Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 16-PFD-294

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Le rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet du décès par balle d’un homme de 45 ans abattu par un agent qui répondait à un appel à une résidence de Nipigon.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 26 novembre 2016, à 20 h 18, la Police provinciale de l’Ontario a signalé un décès par balle survenu vers 19 h 30 le même soir à une résidence de Nipigon. Les agents de la Police provinciale se sont rendus à la résidence après avoir reçu un appel de la témoin civile (TC) no 7, qui voulait faire sortir un homme de chez elle. L’agent témoin (AT) no 1 et l’agent impliqué (AI) sont arrivés sur les lieux. L’homme est sorti de la maison, armé d’un couteau. L’AT no 1 a activé une arme à impulsions, et l’homme est alors rentré dans la maison. Il est ensuite ressorti à toute vitesse par la porte d’entrée avec un couteau. L’AI a tiré sur lui avec son arme à feu et l’homme a été touché. L’homme en question a été conduit à l’hôpital, où il a été déclaré mort.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES se sont rendus sur les lieux et ont identifié des éléments de preuve qu’ils ont préservés. Ils ont documenté les lieux pertinents associés à l’incident par des notes, des photographies, des croquis et des mesures. Ils ont assisté à l’autopsie et l’ont enregistrée et ils ont aidé à préparer ce qui devait être remis au Centre des sciences judiciaires.

Plaignante

Homme de 45 ans décédé dont le dossier médical a été obtenu et examiné

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

TC no 4 A participé à une entrevue

TC no 5 A participé à une entrevue

TC no 6 A participé à une entrevue

TC no 7 A participé à une entrevue

TC no 8 A participé à une entrevue

TC no 9 A participé à une entrevue

TC no 10 A participé à une entrevue

TC no 11 A participé à une entrevue

TC no 12 A participé à une entrevue

TC no 13 A participé à une entrevue

TC no 14 A participé à une entrevue

TC no 15 A participé à une entrevue

TC no 16 Plus proche parent, n’a pas participé à une entrevue

TC no 17 Plus proche parent, n’a pas participé à une entrevue

TC no 18 A participé à une entrevue

TC no 19 A participé à une entrevue

TC no 20 A participé à une entrevue

TC no 21 A participé à une entrevue

TC no 22 Plus proche parent, n’a pas participé à une entrevue

TC no 23 Plus proche parent, n’a pas participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue

AT no 2 A participé à une entrevue

AT no 3 A participé à une entrevue

AT no 4 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

AT no 5 A participé à une entrevue

AT no 6 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

AT no 7 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

AT no 8 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

AT no 9 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

Témoins employés de la police

TEP no 1 A participé à une entrevue[1]

TEP no 2 A participé à une entrevue[2]

Agent impliqué

AI A refusé de participer à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué, mais ses notes ont été obtenues et examinées

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est produit sur le terrain devant une résidence de Nipigon, un bungalow d’un étage avec un escalier de cinq marches en ciment menant à la porte d’entrée. Le terrain était gazonné et recouvert de plaques de neige par endroits.

Schéma des lieux

Scene diagram

Éléments de preuve matériels

Couteau

La photo du couteau utilisé durant l’incident figure ci-dessous.

La photo du couteau utilisé durant l’incident

Preuves médicolégales

Liste de ce qui a été remis au Centre des sciences judiciaires et résultats

Les objets suivants ont été soumis au Centre des sciences judiciaires :

  • la douille d’une cartouche de calibre .40
  • un couteau de boucher à dents de scie d’une longueur hors tout de 29 ½ centimètres avec le bout cassé et la poignée endommagée
  • un pistolet Sig Sauer de modèle P229 (arme semi-automatique de calibre .40)
  • un projectile prélevé du côté gauche de la région du pelvis durant une autopsie (balle blindée à pointe creuse de calibre .40)
  • des échantillons biologiques

Les examens faits par le centre ont permis de déterminer que le projectile avait été tiré par un pistolet Sig Sauer.

L’analyse toxicologique des échantillons biologiques a révélé que le plaignant avait une concentration de 152 mg d’éthanol (alcool) par 100 ml de sang.

Preuve d’expert

Rapport d’autopsie

Le rapport d’autopsie a révélé ce qui suit :

  1. la cause du décès est une seule blessure par balle à l’abdomen
  2. des contusions et éraflures pouvant avoir été causées par la chute ayant suivi le coup de feu ou les manipulations durant l’arrestation
  3. une récente fracture à la main gauche ne pouvant pas avoir été causée par la série d’événements connus, qui ressemble à une blessure ayant été faite en frappant du poing sur un objet, soit une « fracture du boxeur »
  4. aucune preuve médicale n’indique que le plaignant ait tenu un couteau dans sa main
  5. aucune preuve n’indique que des sondes de l’arme à impulsions soient entrées en contact avec la peau

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio et de photographies

Les enquêteurs de l’UES ont ratissé le secteur à la recherche d’enregistrements audio ou vidéo ou de photographies, mais n’ont rien trouvé.

