Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-OFI-076

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave qu’a subie un homme de 40 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

Le 21 février 2024, à 15 h 20, le service de police du Grand Sudbury (SPGS) a informé l’UES de ce qui suit :

Le 21 février 2024, vers 9 h 43, des agents du SPGS se sont rendus dans une résidence située dans le secteur de la rue Kathleen et de Frood Road, à Sudbury, pour appréhender le plaignant en vertu de la Formule 2 déposée au titre de la Loi sur la santé mentale. Après que les agents ont tenté en vain d’appréhender le plaignant, ce dernier s’est barricadé dans sa résidence. Un commandant des opérations sur le lieu de l’incident critique et une équipe se sont rendus sur place à 11 h 51. Parmi les intervenants figuraient des membres de l’Équipe mobile d’intervention en cas de crise et des négociateurs. Les négociations menées avec le plaignant n’ayant pas abouti, on a demandé à un psychiatre légiste de se rendre sur place à 14 h 02 pour faciliter l’arrestation du plaignant. À 14 h 30, un plan visant à pénétrer dans la résidence et à retenir le plaignant a été mis en œuvre. Une fois la porte d’entrée forcée, le plaignant s’est approché des agents de police. Il était armé d’une épée. Un agent a alors déchargé son arme à feu. De plus, une arme Anti-Riot Weapon Enfield (ARWEN) et une arme à impulsions ont été déchargées. Le plaignant s’est ensuite réfugié à l’intérieur de son domicile et les communications verbales ont repris. Le plaignant, qui criait et qui pleurait, a été incité à se rendre. À 14 h 56, le plaignant est sorti par la porte d’entrée de la maison, s’est allongé sur le sol et a été appréhendé par la police. Il a été transporté en ambulance à Horizon Santé-Nord (HSN) où il a reçu un diagnostic de blessure à la hanche et au bras ne mettant pas sa vie en danger.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 21 février 2024 à 17 h 02

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 21 février 2024 à 23 h 59

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 40 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

Le plaignant a participé à une entrevue le 22 février 2024.

Témoins civils

TC n° 1 A participé à une entrevue

TC n° 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue le 23 février 2024.

Agents impliqués (AI)

AI n° 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

AI n° 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

Agents témoins

AT n° 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 4 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 5 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 6 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 7 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 8 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

Les agents témoins ont été interrogés les 6 et 8 mars 2024.

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident en question s’est déroulé à l’intérieur et autour de la résidence qui se situe dans le secteur de la rue Kathleen et de Frood Road à Sudbury.

Éléments de preuve matériels

Le 22 février 2024, à 10 h 38, des enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES se sont rendus dans une résidence située dans le secteur de la rue Kathleen et de Frood Road. Des membres en uniforme du SPGS ont établi un périmètre de sécurité autour des lieux.

Des douilles et des marques provenant de projectiles tirés avec l’ARWEN se trouvaient sur le sol à l’extérieur de la maison.

La porte de la véranda donnait sur une petite véranda fermée et encombrée. La porte avait été forcée et tenait sur une charnière. La porte intérieure de la résidence, qui avait également été forcée, s’ouvrait également vers l’intérieur.

De toute évidence, il y avait eu une dispute et une lutte dans les environs de la véranda et juste à l’intérieur de la porte principale. Une ARWEN avait été déchargée et un fusil ARWEN se trouvait adossé au mur de la véranda. Plusieurs traces vertes de projectiles et de douilles d’ARWEN ont été trouvées dans la véranda fermée et dans la maison. On a également trouvé des preuves qu’une arme à impulsions avait été déchargée, puisque des sondes et des fils se trouvaient à l’intérieur de la véranda et de la maison. Trois douilles de 9 mm ont été trouvées dans le désordre de la véranda, ainsi qu’un projectile de 9 mm.

Il y avait une trace de sang à l’intérieur de la maison qui menait à une chambre à coucher à l’étage. À l’intérieur de la chambre à coucher se trouvait un gilet pare-éclats avec une sonde d’arme à impulsions attachée à l’avant. Une autre sonde d’arme à impulsions ainsi qu’une trace d’impact de projectile se trouvaient sur le sol. Plusieurs armes blanches se trouvaient sur le lit, dont une longue épée avec un tranchant de chaque côté, emmêlée dans un fil d’arme à impulsions, et il y avait aussi des traces de sang sur la poignée. Un casque militaire vert qui portait des traces de sang sur l’un des côtés se trouvait également sur le lit.

