Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-OCI-413

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet de la blessure grave subie par un homme de 31 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

Le 29 septembre 2024, à 0 h 20, le Service de police de Hamilton (SPH) a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant.

D’après les renseignements fournis par le SPH, le 28 septembre 2024, des agents du SPH suivaient une automobile Mazda 3 qui avait été déclarée volée. Ils l’ont perdue de vue. À 22 h 12, l’agent impliqué (AI) est tombé sur une Nissan Altima. Croyant qu’il s’agissait du véhicule volé, l’AI l’a coincé. Le conducteur, soit le plaignant, se trouvait à l’intérieur. L’AI a cassé la vitre. Le plaignant a tenté de s’enfuir, mais l’AI l’a plaqué au sol. La police a appris que la Nissan avait également été déclarée volée. Elle arborait une fausse plaque d’immatriculation. Le plaignant s’est plaint qu’il était blessé et a été transporté à l’Hôpital Saint-Joseph (HSJ). À 22 h 54, on lui a diagnostiqué une fracture du bras gauche et on lui a posé un plâtre temporaire.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 29 septembre 2024 à 6 h 28

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 29 septembre 2024 à 6 h 40

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2

Nombre d’enquêteurs spécialistes des

sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Personne concernée (« le plaignant ») :

Homme de 31 ans, a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 29 septembre 2024.

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à des entrevues le 29 septembre 2024.

Agent impliqué (AI)

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 18 décembre 2024.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont déroulés à l’intérieur et autour d’un véhicule garé sur l’avenue West Nord, à Hamilton.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]

Vidéo provenant d’une résidence

Le 28 septembre 2024, vers 20 h 9 min 43 s, on voit l’avant d’une berline [Nissan Altima] qui roule vers le nord et se gare sur le côté ouest de l’avenue West Nord. Elle fait ensuite marche arrière et sort du champ de la caméra, mais ses phares demeurent visibles.

À 20 h 10 min 20 s, les phares s’éteignent.

Vers 20 h 10 min 27 s, un véhicule de police identifié du SPH [conduit par l’AI] s’approche lentement en roulant vers le sud. Il oblique vers l’endroit où se trouve l’Altima.

À 20 h 10 min 44 s, l’AI active ses gyrophares.

Vers 20 h 10 min 52 s, l’AI sort de son véhicule de police, marche vers le sud et sort du champ de la caméra.

Vers 20 h 11 min 29 s, on voit une personne courir en direction nord, sur le côté est de la rue.

À 20 h 11 min 39 s, la vidéo prend fin.

Enregistrement des communications de la police

Le 28 septembre 2024, à 20 h 24 min 30 s, des agents du SPH recherchent une berline Mazda 3 qui ne s’est pas arrêtée pour la police. La Mazda a été vue pour la dernière fois près de la rue Emerald.

À 20 h 41 min 46 s, l’AI indique qu’il roule sur l’avenue West Nord. Il a repéré un véhicule qu’il croyait être la Mazda, sur l’avenue West Nord. L’AI indique ensuite qu’il a arrêté un homme [le plaignant] et qu’une femme s’est enfuie en direction nord sur l’avenue West Nord.

Un agent du SPH demande que les SMU soient envoyés sur les lieux pour une blessure à la main qui saignait. Il sera plus tard confirmé que l’AI était celui qui avait subi cette blessure. On indique que la Nissan avait elle aussi été déclarée volée et qu’il s’agissait d’un véhicule distinct de la Mazda 3 qui ne s’était pas arrêtée pour la police.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants auprès du SPH entre le 1er octobre 2024 et le 11 octobre 2024 :

  • Rapports du SPH sur l’incident et l’arrestation, et rapport supplémentaire
  • Rapport du système de répartition assistée par ordinateur
  • Enregistrements de communications
  • Liste d’interactions antérieures impliquant le plaignant

Éléments obtenus auprès d’autres sources

Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources entre le 29 septembre 2024 et le 2 octobre 2024 :

  • Dossiers médicaux du plaignant, fournis par le HSJ
  • Vidéo provenant d’une résidence

Description de l’incident

Le scénario suivant ressort des éléments de preuve recueillis par l’UES, lesquels comprennent des entrevues avec le plaignant et l’AI.