Éléments obtenus auprès du service de police

L’UES a demandé à la Police provinciale de l’Ontario les documents suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • l’inventaire contrôlé (chambre forte de contrôle des armes) – AI
  • l’inventaire contrôlé (chambre forte de contrôle des armes) – AT no 1
  • le registre de la scène de crime, résidence
  • le registre de la scène de crime, plaignant
  • le registre de service
  • les détails de l’événement
  • le rapport d’incident général
  • la liste des témoins et des déclarations
  • les notes des AT nos 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 11
  • le rapport des interventions relatives à l’incident
  • l’historique de l’incident, plaignant
  • le sommaire de l’enregistrement audio des entrevues de la Police provinciale avec les TC nos 3, 4, 6, 9, 11, 15 et 19
  • le sommaire de l’enregistrement audio des entrevues de la Police provinciale avec les témoins non désignés
  • les notes relatives à l’enregistrement audio de la Police provinciale de la déclaration faite par le TC no 16
  • la liste des vidéos et des photos de la Police provinciale
  • le rapport et les notes de l’agent de la Police provinciale ayant interrogé un témoin non désigné
  • le rapport de l’agent de la Police provinciale, témoin non désigné
  • le rapport de l’agent de la Police provinciale, TC no 2
  • le rapport de l’agent de la Police provinciale, TC no 10
  • le rapport sur la propriété de la Police provinciale
  • le sommaire de la déclaration faite à la Police provinciale, témoin non désigné
  • le sommaire de la vidéo de l’entrevue et les notes de la Police provinciale, TC no 5
  • le sommaire de la vidéo de l’entrevue de la Police provinciale, TC no 1
  • le sommaire des déclarations des témoins faites à la Police provinciale, témoins non désignés
  • une série de photos
  • le rapport d’incident supplémentaire

Description de l’incident

Le 26 novembre 2016, en début de soirée, le plaignant se trouvait dans la résidence de la TC no 7 et a refusé de partir lorsque celle-ci lui a demandé. La TC no 7 a appelé le 911 pour demander à la police de venir l’aider à faire sortir le plaignant de chez elle. L’AI et l’AT no 1 ont répondu à l’appel et ont rencontré la TC no 7 sur la rue où elle habite et l’ont accompagnée jusqu’à sa résidence dans l’intention de forcer le plaignant à partir.

Lorsque l’AI, l’AT no 1 et la TC no 7 sont arrivés à la résidence, le plaignant en est sorti par la porte d’entrée avec un couteau de cuisine. Il a refusé de partir. Un agent a ordonné au plaignant de jeter son couteau, mais celui-ci a refusé. L’AT no 1 a alors déchargé son arme à impulsions, mais même si le plaignant a semblé touché, cela n’a produit aucun effet sur lui. Le plaignant est rentré dans la maison et a claqué la porte. Dans les secondes qui ont suivi, il est ressorti par la porte d’entrée en brandissant le même couteau, il a dévalé l’escalier et il est a couru en direction de l’AI. Celui-ci a reculé en tirant un coup de feu, qui a atteint le plaignant à l’abdomen.

L’AI a appelé une ambulance, tandis que l’AT no 1 procédait à des manœuvres de réanimation cardiopulmonaire en attendant les secours. Il a poursuivi ces manœuvres dans l’ambulance pendant le transport du plaignant à l’hôpital. Malheureusement, une fois à l’hôpital, le plaignant a été déclaré mort. Il a été établi que la cause du décès du plaignant était une seule blessure par balle à l’abdomen.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1), Code criminel - Protection des personnes chargées de l’application et de l’exécution de la loi

25. (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier;
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions,

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

(3) Sous réserve des paragraphes (4) et (5), une personne n’est pas justifiée, pour l’application du paragraphe (1), d’employer la force avec l’intention de causer, ou de nature à causer la mort ou des lésions corporelles graves, à moins qu’elle n’estime, pour des motifs raisonnables, que cette force est nécessaire afin de se protéger elle-même ou de protéger toute autre personne sous sa protection, contre la mort ou contre des lésions corporelles graves.

