Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-060

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport décrit l’enquête de l’UES sur la blessure grave qu’un homme âgé de 31 ans aurait subie lors de son arrestation, survenue le 29 mars 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 30 mars 2017, vers 10 h 10, le Service de police de Hamilton (SPH) a signalé que le 29 mars 2017, vers 23 h 55, des agents de police ont répondu à une demande d’intervention dans une pharmacie de la Ville de Hamilton, afin d’aider des ambulanciers paramédicaux de Hamilton à prêter assistance à un homme qui avait une coupure au cou. Lorsque les ambulanciers sont arrivés, ils ont trouvé le plaignant qui agissait bizarrement.

Le 30 mars 2017, à 00 h 06, les policiers sont arrivés sur les lieux. Le plaignant a produit un grand couteau de boucher et a marché en direction des policiers. Une arme à impulsions a été utilisée à de multiples reprises, mais cela n’a pas eu d’efficacité.

Le plaignant a utilisé le couteau pour s’infliger des coupures à la gorge plusieurs fois et a commencé à saigner abondamment. Une arme à impulsions a de nouveau été déployée et le plaignant a été appréhendé. Il a été emmené à l’hôpital et a été traité pour ses coupures à la gorge. Il a été déterminé que les coupures à la gorge du plaignant ne mettaient pas sa vie en danger. À 3 h 23, une radiographie a permis de constater que la cheville du plaignant était brisée.

À 9 h, le SPH a examiné l’information et en a avisé l’UES.

Les armes à impulsions utilisées ont été sécurisées et le SPH avait déjà traité la scène de l’incident.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 1

L’enquêteur judiciaire de l’UES s’est rendu sur les lieux de l’incident et a repéré et préservé les éléments de preuve. Il a documenté les lieux pertinents de l’incident au moyen de notes, de photographies et de mesures.

Plaignant

Homme âgé de 31 ans; a tenté de participer à une entrevue, mais n’avait aucun souvenir de l’incident; dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

TC no 4 A participé à une entrevue

TC no 5 A participé à une entrevue

TC no 6 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 2 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 3 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 4 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 5 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 6 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 7 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 8 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

AT no 9 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

Agent impliqué (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue et ses notes et sa déclaration ont été reçues et examinées

Description de l’incident

Le mercredi 29 mars 2017, juste avant minuit, le personnel d’une pharmacie à Hamilton était en train de fermer le magasin pour la journée.

Le plaignant s’est présenté aux portes principales du magasin alors qu’une employée était en train de verrouiller les portes. Le plaignant avait au cou une lacération visible qui saignait. Il a demandé un peu d’alcool à friction. L’employée a alerté le gérant du magasin et un agent de sécurité qui étaient à l’intérieur du magasin, et elle a composé le 9‐1‐1 pour appeler une ambulance.

Le service d’ambulance de Hamilton a répondu à l’appel. Le SPH a aussi été envoyé sur place pour aider.

L’ambulance est arrivée avant la police. Le plaignant a commencé à s’éloigner des ambulanciers. L’AT no 5 et l’AT no 7 sont arrivés sur les lieux.

Le plaignant a tenté de prendre place à l’intérieur de l’ambulance. Il semblait avoir quelque chose dans la main droite. De nouveau, il a commencé à s’éloigner. L’AT no 5 a appelé le plaignant.

Le plaignant s’est arrêté. Il tenait un grand couteau de la main droite et s’est dirigé vers les policiers. Les policiers ont ordonné au plaignant de laisser tomber le couteau. L’AT no 5 a déployé son arme à impulsions, mais cela n’a pas affecté le plaignant. L’AT no 5 a rechargé son arme à impulsions et l’a de nouveau déployée. Le plaignant a retiré les dards. L’AT no 7 a alors déployé son arme à impulsions. Bien qu’il fut touché, le plaignant n’a été affecté par aucune des décharges d’arme à impulsions.

L’AT no 5 et l’AT no 7 se sont alors repliés derrière leurs véhicules de police et le plaignant s’est retourné et a marché vers le milieu du terrain de stationnement. L’AT no 5 a informé le répartiteur de la situation et a demandé de l’assistance.

Le plaignant s’est agenouillé au milieu du terrain de stationnement. L’AT no 5 et l’AT no 7 ont attendu que d’autres agents arrivent.

