Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 16-TCI-323

Attention :

Cette page affiche un contenu graphique pouvant choquer, offenser et déranger.

Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et ayant causé un décès ou une blessure grave ou ayant donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Le présent rapport décrit l’enquête de l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 46 ans le 23 décembre 2016 lors de son arrestation pour voies de fait conjugales.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 23 décembre 2016 at 10 h 21, le Service de police de Toronto (SPT) a signalé qu’à 1 h 20 le même jour, des agents de police se sont rendus à une adresse sur la rue King Ouest suite à un appel concernant un conflit conjugal. Le plaignant a été arrêté pour voies de fait. Durant l’arrestation, le plaignant a été amené au sol et a perdu connaissance pendant 5 à 10 secondes. Des ambulanciers paramédicaux étaient sur les lieux durant l’arrestation. Le plaignant a été transporté à l’hôpital et examiné par précaution. Une tomodensitométrie (TDM) a révélé qu’il n’avait pas de blessure. On lui a donné de l’aspirine et il a été retourné à la garde de la police.

Étant donné qu’aucune commotion cérébrale ou fracture n’a été confirmée et que le plaignant n’a reçu que des analgésiques, ce dossier a été désigné comme ne nécessitant pas une intervention de la part d’un organisme d’enquête. Le SPT a été prié de communiquer avec l’UES si l’état du plaignant changeait.

Le 28 décembre 2016, après avoir réexaminé les circonstances et tout en sachant que le plaignant avait perdu connaissance pendant un certain temps au cours de l’interaction du 23 décembre, l’UES a invoqué son mandat.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 1

Plaignant :

Entretien avec l’homme âgé de 46 ans, obtention et examen des dossiers médicaux

Témoins civils (TC)

TC no 1  N’a pas participé à une entrevue[1]

TC no 2  A participé à une entrevue

TC no 3  A participé à une entrevue

TC no 4  A participé à une entrevue

TC no 5  A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT no 1  A participé à une entrevue

AT no 2  A participé à une entrevue

AT no 3  A participé à une entrevue

AT no 4  A participé à une entrevue

AT no 5  A participé à une entrevue

AT no 6  N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées

Agents impliqués (AI)

AI no 1  A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées

AI no 2  A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées

AI no 3  A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées

Preuve

Les lieux de l’incident

Les lieux de l’incident n’ont pas été examinés, mais l’interaction est survenue dans le couloir au deuxième étage d’un immeuble en copropriété situé sur la rue King Ouest à Toronto.

Preuve vidéo/audio/photographique

L’UES a inspecté les alentours pour déterminer s’il y avait des enregistrements vidéo ou audio et des preuves photographiques. Les enquêteurs ont obtenu une vidéo enregistrée par une télévision en circuit fermé (TVCF) de l’immeuble en copropriété sur la rue King Ouest et la vidéo enregistrée par la caméra dans la voiture de patrouille des AT nos 4 et 5. Le plaignant a aussi fourni des photos de ses blessures.

Vidéo enregistrée par la TVCF

Les enquêteurs ont regardé les images enregistrées par la TVCF de l’entreprise de sécurité à l’immeuble en copropriété, lesquelles ont fourni d’importants éléments de preuve qui pourraient étayer les accusations portées contre le plaignant.

L’enregistrement montre le plaignant entrer dans un ascenseur et s’y tenir debout au milieu en faisant face à la TC no 1. Il recule jusqu’à la paroi de l’ascenseur et semble crier contre la TC no 1, qui ne répond pas. La porte de l’ascenseur se ferme et le plaignant donne un coup de poing droit contre la porte de l’ascenseur avant de reculer contre la paroi de l’ascenseur et de continuer à crier contre la TC no 1. Puis, le plaignant se déplace et se tient directement devant la TC no 1 au moment de l’ouverture de la porte de l’ascenseur. Il se sert de sa main gauche pour pousser la TC no 1 contre la paroi de l’ascenseur avant de la saisir par ses vêtements et de la forcer, la tête en premier, contre la porte de l’ascenseur. Il continue à tenir la TC no 1 jusqu’au moment où il la tire hors de l’ascenseur.

