Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-151

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Ce rapport décrit l’enquête de l’UES sur la blessure grave subie par une femme de 54 ans lors de son arrestation le 18 mai 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Vers 12 h 10 le 23 juin 2017, le Service de police d’Ottawa (SPO) a informé l’UES de la blessure subie par la plaignante pendant qu’elle était sous garde.

Le SPO a expliqué que le 22 juin 2017, à 16 h, la plaignante avait appelé pour signaler que le 18 mai 2017, à 16 h, elle avait été arrêtée en vertu de la Loi sur la santé mentale (LSM), près du boulevard Orléans et de la promenade Fortune dans la banlieue d’Orléans dans la ville d’Ottawa.

La plaignante a indiqué que son poignet avait été fracturé durant l’appréhension et qu’elle souhaitait informer le SPO de la blessure.

Le SPO a confirmé que le 18 mai 2017, à 16 h, le Service des communications du SPO avait reçu un appel concernant une femme en détresse.

L’AT no 2 avait trouvé la plaignante, qui lui avait dit qu’elle voulait sauter dans la circulation à partir d’un pont au‑dessus de la chaussée. Une odeur d’une substance intoxicante émanait de la plaignante, qui était assise sur le trottoir.

Puis, l’AT no 2 avait procédé à l’appréhension de la plaignante en vertu de la LSM et cette personne avait accepté d’aller à l’hôpital. En cours de route vers l’hôpital, dans la voiture de patrouille, la plaignante avait dit que son poignet était endolori, une ambulance avait été appelée, et les ambulanciers paramédicaux l’avaient transportée à l’hôpital.

On avait examiné la plaignante, mais on n’avait trouvé aucune fracture.

La plaignante a expliqué qu’elle avait reçu un appel par la suite du département de radiologie, qui l’avait informée qu’il y avait une erreur dans le diagnostic initial et qu’elle avait en réalité une fracture au poignet droit.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 0

Plaignante :

Femme de 54 ans interviewée, dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

AT no 2 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

AT no 3 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

Agents impliqués (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Description de l’incident

Le 18 mai 2017, à 16 h, l’AT no 2, l’AT no 1, l’AI et l’AT no 3, ont répondu à un appel concernant une femme en détresse qui menaçait de sauter du pont près du boulevard Orléans et de la promenade Fortune dans la banlieue d’Orléans dans la ville d’Ottawa.

La plaignante a été appréhendée en vertu de la LSM et a accepté d’aller à l’hôpital avec l’AT no 2. En chemin vers l’hôpital, l’AT no 2 a remarqué que la plaignante avait perdu connaissance et était en détresse médicale.

L’AT no 2 a immédiatement arrêté son véhicule de police et a demandé aux Services médicaux d’urgence d’intervenir. La plaignante a été sortie prudemment de l’arrière du véhicule de police et placée au sol par les agents de police présents.

Pendant qu’elle était au sol, la plaignante a repris conscience et est immédiatement devenue agressive et combative avec les agents, et a donné un coup de pied à la hanche de l’AT no 3 et a lancé un coup de poing qui a effleuré le menton de l’AI.

La plaignante a été maîtrisée immédiatement et a été mise au sol prudemment et doucement, auquel moment les ambulanciers paramédicaux lui ont injecté un sédatif pour la calmer. Les ambulanciers paramédicaux ont transporté la plaignante à l’hôpital, où elle a subi un examen et où une radiographie a été prise, du fait que la plaignante se plaignait d’un poignet endolori.

Aucune fracture n’a été détectée, et la plaignante a été libérée.

Le lendemain, le département de radiologie a communiqué avec la plaignante et l’a informé qu’elle avait en fait une fracture au poignet droit.

La plaignante a signalé la blessure au SPO le 22 juin 2017.

Nature des blessures/Traitement

On a examiné la radiographie de la plaignante en rapport avec l’incident du 18 mai 2017 et on l’a comparée à des images à son dossier remontant à 2015. La plaignante avait reçu un diagnostic auparavant qu’elle souffrait d’ostéo-arthrite et avait de l’arthrose au poignet droit.

