Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 16-TVI-147

Attention :

Cette page affiche un contenu graphique pouvant choquer, offenser et déranger.

Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Ce rapport a trait à l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par une femme de 42 ans durant une collision qui est survenue le 8 juin 2016 et dans laquelle a été impliqué le Service de police de Toronto.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 8 juin 2016, à 21 h, le SPT a rapporté les faits suivants :

Le 8 juin 2016, des agents de police de la Stratégie d’intervention contre la violence (TAVIS) de Toronto ont tenté d’immobiliser un véhicule. Un véhicule de police TAVIS non identifié était derrière le véhicule et un véhicule de police TAVIS identifié se trouvait devant lui. Le conducteur, le TC no 3, a manœuvré le véhicule de sorte à ne plus être pris entre les deux véhicules de police TAVIS et a quitté les lieux. Les agents de police TAVIS ont informé le répartiteur qu’ils avaient perdu de vue le véhicule du TC no 3, mais par la suite ont été prévenus par des témoins civils qu’il y avait eu une collision de véhicules motorisés à l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst. Lorsque les agents de police sont arrivés sur les lieux, ils ont constaté que le véhicule du TC no 3 était l’un des véhicules impliqués dans l’accident.

Le TC no 3 a fui le lieu de l’accident à pied. Il a ensuite été retrouvé par un agent de police de l’Unité des chiens détecteurs et a été amené à la Division 23. Le TC no 3 n’a pas subi de graves blessures.

La plaignante, qui était la conductrice du véhicule qui avait été heurté par le véhicule du TC no 3, a été transportée à l’hôpital et, selon le diagnostic, avait la cheville droite fracturée.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 1

Nombre de spécialistes de la reconstitution de collisions de l’UES assignés : 1

Les enquêteurs judiciaires de l’UES se sont rendus sur les lieux et ont examiné les véhicules. Ils ont documenté les lieux pertinents de l’incident au moyen de notes et de photographies.

Plaignante :

Femme âgée de 42 ans; a participé à une entrevue; dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1  A participé à une entrevue

TC no 2  A participé à une entrevue

TC no 3  A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT no 1  A participé à une entrevue

AT no 2  A participé à une entrevue

AT no 3  A participé à une entrevue

AT no 4  A participé à une entrevue

AT no 5  A participé à une entrevue

AT no 6  A participé à une entrevue

AT no 7  A participé à une entrevue

Agents impliqués (AI)

AI A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

Preuve

Les lieux de l’incident

La collision entre le véhicule utilitaire sport (VUS) noir conduit par le TC no 3 et la fourgonnette de la plaignante s’est produite au coin sud-est de la promenade Elmhurst et du chemin Albion.

Le chemin Albion est une route asphaltée à quatre voies avec une voie de virage vers la gauche au centre et est à orientation nord-sud à l’intersection avec la promenade Elmhurst. La limite de vitesse est de 60 km/h à cet endroit. Au nord de l’endroit où s’est produite la collision, le chemin Albion est légèrement incliné.

La promenade Elmhurst est une route asphaltée à deux voies qui se dirige vers l’ouest à partir du chemin Albion. L’intersection de la promenade Elmhurst et du chemin Albion est en forme de T.

Résultats de l’enquête de reconstitution de l’UES (résumé) :

La surface de la route était sèche au moment de la collision et il n’y avait pas de traces de pneus précédant l’impact. Il y avait une marque de frottement d’un pneu dans la zone d’impact créée par le pneu gauche du véhicule de la plaignante lorsqu’il a été heurté par le VUS noir.

Le VUS noir était situé sur le trottoir au coin sud-est de la promenade Elmhurst et du chemin Albion, et avait percuté un abribus. Le VUS était fortement endommagé à l’avant;

La fourgonnette de la plaignante se trouvait dans la voie de bordure nord du chemin Albion, mais elle faisait face au sud. La fourgonnette de la plaignante avait de graves dégâts à l’avant.

La fourgonnette de police non identifiée de l’AI et de l’AT no 1 était située dans l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst, et elle faisait face au sud. Il n’y avait pas de dommages visibles au véhicule; et

La voiture de patrouille identifiée de l’AT no 3 et de l’AT no 2 se trouvait également dans l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst, et faisait face au sud.

Schéma des lieux

Schéma des lieux.

Témoignage d’expert

Conclusions du spécialiste en reconstitution de l’UES

Selon les éléments de preuve fournis par l’enquête de reconstitution de l’accident, les véhicules de police de l’AI et des AT nos 3, 5 et 7 n’étaient pas impliqués directement ou indirectement dans la collision entre le véhicule de la plaignante et le VUS noir.

Preuve vidéo/audio/photographique

L’UES a inspecté les lieux pour déterminer s’il y avait des enregistrements vidéo ou audio et des preuves photographiques, et a trouvé plusieurs enregistrements vidéo.