Il n’y avait aucune vidéo de l’interaction entre le plaignant et la police.

Vidéo de la caméra dans la voiture de patrouille

La caméra dans la voiture de patrouille a filmé le transport, par les AT nos 4 et 5, du plaignant, de l’hôpital à la division du SPT. La vidéo commence le 23 décembre 2016 à 6 h 47 m 33 s, quand les AT nos 4 et 5 ont escorté le plaignant jusqu’à la voiture de patrouille depuis l’hôpital et a continué à filmer jusqu’à 8 h 27 m 13 s, quand des personnes inconnues ont conduit la voiture de patrouille hors de l’entrée sécurisée de la division. Des agents de police ont sorti le plaignant de la voiture de patrouille à 7 h 45 m 26 s en vue de sa mise en détention. La vidéo n’a pas fourni d’éléments de preuve utiles aux fins de l’enquête.

Éléments obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les documents suivants du SPT et puis les a examinés :

  • Vidéo de mise en détention
  • Enregistrements des communications
  • Rapport des détails de l’événement
  • Rapport d’incident général
  • Vidéo de la caméra dans la voiture de patrouille des AT nos 4 et 5
  • Liste des agents en cause
  • Notes des AT nos 1, 2, 3, 4 et 5
  • Notes des AI nos 1, 2 et 3
  • Procédure - Arrestation
  • Procédure – Violence conjugale
  • Liste des témoins

Description de l’incident

Aux premières heures du 23 décembre 2016, le plaignant et la TC no 1 retournaient à leur immeuble en copropriété. Ils étaient tous deux en état d’ébriété, et on a observé le plaignant agresser la TC no 1. On a appelé la police, et les agents se sont approchés du plaignant dans le couloir à l’extérieur de son unité au deuxième étage. À l’époque, le plaignant saignait d’une main et il y avait des traînées de sang sur les murs du couloir.

Les AI nos 1, 2 et 3 ont tenté de menotter le plaignant, qui était belliqueux et qui résistait à leurs efforts. Le plaignant est tombé sur le plancher, a heurté sa tête et a perdu connaissance pendant une trentaine de secondes. Les ambulanciers paramédicaux étaient déjà sur les lieux, et le plaignant a été transporté à l’hôpital, où un tomodensitogramme a révélé que le plaignant avait une « légère blessure à la tête[2] » et on lui a dit de se faire examiner davantage par un médecin s’il en ressentait le besoin.

Dispositions législatives pertinentes

Articles 265 et 266 du Code criminel – Voies de fait

265 (1) Commet des voies de fait, ou se livre à une attaque ou une agression, quiconque, selon le cas :

  1. d’une manière intentionnelle, emploie la force, directement ou indirectement, contre une autre personne sans son consentement
  2. tente ou menace, par un acte ou un geste, d’employer la force contre une autre personne, s’il est en mesure actuelle, ou s’il porte cette personne à croire, pour des motifs raisonnables, qu’il est alors en mesure actuelle d’accomplir son dessein
  3. en portant ostensiblement une arme ou une imitation, aborde ou importune une autre personne ou mendie

266 Quiconque commet des voies de fait est coupable

  1. soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans
  2. soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire

Article 270 du Code criminel – Voies de fait contre un agent de la paix

270 (1) Commet une infraction quiconque exerce des voies de fait :

  1. soit contre un fonctionnaire public ou un agent de la paix agissant dans l’exercice de leurs fonctions, ou une personne qui leur prête main-forte
  2. soit contre une personne dans l’intention de résister à une arrestation ou détention légale, la sienne ou celle d’un autre, ou de les empêcher
  3. soit contre une personne, selon le cas :
    1. agissant dans l’exécution légale d’un acte judiciaire contre des terres ou des effets, ou d’une saisie
    2. avec l’intention de reprendre une chose saisie ou prise en vertu d’un acte judiciaire

(2) Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) est coupable :

  1. soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans
  2. soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire

Paragraphe 25(1) du Code criminel - Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Tôt le matin le 23 décembre 2016, le plaignant a subi une blessure à la tête lors d’une altercation avec des agents de police du SPT. Pour les raisons qui suivent, je suis convaincu qu’il n’existe aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre des agents impliqués, soit l’AI no 1, l’AI no 2 ou l’AI no 3, a commis une infraction criminelle durant ses interactions avec le plaignant.