L’AT no 3, l’AT no 8 et l’AT no 4 sont arrivés sur les lieux, ont garé leurs véhicules de police et se sont approchés du plaignant à pied. Le plaignant s’est redressé et s’est plusieurs fois lacéré le cou d’un bord à l’autre avec le couteau.

Alors qu’ils s’approchaient du plaignant, les policiers lui ont ordonné de laisser tomber le couteau. Le plaignant a essuyé le couteau sur son pantalon et l’a posé à côté de lui, mais sans le lâcher.

Alors que le couteau était toujours posé à côté de lui, le plaignant a commencé à se diriger vers l’AT no 4, qui avait dégainé son arme à feu et la braquait sur le plaignant. L’AT no 3 a déchargé son arme à impulsions sur le plaignant, mais là encore le plaignant n’a pas été affecté. Les policiers ont plusieurs fois ordonné au plaignant de laisser tomber le couteau.

L’AI est arrivé sur les lieux. Il s’est approché à pied des autres agents et du plaignant. Le plaignant a fait une pause, puis a recommencé à se diriger vers l’AT no 4. L’AI a déployé son arme à impulsions et le plaignant est tombé sur le sol.

Les policiers se sont avancés sur le plaignant, mais ils n’ont pas été capables de tirer les mains du plaignant de dessous son corps. L’AT no 6, qui venait d’arriver sur les lieux, a appliqué directement son arme à impulsions sur le plaignant en lui administrant un coup en mode paralysant[1].

Les policiers ont pu libérer les deux mains du plaignant de dessous son corps puis le menotter mains dans le dos. Le plaignant a immédiatement été remis aux ambulanciers, qui l’ont transporté à l’hôpital pour une lacération profonde au cou.

Le plaignant a été emmené d’urgence au bloc opératoire et a subi une opération d’urgence. Les médecins ont déclaré que la blessure du plaignant n’était pas de nature grave. L’UES n’avait pas été avisée de cela à ce moment‐là.

Alors qu’il se remettait de la chirurgie à l’unité des soins intensifs (USI) le lendemain matin, le plaignant a reçu un diagnostic de fracture au pied droit.

L’enquête a révélé que le pied fracturé était une blessure préexistante pour laquelle le plaignant avait justement un rendez‐vous ce matin‐là pour se faire traiter à l’hôpital.

Le plaignant a été admis à l’hôpital pour une évaluation psychiatrique.

Preuve

Les lieux de l’incident

La scène de l’incident a été initialement traitée par une agente des scènes de crime du SPH, l’AT no 6, aux petites heures du matin, le 30 mars 2017. L’AT no 6 a pris plusieurs photos. La scène a ensuite été libérée.

Après notification de l’UES plus tard ce matin‐là, un enquêteur judiciaire (EJ) de l’UES s’est rendu sur les lieux. À ce moment‐là, il pleuvait, il neigeait et les conditions étaient plutôt venteuses. La scène était le terrain de stationnement d’un centre commercial achalandé durant les heures normales d’ouverture. Il y avait des piétons et des véhicules qui circulaient sur le terrain de stationnement.

La profondeur du secteur d’intérêt était d’environ 15 espaces de stationnement devant la pharmacie. Le secteur avait une largeur d’environ trois rangées de stationnement. À plusieurs endroits dans cette zone, on a trouvé des tâches rouges (qu’on croyait être du sang), des pièces d’armes à impulsions, ainsi que des fils et des dards d’armes à impulsions. Le secteur n’a pas été bouclé ni sécurisé.

Un périmètre provisoire a été établi à l’aide de chariots de magasinage et le SPH est retourné à la scène de l’incident pour aider à sa sécurisation aux fins de traitement. D’autres éléments ont été repérés et des indicateurs de preuve ont été placés à côté. Les éléments ont ensuite été photographiés, recueillis et sécurisés.