(4) L’agent de la paix, ainsi que toute personne qui l’aide légalement, est fondé à employer contre une personne à arrêter une force qui est soit susceptible de causer la mort de celle-ci ou des lésions corporelles graves, soit employée dans l’intention de les causer, si les conditions suivantes sont réunies :

  1. il procède légalement à l’arrestation avec ou sans mandat
  2. il s’agit d’une infraction pour laquelle cette personne peut être arrêtée sans mandat
  3. cette personne s’enfuit afin d’éviter l’arrestation
  4. lui-même ou la personne qui emploie la force estiment, pour des motifs raisonnables, cette force nécessaire pour leur propre protection ou celle de toute autre personne contre la mort ou des lésions corporelles graves — imminentes ou futures
  5. la fuite ne peut être empêchée par des moyens raisonnables d’une façon moins violente

L’article 34, Code criminel : Défense — emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :

  1. croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne;
  2. commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger — ou de défendre ou de protéger une autre personne — contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force;
  3. agit de façon raisonnable dans les circonstances.

(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :

  1. la nature de la force ou de la menace;
  2. la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel;
  3. le rôle joué par la personne lors de l’incident;
  4. la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme;
  5. la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause;
  6. la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;

    f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause;

  7. la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force;
  8. la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime.

(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si une personne emploie ou menace d’employer la force en vue d’accomplir un acte qu’elle a l’obligation ou l’autorisation légale d’accomplir pour l’exécution ou le contrôle d’application de la loi, sauf si l’auteur de l’acte constituant l’infraction croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle n’agit pas de façon légitime.

Analyse et décision du directeur

Dans la soirée du 26 novembre 2016, des membres de la Police provinciale ont répondu à un appel concernant une querelle familiale et se sont rendus dans une résidence de Nipigon, où les agents ont trouvé le plaignant, qui a été tué par balle. À mon avis, il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’AI ait commis un crime en relation avec le décès du plaignant.

Le 26 novembre 2016, le plaignant a reçu une lettre l’avisant qu’il avait un arriéré de plus de 100 000 $ à verser en pension alimentaire pour enfants, ce qui l’a mis en colère. Plus tard, alors qu’il se trouvait à la résidence de la TC no 7 et qu’il était en train de boire, il s’est mis à se quereller avec celle-ci. Elle lui a demandé de partir, mais le plaignant a refusé et lui a dit d’appeler la police si elle voulait qu’on le fasse sortir. À 18 h 57, la TC no 7 a appelé le 911. Elle a signalé que le plaignant avait bu, qu’il était verbalement agressif envers les voisins et qu’il refusait de partir de sa résidence.

L’AI et l’AT no 1 se sont rendus à l’adresse en question. Vers 19 h 10, les deux agents sont arrivés et ont discuté avec la TC no 7 dans sa rue. L’AI et l’AT no 1 étaient devant la maison quand le plaignant a ouvert la porte d’entrée. Il avait dans sa main droite un grand couteau de cuisine, qu’il tenait le long de son corps. Le plaignant s’est adressé à la TC no 7 en criant parce qu’elle avait fait venir la police. L’AT no 1 a demandé au plaignant de jeter son couteau et a dit à l’AI de sortir son arme à feu. L’AT no 1 a dégainé son arme à impulsions et l’a activée, tandis que l’AI cessait de pointer son arme à feu. L’AT no 1 s’est placé entre la TC no 7 et le plaignant et a enjoint à celle-ci de partir. Elle est alors allée dans la rue. L’AI est demeuré à proximité de la voiture de police dans l’entrée et il a continué d’ordonner au plaignant, qui était à une distance de trois à quatre mètres et demi de lui, de jeter son couteau. Celui-ci a refusé de se départir de son arme et a déclaré avoir besoin du couteau pour se protéger contre la TC no 7. Il était en colère et il a crié aux agents de partir.

L’AT no 1 a lancé « Taser! Taser! » À une distance d’environ trois mètres, l’AT no 1 a déchargé son arme à impulsions pour tenter de ramener le calme et empêcher le plaignant de se blesser lui-même et de blesser d’autres personnes. L’AT no 1 a vu le plaignant grimacer de douleur et rentrer dans la maison. Un instant plus tard, il est surgi de la porte d’entrée en brandissant son couteau à l’horizontale. Il a dévalé l’escalier et a couru en direction de l’AI. Celui-ci a reculé en tirant un coup de feu, puis est tombé à la renverse en trébuchant sur la neige. Le coup de feu a atteint le plaignant à l’abdomen. Celui-ci est alors tombé au sol. L’AI a gardé son arme à feu pointée en direction du plaignant. L’AT no 1, qui était à la gauche de l’AI, s’est rapproché et s’est rendu jusqu’au plaignant, qui était tombé sur le côté droit, le visage dans la neige. L’AT no 1 a attaché les mains du plaignant et a demandé à l’AI d’appeler le centre de communication. À 19 h 17, l’AI a annoncé à la radio que des coups de feu venaient d’être tirés et qu’une ambulance devait être envoyée. Les agents ont procédé à des manœuvres de réanimation cardiopulmonaire en attendant les secours.

