stationnement. L’AT no 1 décharge son PIE dans le dos du plaignant, alors qu’il se trouve à environ un mètre de lui. Le plaignant passe devant le GMC en courant, trébuche et tombe sur la chaussée, et son épaule droite frappe le sol en premier. Il semble amortir sa chute au moyen de son bras droit, puis tente de se relever. L’AT no 2 et l’AI le poursuivent. L’AI déploie son PIE, provoquant une paralysie neuromusculaire chez le plaignant. Les agents roulent le plaignant sur le ventre, l’AI place un genou sur son épaule et l’AT no 2 place un genou sur le haut de sa jambe. L’AT no 1 se tient près de l’endroit où l’arme à feu est tombée. L’AT no 2 prend les menottes de l’AT no 1 tandis que l’AI maintient les bras du plaignant derrière son dos. Les agents lui passent les menottes derrière le dos.
Entre 2 h 34 min 30 s et 2 h 35 min 15 s, l’AI fait rouler le plaignant sur le dos et procède à une brève fouille par palpation. L’AI se sert de l’arrière du chandail du plaignant pour le soulever et l’amener à l’avant du VUS GMC banalisé. Il fouille le plaignant pendant que l’AT no 1 l’éclaire avec une lampe de poche.
À 2 h 35 min 51 s, l’AT no 1 s’écarte et le plaignant prend la fuite vers l’est, en direction de Torbram Road. Il traverse une bande gazonnée et s’engage dans la deuxième voie de circulation en direction sud de Torbram Road avant de trébucher et de rouler sur la chaussée. L’AI rattrape le plaignant alors qu’il tente de se remettre sur ses pieds. Il utilise le poids de son corps pour heurter le dos du plaignant et le faire tomber sur l’asphalte.
À 2 h 35 min 59 s, l’AI porte deux coups rapides de la main droite au visage du plaignant. Il monte à califourchon sur le plaignant et le maintient au sol en attendant l’arrivée de l’AT no 1.
À 2 h 36 min 23 s, l’AI remet le plaignant debout et l’escorte jusqu’au capot du GMC, sur le côté conducteur.
À 2 h 37 min 26 s, l’AI se sert de l’effet de levier de son corps et de sa jambe droite pour amener le plaignant au sol. L’AI maintient le plaignant au sol à l’aide de ses deux bras. Il place le plaignant en position assise, le dos appuyé contre la calandre du GMC.
À 2 h 58 min 33 s, un véhicule du SPRP arrive.
À 3 h 3 min 12 s, le plaignant est escorté jusqu’au véhicule du SPRP, mais résiste aux agents qui tentent de le faire asseoir sur la banquette arrière. Les agents soulèvent ses jambes et le font monter la tête la première dans le compartiment arrière.
À 3 h 10 min 37 s, le véhicule du SPRP quitte les lieux avec le plaignant.
Éléments obtenus auprès du service de police
Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants auprès du SPRP entre le 8 octobre 2024 et le 16 octobre 2024 :
- Rapport — renseignements sur la personne — le plaignant
- Rapport sur les détails de l’incident
- Historique de l’incident
- Rapport d’incident
- Politiques — Bureau des enquêtes criminelles et de l’application spécialisée de la loi
- Vidéos captées par les caméras d’intervention
- Données sur le déploiement des PIE de l’AT 1 et de l’AI
- Liste des agents concernés
- Résumé des formations suivies par l’AI
- Notes de l’AT 2, de l’AT 1 et de l’AI
- Enregistrements des communications
Éléments obtenus auprès d’autres sources
Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources entre le 8 octobre 2024 et le 11 octobre 2024 :
- Vidéo enregistrée par un civil au moyen d’un téléphone cellulaire
- Dossiers médicaux du plaignant, fournis par le William Osler Health System
- Enregistrement vidéo — Torbram Road
Description de l’incident
Le scénario suivant ressort des éléments de preuve recueillis par l’UES, lesquels comprennent des entrevues avec le plaignant, l’AI et d’autres témoins civils et de la police, ainsi que des enregistrements vidéo ayant capté l’incident en partie.