Preuve matérielle

Éléments trouvés sur les lieux :

  • Élément 1 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 2 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 3 : fil d’arme à impulsions
  • Élément 4 : prélèvèment – tâche de couleur rouge/brunâtre (qu’on pensait être du sang)
  • Élément 5 : prélèvèment – tâche de couleur rouge/brunâtre (qu’on pensait être du sang)
  • Élément 6 : prélèvèment – tâche de couleur rouge/brunâtre (qu’on pensait être du sang)
  • Élément 7 : fil d’arme à impulsions
  • Élément 8 : fil d’arme à impulsions
  • Élément 9 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 10 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 11 : fil d’arme à impulsions avec dard attaché
  • Élément 12 : fil d’arme à impulsions avec dard attaché
  • Élément 13 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 14 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 15 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 16 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 17 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)
  • Élément 18 : composante d’arme à impulsions (en plastique vert)

Tous les éléments ont été placés dans des sacs de preuve individuels et scellés. Lors de la fouille, on n’a pas trouvé de dépôts d’AFID (Anti‐Felon Identification Tag), des genres de confettis qui sont projetés de la cartouche lorsque l’arme à impulsions est déployée.

La scène a été traitée puis libérée.

L’EJ de l’UES s’est rendu à la Division 2 du SPH, où il a rencontré un sergent‐chef qui l’a informé qu’il ignorait où se trouvaient les douilles vides des armes à impulsions et a indiqué qu’on ne les avait peut‐être pas recueillies ou qu’elles avaient été jetées par les agents. Il lui a aussi indiqué que le formateur en recours à la force avait récupéré les cartouches inutilisées.

Le sergent‐chef a remis les cinq armes à impulsions à l’EJ. Les armes à impulsions étaient vides de toutes leurs cartouches et avaient encore leurs batteries respectives insérées à l’intérieur. Le sergent‐chef a indiqué que l’un des agents avait deux douilles de cartouche utilisées en sa possession. L’UES a demandé à ce qu’on lui remettre les douilles de cartouche de l’arme à impulsion. Un enquêteur judiciaire de l’UES a photographié chaque arme à impulsions et a ensuite téléchargé leurs données internes.

L’EJ de l’UES a reçu deux cartouches d’arme à impulsions et a été informé que ces cartouches avaient été fournies par l’AT no 5. Les cartouches ont été photographiées.

Armes à impulsions examinées :

Arme à impulsions Taser [déployée par l’AI]
Modèle : X26P
(numéro d’identification écrit à la main à l’encre noire sur le dessus de l’unité)
Déchargée à sec pendant environ 30 secondes. Le repère affichait comme numéro de séquence no 6389 sur le rapport Taser. Données téléchargées et sauvegardées.

Arme à impulsions Taser [déployée par l’AT no 5]
Modèle : X26P
(numéro d’identification écrit à la main à l’encre noire sur le dessus de l’unité)
Déchargée à sec pendant environ 15 secondes. Le repère affichait comme numéro de séquence no 2143 sur le rapport Taser. Données téléchargées et sauvegardées.

Arme à impulsions Taser [déployée par l’AT no 3]
Modèle : X26P
(numéro d’identification écrit à la main à l’encre noire sur le dessus de l’unité)
Déchargée à sec pendant environ 15 secondes. Le repère affichait comme numéro de séquence no 1938 sur le rapport Taser. Données téléchargées et sauvegardées.

Arme à impulsions Taser [déployée par l’AT no 6]
Modèle : X26P
(numéro d’identification écrit à la main à l’encre noire sur le dessus de l’unité)
Déchargée à sec pendant environ 15 secondes. Le repère affichait comme numéro de séquence no 2218 sur le rapport Taser. Données téléchargées et sauvegardées.

Arme à impulsions Taser [déployée par l’AT no 7]
Modèle : X26P
(numéro d’identification écrit à la main à l’encre noire sur le dessus de l’unité)
Déchargée à sec pendant environ 15 secondes. Le repère affichait comme numéro de séquence no 4278 sur le rapport Taser. Données téléchargées et sauvegardées.

Résumés des rapports des armes à impulsions :

Cinq armes à impulsions ont été utilisées huit fois en tout pendant l’interaction avec le plaignant.