Résumé des séquences vidéo (église à proximité) :

  • À 17 h 37 m 27 s, un VUS noir [dont on sait maintenant que le TC no 3 le conduisait] se déplaçait vers le sud dans la voie de virage vers la gauche sur le chemin Albion. Il semble que le VUS noir se déplaçait à grande vitesse. Le TC no 3 a dépassé plusieurs autres véhicules qui se dirigeaient aussi vers le sud sur le chemin Albion. Tandis que le TC no 3 se dirigeait vers l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst, il a viré et a commencé à rouler sur les voies vers le nord sans ralentir. La collision a eu lieu hors du plan de la caméra; et
  • À 17 h 38 m 02 s, trois voitures de patrouille identifiées [dont on sait maintenant que les TC nos 3, 7 et 5 en étaient les conducteurs] sont arrivés à l’intersection de la promenade Elmhurst et du chemin Albion et, peu après, une fourgonnette grise [dont on sait maintenant qu’elle était conduite par l’AI] est arrivée au même endroit.

Résumé des séquences vidéo (Dépanneur à proximité) :

  • À 17 h 37 m 13 s, un VUS noir [dont on sait maintenant que le TC no 3 le conduisait] se dirigeait vers le sud dans les voies nord du chemin Albion et se rendait vers l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst. Le VUS noir est entré en collision avec une fourgonnette [dont on sait maintenant qu’elle était conduite par la plaignante]
  • À 17 h 37 m 26 s, le TC no 3 est sorti du VUS noir du côté du conducteur, a couru vers l’arrière du VUS et puis s’est mis à courir vers le sud sur le chemin Albion; et
  • À 17 h 38 m 01 s, des agents de police se sont rendus à l’intersection à pied et se sont approchés du VUS noir

Enregistrements des communications

Résumé des communications radio entre 17 h 34 et 17 h 37 :

  • L’AT no 1 a envoyé un message par la radio pour demander de l’aide à l’avenue Islington près du chemin Albion parce que lui et l’AI suivaient un VUS noir. Le rapport sur le véhicule d’intérêt précisait que le conducteur du véhicule [maintenant connu comme étant le TC no 3] était recherché
  • Les AT nos 4 et 5 ont indiqué qu’ils avaient pris connaissance de la requête
  • Les AT nos 2 et 3 ont indiqué qu’ils avaient pris connaissance de la requête
  • L’AT no 1 a signalé par la radio que le TC no 3 avait tourné (vers l’ouest) sur l’avenue Barker. Le TC no 3 montait sur une colline et s’approchait d’un panneau d’arrêt au coin de l’avenue Barker et de la promenade Riverdale
  • Les AT nos 4 et 5 ont indiqué qu’ils étaient derrière l’AT no 1 et l’AI
  • L’AT no 1 a indiqué que le TC no 3 était juste devant la voiture de patrouille des AT nos 2 et 3 et que le TC no 3 s’était simplement [traduction] « échappé » de lui et de l’AI
  • L’AT no 1 a rapporté que le TC no 3 continuait de se diriger vers le nord sur l’avenue Barker et qu’il avait tourné ensuite sur le chemin Albion. L’AT no 1 a indiqué que lui-même et l’AI allaient suivre le TC no 3
  • L’AT no 6 a demandé si les agents de police poursuivaient le véhicule du TC no 3. L’AT no 1 a répondu que lui et l’AI ne poursuivaient pas le véhicule du suspect. On entend les sirènes d’une voiture de patrouille non identifiée en arrière-plan
  • L’AT no 1 a expliqué que le TC no 3 s’était rendu compte que lui-même et l’AI le suivaient et que le TC no 3 avait accéléré pour les distancer. Le TC no 3 a contourné la voiture de patrouille des AT nos 2 et 3
  • Un agent de police non identifié a demandé à l’AT no 1 s’il voyait le véhicule du TC no 3, mais il n’y a pas eu de réponse. Quelques secondes plus tard, l’AT no 2 a signalé que le TC no 3 s’était « écrasé »; et
  • À environ 17 h 38, on entend l’AT no 6 demander « Les gars, est-ce quelqu’un pourrait me mettre au courant et me dire ce qui se passe? » Un agent de police non identifié a répondu qu’il y avait eu un accident au coin du chemin Albion et de la promenade Elmhurst et que plusieurs véhicules étaient impliqués, mais qu’on ne savait pas s’il y avait des blessés.

Séquences vidéo prises par les caméras dans les véhicules (CV)/ Sommaire des données fournies par les systèmes de localisation automatique de véhicules (LAV)

Résumé des séquences vidéo de la voiture de patrouille de l’AT no 3 :