Après le coup de feu, le couteau s’est retrouvé dans la neige, à proximité du corps du plaignant. Craignant que la TC no 7 ou d’autres personnes puissent y accéder pendant que les agents s’occupaient du plaignant, l’AT no 1 a demandé à l’AI de ramasser le couteau et de le mettre dans la voiture de police pour des raisons de sécurité[3]. J’estime que la décision des agents de retirer le couteau des lieux pour éviter des blessures était raisonnable, compte tenu de tout le remue-ménage dans les circonstances. L’ambulance est ensuite arrivée, et le plaignant a été conduit à l’hôpital. Les registres de l’ambulance indiquent que le plaignant n’avait pas de pouls ni d’activité cardiaque pendant le transport à l’hôpital. À 20 h 4, il a été déclaré mort.

Il ne fait aucun doute que l’AI et l’AT no 1 ont agi conformément à leurs fonctions lorsqu’ils se sont rendus à la résidence de la TC no 7 en réponse à son appel au 911, qui visait à demander de l’aide. Tout ce que j’ai à déterminer, c’est si le coup de feu de l’AI était justifié. Je juge que son geste était conforme aux articles 34 et 25 du Code criminel. L’article 34 fournit la justification légale pour l’emploi de la force visant à se défendre soi-même et à défendre d’autres personnes. N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne, commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger — ou de défendre ou de protéger une autre personne — contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force et agit de façon raisonnable dans les circonstances, compte tenu de plusieurs facteurs énumérés au paragraphe 34(2), notamment la nature de la force ou de la menace, le fait que des armes aient ou non été utilisées, l’existence d’autres moyens pour neutraliser la menace et la proportionnalité de la réaction. De plus, conformément au paragraphe 25(3) du Code criminel, l’utilisation par un agent dans l’exercice de ses fonctions de la force d’une manière pouvant causer la mort doit se limiter à ce qui est raisonnablement nécessaire pour protéger contre la mort ou contre des lésions corporelles graves.

L’AI et l’AT no 1 ont déclaré que le plaignant était sorti de la maison en courant et qu’il avait dévalé les marches de la galerie avant en brandissant un couteau. Il avait ignoré les ordres répétés de jeter son arme et s’approchait à toute vitesse des agents. Il se trouvait à une distance d’environ un mètre et demi lorsque l’AI a tiré un coup de feu. Même si l’AI a refusé de participer à une entrevue avec l’UES, comme la loi l’y autorise, il a néanmoins remis une copie de ses notes. Il ne fait aucun doute pour moi que l’AI craignait pour sa propre vie, celle de son partenaire et celle de la TC no 7 lorsqu’il a vu le plaignant s’approcher rapidement de lui avec un grand couteau à la main. L’AI a exprimé cette crainte et, vu les circonstances, je n’ai aucun mal à le croire. L’AT no 1 avait déjà tenté sans succès de se servir d’une arme non mortelle, soit son arme à impulsions, et n’avait pas encore pris son arme à feu lorsque le plaignant s’est précipité vers eux. Le rapport d’autopsie conclut que la cause du décès est une seule blessure par balle à l’abdomen, ce qui concorde avec les indications de l’AI et des autres témoins. Par conséquent, compte tenu des éléments de preuve susmentionnés, je juge que l’AI avait, lorsqu’il a déchargé son arme à feu, des motifs suffisants de croire que c’était nécessaire pour éviter une attaque au couteau imminente du plaignant.

En dernière analyse, je conclus que l’ensemble des éléments de preuve permettent de remplir les exigences du paragraphe 25(3) et les trois conditions de l’article 34 du Code criminel. Par conséquent, il n’existe aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait dépassé son pouvoir d’employer une force légitime dans les circonstances. Aucune accusation n’est donc portée dans cette affaire et le dossier est clos.

Date : 19 septembre 2017

Original signé par

Joseph Martino
Directeur intérimaire
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) [1] Le TEP no 1 est membre du service de police de Lake Helen, détachement de Nipigon. [Retour au texte]
  • 2) [2] Le TEP no 2 est membre du Service de police anichinabé. [Retour au texte]
  • 3) [3] La Police provinciale a saisi le couteau de cuisine de 29,5 cm qui se trouvait dans la voiture de l’AI et l’a par la suite remis à l’UES. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.