  • L’AT no5 s’est vu attribuer une arme à impulsions avec numéro de série (caviardé). Le rapport du dispositif indiquait que l’arme à impulsions a été déployée deux fois le 30 mars 2017, à 00 h 06. Les décharges ont duré chacune de six à huit secondes et étaient espacées de 20 secondes
  • L’AT no7 s’est vu attribuer une arme à impulsions avec numéro de série (caviardé). Le rapport du dispositif indiquait que l’arme à impulsions a été déployée le 30 mars 2017, à 00 h 07 pendant cinq secondes
  • L’AT no3 s’est vu attribuer une arme à impulsions avec numéro de série (caviardé). Le rapport du dispositif indiquait que l’arme à impulsions a été déployée le 30 mars 2017, à 00 h 12, pendant cinq secondes
  • L’AI s’est vu attribuer une arme à impulsions avec numéro de série (caviardé). Le rapport du dispositif indiquait que l’arme à impulsions a été déployée le 30 mars 2017, à 00 h 13, pendant cinq secondes
  • L’AT no6 s’est vu attribuer une arme à impulsions avec numéro de série (caviardé). Le rapport de l’appareil indiquait que l’arme à impulsions a été déployée trois fois le 30 mars 2017, à 00 h 13. Les décharges de l’appareil ont duré chacune 5, 15 et 15 secondes respectivement et étaient espacées de 12 et de 16 secondes

Le couteau :

Le couteau que le plaignant avait en sa possession au moment de cette interaction a été saisi sur les lieux de l’incident par l’agente des scènes de crime du SPH, l’AT no 6. Il a été sécurisé dans le bureau des pièces à conviction du SPH.

Le couteau a été remis à l’EJ de l’UES. Le sceau apposé sur le couteau indiquait qu’il avait été placé dans la boîte par l’AT no 6 le 30 mars 2017, à 3 h 26 du matin. Une étiquette distincte du SPH identifiait le contenu de la boîte comme étant un couteau à poignée noire avec une lame de huit pouces (recouverte de sang).

L’EJ de l’UES a examiné le couteau. Du sang séché recouvrait les deux côtés de la poignée et de la lame du couteau. Le couteau a été photographié dans la boîte avant d’être transféré sur une feuille de papier kraft protectrice. La lame était dentelée et mesurait 19,5 cm (environ 8 pouces) de long. D’autres photos du couteau ont été prises. Après quoi, le couteau a été emballé dans la même feuille protectrice de papier kraft puis replacé dans la boîte de carton de protection.

Voir une photo du couteau (avertissement : contenu graphique)

Preuve criminalistique

Aucun envoi n’a été fait au Centre des sciences judiciaires (CSJ) dans le cadre de cette enquête.

Preuve vidéo/audio/photographique

L’UES a exploré les alentours à la recherche de possibles enregistrements vidéo ou audio et preuves photographiques, et elle a trouvé ce qui suit :

Vidéo de surveillance de la pharmacie :

La séquence vidéo de la caméra de surveillance située aux portes principales du magasin a été obtenue et visionnée par l’UES. Les éléments suivants étaient pertinents pour l’enquête :

  • à 23 h 52, le plaignant apparaît dans le champ de vision, à l’extérieur du magasin, sur le trottoir
  • on le voit franchir les portes extérieures pour entrer et sortir du magasin et placer des chariots devant les portes pour déclencher leur ouverture
  • il garde tout le temps la main droite dans la poche
  • on voit l’agent de sécurité ainsi que l’AT no 6 avoir tous deux une interaction avec le plaignant
  • le plaignant entre et sort du champ de la caméra tandis qu’il se promène juste à l’extérieur des portes
  • à 23 h 59, on voit le plaignant sortir un couteau de la poche droite de son pantalon et le porter brièvement sur le devant de son torse, puis le remettre dans la poche droite de son pantalon
  • à 0 h 03, on voit une ambulance arriver. Le plaignant s’éloigne des ambulanciers

Enregistrements des communications

Enregistrements de l’appel au 9‐1‐1 et des communications et chronologie des événements :