Le 6 octobre 2024, au petit matin, des agents du programme stratégique d’application ciblée du SPRP effectuaient une patrouille proactive dans leur véhicule de police devant un commerce situé près de Torbram Road et de Drew Road, à Mississauga. Lors de leur patrouille, ils ont remarqué deux hommes près de l’entrée du commerce : l’un portait un survêtement [on sait maintenant qu’il s’agissait du TC] et l’autre portait un chandail dont le capuchon était relevé, un masque médical et un sac en bandoulière [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant]. L’AI a remarqué que le TC et le plaignant se comportaient de façon hypervigilante et conformément aux signes révélateurs d’une personne armée. En raison de leurs vêtements, du fait qu’ils tenaient leurs sacs près de leurs corps, à portée de main, et de la façon dont ils scrutaient leur environnement, l’AI a soupçonné qu’ils avaient des armes à feu en leur possession. L’agent a élaboré un plan selon lequel l’AI s’approcherait du TC tandis que l’AT no 2 s’approcherait du plaignant, puis ils les arrêteraient tous deux pour possession d’une arme à feu.
L’AI et l’AT no 2 sont sortis du véhicule de police. L’AI s’est approché du TC, l’a informé qu’il était en état d’arrestation pour possession d’une arme à feu et a saisi son sac. L’AI n’a rien senti lui permettant de croire qu’il y avait une arme à feu dans le sac. L’AT no 2 s’est approché du plaignant, s’est identifié, a demandé une pièce d’identité et ce que contenait son sac, puis a palpé les poches du plaignant et le sac qu’il portait en bandoulière. Il a senti un objet ressemblant à une arme à feu. Le plaignant a affirmé avec insistance qu’il n’avait rien sur lui, a repoussé la main de l’AT no 2 sur son sac, s’est éloigné, a réussi à retirer le sac de son corps, puis s’est retourné en vue de s’enfuir. Alors qu’il se retournait, l’AI a agrippé sa main droite et le plaignant est tombé à la renverse. Ce faisant, le plaignant a agrippé l’uniforme de l’AI à la poitrine et l’a tiré au sol avec lui. L’AT no 2 a tenté de prendre le contrôle du plaignant. Il l’a maintenu au sol en plaçant son genou droit sur sa hanche gauche et ses deux mains sur son épaule gauche. L’AI a repris pied et, alors que le plaignant était voûté entre lui et l’AT no 2, il lui a porté deux coups de genou droit au visage. Le plaignant a continué à lutter avec les agents contre le capot d’une berline. Au cours de la lutte, des objets sont tombés au sol, y compris une arme à feu, laquelle a glissé sous la berline. L’AT no 1 a pris le contrôle de l’arme à feu. Il s’agissait d’un Glock 27 et le chargeur était à moitié sorti.
Le plaignant s’est dégagé de l’AI et de l’AT no 2 et s’est mis à courir vers l’est à travers le stationnement. L’AT no 1 a déchargé son PIE dans le dos et la jambe du plaignant. Les sondes l’ont atteint, mais se sont délogées alors que le plaignant s’enfuyait. Le plaignant a passé devant le véhicule de police en courant, a trébuché et est tombé sur la chaussée. L’AT no 2 et l’AI poursuivaient le plaignant. L’AI a déployé son PIE à une reprise. Comme cela n’a pas eu l’effet escompté, il l’a déployé une deuxième fois, ce qui a permis de paralyser temporairement le plaignant. Le plaignant est tombé sur son côté droit sur l’asphalte du stationnement et les agents l’ont roulé sur le ventre. L’AI a placé un genou sur son épaule et l’AT no 2 a placé un genou sur le haut de sa jambe. Les mains du plaignant se trouvaient sous lui. L’AI a informé le plaignant qu’il était en état d’arrestation et qu’il devait lui donner ses mains. Le plaignant a refusé de donner ses mains. L’AI, craignant que le plaignant ne saisisse une arme, a utilisé le PIE en mode paralysant sur le haut du dos du plaignant. Le plaignant a relâché ses bras et les agents lui ont passé les menottes derrière le dos.
L’AI a remis le plaignant debout et l’a escorté jusqu’à l’avant du véhicule de police. Soudain, le plaignant s’est enfui vers l’est en direction de Torbram Road, toujours menotté derrière le dos. Il a traversé le stationnement et s’est rendu jusqu’à la deuxième voie de circulation en direction sud de Torbram Road avant de trébucher et de rouler sur la chaussée. L’AI a rattrapé le plaignant alors qu’il tentait de se remettre sur ses pieds. Il a utilisé le poids de son corps pour heurter le dos du plaignant et le faire tomber sur la chaussée. L’AI a porté deux coups rapides de la main droite au visage du plaignant, puis il s’est placé à califourchon sur le plaignant et l’a plaqué au sol en attendant que l’AT no 1 arrive pour lui prêter main-forte.