Il a été confirmé que la plaignante avait effectivement une fracture non déplacée au processus styloïde du cubitus droit. La gravité de la fracture a été décrite comme analogue à une grave entorse, et aucune chirurgie ni aucun traitement additionnel n’étaient recommandés. Au moment de son traitement initial, on avait fourni à la plaignante un atèle afin d’immobiliser son poignet pendant quelques jours.

Selon l’opinion d’un expert, il n’était pas nécessaire que le mécanisme à l’origine de cette blessure soit significatif et la blessure aurait pu être causée simplement en serrant le poignet de la plaignante, par un contact entre le poignet et du métal, comme celui des menottes ou des tubes du chariot‑brancard, ou durant une chute.

Preuve

Les lieux de l’incident

On n’a pas examiné des lieux dans le contexte de cet incident, puisque pas mal de temps s’était écoulé depuis qu’il était survenu.

Éléments de preuve médico-légaux

Aucun document ni élément n’a été soumis au Centre des sciences judiciaires.

Preuve vidéo/audio/photographique

On n’a trouvé aucune preuve de ce genre à cause du temps qui s’était écoulé.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a demandé au SPT les éléments et documents suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • résumé détaillé des appels
  • rapport d’incident général
  • notes des AT nos 1 à 3

Documents obtenus d’autres sources :

  • Dossiers médicaux de la plaignante et rapport de l’appel au Service d’ambulances

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel – Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Article 17 de la Loi sur la santé mentale – Intervention de l’agent de police

17 Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :

  1. soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire
  2. soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles
  3. soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même

et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :

  1. elle s’infligera des lésions corporelles graves
  2. elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne
  3. elle subira un affaiblissement physique grave

et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.

Analyse et décision du directeur

Le 18 mai 2017, vers 16 h, le Service de police d’Ottawa (SPO) a reçu un appel lui signalant qu’une femme se trouvait sur un pont près du boulevard Orléans et du chemin Fortune dans la ville d’Ottawa et menaçait de sauter. L’AT no 2, l’AT no 1, l’AI et l’AT no 3 se sont rendus sur les lieux et ont fini par appréhender la plaignante en vertu de la Loi sur la santé mentale et la plaignante a été transportée à l’hôpital. Une fois à l’hôpital, la plaignante n’y a pas été internée contre sa volonté et a refusé d’y rester de plein gré et a été libérée après qu’on avait pris une radiographie de son poignet, qui n’a révélé aucune fracture. Toutefois, deux jours plus tard, la plaignante a reçu un appel du département de radiologie l’informant que son poignet droit avait effectivement été fracturé.

Le 22 juin 2017, la plaignante a communiqué avec le SPO et l’a informé qu’elle avait été blessée durant son appréhension le 18 mai 2017, et l’UES a été avisée.

Il est allégué que, pendant son transport à l’hôpital, après qu’elle avait été appréhendée par le SPO en vertu de la LSM du fait qu’elle avait tenté de s’ôter la vie, la plaignante avait perdu connaissance à cause de sa forte consommation d’alcool. Il est allégué qu’après que la voiture de patrouille s’était arrêtée, elle avait été tirée hors du véhicule par ses poignets et placée sur le sol. Elle aurait étendu les deux bras pour amortir sa chute sur l’asphalte. Pendant qu’on la menottait, elle avait immédiatement ressenti de la douleur dans son poignet. Il est allégué que le poignet de la plaignante avait été fracturé de l’une de trois façons : soit quand les agents de police l’avaient tirée hors du VUS par ses poignets, soit lorsqu’on lui avait passé les menottes sur la chaussée, soit lorsqu’elle avait étendu les bras pour amortir sa chute.

En me fondant sur la preuve fournie par la plaignante elle‑même, je conclus que sa version des événements ne comporte pas les éléments nécessaires qui me fourniraient des motifs raisonnables de croire que les agents de police ont eu recours à une force excessive dans cette affaire, puisque la plaignante a expliqué l’origine de sa blessure comme s’étant produite de l’une de trois façons, c’est‑à‑dire soit quand elle avait été tirée hors du VUS par les poignets, soit lorsqu’on lui avait passé les menottes, soit lorsqu’elle avait étendu les bras pour amortir sa chute. Sur la seule foi de son témoignage, je ne qualifierais aucune de ces actions comme un recours excessif à la force.

