Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-OOD-364
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- des renseignements qui révèlent des
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 26 ans (le « plaignant »).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 31 août 2024, à 7 h 45, le Service de police régional de Peel (SPRP) a signalé l’incident suivant à l’UES.
Le 31 août 2024, vers 7 h 30, l’agent impliqué (AI) conduisait un véhicule de police banalisé en direction sud sur l’autoroute 410 lorsqu’il a aperçu une femme [on sait maintenant qu’il s’agissait d’un homme — le plaignant] près de la voie de circulation en direction ouest, sur le pont d’étagement de l’avenue Steeles. L’AI a décidé d’enquêter sur la situation et a emprunté la sortie de l’avenue Steeles pour se rendre à l’endroit où se trouvait le plaignant. Au même moment, le SPRP a reçu un appel au 911 au sujet du plaignant. D’après la personne qui a téléphoné, le plaignant se trouvait sur le pont d’étagement de l’avenue Steeles qui enjambait l’autoroute 410. L’AI a eu une brève conversation avec le plaignant, lequel lui a dit de ne pas s’approcher davantage. Le plaignant a ensuite sauté du pont d’étagement et a atterri sur les voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410, environ 7,6 mètres (25 pieds) plus bas. Son décès avait été constaté.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 31 août 2024 à 8 h 49
Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 31 août 2024 à 10 h 15
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2
Nombre d’enquêteurs spécialistes des
sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
Personne concernée (« plaignant ») :
Homme de 26 ans; décédé
Témoins civils (TC)
TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue
Les témoins civils ont participé à des entrevues entre le 31 août 2024 et le 26 septembre 2024.
Agent impliqué (AI)
AI N’a pas consenti à participer à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué
Agents témoins (AT)
AT no 1 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées et entrevue jugée non nécessaire
AT no 2 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées et entrevue jugée non nécessaire
AT no 3 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées et entrevue jugée non nécessaire
AT no 4 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées et entrevue jugée non nécessaire
Éléments de preuve
Les lieux
Les événements en question se sont déroulés sur le pont d’étagement de l’avenue Steeles Est qui enjambe les voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410, à Brampton.
Éléments de preuve matériels
Le 31 août 2024, à 10 h, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES est arrivé sur le pont d’étagement de l’avenue Steeles Est qui enjambe l’autoroute 410, à Brampton, et s’est rendu sur la section de l’autoroute 410 en direction sud située sous le pont d’étagement de l’avenue Steeles Est. Des agents de la Police provinciale de l’Ontario et de la SPRP, ainsi que le médecin légiste, étaient sur place. Deux zones d’intérêt avaient été identifiées. Des véhicules de police et des véhicules contractuels du ministère des Transports (MTO) bloquaient l’accès aux deux zones. Il s’agissait d’une journée ensoleillée et chaude.
La première zone était une section de l’autoroute 410 en direction sud, légèrement au nord et au sud du pont d’étagement de l’avenue Steeles Est. Cette section de l’autoroute comprenait une voie réservée aux véhicules multioccupants (VMO), quatre voies pour le trafic de transit et une voie d’insertion en direction ouest pour les véhicules qui s’engagent sur l’autoroute 410 à partir de l’avenue Steeles Est. Une barrière en béton séparait la circulation en direction nord de la circulation en direction sud. Le tracé de toutes les voies était clair et bien visible. La route était plane et asphaltée, et la vitesse maximale autorisée était de 100 km/h. Il y avait des marques de pneus dans la deuxième voie à l’ouest de la voie réservée aux VMO, légèrement au nord du pont d’étagement. Des produits alimentaires étaient éparpillés sur la chaussée. Des marqueurs avaient été placés sur la chaussée pour faciliter l’identification des éléments de preuve biologiques.