  • Le 29 mars 2017, à 31 h 57, la TC no 6 a appelé le 9‐1‐1 et demandé qu’on envoie une ambulance à la pharmacie. Elle a indiqué à l’opérateur des communications du service d’ambulance qu’un homme [dont on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] demandait de l’alcool à friction et elle a déclaré [traduction] « On dirait qu’il saigne abondamment au cou. »
  • La TC no 6 a ensuite fourni des détails supplémentaires au personnel des communications de la police
  • À 23 h 57, le communicateur de la police chargé de la répartition du personnel a demandé à une unité disponible de répondre à la demande d’intervention
  • L’AT no 5 et l’AT no 7 se sont immédiatement portés volontaires pour répondre à l’appel et ont été envoyés sur les lieux
  • À 00 h 06, l’AT no 5 et l’AT no 7 sont arrivés sur place. L’AT no 7 a dit [traduction] « Il nous faut deux unités de plus ici. »
  • Cette communication est suivie d’une transmission dans laquelle on entend l’AT no 5 dire [traduction] « L’homme a un couteau […] il se lance vers les policiers […] les Tasers ont été déployés […] il continue de se diriger vers les policiers […] il essaie de voler l’ambulance en ce moment. »
  • D’autres policiers ont été envoyés sur place
  • L’AT no 5 a fourni une description physique du plaignant
  • À 00 h 08, l’AT no 5 a indiqué que le plaignant marchait vers le milieu du terrain de stationnement
  • À 00 h 10, l’AT no 5 a dit que le plaignant [traduction] « se coupe lui‐même le cou d’un bord à l’autre avec le couteau. »
  • À 00 h 11, l’AT no 3, l’AT no 8 et l’AT no 4 sont arrivés sur les lieux
  • À 00 h 12, un agent de police arrivant sur place a dit que le plaignant était maintenant au sol

Éléments obtenus du service de police

L’UES a demandé au SPH les éléments et documents suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • chronologie des événements
  • dépositions de témoin du TC no 4, du TC no 2, du TC no 1 et de trois autres témoins civils datées du 30 mars 2017, fournies par le SPH
  • notes des AT nos 1 à 9 et de l’AI
  • liste des antécédents d’implication dans des incidents et des fréquentations du plaignant
  • rapport des fiches de service
  • liste des témoins de la police
  • procédure 1.31 – arme à impulsions
  • rapport sur le profil du sujet avec rapports sur ses antécédents d’implication dans des incidents – le plaignant
  • registre des données sur les décharges des armes à impulsions Taser
  • déclarations écrites des AT nos 1 à 9 et de l’AI

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 88(1) du Code criminel – Port d’arme dans un dessein dangereux

88 (1) Commet une infraction quiconque porte ou a en sa possession une arme, une imitation d’arme, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées dans un dessein dangereux pour la paix publique ou en vue de commettre une infraction.

Article 17 de la Loi sur la santé mentale – Intervention de l’agent de police

17 Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :

  1. soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire
  2. soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles
  3. soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même

et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :

  1. elle s’infligera des lésions corporelles graves
  2. elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne
  3. elle subira un affaiblissement physique grave

et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.

Paragraphe 25(1) du Code criminel – Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 29 mars 2017, à 23 h 57 m 32 s, un appel au 9‐1‐1 émanant de la TC no 6, une employée d’une pharmacie dans la Ville de Hamilton, a été reçu par le Service de police de Hamilton (SPH). La TC no 6 a indiqué qu’un homme se trouvait à l’extérieur de son magasin, qu’il saignait au cou et qu’il demandait de l’alcool à friction. Dans un premier temps, l’appel a été transféré au service d’ambulance, mais une demande de renfort a été transmise en provenance de l’ambulance et des deux agents de police, l’AT no 5 et l’AT no 7, qui avaient été envoyés sur les lieux à 00 h 02 m 16 s. Dix agents du SPH ont fini par intervenir pendant l’interaction avec l’homme, le plaignant, à la suite de quoi il a été transporté à l’hôpital et traité pour une lacération profonde au cou et une fracture au pied droit.

Le plaignant impliqué dans cette interaction n’avait aucun souvenir de la façon dont il avait subi ses blessures ni même d’avoir eu un contact avec la police le soir du 29 mars 2017; heureusement, cependant, grâce à la coopération de six témoins civils et dix témoins de la police, dont l’AI, ainsi qu’avec la séquence vidéo de surveillance provenant du système de télévision en circuit fermé (TVCF) de la pharmacie, les enregistrements des communications, les données téléchargées provenant des cinq armes à impulsions utilisées pendant l’interaction et le rapport des appels au service d’ambulance; on a pu brosser un portrait clair de la séquence des événements. Les faits ne sont aucunement contestés.

La séquence vidéo de TVCF a révélé que le plaignant, à 23 h 59, a sorti un couteau de sa poche droite et l’a brièvement porté à sa poitrine, avant de le remettre dans sa poche. On voit ensuite l’ambulance arriver à 0 h 03, moment auquel le plaignant s’éloigne de l’angle de vision de la caméra, de sorte que rien d’autre n’est capté de l’interaction.