Le plaignant a été escorté jusqu’au stationnement du commerce. Il a refusé de décliner son identité. Il s’est plaint qu’il ne sentait pas sa main. Les agents lui ont retiré les menottes et les ont remplacées par d’autres. Le plaignant a continué à refuser de fournir son identité et a demandé aux agents où se trouvaient ses effets personnels. Le plaignant a refusé de monter dans le véhicule de police sans ses effets personnels. Après de multiples tentatives, pendant environ dix minutes, pour amener le plaignant à s’identifier et à monter dans le véhicule de police, les agents l’ont fait monter dans le compartiment du siège arrière.
Le plaignant a été transporté à l’hôpital après son arrestation et on lui a diagnostiqué une fracture du poignet droit.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1) du Code criminel — Protection des personnes autorisées
25(1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier;
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;
d) soit en raison de ses fonctions,
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
Analyse et décision du directeur
Le 6 octobre 2024, le plaignant a été grièvement blessé lors de son arrestation par des agents du SPRP. L’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête dans laquelle l’AI a été désigné comme étant l’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. Après examen de la preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation du plaignant et la blessure qu’il a subie.
Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.
Je suis convaincu que l’AI et l’AT no 2 exerçaient leurs fonctions de façon légitime tout au long de la série d’événements qui s’est soldée par l’arrestation du plaignant. Leur patrouille et leurs observations leur ont donné des raisons de croire que le plaignant était en possession d’une arme à feu et ils avaient donc des motifs légitimes de détenir le plaignant à des fins d’enquête et pour procéder à une fouille par palpation pour assurer la sécurité des agents et du public : R. c. Mann, [2004] 3 RCS 59. Après avoir senti ce qui semblait être une arme à feu dans le sac du plaignant et après voir vu une arme à feu tomber sur le sol, les agents étaient fondés à arrêter le plaignant pour possession illégale d’une arme à feu.
Je suis également convaincu que la force utilisée par l’AI, l’AT no 2 et l’AT no 1 pour détenir et arrêter le plaignant était justifiée au sens de la loi. Cette force n’a pas dépassé ce qui serait considéré comme raisonnable et nécessaire dans les circonstances. Le plaignant avait démontré qu’il était déterminé à échapper à son appréhension et s’était révélé un adversaire redoutable lorsque l’AI et l’AT no 2 avaient tenté de le maîtriser, parvenant même à se libérer à deux occasions.
Puisque le plaignant avait refusé de se soumettre pacifiquement à son arrestation, les agents étaient en droit de recourir à une force raisonnable pour parvenir à leurs fins. Les deux coups de genou portés au plaignant ne me semblent pas excessifs dans ces circonstances, d’autant plus que le plaignant a réussi à prendre la fuite, même après le dernier de ces coups. Le recours au PIE, ce qui représente une escalade de la force employée, me semble également en accord avec les exigences du moment. Cette escalade de la force est devenue nécessaire pour parer à la résistance opposée par le plaignant et permettre aux agents de l’arrêter le plus rapidement possible, de peur qu’il ne soit en possession d’autres armes. Les trois premières décharges de PIE sont survenues alors que le plaignant fuyait la police et semblaient destinées à empêcher le plaignant d’échapper à son arrestation. La dernière décharge de PIE, survenue alors que le plaignant se trouvait au sol, semblait destinée à faciliter le processus de menottage. Les deux coups rapides portés avec la main droite pour tenter de maîtriser le plaignant au milieu de Torbram Road, après qu’il se soit enfui pour la deuxième fois, ne me semblent pas non plus excessifs. À ce moment-là, il était devenu évident que le plaignant n’allait pas se rendre pacifiquement. De plus, les parties se trouvaient au milieu d’une route, ce qui les mettait en danger.
Il est possible que la blessure subie par le plaignant soit survenue lorsqu’il est tombé après le déploiement du PIE par l’AI ou lorsqu’il est tombé sur Torbram Road alors qu’il fuyait pour échapper à son arrestation. Dans tous les cas, je n’ai aucun motif de croire que l’AI a outrepassé les limites de la protection conférée par le Code criminel.
Pour les motifs qui précèdent, j’en conclus donc qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.
Date : Le 3 février 2025
Approuvé électroniquement par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) Sauf indication contraire, les renseignements fournis dans cette section reflètent les renseignements fournis à l’UES au moment de la notification. Ils ne reflètent pas nécessairement les faits constatés par l’UES dans le cadre de son enquête. [Retour au texte]
- 2) L’heure provient de l’horloge interne des armes et n’est pas nécessairement synchronisée avec les autres armes ni avec l’heure réelle. [Retour au texte]
- 3) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.