Le défunt, qui était recouvert d’une couverture bleue, se trouvait un peu au sud du pont d’étagement de l’avenue Steeles Est, dans la troisième voie à l’ouest de la voie réservée aux VMO. Des effets personnels, des éléments de preuve biologiques et d’autres objets d’intérêt étaient éparpillés sur la chaussée. Il y avait également des éclaboussures sur la chaussée. Une Honda Civic de couleur blanche (véhicule 1) était immobilisée au sud de l’endroit où gisait le défunt. Un gros camion tracteur transportant une grande benne à ordures (véhicule 2) était immobilisé sur l’accotement de la route, plus au sud de l’endroit où se trouvaient le défunt et la Honda blanche.
Un agent de police a relevé les empreintes digitales du défunt afin d’accélérer son identification. Les lieux ont été photographiés et la dépouille du défunt a été placée dans un sac mortuaire avant d’être photographiée sur place. Un agent de la Police provinciale a cartographié les lieux. Il y avait une caméra du MTO sur un poteau électrique situé sur le côté est de l’autoroute 410, au sud du pont d’étagement de l’avenue Steeles Est.
Le véhicule 1 était une berline Honda Civic de 2021. Le véhicule était immobilisé dans la deuxième voie à l’ouest de la voie réservée aux VMO et faisait face au sud. Une longue traînée de liquide s’étendait jusqu’à l’endroit où le véhicule était arrêté. Le moteur du véhicule était éteint et le coussin gonflable du côté passager avant était déployé. Le véhicule affichait des dommages importants sur le côté passager avant. Il y avait du sang sur le dessous de l’aile avant et des cheveux étaient visibles sur les composants du sous-châssis.
Le véhicule 2 était un tracteur routier Freightliner 2023. Le camion transportait une grande benne commerciale pour Wasteco. Le véhicule était immobilisé sur l’accotement non stabilisé sur le côté ouest de l’autoroute 410. L’avant du véhicule n’affichait aucun dommage, mais du sang et des tissus corporels étaient visibles sur une boîte à outils et sur les garde-boue arrière du côté conducteur du véhicule.
Des objets d’intérêt ont été recueillis et des photos ont été prises. Les services d’enlèvement des cadavres sont arrivés sur lieux et, à 12 h 17, un scellé a été inséré dans les tirettes des fermetures à glissière de la housse mortuaire. Les techniciens chargés de l’enlèvement du cadavre ont quitté les lieux en emportant la dépouille du défunt.
La deuxième zone d’intérêt se trouvait sur le côté nord du pont d’étagement de l’avenue Steeles Est, au-dessus de l’autoroute 410. Toutes les parties d’intérêt avaient été bouclées par des véhicules du SPRP. Deux véhicules d’intérêt du SPRP se trouvaient dans les voies de circulation en direction ouest de l’avenue Steeles Est, sur le côté est du pont d’étagement. Les véhicules de police, lesquels étaient entièrement identifiés, ont été photographiés. Ils n’affichaient aucun dommage. L’un d’eux était une Dodge Charger blanche à quatre portes. L’autre était une Ford Explorer blanche à quatre portes.
Une partie du trottoir et du garde-corps du côté nord du pont d’étagement ont été photographiés. Des mesures ont été prises pour déterminer la hauteur entre le garde-corps et le trottoir, soit 1,41 mètre. Le haut du garde-corps se situait à 9,1 mètres au-dessus des voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410. Une canette de boisson gazeuse (Coke) ouverte a été trouvée sur le trottoir, près du garde-corps.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]
Images captées par les caméras d’intervention des agents du SPRP
Le 31 août 2024, le temps était couvert et les routes étaient sèches.
Vers 7 h 2 min 27 s, la caméra de l’AI capte une vue d’une rue [on sait maintenant qu’il s’agissait du côté est du pont d’étagement de l’avenue Steeles Est, à la hauteur de l’autoroute 410]. Un véhicule de police du SPRP [on sait maintenant qu’il était conduit par l’AT no 2] est arrêté dans la voie de circulation en direction ouest.
Vers 7 h 2 min 31 s, le véhicule de police du SPRP traverse le pont en direction ouest et l’AI marche en direction ouest sur le trottoir nord du pont d’étagement.