L’AT no 5 a indiqué qu’il est arrivé sur les lieux, à la pharmacie Shopper’s Drug Mart, à 0 h 06 et qu’il a vu l’ambulance déjà stationnée devant le magasin. L’AT no 7 est ensuite arrivé à bord d’une autre autopatrouille. L’AT no 5 a observé que le plaignant avait du sang au niveau du cou et l’a vu courir sur le côté de l’ambulance et essayer d’ouvrir la portière côté chauffeur tout en serrant quelque chose dans la main droite; l’ambulancière s’est alors rapidement déplacée vers le côté passager de l’ambulance puis s’est dirigée vers les deux autopatrouilles. L’AT no 5 a indiqué qu’il est sorti de son autopatrouille et qu’il a dit au plaignant de sortir de l’ambulance, moment auquel le plaignant s’est éloigné des agents et où l’AT no 5 lui a crié de revenir pour que les ambulanciers puissent le traiter. L’AT no 7 a indiqué que l’AT no 5 se trouvait à environ quinze ou vingt pieds du plaignant et qu’il a alors vu le plaignant sortir un grand couteau et le tenir serré dans la main droite, en l’agitant en l’air.

L’AT no 7 a indiqué qu’avant d’arriver à son autopatrouille, il a entendu l’AT no 5 crier [traduction] « Il a un couteau! » L’AT no 7 est alors retourné en courant vers l’AT no 5 et a observé le plaignant lever son couteau jusqu’à son torse et adopter ce qui semblait être une position de combat, la lame du couteau pointée vers les policiers. À ce moment‐là, l’AT no 5 a sorti son arme à impulsions et l’a pointée sur le torse du plaignant tout en lui criant de laisser tomber le couteau. Les deux agents ont demandé au plaignant ce qui n’allait pas et lui ont dit qu’ils pouvaient l’aider, mais le plaignant n’a pas répondu, ne leur adressant qu’un regard sans expression.

L’enregistrement des communications a confirmé qu’à 0 h 06, l’AT no 7 a demandé que des unités supplémentaires soient envoyées pour prêter assistance.

L’AT no 5 a indiqué qu’il avait peur et qu’il craignait que le plaignant ne le tue ou ne lui inflige des lésions corporelles graves; c’est à ce moment‐là que, tandis que le plaignant venait vers lui, il a déchargé son arme à impulsions et a touché le plaignant au torse. Le plaignant a poussé un « ah » de gémissement lorsqu’il a été touché, mais il a ensuite tiré sur les dards de l’arme à impulsions.

Le registre des données de l’arme à impulsions a confirmé qu’à 0 h 06, l’AT no 5 a déployé son arme à impulsions pendant six secondes.

Le plaignant a ensuite été observé en train de s’avancer vers l’AT no 7 et l’AT no 5 en a profité pour recharger son arme à impulsions avec une nouvelle cartouche. L’AT no 5 a d’abord cru qu’il lui faudrait utiliser son arme à feu, mais il a eu suffisamment de temps et a pu maintenir une distance suffisante entre lui et le plaignant pour ne pas avoir à le faire. L’AT no 5 a déclaré qu’il ne voulait pas tirer sur le plaignant, mais qu’il était prêt à le faire car il avait peur, mais il craignait aussi que des balles se perdent dans cette zone achalandée.

Ce témoignage est entièrement confirmé par le TC no 4, qui se trouvait à proximité dans le terrain de stationnement.

L’AT no 7 a rengainé son arme à impulsions et a sorti son arme à feu, mais il l’a gardée pointée vers le sol et la tenait au‐dessus de son étui. L’AT no 5 a déchargé une nouvelle fois son arme à impulsions, cette fois sur le dos du plaignant, mais là encore cela s’est avéré inefficace alors que le plaignant a arraché les dards de l’arme à impulsions dans son dos.

Le registre de données de l’arme à impulsions confirme que, vingt secondes après avoir déchargé son arme à impulsions pour la première fois, l’AT no 5 l’a de nouveau déployée, cette fois pendant une période de huit secondes.