Qui plus est, il ressort clairement de la preuve médicale que la plaignante avait déjà reçu un diagnostic antérieur qu’elle souffrait d’ostéo-arthrite et qu’elle avait de l’arthrose dans son poignet droit; l’expert médical qui a examiné la radiographie de la plaignante a émis l’opinion que même si la plaignante avait subi une fracture non déplacée au processus styloïde du cubitus, il comparerait la gravité de la fracture à celle d’une grave entorse et a indiqué que la quantité de force nécessaire pour causer la blessure ne devait pas être significative, mais aurait pu être causée par un serrage du poignet, par une chute, ou par un contact entre le poignet et du métal, comme celui des menottes ou des tubes du brancard.

Les enquêteurs se sont entretenus avec quatre témoins civils, dont la plaignante elle‑même; ils ont également eu un entretien avec les quatre agents de police qui avaient eu affaire à la plaignante, y compris avec l’agente impliquée.

La plaignante, dans sa déclaration, a confirmé la preuve selon laquelle les quatre agents de police n’avaient pas dû recourir à une quelconque force pour l’amener à quitter le pont et à prendre place dans le véhicule de police de l’AT no 2, puisque la plaignante y était entrée de plein gré et sans aide aucune.

En ce qui concerne les allégations que la plaignante avait été retirée de la voiture de patrouille par ses poignets et placée au sol, alors qu’aucun des ambulanciers paramédicaux n’était présent à ce moment‑là, je note que les quatre agents de police ont indiqué que lorsque la plaignante avait été retirée du véhicule, elle était inconsciente, et chaque agent, à tour de rôle, a précisé qu’elle avait été sortie doucement du véhicule, les pieds d’abord, et non pas par les poignets, et puis posée sur l’herbe à proximité, où elle avait été placée dans une position de récupération et surveillée jusqu’à l’arrivée des ambulanciers paramédicaux. Chaque agent, dans sa déclaration, décrivait les faits de la même façon, en ce sens que la plaignante n’avait pas été forcée au sol à ce moment‑là, mais plutôt qu’elle avait été transportée du véhicule, dans son état inconscient, et placée sur l’herbe, et non pas sur la chaussée, contrairement à l’allégation de la plaignante. Cette preuve est confirmée par les deux ambulanciers paramédicaux qui ont répondu à l’appel pour venir en aide à la plaignante et qui, à leur arrivée, l’ont trouvée couchée sur l’herbe, avec les agents de police se tenant debout près d’elle.

Les deux ambulanciers paramédicaux ont également confirmé la preuve fournie par les agents de police présents que la plaignante était couchée par terre sans connaissance à leur arrivée; par conséquent, je ne puis accepter la version des événements fournie par la plaignante selon laquelle elle avait été tirée de la voiture de patrouille par les poignets ou avait été mise au sol avec force sur la chaussée ou qu’elle avait étendu les bras afin d’éviter qu’elle tombe sur le ventre sur la chaussée, puisqu’elle était clairement inconsciente du moment où la voiture de patrouille s’était rangée sur le côté jusqu’à l’arrivée des ambulanciers paramédicaux et qu’en raison de cela, elle n’aurait pas pu savoir comment elle avait été sortie de la voiture de patrouille ou comment elle s’était retrouvée sur l’herbe.

La preuve fournie par les quatre agents de police selon laquelle, une fois couchée sur l’herbe (et traitée par les ambulanciers paramédicaux), la plaignante avait saisi la cheville de la TC no 2 et s’était remise debout soudainement et avait commencé à jurer et à lancer des coups de poing et des coups de pied vers les agents de police et les ambulanciers paramédicaux, est aussi corroborée entièrement par la TC no 2, qui a précisé que la plaignante saisissait sa cheville avec vigueur, après quoi la plaignante s’était remise debout rapidement et était devenue très agressive, combative et fâchée, et avait lancé des coups avec ses deux poings vers la TC no 2. Puis, les deux agents de police et l’AT no 2 étaient intervenus pour contrôler et maîtriser la plaignante, qui avait énormément de mal à garder son équilibre, qui avait des sautes d’humeur constantes et qui de temps à autre, avait de la difficulté à articuler. Tous les agents de police ont été décrits comme étant très professionnels et comme parlant calmement à la plaignante, lorsqu’elle avait commencé à lancer ses poings vers eux et à se ruer sur eux. Une témoin civile a indiqué qu’elle pensait que deux des coups lancés par la plaignante avaient atteint les agents au visage. Cette preuve corrobore la déclaration des agents de police que la plaignante avait donné un coup de pied à l’AT no 3 au haut de sa hanche et puis avait lancé un coup de poing vers l’AI, effleurant son menton.