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont examiné et photographié les lieux.

Ils y ont recueilli les éléments de preuve suivants :

  • Un projectile de 9 mm
  • Trois douilles de 9 mm
  • Multiples projectiles provenant d’ARWEN
  • Plusieurs douilles d’ARWEN
  • Quatre sondes d’arme à impulsions
  • Deux cartouches d’arme à impulsions
  • Un gilet pare-éclats

Figure 1 – Projectile d’ARWEN

Figure 1 – Projectile d’ARWEN

Les éléments de preuve suivants ont été recueillis par les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires au siège du SPGS.

  • Pistolet de service de l’AI n° 1 – un Sig Sauer, modèle P320
  • Cartouches d’arme à impulsions déchargées par l’AT n° 5
  • Vêtements du plaignant

L’arme à feu de l’AI n° 1 était un pistolet semi-automatique Sig Sauer, modèle P320 de 9 mm. Une cartouche a été retirée de la culasse où elle se trouvait. Son chargeur contenait 16 cartouches. L’arme avait une capacité maximale de 22 cartouches (21 dans le chargeur et 1 dans la culasse).

Figure 2 - L’arme à feu de l’AI n° 1

Figure 2 - L’arme à feu de l’AI n° 1

L’ARWEN de l’AI n° 2 contenait au total trois cartouches réelles chargées dans le barillet rotatif à cinq cartouches.

Éléments de preuve médicolégaux

Données sur la déploiement de l’arme à impulsions

L’arme à impulsions a été activée le 21 février 2024 à 14 h 31 min 05 s. Environ trois secondes plus tard, la détente a été actionnée et la cartouche de la baie de stockage de cartouches 1 a été déployée avec une décharge électrique de 0,832 seconde. Immédiatement après l’activation initiale, la détente a été actionnée une seconde fois et la cartouche de la baie de stockage de cartouches 2 a été déployée avec une décharge électrique d’une durée de 4,926 secondes.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]

Enregistrements des communications de la police – radio

Le 21 février 2024, vers 14 h 29, l’enregistrement commence par le message suivant d’un répartiteur du SPGS : [traduction] « Allez-y. » Le commandant des opérations sur le lieu de l’incident, soit l’AT n° 3, indique qu’il a tenté de communiquer avec le plaignant, mais en vain. Il ajoute ensuite : [traduction] « nous passons à la deuxième phase de notre plan », notant qu’on allait essayer de communiquer face à face avec le plaignant. L’AT n° 3 indique ensuite à l’AT n° 4 de l’équipe d’intervention d’urgence que lorsque l’Équipe d’action immédiate (EAI) serait prête, elle aurait le « feu vert ». L’EAI confirme et indique qu’elle se dirige vers la porte.

Vers 14 h 31, un membre dont on ignore l’identité de l’équipe d’intervention d’urgence du SPGS indique qu’une arme à impulsions et une ARWEN avaient été déchargées et que la manœuvre d’intrusion et de retenue avait échoué. Le plaignant est sorti de la maison avec une épée, puis est retourné à l’intérieur. Le membre de l’équipe d’intervention d’urgence dont on ne connait pas l’identité précise également que l’EAI s’est retirée et que [traduction] « il y a un agent blessé ici ». L’AT n° 3 demande si l’agent blessé va bien et un membre de l’équipe d’intervention d’urgence lui répond : [traduction] « Coups de feu, coups de feu. » L’AT n° 3 demande à l’AT n° 4 s’il peut confirmer que des coups de feu ont été tirés, et il répond par l’affirmative.