  • L’enregistrement vidéo de la CV montre qu’à 17 h 35 m 21 s, l’AT no 3 conduisait le véhicule vers le sud sur le chemin Albion et a activé ses feux d’urgence. À ce moment-là, l’AT no 1 avait demandé de l’aide
  • À 17 h 35 m 55 s, l’AT no 3 s’est dirigé vers le sud sur la promenade Riverdale
  • À 17 h 35 m 59 s, l’AT no 3 s’est placé dans la voie nord, tout en continuant à se diriger vers le sud sur la promenade Riverdale. On voit un VUS noir [dont on sait maintenant qu’il était conduit par le TC no 3] se déplacer rapidement vers le nord dans la voie nord et venir vers la voiture de patrouille de l’AT no 3
  • À 17 h 36 m 02 s, l’AT no 3 a arrêté brusquement sa voiture de patrouille dans la voie nord et il y avait environ la moitié de la longueur d’une voiture entre son véhicule et le VUS noir qui continuait de s’approcher de la voiture de patrouille de l’AT no 3. Le TC no 3 a immédiatement contourné la voiture de patrouille de l’AT no 3 du côté passager et a poursuivi son chemin vers le nord sur la promenade Riverdale
  • À 17 h 36 m 07 s, une fourgonnette grise [dont on sait aujourd’hui qu’elle était conduite par l’AI] est passée à côté de la voiture de patrouille de l’AT no 3 et a continué à rouler sur la promenade Riverdale
  • À 17 h 36 m 16 s, l’AT no 3 a fait demi-tour en trois étapes et puis s’est dirigé vers le nord sur la promenade Riverdale
  • À 17 h 36 m 26 s, l’AT no 3 a tourné à droite sur le chemin Albion et s’est dirigé dans la direction sud-est. À ce moment-là, le véhicule de l’AI n’était pas visible. L’AT no 3 a activé la sirène de son véhicule. La circulation était modérée dans la voie de gauche et la voie en bordure du chemin Albion. La plupart des véhicules qui se dirigeaient vers le sud-est s’étaient placés dans la voie près du trottoir, alors que l’AT no 3 les dépassait. L’AT no 3 conduisait dans le voie de virage vers la gauche au centre et parfois dans la voie gauche du chemin
  • Les données de LAV montrent qu’à environ 17 h 36 m 38 s, la vitesse du véhicule de l’AT no 3 est passée de 92 km/h à 113 km/h en cinq secondes dans la direction sud-est sur le chemin Albion. La limite de vitesse sur le chemin Albion était de 60 km/h. Les séquences de la CV montrent qu’à ce moment-là, l’AT no 3 s’approchait de la promenade Calstock, où il y avait des feux de circulation. L’AT no 3 est passé par le feu de circulation, qui était vert
  • À environ 17 h 36 m 47 s, on entend l’AT no 6 sur la radio, laquelle transmission a été captée dans la séquence vidéo de la CV, demandant si une poursuite était en cours. On entend l’AT no 1 répondre par la radio qu’il ne s’agissait pas d’une poursuite. À ce moment-là, selon les données de LAV, l’AT no 3 roulait à environ 101 km/h
  • D’après les données de LAV, à 17 h 37 m 05 s, la vitesse de l’AT no 3 est tombée de 113 km/h à 92 km/h pendant qu’il s’approchait du chemin Irwin. Les séquences enregistrées par la CV montrent que l’AT no 3 s’approchait du chemin Irwin, où la circulation était contrôlée par des feux de circulation. L’AT no 3 a franchi les feux de circulation qui étaient ambre. Il semble que l’AT no 3 ait ralenti momentanément alors qu’il traversait l’intersection
  • Les séquences de la CV montrent qu’à 17 h 37 m 23 s, alors que l’AT no 3 se rapprochait de l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst, des gens se tenaient dans les voies nord du chemin et semblaient faire des signes avec leurs bras en l’air. Les données de LAV ont révélé qu’à ce moment-là, la vitesse du TC no 3 était d’environ 45 km/h
  • Les séquences de la CV montrent qu’à 17 h 37 m 28 s, l’AT no 3 s’est lentement placé dans la voie gauche nord du chemin Albion à l’intersection avec la promenade Elmhurst. Des gens couraient vers le sud sur le trottoir est vers un abribus [dont on sait maintenant que le VUS l’avait percuté] et une fourgonnette [dont on sait maintenant qu’elle était conduite par la plaignante] qui faisait face au sud dans la voie de bordure nord; et
  • À 17 h 37 m 37 s, les AT nos 3 et 2 ont quitté leur voiture de patrouille et ont marché vers le VUS noir et le véhicule de la plaignante. On voit de la fumée venant du VUS noir.

Résumé des séquences vidéo du véhicule de l’AI :

  • Il n’y avait pas de séquences vidéo enregistrées par une CV dans le véhicule de l’AI
  • Les données de LAV montrent qu’à environ 17 h 35 m, le véhicule de l’AI a atteint la vitesse de 74 km/h pendant qu’il conduisait en direction sud sur l’avenue Islington (limite de vitesse de 50 km/h) juste avant de tourner sur l’avenue Barker
  • Pendant qu’il se déplaçait vers le sud-est sur le chemin Albion, à environ 17 h 36, le véhicule a atteint des vitesses allant jusqu’à 105 km/h, lorsqu’il a traversé l’intersection de la promenade Calstock et du chemin Albion, où il y avait des feux de circulation dans les quatre directions

·À environ 17 h 36 m 47 s, on entend l’AT no 6 demander par la radio, laquelle transmission a été captée dans la séquence vidéo de la CV de la voiture de patrouille de l’AT no 3, si les agents de police avaient entamé une poursuite. On entend l’AT no 1 répondre par la radio qu’il ne s’agissait pas d’une poursuite. À ce moment-là, selon les données de LAV, l’AI roulait à environ 87 km/h; et