La témoin civile a également confirmé la preuve fournie par les quatre agents de police que, durant leur tentative de contrôler et de maîtriser la plaignante après qu’elle avait commencé à s’attaquer à tous les membres du personnel d’urgence présents, les agents de police et un ambulancier paramédical avaient saisi ensemble la plaignante et l’avait doucement mis sur l’herbe sur le ventre et qu’elle avait continué de donner des coups de pied et de résister activement à cet endroit. Puis, un ambulancier paramédical avait donné un sédatif à la plaignante et l’AT no 2 a indiqué qu’à ce moment‑là, elle avait passé les menottes à la plaignante, derrière son dos. Une fois que la plaignante avait été placée sur la civière, on l’avait menottée aux tubes en métal du brancard, comme le veut la procédure habituelle de la police, et elle avait été placée dans l’ambulance, où elle avait de nouveau perdu connaissance pendant le trajet à l’hôpital. Une fois à l’hôpital, la plaignante était redevenue consciente et était devenue combative, s’attaquant aux médecins et aux membres du personnel infirmier qui s’occupaient d’elle, et des employés de l’hôpital avaient dû la maîtriser physiquement.

Tandis que le TC no 3 n’était pas constamment en la présence de la plaignante, la TC no 2 l’était durant l’entière interaction entre la plaignante et la police après que cette première avait repris connaissance et la TC no 2 a entièrement confirmé les déclarations des quatre agents de police selon lesquelles ils avaient utilisé très peu de force contre la plaignante et avaient réussi à la mettre au sol prudemment, tout en supportant sa tête, afin d’éviter qu’elle se blesse. De plus, la TC no 2 a confirmé que la plaignante n’était pas menottée lorsque les ambulanciers paramédicaux étaient arrivés sur les lieux initialement et qu’elle avait seulement été menottée après qu’on l’avait placée sur l’herbe la seconde fois et qu’elle s’était attaquée à des membres du personnel d’urgence. Dans sa déclaration, en parlant du traitement par les agents de police de la plaignante, la TC no 2 a utilisé des mots comme [traduction] « doucement » et « prudemment ». La TC no 2 a précisé tout particulièrement qu’elle n’avait jamais vu l’un ou l’autre des agents de police recourir à une quelconque force qui aurait consisté à tordre ou à saisir fermement les mains ou les bras de la plaignante, tandis que le TC no 3 a confirmé, de son côté, qu’à aucun moment aucun des agents n’avait utilisé aucune option de recours à la force auxquels ils avaient accès, et aucun agent n’avait usé de force physique contre la plaignante.

Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, je ne puis accepter la version des événements présentée par la plaignante, du fait qu’elle était sans connaissance aussi bien au moment où elle avait été sortie du VUS qu’au moment où elle avait été placée au sol initialement et du fait qu’elle était très intoxiquée, qu’elle était dans un état d’esprit altéré et que les ambulanciers paramédicaux lui avaient administré un sédatif, mais ce qui est très important, du fait que sa version des événements est entièrement contredite par deux témoins civils, qui appuient entièrement les déclarations des quatre agents de police présents.