Vers 7 h 2 min 57 s, un homme [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] se tient debout sur le garde-corps du côté nord du pont d’étagement, sur le côté nord de l’avenue Steeles Est. L’AI indique par radio qu’une voiture circulant en direction est s’est arrêtée sur la route et que le conducteur semble parler au plaignant. Le véhicule repart en direction est et l’AI demande qu’une unité intercepte le véhicule afin d’obtenir des informations.
Vers 7 h 3 min 58 s, l’AT no 2 sort de son véhicule de police sur le côté ouest du pont et marche en direction est, le long du trottoir nord du pont de l’avenue Steeles Est.
Vers 7 h 4 min 3 s, sur la vidéo captée par la caméra de l’AI, on voit le plaignant dire quelque chose. En raison du vent et des bruits de circulation, on ne peut discerner ce qu’il dit. L’AI continue de marcher vers l’ouest, en direction du plaignant.
Vers 7 h 4 min 13 s, le plaignant dit de nouveau quelque chose d’indiscernable. L’AI signale que le plaignant vient de passer son autre jambe de l’autre côté du garde-corps et qu’il est assis au-dessus des voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410. L’AT no 2 marche en direction est, sur le trottoir nord du pont, vers le plaignant.
Vers 7 h 4 min 30 s, le plaignant regarde plusieurs fois de l’est à l’ouest et balance ses bras.
Vers 7 h 4 min 37 s, le plaignant dit : [Traduction] « Ne venez pas ici (inaudible) ».
Vers 7 h 4 min 38 s, le plaignant s’accroupit et se jette en bas du pont, face au nord. Le plaignant crie et un bruit fort se fait entendre.
Vers 7 h 4 min 41 s, l’AI regarde par-dessus le garde-corps, sur le côté nord. Il prévient le répartiteur que le plaignant a sauté en bas du pont et a été heurté par un véhicule.
L’AI n’a jamais parlé au plaignant. Il se trouvait à une distance de 15 à 18 mètres du plaignant lorsque ce dernier a sauté. L’AT no 2, que l’on peut voir au loin à l’est, était encore plus loin du plaignant.
Vers 7 h 5 min 3 s, l’AT no 1 et un agent de la Police provinciale se dirigent vers l’AI en courant.
Vers 7 h 5 min 8 s, l’agent de la Police provinciale se retourne et se met à marcher en direction est. L’AT no 1 demande à l’AI : [Traduction] « Il buvait et criait, c’est ça? » L’AI répond : « Oui, je ne sais pas, je pense qu’il essayait de dire de ne pas s’approcher plus de lui, mais je ne pouvais rien entendre. »
Vers 7 h 6 min 7 s, l’AT no 1 dit à l’AI : [Traduction] « Oui, je l’ai vu et j’ai entendu les voitures, quelque chose l’a écrasé ».
Enregistrements vidéo fournis par le MTO
Au début de la vidéo captée le 31 août 2024, la caméra fait face au sud, depuis le côté sud de l’avenue Steeles Est, et filme les voies de circulation en direction nord et sud de l’autoroute 410. La chaussée est sèche et il y a peu de circulation.
Vers 4 h 28 min, la caméra pivote pour faire face au nord-ouest. Un homme — le plaignant — se trouve sur le côté nord du pont d’étagement de l’avenue Steeles Est. Il se tient à la rambarde et se penche plusieurs fois au-dessus, puis il se dirige vers l’ouest en marchant. Il porte des vêtements de couleur sombre et un sac à dos de couleur sombre sur son épaule droite. Le plaignant regarde vers l’arrière à plusieurs reprises, vers l’est, tout en continuant de marcher.
Vers 6 h, le plaignant traverse la bretelle d’accès à l’autoroute 410 en direction sud et poursuit sa route en direction ouest. Le plaignant traverse ensuite la bretelle de sortie de l’autoroute 410 en direction sud.