Le plaignant a alors semblé centrer son attention sur l’AT no 7 et s’est rué vers lui. L’AT no 7 a remis son arme à feu dans son étui et a déclaré que lui aussi craignait pour sa sécurité et qu’il a dégainé son arme à impulsions pour mettre fin à la menace posée par le plaignant. L’AT no 7 a déployé son arme à impulsions sur la poitrine du plaignant, mais cela s’est aussi avéré inefficace, alors que le plaignant n’a même pas crié et que l’arme à impulsions n’a eu aucun effet sur lui. L’AT no 7 s’est alors replié afin de mettre une certaine distance entre lui et le plaignant, car il craignait que le plaignant ne le poignarde. Les deux agents se sont ensuite repliés vers leurs autopatrouilles et le plaignant a été observé en train de marcher vers l’ambulance et d’essayer d’ouvrir les portières côté conducteur; à ce moment‐là, l’ambulancière qui se trouvait à l’arrière de l’ambulance est sortie en courant et s’est dirigée vers les agents de police. L’enregistrement des communications a confirmé une transmission émanant de l’AT no 5 dans laquelle on l’entend dire [traduction] « L’homme a un couteau […] Il se lance vers les policiers […] Le Taser a été déployé […] L’homme continue de se diriger vers la police […] Il essaie de voler l’ambulance en ce moment. » Sept autres autopatrouilles ont été envoyées sur place pour prêter assistance.

Le registre de données de l’arme à impulsions de l’AT no 7 a confirmé que l’AT no 7 a déployé son arme à 0 h07 pendant cinq secondes.

L’enregistrement des communications a révélé qu’à 00 h10, l’AT no 5 a indiqué que le plaignant [traduction] « se coupe maintenant lui‐même avec le couteau, d’un bord à l’autre du cou ».

À 00 h11, l’AT no 3, l’AT no 4 et l’AT no 6 sont arrivés sur les lieux. L’AT no 3 a indiqué qu’il avait donné l’instruction à l’AT no 4 et à l’AT no 8 de dégainer leurs armes à feu et que lui‐même dégainerait son arme à impulsions. Le plaignant a été vu en train de s’éloigner en marchant vers un lampadaire, où on l’a vu s’infliger violemment des coupures à la gorge à deux ou trois reprises, comme s’il essayait de se trancher la gorge. Le rapport des appels au service d’ambulance a confirmé que les ambulanciers qui étaient sur place ont également vu le plaignant s’infliger lui‐même des coupures au cou avec le couteau.

L’AT no 3 a indiqué qu’il a continuellement communiqué avec le plaignant, lui disant que les agents étaient là pour l’aider, pas pour le blesser, et lui demandant de poser le couteau. Le plaignant semblait totalement inconscient de ce que l’AT no 3 disait et, à aucun moment, il n’a répondu. L’AT no 3 a indiqué qu’il appréhendait de s’approcher trop près du plaignant du fait que ce dernier avait en sa possession ce qui a été décrit comme étant un couteau avec une lame de 10 pouces.

L’AI est arrivé sur les lieux et a observé le plaignant qui se trouvait au centre du terrain de stationnement et était entouré de six ou sept agents de police dans une formation en demi‐cercle. Il a indiqué que l’AT no 4 se trouvait directement devant le plaignant, à une distance de dix à quinze pieds de lui. L’AI est sorti de son autopatrouille et a marché de sept à dix pieds en direction de l’AT no 4. Il a vu que l’AT no 3 avait sorti son arme à impulsions. L’AT no 3 a observé le plaignant faire un mouvement de sciage sur le côté gauche de son cou, et il s’est avancé vers le plaignant en marchant de douze à quinze pieds. À ce moment‐là, pour assurer la sécurité tant des agents et du public que du plaignant lui‐même, l’AT no 3 a utilisé son arme à impulsions sur le plaignant.

Le registre de données de l’arme à impulsions de l’AT no 3 a confirmé que le dispositif a été déployé à 00 h 12 pendant une période de cinq secondes.