Il n’est pas contesté que le plaignant était en état d’ébriété au moment de l’intervention de la police ou qu’il avait saisi ou poussé la TC no 1, ce qui était à l’origine de l’appel fait à la police. Les séquences de la TVCF montraient que le plaignant avait frappé la paroi de l’ascenseur en utilisant son poing droit. Il semblait ensuite crier contre la TC no 1, la pousser en arrière vers la paroi de l’ascenseur et l’empoigner, la tirer vers l’avant contre la paroi de l’ascenseur, avant de la pousser par la porte. Le plaignant saignait de l’un de ses doigts de la main droite. Après que le plaignant et la TC no 1 étaient sortis de l’ascenseur, des témoins ont vu du sang sur les murs et sur le tapis dans le couloir et sur la porte de la suite.

À 1 h 10, le TC no 5 a appelé la police. Il a signalé qu’un couple qui habitait dans l’immeuble se disputait et qu’il y avait du sang sur le mur provenant d’un doigt blessé. Environ cinq minutes plus tard, les AI nos 1, 2 et 3 et l’AT no 1 sont arrivés et se sont approchés du plaignant dans le corridor au deuxième étage. L’AI no 3 l’a reconnu comme étant le même homme que lui et l’AT no 1 avaient croisé dans une rue du voisinage deux heures avant cela. Le plaignant poussait des cris et avait tenté de commencer une bagarre avec un autre homme. Les agents lui avaient dit de poursuivre son chemin, ce qui avait mis fin à leur rencontre.

Les agents se sont approchés du plaignant qui faisait beaucoup de bruit et était belliqueux et qui leur a dit [traduction] « allez chier » en précisant qu’ils n’avaient rien à faire là. L’AI no 3 a demandé au plaignant ce qui se passait et pourquoi il saignait. Le plaignant a dit que plus tôt, un inconnu l’avait [traduction] « tailladé » sur la rue King. Le plaignant a dit qu’il habitait dans la suite voisine et que la TC no 1 dormait à l’intérieur. D’après les agents, le plaignant sentait l’alcool, avait de la difficulté à articuler, avait les yeux brillants et titubait. Le TC no 2 a dit à l’AT no 1 qu’il avait vu le plaignant pousser la TC no 1 dans le hall d’entrée et l’agresser ensuite dans l’ascenseur. L’AT no 1 a fourni cette information à l’AI no 3.

L’AI no 1 a frappé à la porte de la suite, et la TC no 1 a répondu. Elle pleurait, mais ne semblait pas avoir des blessures visibles. Il s’est identifié et elle l’a invité à entrer. L’AI no 3 s’est joint à eux. La TC no 1 a déclaré qu’elle n’était pas blessée. Elle a expliqué qu’ils avaient bu dans un club de danseuses et avaient commencé à se disputer lorsqu’ils étaient arrivés chez eux. La TC no 1 semblait ivre, elle aussi, car elle avait de la difficulté à se tenir debout, avait les yeux brillants et avait de la difficulté à articuler. La TC no 1 n’a pas dit aux agents qu’elle avait été agressé par le plaignant. Les agents ont entendu le plaignant élever la voix dans le couloir et devenir plus agité et se quereller avec l’AI no 2. L’AI no 3 est retourné dans le couloir pour voir ce qui se passait. Les TC nos 3 et 4 sont arrivés au deuxième étage et se tenaient près de l’ascenseur, à l’écart du plaignant et des agents.