À la lumière de l’opinion médicale selon laquelle la fracture de la plaignante, que l’expert a décrite comme l’équivalent d’une entorse grave, combinée à son état médical, aurait pu survenir en l’absence d’une quelconque force significative, et aurait pu être causée par une force aussi légère que le fait de serrer son poignet ou un contact avec du métal ou encore durant une chute, je conclus que sa blessure est fort probablement survenue lorsqu’elle se débattait alors qu’elle était menottée, lorsqu’elle était attachée au brancard ou lorsqu’elle était combative envers le personnel médical, qui a dû la contrôler et la maîtriser à l’hôpital.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police peuvent seulement recourir à la force qui est raisonnablement nécessaire dans l’exécution d’une obligation légale. En ce qui concerne d’abord la légalité de l’appréhension de la plaignante, il est clair, compte tenu de l’ensemble de la preuve, que les agents de police avaient des motifs raisonnables et probables d’appréhender la plaignante en vertu de l’article 17 de la Loi sur la santé mentale puisqu’elle agissait comme une personne qui menaçait de se faire du tort physiquement. Par conséquent, l’appréhension de la plaignante était légalement justifiée dans les circonstances.

Pour ce qui est de la force utilisée par les agents de police dans leurs efforts d’appréhender la plaignante et de la transporter à l’hôpital, je conclus qu’ils n’ont pas utilisé plus que la force minimale requise pour la maîtriser, quand elle avait un comportement violent à l’égard de tous les membres du personnel d’urgence et pour lui passer les menottes. J’accepte entièrement la preuve soumise par la TC no 2, qui était constamment présente aux côtés de la plaignante, après que celle-ci avait repris connaissance et durant son interaction subséquente avec la police, pour ce qui est de sa description du comportement des agents, qui étaient doux et prudents et ont utilisé très peu de force, qui ont fait leur possible en tout temps pour réduire au minimum tout tort que pouvaient causer à la plaignante ses propres gestes et que leur comportement était toujours très professionnel et calme.

Tandis que j’accepte qu’il soit possible que la plaignante se soit blessée au poignet lorsqu’on lui a passé les menottes et qu’elle continuait de se débattre et de résister ou lorsqu’elle a été menottée au brancard, je conclus qu’il est tout aussi probable qu’elle s’est blessée lorsqu’elle avait repris connaissance à l’hôpital et qu’elle avait attaqué le personnel médical, qui avait alors dû la maîtriser physiquement. Cependant, si la blessure de la plaignante a toutefois été causée par les agents de police lorsqu’ils tentaient de la maîtriser et de la mettre dans l’ambulance, je ne puis conclure qu’il s’agissait là d’une force excessive. Pour en arriver à cette conclusion, je suis conscient de la loi telle qu’exposée dans R. c. Baxter (1975), 27 C.C.C. (2d) 96 (C. A. de l’Ont.), selon lequel on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention, et on ne devrait pas leur appliquer la norme de la perfection (R. c. Nasogaluak [2010] 1 RCS 206).

Compte tenu de tous les éléments de preuve crédibles, je conclus que les agents de police étaient extrêmement patients et attentifs à la situation de la plaignante et qu’ils ont seulement utilisé une force absolument minimale pour la maîtriser. Alors que les agents de police n’étaient pas en possession de l’information concernant l’état de santé de la plaignante et ne savaient pas qu’un geste aussi léger que de saisir son poignet pouvait causer une fracture à l’os, même s’ils avaient disposé de cette information, je ne puis conclure qu’ils auraient pu traiter la plaignante avec plus de douceur qu’ils ne l’ont fait, tout en évitant qu’elle se fasse du tort.

En dernière analyse, je suis convaincu, pour les motifs qui précèdent, que l’appréhension de la plaignante et la manière dont cela s’est fait étaient légales malgré la blessure qu’elle a peut-être subie, et ce, même si j’en venais à conclure que les agents ont causé cette blessure, ce qui au mieux serait de se lancer en conjectures. Je suis donc convaincu, pour des motifs raisonnables dans cette affaire que les gestes posés par les agents de police tombaient nettement dans les limites prescrites par le droit criminel, qu’ils n’ont pas utilisé plus que la force absolument minimale pour protéger la plaignante contre du tort et que leurs actes, qui témoignaient de patience, de compassion et de prise en compte de l’état de crise que traversait la plaignante, étaient non seulement acceptables, mais louables dans les circonstances. Compte tenu de ces faits, il n’y a pas l’ombre d’une preuve sur laquelle je puis me fonder pour avoir des motifs raisonnables de penser que ces agents de police ont commis un acte criminel, et il n’y a donc pas lieu de porter des accusations en l’espèce.

Date : 23 mars 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.