Dans la soirée du 28 septembre 2024, l’AI patrouillait à bord d’un véhicule identifié lorsqu’il a aperçu un véhicule arrêté. Il a cru qu’il s’agissait d’un véhicule qui s’était enfui de la police peu de temps avant. Environ 10 minutes plus tôt, un autre agent du SPH avait signalé qu’une Mazda 3 ne s’était pas arrêtée pour lui. La Mazda était conduite par un homme et il y avait une passagère à l’avant. Il n’y avait pas de plaque d’immatriculation à l’avant de la Mazda. Le véhicule sur lequel l’AI était tombé n’avait pas de plaque d’immatriculation avant lui non plus, était lui aussi conduit par un homme, et une femme se trouvait aussi sur le siège du passager avant.

L’AI a arrêté son véhicule de police nez à nez avec le véhicule, lequel était garé face au nord, sur le côté ouest de l’avenue West Nord. L’IA est sorti de son véhicule et s’est approché de l’autre véhicule pour demander à ses occupants de sortir à plusieurs reprises. Craignant que le conducteur ne soit sur le point de mettre le véhicule en marche, l’AI a brisé la vitre de la portière du conducteur afin d’accéder au conducteur.

Le conducteur était le plaignant. Il conduisait une Nissan Altima, et non la Mazda 3 recherchée par la police. La Nissan Altima avait également été volée. Une plaque d’immatriculation frauduleuse avait été apposée à l’arrière du véhicule. Lorsque l’agent a brisé la vitre de la portière du conducteur, la passagère est sortie du véhicule par la portière du passager avant et s’est enfuie vers le nord sur l’avenue West Nord. Le plaignant a escaladé la console centrale du véhicule et est sorti par la portière du passager avant. Il a couru vers l’est et a traversé la chaussée sur une courte distance avant que l’AI le plaque au sol.

Lorsqu’il a vu le plaignant sortir de la Nissan, l’AI s’est lancé à sa poursuite et l’a plaqué au sol par-derrière. Il l’a maintenu au sol pendant un certain temps avant de lui passer les menottes derrière le dos.

Le plaignant a été transporté au poste de police, puis à l’hôpital, après s’être plaint d’avoir mal au bras gauche. On lui a diagnostiqué une fracture de l’avant-bras.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25 (1) du Code criminel — Protection des personnes autorisées

25(1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

a) soit à titre de particulier;

b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;

c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;

d) soit en raison de ses fonctions,

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 28 septembre 2024, lors de son arrestation par un agent du SPH, le plaignant a subi une blessure grave. L’UES a été avisée de l’incident et a lancé une enquête. L’AI a été identifié comme étant l’agent impliqué dans cette affaire. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation du plaignant et la blessure qu’il a subie.

Aux termes du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.

Bien que le plaignant et le véhicule qu’il conduisait n’étaient pas ceux qui s’étaient enfuis de la police peu avant, la loi n’exige pas la perfection de la part des agents de police. Les agents ont droit à une certaine protection lorsqu’ils agissent sur une base erronée, pour autant que leur erreur ait été raisonnable dans les circonstances. Dans le cas qui nous occupe, je suis convaincu que l’AI avait des motifs raisonnables de croire que le plaignant était l’individu qui s’était enfui de la police. Tout comme le véhicule recherché, la Nissan n’avait pas de plaque d’immatriculation à l’avant et contenait un conducteur et une passagère. La Nissan se trouvait également à proximité de l’endroit où la Mazda avait été vue pour la dernière fois.

Je suis également convaincu que la force utilisée par l’AI pour arrêter le plaignant, à savoir la mise au sol, constituait une force conforme à la loi. Il était manifeste qu’une intervention physique allait être nécessaire pour arrêter le plaignant, puisqu’il avait pris la fuite. De plus, l’agent a certainement dû prendre en compte la résistance physique que le plaignant allait vraisemblablement lui opposer une fois qu’il l’aurait rattrapé. Pour ces raisons, la mise au sol du plaignant était une tactique logique. L’AI pouvait ainsi espérer mettre fin à la fuite et mieux gérer toute autre résistance de la part du plaignant.

Par conséquent, bien que je reconnaisse que le bras du plaignant ait été cassé lorsque l’AI l’a amené au sol, je ne peux raisonnablement conclure que la blessure est due à un comportement illégal de la part de l’AI. Il n’y a donc pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.

Date : 27 janvier 2025

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Sauf indication contraire, les renseignements fournis dans cette section reflètent les renseignements fournis à l’UES au moment de la notification. Ils ne reflètent pas nécessairement les faits constatés par l’UES dans le cadre de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.