Vers 7 h 23 environ, un VUS Ford Explorer gris s’arrête dans la voie de circulation en direction ouest de l’avenue Steeles Est, à côté du plaignant. [Des tentatives infructueuses ont été faites pour identifier le véhicule et son conducteur.] Le conducteur active ses gyrophares situés au haut de la lunette arrière, au milieu. Le plaignant se retourne et prend la fuite en direction est sur l’avenue Steeles. Le véhicule éteint ses gyrophares et poursuit sa route en direction ouest.
Vers 8 h 3, le plaignant se met à escalader le pont d’étagement de l’avenue Steeles Est sur le trottoir situé sur le côté nord.
Vers 8 h 27, le plaignant escalade le garde-corps nord du pont [on sait maintenant qu’il se trouvait directement au-dessus des voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410]. Le plaignant s’assoit à califourchon sur le garde-corps et fait face à l’ouest. Il regarde autour de lui à plusieurs reprises. Par intermittence, il se penche vers l’avant et pose sa tête sur la lisse supérieure du garde-corps.
Vers 12 h 11, une berline grise s’arrête dans la voie de circulation en direction ouest et fait marche arrière, en direction du plaignant.
Vers 13 h 6 min, la berline grise repart en direction ouest et sort du champ de la caméra.
Vers 13 h 53 min, un véhicule qui roule vers l’est sur l’avenue Steeles [on sait maintenant qu’il s’agissait d’un véhicule de police du SPRP conduit par l’AT no 2] apparaît dans le champ de la caméra depuis le côté gauche de l’image. Le véhicule de police s’immobilise.
Vers 14 h 2, l’AT no 2 sort du véhicule de police, traverse à pied les voies de circulation en direction ouest et est sur l’avenue Steeles Est, et se rend jusqu’au trottoir sur le côté nord.
Vers 14 h 6, le plaignant passe sa jambe gauche de l’autre côté du garde-corps et se tient de l’autre côté du garde-corps, face au nord.
Vers 14 h 17, l’AI apparaît dans le champ de la caméra en marchant en direction ouest sur le trottoir nord de l’avenue Steeles.
Vers 14 h 40, l’AI se trouve à environ 15 mètres (50 pieds) du plaignant lorsque celui-ci se jette en bas du pont, face au nord. L’AT no 2 court vers l’AI.
Vers 14 h 43, dans le coin inférieur gauche du champ de la caméra, on voit des débris éparpillés sur les voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410, au sud du pont de l’avenue Steeles Est. Un camion vert [on sait maintenant qu’il s’agissait d’un camion à benne Wasteco] roule en direction sud et passe sous le pont de l’avenue Steeles Est. Le camion Wasteco sort du champ de la caméra, dans le coin inférieur gauche.
Enregistrements des communications
Le 6 septembre 2024, à 6 h 50 min 39 s, une femme [on sait maintenant qu’il s’agissait de la TC no 4] appelle le 911 et signale qu’un homme [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] se trouve sur le garde-corps du pont d’étagement de l’avenue Steeles Est qui enjambe l’autoroute 410. Par la suite, 11 autres appels au 911 seront effectués par des civils afin de signaler la présence du plaignant sur le pont d’étagement de l’avenue Steeles Est.
À 6 h 53 min 57 s, le répartiteur alerte les agents de police d’une perturbation inconnue sur le pont de l’avenue Steeles Est qui enjambe les voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410. On croyait que le plaignant allait sauter en bas du pont. L’AI, l’AT no 1 et l’AT no 2 confirment qu’ils sont en route. L’AI déclare également qu’il a vu le plaignant alors qu’il roulait en direction sud sur l’autoroute 410, et qu’il allait faire demi-tour pour se rendre sur le pont d’étagement.
À 6 h 57 min 5 s, l’AI indique qu’il a vu le plaignant marcher en direction ouest sur le côté nord de l’avenue Steeles.
À 6 h 57 min 36 s, l’AI signale que le plaignant a couru vers l’est, jusqu’au pont, et qu’il — l’AI — n’est pas à sa poursuite.
