Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 16-OCI-122

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par une femme de 32 ans le 14 mai 2016, vers 3 heures du matin, et découverte à la suite de son arrestation pour défaut de rester sur le lieu d’une collision de véhicule automobile.

L’enquête

Notification de l’UES

La Police régionale de York (PRY) a avisé l’UES de la blessure sous garde de la plaignante le 14 mai 2016, à 9 h 18. Dans son rapport, la PRY a indiqué que la plaignante avait été arrêtée à 3 heures du matin, après avoir omis de rester sur le lieu d’une collision automobile. Une ambulance a été appelée, mais la plaignante a refusé de coopérer avec les ambulanciers. La plaignante a ensuite été transportée au poste de police. À 8 h 55, elle s’est plainte de douleur au coude gauche et a été emmenée à l’hôpital. À l’hôpital, un examen a révélé qu’elle avait une fracture au coude droit.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Plaignant

Femme de 32 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été reçus et examinés

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue

AT no 2 A participé à une entrevue

AT no 3 A participé à une entrevue

AT no 4 Notes reçues et examinées; entrevue jugée non nécessaire

AT no 5 Notes reçues et examinées; entrevue jugée non nécessaire

En outre, l’UES a reçu et examiné les notes de deux autres agents.

Agent impliqué

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes à l’UES, comme la loi l’y autorise.

Éléments de preuve

Documents obtenus auprès du Service de police

L’UES a demandé les documents suivants à la PRY, qu’elle a obtenus et examinés :

  • notes des agents témoins 1, 2, 3, 4 et 5,
  • notes de deux agents non désignés, et
  • rapport de l’inspecteur de service.

Description de l’incident

Le 14 mai 2016, vers 2 h 53 du matin, l’AI a répondu à un appel concernant une femme suspectée de conduite avec facultés affaiblies dans le secteur de l’avenue Carrick, à Keswick. L’AI a ensuite été informé que la femme avait été impliquée dans une collision de véhicule automobile et qu’elle quittait le lieu de la collision dans un taxi. La personne qui avait appelé le 9-1-1 avait relevé une partie du numéro de la plaque d’immatriculation du taxi. Vers 2 h 56, l’AI a intercepté un taxi qui roulait sur l’avenue Carrick. La plaignante était assise dans le siège passager du taxi.

L’AI a parlé à la plaignante, qui était visiblement en état d’ébriété à ce moment-là. La plaignante est sortie du taxi et s’est enfuie à pied vers le nord, sur l’avenue Carrick. Elle est alors tombée à plat ventre sur la chaussée d’asphalte.

L’AI s’est approché d’elle pour l’arrêter. L’AT no 1 est arrivé sur les lieux et a aidé l’AI à menotter la plaignante. Une ambulance, appelée à cause de la chute de la plaignante, est arrivée sur les lieux. Toutefois, la plaignante a refusé tout soin médical et n’a mentionné aucune blessure. La plaignante a été transportée au poste de police où les ambulanciers ont de nouveau tenté de l’examiner. Là encore, elle refusé tout soin médical et n’a mentionné aucune blessure.

Le lendemain matin, la plaignante s’est plainte de douleur au coude droit. On l’a conduite à l’hôpital où il a été constaté qu’elle avait une fracture intra-articulaire sans déplacement de la tête du radius proximal (fracture d’un os du coude droit).

Analyse et décision du directeur

Le 14 mai 2016, vers 2 h 53 du matin, l’AI a répondu à un appel concernant une personne soupçonnée de conduite avec facultés affaiblies dans le secteur de l’avenue Carrick, à Keswick, dans la ville de Georgina. Peu après, l’AI a arrêté la plaignante, et il est allégué qu’au cours de son interaction avec la police, la plaignante a subi une fracture intra-articulaire sans déplacement de la tête du radius proximal (fracture d’un os du coude droit).

Le TC no 1 avait appelé le 9-1-1 au sujet du comportement de la plaignante et fourni à la police une partie du numéro de la plaque d’immatriculation du taxi dans lequel la plaignante avait quitté les lieux. Dans sa déclaration à l’UES, la plaignante a refusé de dire si elle avait consommé ou non de l’alcool avant cet incident. Étant donné sa réticence à donner un compte rendu complet et franc des faits, j’ai du mal à me fier à sa version des événements (et, à certains égards, à la croire).

Le TC no 2 était le chauffeur de taxi. Il a décrit l’arrestation de la plaignante par l’AI. Le TC no 2 n’a, à aucun moment, entendu la plaignante se plaindre d’une blessure et n’a pas non plus vu un agent frapper la plaignante ou lui donner un coup de pied ou de poing.

Selon le témoignage de deux civils indépendants, il est clair que la plaignante était bel et bien en état d’ivresse. Cette conclusion est aussi corroborée par le fait que la plaignante ne se souvenait pas qu’on avait appelé une ambulance, que les ambulanciers avaient essayé de l’examiner, qu’elle avait saisi le pénis d’un des ambulanciers après son arrivée au poste de police, ni qu’elle avait dormi dans la cellule la poitrine et le ventre à l’air.

La seule partie de la déclaration de la plaignante qui pourrait avoir quelque crédibilité est celle qui est spécifiquement confirmée par les observations du TC no 2. Le reste de son témoignage est directement contredit par le TC no 2, un témoin totalement indépendant. Par conséquent, la fiabilité et la crédibilité de la version des faits donnée par la plaignante, qui était apparemment ivre au moment de l’incident, ne peuvent pas l’emporter sur celle du TC no 2, un témoin sobre et complètement indépendant. En fait, l’allégation de la plaignante, selon laquelle l’AI a fait usage d’une force excessive à son encontre, est complètement contrecarrée et discréditée par le témoignant du TC no 2, dont le récit de l’incident est corroboré à la fois par la preuve médicale et par les déclarations des témoins de la police et du TC no 1.

Je trouve inutile de décrire en détail les déclarations de l’AI et des autres agents qui ont eu affaire à la plaignante dans la matinée du 14 mai 2016, hormis le fait que le témoignage du TC no 2 corrobore la version des faits donnée par les policiers et contredit la version alléguée par la plaignante.

Après avoir analysé toutes les preuves, et plus particulièrement les déclarations des deux témoins civils qui étaient à la fois impartiaux et sobres, je conclus qu’il n’y a pas aucune preuve crédible à l’appui de l’affirmation de la plaignante selon laquelle sa blessure résulte de l’utilisation d’une force excessive par l’AI.

Par conséquent, au vu du dossier devant moi, je conclus que la déclaration de la plaignante est loin de satisfaire à la norme requise de motifs raisonnables de croire qu’une infraction de voies de fait ou d’infliction de lésions corporelles a été commise.

En somme, je conclus que la plaignante est sortie du taxi et s’est enfuie de son plein gré afin de se soustraire à la police et, ce faisant, a perdu l’équilibre et est tombée, probablement fracturant son coude dans sa chute. Je conclus qu’aucun agent de police n’a une responsabilité quelconque dans la blessure de la plaignante et qu’aucun agent n’a utilisé de force à son encontre, si ce n’est pour la menotter, la relever et l’escorter jusqu’à l’ambulance. Je ne peux donc pas conclure à l’existence de preuves crédibles et suffisantes qui justifieraient le dépôt d’accusations criminelles.

Date : 5 septembre 2017

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.