Le plaignant se trouvait proche de l’AI no 2 et criait contre lui. Il frottait son sang sur les murs et saisissant la veste de l’AI no 2. Pour prévenir une agression apparemment imminente, l’AI no 2 a tenté de le menotter avec l’aide de l’AI no 3. L’AI no 3 a saisi le bras gauche du plaignant, alors que l’AI no 2 tenait son bras droit. Alerté par le bruit de l’interaction, l’AI no 1 est entré dans le couloir et a pris le contrôle du bras gauche du plaignant, de sorte que l’AI no 3 puisse aider l’AI no 2 à contrôler son bras droit. Le plaignant a été placé le visage en premier contre le mur. L’AI no 3 a tenté de maintenir le visage et la poitrine du plaignant contre le mur, mais le plaignant a essayé de se retourner pour faire face aux agents de police. Il a bougé ses bras pour éviter d’être menotté et il a donné des coups de pied en arrière avec ses deux pieds afin de forcer les agents à reculer. Le plaignant n’a pas obéi aux ordres de la police et a refusé de présenter ses mains. Le plaignant était un homme imposant, dont le poids était nettement supérieur à 200 livres (90,72 kilogrammes) et dont la taille dépassait largement six pieds (1,83 mètre). L’AI no 3 a fini par réussir à menotter les bras du plaignant derrière le dos. Néanmoins, le plaignant a continué à essayer de se déplacer et a continué à donner des coups de pied dans la direction des agents, à qui il a dit qu’ils n’avaient aucune raison de l’arrêter et qu’il a menacé de poursuivre en justice.

Parce qu’il résistait et en raison de la différence physique entre le plaignant et les agents de police, l’AI no 3 a utilisé son avant‐bras gauche pour contrôler la tête du plaignant en l’appuyant contre le mur. L’AI no 3 a marché sur les pieds du plaignant pour l’empêcher de donner des coups de pied. Selon les agents, aucun d’eux n’a jamais donné des coups au plaignant. Aucun des témoins civils n’a vu les agents de police donner des coups au plaignant. Le plaignant donnait des coups de pied et se déplaçait d’un côté à l’autre même lorsqu’il était menotté. Tout à coup, le plaignant a perdu l’équilibre et est tombé sur le plancher, heurtant sa tête par terre. On a entendu un bruit fort, et le plaignant a perdu connaissance. Il est resté sans connaissance pendant une trentaine de secondes. On l’a placé sur une civière et on lui a mis un collier cervical. L’AI no 3 a dit au plaignant qu’il était en état d’arrestation. Il a été transporté à l’hôpital où selon le diagnostic, il avait une légère blessure à la tête. Puis, le plaignant a été transporté à la division du SPT. Il a été accusé de voies de fait et de voies de fait dans l’intention de résister à son arrestation.

Le plaignant a fourni une version différente des événements. Il a affirmé qu’il avait été arrêté illégalement et que les agents impliqués l’avaient mis au sol et lui avaient donné plusieurs coups de poing à la tête durant l’arrestation. Il n’a pas nié qu’il était intoxiqué. Le souvenir qu’a le plaignant de l’incident est problématique, car ses affirmations sont directement contredites par d’autres témoins qui étaient présents, dont les agents impliqués et les témoins civils, dont aucun n’a vu les méthodes de recours à la force décrites par le plaignant. De plus, je suis préoccupé par la variété des explications que le plaignant a fournies pour expliquer comment son doigt avait été blessé. L’AI no 3 et l’AT no 1 se sont souvenus qu’il avait dit qu’un inconnu sur la rue King avait [traduction] « tailladé » sa main, ce qui diffère de ce que le plaignant a dit au TC no 5. Dans sa déclaration à l’UES, le plaignant a offert une autre explication. Je doute également de l’exactitude de ses souvenirs, puisqu’il était intoxiqué de son propre aveu. Ainsi, j’ai d’importantes réserves à propos de la crédibilité et de la fiabilité de sa déclaration.