À 6 h 58 min 52 s, le répartiteur informe l’AI que le plaignant est de retour sur le pont d’étagement. L’AI indique qu’il voit le plaignant et qu’il veut attendre l’arrivée d’autres unités avant de s’approcher. L’AI signale que le plaignant a passé une jambe de l’autre côté du garde-corps. Le répartiteur informe les agents que le MTO surveille le plaignant à l’aide d’une de ses caméras. L’AI signale au répartiteur que le plaignant se balance d’avant en arrière et regarde autour de lui, et qu’il est peut-être sous l’emprise de substances illicites.
À 7 h 1 min 51 s, l’AI demande qu’un agent de police s’approche depuis le côté ouest du pont tandis qu’il s’approche depuis le côté est. L’AI signale qu’une berline grise s’est arrêtée à côté du plaignant, sur l’avenue Steeles Est, et que le conducteur semble tenter d’engager la conversation avec lui. L’AT no 2 informe le répartiteur qu’elle va s’approcher depuis le côté ouest. L’AI signale qu’il a bloqué la circulation sur l’avenue Steeles Est en direction ouest. Il indique ensuite que la berline grise est partie. L’AI indique qu’il se dirige vers le plaignant, en marchant, et que ce dernier a passé son autre jambe de l’autre côté du garde-corps. L’AI signale que lui et l’AT no 2 s’approchent de part et d’autre du pont. L’AI était en train de demander que la Police provinciale bloque l’accès aux voies de circulation lorsqu’il a signalé que le plaignant venait de sauter.
Éléments obtenus auprès du service de police
L’UES a obtenu les éléments suivants auprès du SPRP et de la Police provinciale (selon ce qui est indiqué ci-dessous) entre le 31 août 2024 et le 10 septembre 2024 :
- Enregistrements provenant des systèmes de caméra intégrés aux véhicules (Police provinciale)
- Enregistrements vidéo fournis par le MTO (SPRP)
- Enregistrements de communications (SPRP)
- Rapport sur les détails de l’incident (SPRP)
- Historique de l’incident (SPRP)
- Notes de l’AT no 2 (SPRP)
- Notes de l’AT no 1 (SPRP)
- Notes de l’AT no 3 (Police provinciale)
- Notes de l’AT no 4 (Police provinciale)
- Rapport sur une mort subite (Police provinciale)
- Rapport sur une collision de véhicule à moteur (Police provinciale)
- Directive — Politique relative à la santé mentale (SPRP)
Éléments obtenus auprès d’autres sources
L’UES a obtenu les documents suivants auprès d’autres sources :
- Rapports sur les demandes d’ambulance, fournis par les services médicaux d’urgence le 26 septembre 2024
- Rapport préliminaire de l’autopsie réalisée par le Service de médecine légale de l’Ontario, fourni le 2 septembre 2024
Description de l’incident
La preuve recueillie par l’UES, laquelle comprend des entrevues avec des témoins de la police et des témoins civils, ainsi que des enregistrements vidéo ayant capté la majeure partie de l’incident, brosse le portrait suivant de ce qui s’est passé. Comme la loi l’y autorise, l’AI a choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES et de ne pas autoriser la communication de ses notes à l’UES.
Dans la matinée du 31 août 2024, des agents du SPRP ont été dépêchés sur le pont d’étagement de l’avenue Steeles Est qui enjambe l’autoroute 410. La police avait reçu de nombreux appels au 911 de la part de citoyens s’inquiétant de la présence d’un homme sur le garde-corps du pont. L’homme était le plaignant.
L’AI a été l’un des premiers agents du SPRP à arriver sur le pont. Il a immobilisé son véhicule de police sur le côté est du pont d’étagement, à l’est de l’autoroute 410. L’AT no 2 est arrivée peu après dans son véhicule de police. Elle a immobilisé son véhicule dans les voies de circulation en direction est de l’avenue Steeles Est, à une certaine distance à l’ouest du plaignant, lequel se trouvait sur le bord du garde-corps nord du pont enjambant les voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410.
Le plaignant s’est assis à califourchon sur le garde-corps et a fini par amener ses deux jambes sur le côté extérieur du garde-corps. L’AT no 2 et l’AI se sont approchés du plaignant à pied. L’AI se trouvait à environ 15 mètres du plaignant lorsque ce dernier a sauté en bas du pont et est tombé sur l’autoroute en contrebas.