  • À 17 h 37 m 28 s, il semble que l’AI ait commencé à ralentir jusqu’à 34 km/h après avoir franchi l’intersection de la promenade Irwin et du chemin Albion, qui était contrôlée par des feux de circulation dans les quatre directions, jusqu’à son arrivée à l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst. La limite de vitesse sur le chemin Albion était de 60 km/h

Résumé des séquences vidéo de la voiture de patrouille de l’AT no 5 :

  • Les séquences de la CV montrent qu’à 17 h 36 m 22 s, l’AT no 5 roulait vers l’est sur la promenade Riverdale en direction du chemin Albion. Juste avant le chemin Albion, la voiture de patrouille de l’AT no 3 était devant le véhicule de l’AT no 5
  • Les données de LAV montrent qu’à environ 17 h 36 m 25 s, l’AT no 5 a tourné sur le chemin Albion depuis la promenade Riverdale et a commencé à accélérer de 43 km/h jusqu’à 121 km/h tout en se déplaçant vers le sud-est sur le chemin Albion. Les séquences vidéo de la CV montrent que l’AT no 5 conduisait dans la voie de virage au centre et la voie de gauche du chemin Albion. À environ 17 h 36 m 39 s, la vidéo montre qu’à l’approche de l’intersection du chemin Albion et de la promenade Calstock, l’AT no 5 a continué d’accélérer, de 87 à 117 km/h. Lorsque l’AT no 5 a traversé l’intersection à la promenade Calstock contrôlée par des feux de circulation dans les quatre directions, le feu était vert.
  • Les séquences de la CV montrent que les véhicules se déplaçant dans la direction sud-est sur le chemin Albion s’étaient placés dans la voie en bordure droite lorsque l’AT no 5 passait près d’eux

·À environ 17 h 36 m 47 s, on entend l’AT no 6 demander par la radio, paroles captées dans la séquence vidéo de la CV, si les agents de police avaient entamé une poursuite. On entend l’AT no 1 répondre par la radio qu’il ne s’agissait pas d’une poursuite. À ce moment-là, selon les données de LAV, l’AT no 5 roulait à environ 119 km/h; et

  • Vers 17 h 37 m 05 s, l’AT no 5 a commencé à ralentir et sa vitesse est passée à environ 31 km/h lorsqu’il est arrivé au coin du chemin Albion et de la promenade Elmhurst.

Résumé des séquences vidéo de la voiture de patrouille de l’AT no 7 :

  • Les séquences de la CV montrent qu’à 17 h 36 m 22 s, l’AT no 7 roulait vers l’est sur la promenade Riverdale vers le chemin Albion. Juste avant le chemin Albion, la voiture de patrouille de l’AT no 5 se trouvait devant le véhicule de l’AT no 7 et la voiture de patrouille de l’AT no 3 se trouvait devant le véhicule de l’AT no 5
  • Les données de LAV montrent qu’à environ 17 h 36 m 27 s, l’AT no 5 a tourné sur le chemin Albion depuis la promenade Riverdale et a commencé à accélérer de 34 km/h jusqu’à 124 km/h en l’espace de 11 secondes tout en se déplaçant vers le sud-est sur le chemin Albion
  • À environ 17 h 36 m 47 s, l’AT no 7 a traversé l’intersection de la promenade Calstock et du chemin Albion, où il y a des feux de circulation dans les quatre directions. Les séquences de la CV montrent que le feu de circulation était vert lorsqu’il a traversé l’intersection à des vitesses entre 84 km/h et 116 km/h. À ce moment-là, on entend l’AT no 1 dire par la radio qu’il ne s’agissait pas d’une poursuite
  • Les séquences de la CV montrent que les véhicules se déplaçant vers le sud-est sur le chemin Albion s’étaient placés dans la voie en bordure droite, lorsque l’AT no 7 est passé près d’eux
  • Les séquences vidéo de la CV montrent que l’AT no 7 conduisait sur la voie de gauche et la voie de virage vers la gauche au centre du chemin Albion. On peut voir des nuages de poussière venant des pneus arrière de la voiture de patrouille de l’AT no 5
  • Les données de LAV montrent que la vitesse de l’AT no 7 est tombée de 121 km/h à 63 km/h lorsqu’il s’est approché de l’intersection du chemin Albion Road et du chemin Irwin. Les séquences de la CV montrent que lorsque l’AT no 7 a traversé l’intersection au chemin Irwin, le feu de circulation venait tout de passer d’ambre à rouge; et
  • Les données de LAV montrent que l’AT no 7 a commencé à ralentir de 121 km/h à 63 km/h alors qu’il s’approchait du chemin Irwin (limite de vitesse de 60 km/h).