Vers 14 h 33, l’AT n° 4 indique que l’AT n° 5, membre de l’équipe d’intervention d’urgence, s’était blessé et qu’il ignorait dans quel état se trouvait le plaignant à ce moment-là. Un membre dont on ignore l’identité de l’équipe d’intervention d’urgence précise que [traduction] « à titre informatif pour le commandant, le sujet était à la porte d’entrée et avait l’épée. »

Vers 14 h 37, l’AI n° 4 dit : [traduction] « Commençons par briser quelques fenêtres [...] pour pouvoir tamiser la lumière et voir à l’intérieur. »

Vers 14 h 38, un agent dont on ignore l’identité du SPGS conseille à l’AT n° 4 de [traduction] « se tenir prêt », car les négociateurs avaient le plaignant au téléphone. Selon d’autres renseignements reçus, il y avait eu beaucoup de cris et de hurlements et que le plaignant leur avait [traduction] « raccroché au nez. » Un agent dont on ignore l’identité du SPGS dit à AI n° 1 : [traduction] « je vais te retirer du groupe. Reviens à l’une des camionnettes et assieds-toi à l’arrière. »

Vers 14 h 39, l’AT n° 6 dit qu’il sait que le négociateur a parlé au plaignant, mais qu’il a raccroché. Il demande alors à l’AT n° 4 : [traduction] « Peut-on briser quelques fenêtres ici? » L’AT n° 4 répond : « Absolument, allez-y. »

Vers 14 h 42, l’AT n° 6 indique qu’il a commencé à briser des fenêtres et qu’il essaie toujours d’établir la communication avec le plaignant.

Vers 14 h 43, un agent dont on ignore l’identité du SPGS précise que les négociations avec le plaignant avaient repris par téléphone.

Vers 14 h 50, un agent dont on ignore l’identité du SPGS annonce : [traduction] « l’homme se rend. »

Vers 14 h 55, l’AT n° 4 indique qu’on a ouvert la porte d’entrée et qu’on a vu le plaignant sortir de la maison. Il ajoute que le plaignant obéit aux ordres, qu’il s’est mis au sol et qu’il a été menotté. L’AT n° 4 précise que les services médicaux d’urgence [traduction] « sont en chemin. » L’AT n° 6 demande à l’AT n° 4 l’autorisation d’entrer avec l’EAI et de fouiller l’intérieur de la maison. Il obtient l’autorisation.

Vidéo filmée par le TC n° 2

Sur les cinq extraits vidéo obtenus, un seul a filmé l’arrestation du plaignant qui a eu lieu le 21 février 2024 vers 14 h 56, d’après l’horodatage de la vidéo. Malheureusement, le champ de vision était bloqué et tout ce que l’on pouvait distinguer étaient des membres de l’équipe d’intervention d’urgence accroupis et semblant maîtriser du plaignant alors qu’il était étendu sur la pelouse avant de sa résidence.

Vidéos captées avec le téléphone cellulaire d’un citoyen

Les images montrent la pelouse et la façade du domicile du plaignant. Compte tenu de la position diagonale de la caméra, la vue de devant de la résidence du plaignant était quelque peu obscurcie par un poteau électrique, un arbre de taille moyenne et une clôture située en bordure de la cour du plaignant.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et les documents suivants que lui a remis, à sa demande, le SPGS entre le 23 février et le 24 juin 2024 :

  • Rapport de la répartition assistée par ordinateur
  • Tous les rapports d’incident généraux et les rapports supplémentaires
  • Enregistrements des communications
  • Indicatifs d’appel de tous les agents impliqués
  • Enregistrements des négociations
  • Politique du SPGS en matière de sauvetage d’otages et de personnes barricadées
  • Politique sur l’intervention de la police auprès des personnes en situation de crise
  • Plan d’action et de mission pour l’appréhension du plaignant
  • AT n° 3 — notes manuscrites
  • Rapports sur le recours à la force — AT n° 2
  • Dossiers de formation sur le recours à la force et les armes à feu de l’AI n° 1
  • Données relatives à la décharge de l’arme à impulsions de l’AT n° 5
  • Copie du mandat Feeney
  • Copie de la Formule 2 délivrée au plaignant
  • Capture d’écran d’un message du plaignant sur les médias sociaux.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a également obtenu les éléments suivants provenant d’autres sources entre le 24 février et le 12 mars 2024

  • Dossiers médicaux du plaignant - HSN
  • Images de la caméra située sur la sonnette fournies par le TC n° 2
  • Vidéo fournie par un citoyen.

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage des preuves recueillies par l’UES, notamment des entrevues avec le plaignant et les agents qui se trouvaient à proximité au moment de l’incident. Comme ils en avaient le droit, les AI ont refusé de s’entretenir avec l’UES et n’ont pas consenti à la diffusion de leurs notes.