Je suis convaincu, pour les motifs qui suivent, que les agents impliqués avaient le pouvoir légal d’arrêter le plaignant pour avoir agressé la TC no 1. Bien que la TC no 1 l’ait nié, il y avait suffisamment d’éléments de preuve provenant d’autres sources pour que les agents aient des motifs raisonnables de croire qu’elle avait été agressée par le plaignant. En vertu de la politique du SPT sur la violence conjugale, les agents de police n’ont pas de choix autre que de porter des accusations lorsqu’ils ont des motifs raisonnables de le faire et la décision de porter des accusations ne peut être influencée par des facteurs comme le déni d’une victime malgré la preuve du contraire[3]. Les agents répondaient à un appel au numéro 9‐1‐1 signalant une agression conjugale et lorsqu’ils sont arrivés, ils ont constaté qu’une des mains du plaignait saignait. Le plaignant a tenté d’essuyer du sang sur les agents présents et refusait de répondre à leurs questions sur ce qui c’était passé avec la TC no 1. Les TC nos 2 et 5 ont déclaré aux agents qu’ils avaient vu le plaignant agresser la TC no 1 dans le hall d’entrée et dans l’ascenseur. De plus, l’AI no 2 a déclaré que le plaignant avait un comportement agressif lorsqu’ils attendaient dans le couloir et qu’il a saisi à plusieurs reprises le devant de sa veste de protection.

Je me penche maintenant sur la question de savoir si la force utilisée au moment de l’arrestation était raisonnable. À mon avis, il n’y a aucun fondement probatoire pour conclure que les AI nos 1, 2 ou 3 ont eu recours à une force excessive. Le degré de force utilisée pour maîtriser et arrêter le plaignant était minime selon les déclarations des agents en cause et a consisté uniquement à maîtriser physiquement les membres du plaignant ou à le menotter. Je n’ai trouvé aucune raison dans cette affaire de ne pas croire leurs comptes rendus. Au contraire, comme les TC nos 3 et 4 l’ont affirmé, le plaignant résistait aux agents de police lorsqu’ils ont essayé de le menotter et lorsqu’il est tombé subséquemment. En réalité, en raison du risque élevé qui caractérise les interventions dans des conflits familiaux, du manque de coopération du plaignant et du danger biologique inconnu que présentait son sang, je conclus que les agents en cause ont fait preuve de retenue dans leur recours à la force.

Bien qu’il semble que la blessure à la tête du plaignant ait été le plus probablement causée lorsqu’il est tombé et que sa tête a heurté le sol après avoir été menotté, je suis convaincu que le plaignant est tombé tout seul et que les agents impliqués ne l’ont aucunement forcé au sol ni ne lui ont donné des coups à la tête. Il n’y a aucune preuve permettant de conclure que le plaignant a été mis au sol et a reçu plusieurs coups de poing à la tête de la part des agents impliqués, sauf dans le témoignage du plaignant, dont le souvenir des événements est peu fiable à mon avis, pour les raisons que j’ai exposées. Je conclus qu’en vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents impliqués n’ont pas eu recours à plus de force qui était raisonnablement nécessaire dans l’exercice de leurs fonctions légitimes pour appréhender un homme de taille imposante qui était ivre et belligérant et qui refusait de coopérer.

Par conséquent, je suis convaincu que dans cette affaire, les actions des agents impliquées, soit l’AI no 1, l’AI no 2 et l’AI no 3, tombaient dans les limites prescrites par le droit criminel et je conclus donc qu’il n’y a aucun motif de croire qu’une infraction criminelle a été commise. Par conséquent, aucune accusation ne sera portée.

Date : 2 novembre 2017

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) [1] La TC no 1 a refusé de participer à l’enquête. [Retour au texte]
  • 2) [2] Une commotion cérébrale présumée qui serait reliée à la perte de connaissance du plaignant. [Retour au texte]
  • 3) [3] Politique du SPT – Violence conjugale, page 4. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.