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les documents suivants du SPT et puis les a examinés :

  • Document photographique de mise en détention du TC no 3
  • Exposés des faits - répartition assistée par ordinateur (RAO)
  • Interrogations du CIPC
  • Rapport sur le refus de s’arrêter
  • Indications d’appel du parc automobile
  • Dossier complet - Accusations au criminel et à la Loi sur la sécurité routière (LSR)
  • Incident général x 2
  • Répartition assistée par ordinateur Intergraph (ICAD) - Rapport détaillé de l’événement
  • Renseignements sur le TC no 3 dans IntelliBook
  • Notes des AT nos 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7
  • Rapport des fiches de service
  • Rapport sur les dommages aux véhicules – Voiture de patrouille de l’AT no 3; et
  • Recherche interne : Unités TAVIS en cause

Description de l’incident

Le 8 juin 2016, l’AI et l’AT no 1 roulaient dans un véhicule de police TAVIS non identifié dans le secteur du chemin Albion. À ce moment-là, ils ont vu le TC no 3 au volant d’un VUS noir. Une vérification a révélé que le TC no 3 était visé par des mandats non exécutés. L’AI et l’AT no 1 ont demandé l’intervention d’une voiture de patrouille identifiée pour immobiliser le VUS noir.

Les AT nos 2 et 3 sont arrivés sur les lieux à bord d’une voiture de patrouille identifiée avec les feux d’urgence activés et ont tenté d’immobiliser le véhicule du TC no 3. Le TC no 3 a cependant contourné la voiture de patrouille de l’AT no 3 à grande vitesse. L’AI et l’AT no 1 ont continué de suivre le TC no 3 sur la promenade Riverdale, tout comme l’AT no 2 et l’AT no 3. Les AT nos 4, 5 et 7 ont également pris part à la tentative d’immobiliser le véhicule automobile que conduisait le TC no 3 sur le chemin Albion. Le TC no 3 a continué de se diriger dans la direction ouest vers l’intersection du chemin Albion et de la promenade Elmhurst, où il a viré dans la voie nord et est entré en collision avec la fourgonnette de la plaignante. Le véhicule du TC no 3 a alors heurté un abribus tandis que la fourgonnette de la plaignante a percuté le véhicule du TC no 1 à la suite de la première collision.

Le TC no 3 a quitté son véhicule et a pris la fuite à pied vers le sud sur le chemin Albion. Le TC no 3 a ensuite été arrêté; il n’avait subi aucune blessure grave durant la collision. La plaignante a été transportée à l’hôpital et, selon le diagnostic, avait la cheville droite fracturée.

Dispositions législatives pertinentes

Article 249(1), Code criminel - Conduite dangereuse de véhicules à moteur, bateaux et aéronefs

249 (1) Commet une infraction quiconque conduit, selon le cas :

  1. un véhicule automobile d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu

Paragraphe 249(3), Code criminel - Conduite dangereuse causant ainsi des lésions corporelles

249 (3) Quiconque commet une infraction mentionnée au paragraphe (1) et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans.

Article 219, Code criminel - Négligence criminelle

219 Est coupable de négligence criminelle quiconque :

  1. soit en faisant quelque chose
  2. soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir

montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.

Article 221, Code criminel - Causer des lésions corporelles par négligence

221. Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.

Règl. de l’Ont. 266/10, article 2, Loi sur les services policiers - Amorce ou continuation de la poursuite

2(1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :

  1. soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être
  2. soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule

(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues dans la procédure écrite, selon le cas :

  1. du corps de police de l’agent, établie en application du paragraphe 6 (1), si l’agent est membre d’un corps de police de l’Ontario au sens de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux
  2. d’un corps de police dont le commandant local a été avisé de la nomination de l’agent en vertu du paragraphe 6 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie II de cette loi
  3. du corps de police local du commandant local qui a nommé l’agent en vertu du paragraphe 15 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie III de cette loi. Règl. de l’Ont. 266/10, par. 2 (2)

(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.

(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier.

Analyse et décision du directeur

Le 8 juin 2016, l’AI et les AT nos 1, 2, 3, 4, 5 et 7 ont tenté d’arrêter un véhicule automobile sur le chemin Albion, dans la ville de Toronto, afin de mettre le conducteur, le TC no 3, en état d’arrestation parce qu’il était visé par des mandats non exécutés. Pendant que ces agents le poursuivaient, le TC no 3 est entré en collision avec un autre véhicule automobile. La conductrice de celui-ci, la plaignante, a subi une fracture à la cheville droite.

Les enquêteurs se sont entretenus avec quatre témoins civils et huit policiers, y compris l’AI, qui leur a également fourni ses notes pour examen. De plus, les enquêteurs avaient accès à des images de télévision en circuit fermé (TVCF) fournies par deux établissements dans la région ainsi qu’aux enregistrements vidéo des caméras dans les trois voitures de patrouille identifiées de la police, aux données de LAV de tous les véhicules de police et aux enregistrements des communications transmises par les agents de police durant cet incident. Grâce aux multiples sources d’information, une séquence assez précise des événements a pu être établie.

La vidéo de TVCF provenant d’une église à proximité montre que la première voiture de patrouille, conduite par l’AT no 3 est arrivé sur le lieu de l’accident dans les 36 secondes qui ont suivi la collision, la deuxième est arrivée deux secondes plus tard, et la fourgonnette grise non identifiée conduite par l’AI est arrivée sept secondes après la dernière voiture de patrouille ou dans les 47 secondes qui ont suivi la collision. Il est toutefois important de garder à l’esprit que les données de LAV montrent que chacun des véhicules de police a fortement décéléré à peu près au moment de l’accident alors qu’il restait encore une distance considérable à parcourir pour arriver au lieu de la collision. (Lorsque chacun des agents a atteint le chemin Irwin à environ 225 mètres de l’accident - leurs véhicules respectifs se déplaçaient à une vitesse en deçà de la limite de vitesse.)

Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, je n’ai aucune difficulté à conclure que les quatre véhicules de police participaient à un moment donné à une poursuite policière du véhicule du TC no 3 et qu’ils enfreignaient tous la Loi sur les services policiers de l’Ontario, de même que la réglementation connexe du SPT intitulée [traduction] « Poursuites visant l’appréhension de suspects » pour les motifs suivants :

L’article 21 du Régl, de l’Ontario 266/10 pris en application de la Loi sur les services policiers de l’Ontario (LSPO), intitulé « Poursuites visant l’appréhension de suspects », précise ceci :

Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :

  1. soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être
  2. soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule

(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues dans la procédure écrite, selon le cas :

(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.

(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier.

La politique du SPT adoptée en vertu de la LSPO renferme les passages suivants :

[traduction]

Responsabilité pour l’exécution sécuritaire

La responsabilité pour l’exécution sécuritaire d’une poursuite incombe à l’agent de police individuel, au préposé aux communications - Services des communications, au superviseur des poursuites et à toute autre personne autorisée qui surveille la poursuite.

Restrictions relatives à la poursuite visant l’appréhension de suspects

(1) Seul un agent de police qui est au volant d’un véhicule automobile identifié peut amorcer et continuer une poursuite à moins qu’un véhicule automobile identifié ne soit pas facilement disponible et que le policier estime qu’il est nécessaire d’appréhender immédiatement un individu dans le véhicule automobile en fuite ou d’identifier ce véhicule automobile ou une personne qui se trouve à son bord

(3) Tout au plus deux véhicules automobiles devraient participer directement à une poursuite, sauf si le superviseur des poursuites l’autorise

Dans ce cas-ci, l’agent ayant amorcé la poursuite n’en a jamais informé le préposé aux communications, ce qui signifie évidemment que le préposé aux communications, le superviseur des poursuites et toute autre personne autorisée qui est censée surveiller la poursuite n’ont aucunement participé à la gestion de la poursuite, étant donné qu’il est clair que personne ne la surveillait.

Lorsqu’on regarde la séquence vidéo enregistrée par la caméra dans le véhicule conduit par l’AT no 3, où il tente de bloquer le véhicule du TC no 3 et où celui-ci contourne son véhicule à haute vitesse, et où la fourgonnette grise non identifiée de l’AI le prend en chasse en roulant à la même vitesse élevée, il est clair que l’AI se lançait à la poursuite du véhicule. Bien que l’AT no 1, qui était le passager dans le véhicule de l’AI, ait initialement demandé qu’on envoie un véhicule identifié pour immobiliser le véhicule automobile du TC no 3, quand cela n’a pas eu le résultat souhaité, l’AI a continué la poursuite et a omis d’en informer le préposé aux communications. Plus précisément, lorsque l’AT no 6 a demandé à 17 h 36 m 47 si les agents avaient entamé une poursuite, l’AT no 1 l’a nié, en dépit du fait qu’au moment de la transmission, le véhicule automobile dans lequel il voyageait se déplaçait à une vitesse de 87 km/h dans une rue de ville pendant l’heure de pointe et qu’à peine 47 secondes avant cela, il se déplaçait à 105 km/h.

Je conclus que l’AI, au volant de son véhicule automobile non identifié, a amorcé la poursuite du véhicule du TC no 3 et puis a demandé qu’une voiture de patrouille l’aide à arrêter le véhicule, en conformité avec la politique de la police. Lorsque cela ne pouvait se faire, l’AI a toutefois continué de poursuivre le véhicule pendant que les voitures de patrouille identifiées conduites par les AT nos 3, 5 et 7 l’ont fait également et ont rattrapé et dépassé à un moment donné le véhicule automobile de l’AI, du fait que ce dernier avait à composer avec de la circulation, puisque son véhicule n’était pas muni de feux et de sirènes de police, tandis que les trois voitures de patrouille qui en étaient équipées s’en sont servis pour forcer la circulation dans le chemin à s’écarter. Au moment de la transmission de l’AT no 6, qui demandait à savoir si une poursuite était en cours, il est clair, lorsqu’on examine l’enregistrement de la communication, dans laquelle on peut entendre les sirènes en arrière-plan, ainsi que les séquences enregistrées par la caméra dans les trois voitures de patrouille, que l’AI pouvait manifestement voir les trois voitures de patrouille le dépasser à haute vitesse dans la voie de virage vers la gauche au centre du chemin et il ne pouvait y avoir absolument aucun doute qu’une poursuite était en cours. Le fait que le véhicule automobile de l’AI ait été rattrapé et dépassé par les trois autres voitures de patrouille ne vicie pas ce fait.