Le 21 février 2024, peu avant midi, l’AT n° 1, en compagnie des agents de l’EAI, l’AT n° 5 et l’AI n° 1, se sont rendus à une résidence située dans le secteur de la rue Kathleen et de Frood Road, à Sudbury. Ils se trouvaient là pour exécuter un mandat lancé en vertu de la Loi sur la santé mentale afin d’appréhender le plaignant. Les agents disposaient également d’un mandat Feeney autorisant une entrée forcée dans la résidence au besoin pour mettre le plaignant sous garde. Le plaignant est apparu brièvement à la porte d’entrée d’un porche fermé attenant à la maison proprement dite. Il tenait une épée dans sa main gauche. Il a refermé la porte, menaçant les agents de leur couper les mains s’ils pénétraient dans la maison. Derrière un bouclier, les agents ont appelé le plaignant en lui précisant qu’ils étaient là pour l’aider. Il n’y a pas eu de réponse depuis l’intérieur de la maison. Une demande de renfort de la part des agents de l’équipe d’intervention d’urgence a été faite, car la situation impliquait désormais une personne armée et barricadée.

Au cours des deux heures suivantes, des ressources policières supplémentaires ont été dépêchées sur les lieux, notamment des agents de l’équipe d’intervention d’urgence sous les ordres de l’AT n° 3. Des périmètres de sécurité, un petit et un grand, ont été établis autour de la maison. Les négociateurs ont tenté d’appeler le téléphone cellulaire du plaignant, mais en vain. On a fait appel à un médecin spécialiste de la santé mentale. Vers 13 h 45, les agents ont appris que le plaignant était sur les médias sociaux et qu’il affirmait que le gouvernement était corrompu, que la police était à sa porte et que c’était un jour idéal pour mourir.

Compte tenu de l’absence de réponse de la part du plaignant et de sa publication déconcertante dans les médias sociaux, on a exprimé des craintes quant à sa sécurité à l’intérieur de la maison. Il a donc été décidé qu’une équipe composée d’agents de l’équipe d’intervention d’urgence franchirait la porte de la maison et maintiendrait sa position. On espérait ainsi faciliter le dialogue avec le plaignant.

Vers 14 h 30, l’AT n° 7 a forcé la porte d’entrée à l’aide d’un bélier. Il était accompagné de l’AI n° 1, armé d’un pistolet semi-automatique, de l’AI n° 2, armé d’une ARWEN, et de l’AT n° 5, qui tenait un bouclier. Ils se sont immédiatement retrouvés face au plaignant qui se trouvait à quelques mètres d’eux. Une épée dans la main droite et une lance dans la main gauche, le plaignant s’est avancé vers les agents et a balancé ses armes à plusieurs reprises dans leur direction. La plupart des coups ont été déviés grâce au bouclier, mais certains ont touché les agents. L’AT n° 4 a déchargé son arme à impulsions à deux reprises, sans résultat; le plaignant portait un gilet pare-éclats qui a empêché au moins l’une des sondes de l’arme de le toucher. L’AI n° 2 a tiré plusieurs fois avec son ARWEN et a atteint le plaignant. À peu près au même moment, l’AI n° 1 a tiré de trois à cinq balles, dont l’une a traversé la jambe droite du plaignant. Les agents de l’équipe d’intervention d’urgence ont reculé d’un pas et le plaignant a fermé la porte et s’est replié dans la maison.

Les agents touchés, soit l’AI n° 1, l’AT n° 7 et l’AT n° 5, ont pris le temps d’évaluer leurs blessures. Un agent a été grièvement blessé à la main, et a dû subir une intervention chirurgicale.

Environ dix minutes après l’affrontement, les agents ont réussi à joindre le plaignant par téléphone. Ce dernier a fini par accepter de sortir de chez lui et de se rendre. Vers 14 h 55, il s’est rendu et a été arrêté.

Le plaignant a été transporté à l’hôpital où il a reçu un diagnostic de lacération au bras gauche, d’ecchymoses à la jambe droite et au pénis, d’une blessure par balle à la partie supérieure de la cuisse droite et d’une fracture au doigt droit.

Dispositions législatives pertinentes

Article 34, Code criminel - Défense - emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :

a) croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne;

b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger — ou de défendre ou de protéger une autre personne — contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force;

c) agit de façon raisonnable dans les circonstances.