Le plaignant a subi des blessures mortelles lors de sa chute et de l’impact avec deux véhicules roulant en direction sud.
Cause du décès
De l’avis préliminaire du pathologiste chargé de l’autopsie, le décès du plaignant serait dû à des traumas multiples.
Dispositions législatives pertinentes
Articles 219 et 220 du Code criminel — Négligence criminelle causant la mort
219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir,
montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.
220 Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d’une autre personne est coupable d’un acte criminel passible :
a) s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans;
b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.
Analyse et décision du directeur
Le 31 août 2024, le plaignant a fait une chute mortelle depuis un pont d’étagement enjambant une autoroute, à Brampton. Puisque des agents du SPRP se trouvaient sur les lieux à ce moment-là, l’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête. L’agent du SPRP se trouvant le plus près du plaignant lorsqu’il est tombé, l’AI, a été identifié comme étant l’agent impliqué aux fins de cette enquête. L’enquête est maintenant terminée. Après examen de la preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de conclure que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec le décès du plaignant.
L’infraction sur laquelle il faut se pencher dans cette affaire est la négligence criminelle causant la mort, en contravention de l’article 220 du Code criminel. Cette infraction est réservée aux cas graves de négligence qui témoignent d’une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. L’infraction repose, en partie, sur une conduite constituant un écart marqué et substantiel par rapport au degré de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans les mêmes circonstances. Dans l’affaire en question, il faut donc déterminer si l’AI n’a pas fait preuve de la diligence requise et si ce manque de diligence, le cas échéant, pourrait avoir causé le décès du plaignant ou y avoir contribué, et pourrait être considéré comme suffisamment grave pour justifier l’imposition d’une sanction pénale. À mon avis, cela n’est pas le cas.
L’AI et les autres agents qui étaient présents sur le pont d’étagement de l’avenue Steeles Est et dans les alentours exerçaient leurs fonctions de façon légitime tout au long de la série d’événements qui se sont soldés par la chute du plaignant. Après avoir été informés qu’une personne envisageait de se faire du mal sur un pont, les agents avaient le devoir de se rendre sur les lieux et de faire ce qui était raisonnablement en leur pouvoir pour protéger le plaignant.
Je suis également convaincu que l’AI a fait preuve de la prudence et de la diligence nécessaires pour assurer la sécurité et la santé du plaignant. Les agents de police appelés à intervenir dans de telles situations ont des choix difficiles à faire. Ils doivent évaluer les risques associés aux différentes approches qu’ils pourraient adopter, souvent dans des délais très courts, et agir en conséquence. Dans cette affaire, le plaignant a dit [Traduction] « ne vous approchez pas plus » juste avant qu’il saute en bas du pont, alors que l’AI et l’AT no 2 s’approchaient de l’endroit où il se trouvait. On peut en déduire que la présence de la police a été en quelque sorte le catalyseur de la décision fatidique du plaignant. D’autre part, il relèverait essentiellement de la spéculation de suggérer qu’une attitude moins proactive de la part agents aurait donné un meilleur résultat, d’autant plus que le plaignant se trouvait déjà sur le garde-corps du pont depuis un certain temps avant que les agents arrivent. Les agents s’inquiétaient probablement aussi des risques que les automobilistes qui circulaient dans les voies de circulation en direction sud de l’autoroute 410 allaient courir si le plaignant sautait. Par conséquent, je ne peux pas raisonnablement conclure que l’AI a transgressé les limites de la diligence prescrite lorsqu’il a décidé de s’approcher du plaignant, vraisemblablement pour se mettre en position de communiquer avec lui.
Pour les motifs qui précèdent, j’en conclus qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.
Date : Le 27 décembre 2024
Approuvé électroniquement par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) À moins d’indication contraire, les renseignements fournis dans cette section reflètent les renseignements fournis à l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les faits constatés par l’UES dans le cadre de son enquête. [Retour au texte]
- 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.