Ce serait bien entendu une banalité de dire que les conducteurs de chacune des trois voitures de patrouille qui participaient à la poursuite active du véhicule automobile du TC no 3 ont tous enfreint la LSPO et la politique du SPT au même degré et en ce sens qu’aucun d’entre eux n’a cru bon d’informer le préposé aux communications qu’ils avaient pris en chasse le suspect, malgré le fait qu’ils tentaient d’immobiliser le véhicule automobile du TC no 3 en se déplaçant aux vitesses élevées indiquées ci-après :

  • D’après l’enregistrement, la voiture de patrouille de l’AT no 3 a accéléré de 92 km/h à 113 km/h en l’espace de cinq secondes alors qu’il se déplaçait sur le chemin Albion, dans une zone où la limite de vitesse affichée est de 60 km/h. Au moment où l’on entend le TC no 6 demander par la radio si une poursuite est en cours, l’AT no 3 se déplaçait à une vitesse de 101 km/h
  • D’après l’enregistrement, la voiture de patrouille de l’AT no 5 a accéléré de 43 km/h à 121 km/h alors qu’il conduisait sur le chemin Albion. Au moment de la transmission de l’AT no 6, l’AT no 5 roulait à 119 km/h; et
  • D’après l’enregistrement, la voiture de patrouille de l’AT no 7 a accéléré de 34 km/h à 124 km/h en 11 secondes sur le chemin Albion. Au moment de la transmission de l’AT no 1 niant qu’une poursuite était en cours, la voiture de patrouille de l’AT no 7 traversait une intersection à des vitesses allant de 84 km/h à 116 km/h

Bien qu’il soit clair que les trois agents qui conduisaient les voitures de patrouille identifiées ont entendu à la fois la question de l’AT no 6 qui voulait savoir s’il y avait une poursuite en cours et la réponse de l’AT no 1 qu’il n’y avait pas de poursuite, aucun des agents n’a décidé de répondre à cette affirmation ou de la corriger, malgré le fait que chacun d’eux poursuivait manifestement activement le suspect dans des rues de la ville un jour de semaine à l’heure de pointe.

Lors de la transmission de l’AT no 1 après sa tentative échouée d’immobiliser le véhicule du TC no 3, il a indiqué que le TC no 3 s’était juste [traduction] « échappé » et qu’ils allaient le suivre sans le prendre en chasse. J’estime qu’à partir de ce moment-là, il est clair tant à partir des données de LAV que des images vidéo enregistrées par la caméra dans les trois véhicules de patrouille que l’AI avaient amorcé une poursuite et qu’après la tentative échouée de l’immobiliser, les AT nos 3, 5 et 7 ont pris part à cette poursuite jusqu’au moment où le véhicule automobile du TC no 3 est entré en collision avec le véhicule automobile de la plaignante et que sa course s’est arrêtée abruptement lorsqu’il a percuté l’abribus. Durant cette période, aucun des agents concernés n’a communiqué avec le centre de communication pour l’informer qu’il se livrait à une poursuite. Chaque agent avait l’obligation de signaler au répartiteur qu’il avait amorcé une poursuite dès qu’elle avait été entamée, et l’affirmation de l’AT no 1 selon laquelle ils suivaient simplement le suspect à une vitesse allant jusqu’à 101 km/h, et plus dans le cas des voitures de patrouille, et ne poursuivaient pas le suspect, est une déformation du sens de la législation. Chaque agent avait un deuxième agent dans le véhicule avec lui et, par conséquent, rien ne l’empêchait d’informer le Service de répartition de la poursuite. Je doute fort qu’une personne raisonnable penserait que la décision d’immobiliser un véhicule automobile conduit par un conducteur identifié visé par des mandats non exécutés l’emporte sur le risque que présentait pour la sécurité publique le fait de continuer à poursuivre un véhicule automobile aux vitesses auxquelles roulaient ces agents, compte tenu du fait que c’était la fin de la journée de travail dans une ville à grande activité, alors qu’on pouvait s’attendre à ce que des véhicules et piétons circulent.

Les mots « poursuite » ou « je suis, mais je ne poursuis pas », ne sont pas des mots qui transforment une poursuite en quelque chose d’autre qui disculpe la police de ses obligations en vertu du Règlement sur les poursuites visant l’appréhension de suspects. En vertu de ce règlement, une poursuite visant l’appréhension de suspects a lieu lorsqu’un agent de police tente d’ordonner au conducteur d’un véhicule automobile de s’immobiliser, que le conducteur refuse d’obtempérer et que l’agent poursuit, en véhicule automobile, le véhicule en fuite dans l’intention de l’immobiliser . Même si l’AT no 1 prétendait qu’une poursuite n’avait pas lieu, je ne vois aucune raison de poursuivre un véhicule à 101 km/h sur une rue bondée durant l’heure de pointe un jour de semaine à toute autre fin que de tenter de l’immobiliser. Si l’on se base sur les paroles qu’a dites l’AT no 1 au répartiteur que le TC no 3 s’était [traduction] « juste échappé » de lui et de l’AI, il est clair que les agents tentaient d’immobiliser le véhicule lorsqu’il est parti à haute vitesse. Toutefois, ces paroles auraient dû être suivies des mots « j’amorce maintenant une poursuite et je me déplace à 101 km/h » afin que le sergent responsable des communications soit en mesure de décider si la poursuite devait être interrompue ou non. Et plutôt que de garder le silence quand l’AT no 1 a informé l’AT no 6 qu’une poursuite n’était pas en cours, chaque agent individuellement avait l’obligation de signaler qu’ils poursuivaient en fait activement le suspect.