(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :

a) la nature de la force ou de la menace;

b) la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel;

c) le rôle joué par la personne lors de l’incident;

d) la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme;

e) la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause;

f) la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;

f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause;

g) la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force;

h) la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime.

(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si une personne emploie ou menace d’employer la force en vue d’accomplir un acte qu’elle a l’obligation ou l’autorisation légale d’accomplir pour l’exécution ou le contrôle d’application de la loi, sauf si l’auteur de l’acte constituant l’infraction croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle n’agit pas de façon légitime.

Analyse et décision du directeur

Le 21 février 2024, le plaignant a été blessé par balle par un agent du SPGS. Lors de l’incident, il a également été touché par une ou plusieurs projectiles d’ARWEN. L’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête en désignant les AI n° 1 et n° 2 comme étant les agents impliqués. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que les AI ont commis une infraction criminelle relativement aux événements.

L’article 34 du Code criminel prévoit qu’un comportement, qui autrement constituerait une infraction, est légitimé s’il visait à déjouer une attaque raisonnablement appréhendée, qu’elle soit réelle ou une menace, et était lui-même raisonnable. Le caractère raisonnable du comportement doit être évalué selon les circonstances, c’est-à-dire en fonction de facteurs tels que la nature de la force ou de la menace; la mesure dans laquelle l’usage de la force était imminent et s’il y avait d’autres moyens disponibles pour répondre à l’usage potentiel de la force; si une partie impliquée dans l’incident a utilisé ou menacé d’utiliser une arme; et, la nature et la proportionnalité de la réponse de la personne à l’usage ou à la menace de la force.

Les AI étaient dans une position légale et dans l’exercice de leurs fonctions tout au long de la série d’événements qui ont abouti à la décharge de leurs armes. Les policiers disposaient d’un mandat en vertu de la Loi sur la santé mentale autorisant l’arrestation du plaignant en vue d’un examen psychiatrique. Ils disposaient également d’un mandat Feeney leur donnant le droit de pénétrer dans la résidence du plaignant pour l’appréhender.

Il ne fait guère de doute que les AI n° 1 et n° 2 ont fait feu pour se protéger d’une agression raisonnablement appréhendée de la part du plaignant. Bien qu’aucun des deux agents n’ait fourni cette preuve de première main à l’UES (comme ils en avaient légalement le droit), la proposition est mise à nu par les circonstances. Lorsqu’ils ont réagi en utilisant leur propre arme, les deux agents ont été attaqués à bout portant à l’aide d’armes blanches que possédait le plaignant.

Quant à la nature de la force en question, plusieurs balles tirées par l’AI n° 2 et le pistolet semi-automatique de l’AI n° 1, je suis convaincu qu’elle constituait une force raisonnable. En rétrospective, les agents qui ont participé à l’opération policière précédant le recours à la force se sont comportés avec le soin et l’attention nécessaires au bien-être du plaignant. Les efforts pour négocier pacifiquement une solution à l’impasse avaient été inefficaces et il était à craindre, à juste titre, que le plaignant ne se fasse du mal lorsque les policiers ont décidé qu’une approche plus proactive s’imposait. La porte d’entrée ayant été forcée et les agents de police se trouvant immédiatement face à un plaignant qui les attaquait, ils étaient en droit de recourir à une mesure de force défensive. Un engagement purement physique aurait risqué de grièvement blesser, voire de tuer les agents. La retraite et le repli n’étaient pas envisageables compte tenu de la rapidité avec laquelle les événements se sont déroulés. Par conséquent, l’AT n° 5 et l’AI n° 2 ont agi raisonnablement lorsqu’ils ont tenté de neutraliser le plaignant à l’aide de leurs armes à létalité atténuée. On ignore si l’AI n° 1 était au courant de la possibilité d’utiliser l’arme à impulsions ou l’ARWEN avant de faire feu. Quoi qu’il en soit, il n’en demeure pas moins qu’il risquait, ainsi que les membres de son équipe, de subir des lésions corporelles graves, voire de mourir. Dans ces circonstances, il était en droit de contrer un danger mortel en recourant lui-même à une force mortelle.

Par conséquent, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.

Date : 19 juillet 2024

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section correspondent à ceux dont disposait l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement la constatation des faits de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments suivants contiennent des renseignements personnels délicats et ne sont pas divulgués en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les renseignements importants des éléments sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.