En me fondant sur l’ensemble de la preuve, j’ai de graves préoccupations quant au comportement de chacun des agents dans les quatre véhicules qui ont participé à la poursuite du véhicule de TC no 3, dans une situation où il n’est pas allégué que le TC no 3 venait de commettre une infraction criminelle, ni qu’une infraction criminelle était sur le point d’être commise, lorsqu’ils avaient identifié le TC no 3 et le véhicule automobile qu’il conduisait et où leur seul but était d’exécuter des mandats en souffrance et où huit policiers différents croyaient que cela équivalait à une situation où « afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite […] l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique ». Je ne parviens pas à comprendre non plus comment la responsabilité de chacun de ces agents de réévaluer la situation et d’interrompre « la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite » aurait pu être remplie en décidant de continuer la poursuite plutôt que d’y mettre fin. Fort heureusement, à cette heure de la journée, il n’y avait pas de piétons dans l’abribus ou l’issue de cette affaire aurait été bien pire, voire fatale.

Cela dit, le non-respect de la LSPO ou de la politique du SPT n’équivaut pas à des motifs raisonnables de croire qu’une infraction criminelle a été commise.

La question à trancher est de savoir s’il existe des motifs raisonnables de croire que l’un ou l’autre des agents ayant participé à la poursuite du TC no 3 a commis une infraction criminelle et plus particulièrement si la conduite est devenue dangereuse et, par conséquent, était en contravention du paragraphe 249(1) du Code criminel et a ainsi causé des lésions corporelles contraires au paragraphe 249(3) ou s’il s’agissait d’une négligence criminelle contraire à l’article 221 du Code criminel et a ainsi causé des lésions corporelles.

Selon la décision de la Cour suprême du Canada dans R. c. Beatty, [2008] 1 R.C.S. 49, pour que l’article 249 s’applique, il faut établir que la personne conduisait « d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu »; de plus, la conduite doit être telle qu’elle équivaut « à un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé ». De plus, pour que l’art. 221 s’applique, il faut qu’il y ait un [traduction] « écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les circonstances » où l’accusé [traduction] « a manifesté un mépris téméraire pour la vie et la sécurité d’autrui » (R. c. Sharp (1984), 12 C.C.C. (3d) 426 (Cour d’appel de l’Ont.)).

Un examen de l’ensemble de la preuve montre clairement que les agents se déplaçaient tous à des vitesses excessives lorsqu’ils se sont lancés à la poursuite du véhicule automobile du TC no 3, tout en empruntant fréquemment la voie au centre réservée aux virages à gauche et tout en ne pas tenant compte de divers panneaux d’arrêt ou feux de circulation. Je conclus toutefois qu’il n’y a aucune preuve que la conduite de l’un ou l’autre des agents créait un danger pour les autres utilisateurs de la chaussée ou qu’ils ont, à un moment ou à un autre, entravé la circulation, puisque ces autres automobilistes ont cédé le passage aux agents de police. De plus, les conditions environnementales étaient bonnes, et les routes étaient sèches. De plus, il semble qu’ils aient tous décidé de ralentir à mesure qu’ils quittaient une zone inhabitée du chemin Albion, dans la vallée du parc West Humber, avant de pénétrer dans une zone plus résidentielle avant la collision. Cela dit, les agents ont décidé de continuer leur chasse du véhicule automobile du TC no 3, mais cela a semblé exacerber le mode de conduite du TC no 3, apparemment en l’incitant à accélérer de plus en plus pour éviter la police. En fin de compte, je conclus que le TC no 3 a malheureusement décidé de tenter d’échapper à la police et qu’il l’aurait fait à tout prix afin d’éviter son appréhension et, ce faisant, s’est enfui à une vitesse dangereuse et a fait des manœuvres dangereuses sans égard aux autres personnes qui utilisaient la route. L’ensemble de la preuve révèle que le TC no 3 a décidé de rouler dans la voie en sens inverse et a heurté le véhicule de la plaignante, puis a perdu le contrôle de son véhicule tout en conduisant dangereusement et à des vitesses excessives et tout en essayant de s’échapper.

Je conclus, en me fondant sur cette preuve, que la conduite des agents participant à la poursuite et la tentative d’appréhender le TC no 3 ne constituait pas « un écart marqué par rapport à la norme » et, manifestement, ne peut donc pas équivaloir à « un écart marqué et important de la norme » et je suis dans l’impossibilité d’établir qu’il y avait un lien causal entre les actions des agents et la collision des véhicules automobiles à l’origine de la blessure de la plaignante. Par conséquent, je conclus qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour en arriver à des motifs raisonnables de croire qu’une infraction criminelle a été commise, de sorte qu’aucune accusation ne sera portée en l’espèce.

Date : 5 septembre 2017

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.