L’AI a constaté que le déploiement de l’arme à impulsions avait de nouveau été inefficace et a observé l’épaule du plaignant qui se baissait pendant que le plaignant faisait trois ou quatre pas en direction de l’AT no 4. Depuis l’angle d’où l’AI voyait les choses, le plaignant était complètement fixé sur l’AT no 4, et l’AI a décrit cela comme une attaque sur l’AT no 4, lequel avait dégainé son arme à feu et se repliait du plaignant afin d’accroître le plus possible la distance le séparant du plaignant et ainsi éviter d’avoir à lui tirer dessus. L’AT no 4 a continué de crier au plaignant de laisser tomber le couteau, mais sans succès. L’AI a déterminé qu’en raison des positions des autres agents de police et du risque d’une situation de tirs croisés, il n’était pas opportun pour lui de sortir son arme à feu, de sorte qu’il a plutôt recouru à son arme à impulsions. L’AI a dégainé son arme à impulsions, l’a activée et a observé le point rouge atterrir sur l’épaule droite du plaignant, juste au‐dessous de la coiffe des rotateurs; l’AI a indiqué qu’il avait reçu une formation dans laquelle on lui avait appris à se concentrer sur cette zone afin d’accroître les chances d’un déploiement réussi de l’arme à impulsions. Le plaignant a commencé à se ruer vers l’AT no 4. L’AI a craint que le plaignant aille poignarder l’AT no 4, mais il voulait attendre que le plaignant soit plus près pour augmenter les chances d’un déploiement réussi de l’arme à impulsions et ainsi neutraliser le plaignant. Lorsque le plaignant s’est trouvé à quelque quatre à six pieds de l’AI, l’AI a déployé son arme à impulsions et le plaignant est immédiatement tombé au sol. L’AI a indiqué que si la décharge de l’arme à impulsions n’avait pas réussi à arrêter le plaignant, il croit que l’AT no 4 aurait tiré sur le plaignant.

Le registre de données de l’arme à impulsions de l’AI a confirmé que l’arme a été déployée à 00 h 13, pendant cinq secondes.

Une fois que le plaignant était au sol, les agents se sont dirigés vers lui pour le menotter, mais le plaignant a refusé de libérer ses mains, et il avait le couteau sous son corps, de sorte qu’il continuait de présenter un danger pour les agents. L’AT no 6 a observé que le plaignant continuait de lutter et de se débattre, et elle se demandait si le plaignant n’était pas en train de s’infliger plus de dommages à lui‐même ou s’il allait blesser d’autres agents avec le couteau; par conséquent, elle a sorti son arme à impulsions. L’AT no 9, qui se trouvait immédiatement à droite de l’AT no 6, l’a vue utiliser son Taser en mode paralysant sur les vêtements du plaignant, ce qui n’a pas produit d’effet, de sorte que l’AT no 9 a conseillé à l’AT no 6 d’apposer directement l’arme à impulsions sur la peau exposée du dos du plaignant. À ce moment‐là, l’AT no 6 a placé l’arme à impulsions directement sur la peau du plaignant, au côté droit de son dos, juste au‐dessus de la taille, et elle a activé l’arme à impulsions en envoyant une décharge en mode paralysant et a maintenu l’arme là pendant que les autres agents maîtrisaient le plaignant. Finalement, il a fallu l’intervention de sept agents de police pour maîtriser physiquement le plaignant. Après avoir menotté le plaignant, les agents l’ont soulevé du sol et ont trouvé le couteau qui se trouvait sous lui. Le plaignant a ensuite été emmené vers l’ambulance puis transporté à l’hôpital.

Le registre de données de l’arme à impulsions de l’AT no 6 a confirmé que le dispositif a été déployé trois fois, à 00 h 13, la première fois pendant cinq secondes, puis, après l’écoulement de douze secondes, pendant une période de quinze secondes, et une troisième fois, après l’écoulement de seize secondes, pendant une période de quinze secondes.

L’un des témoins civils présents a indiqué qu’il n’avait rien vu qui expliquerait comment le plaignant aurait subi une fracture à la cheville, hormis la possibilité qu’il soit tombé après le déploiement de l’arme à impulsions, tandis que trois autres témoins civils ont déclaré n’avoir rien vu d’inapproprié dans les gestes des policiers, deux des témoins précisant que, selon eux, la réponse de la police avait été appropriée et ne leur avait causé aucune préoccupation.

Une fois à l’hôpital, il a été constaté que le plaignant avait subi une profonde lacération au côté gauche avant du cou et qu’il avait une fracture à la cheville droite. Le médecin a décrit la lacération au cou comme n’étant pas grave et a mentionné que cela n’avait pas lieu de déclencher le mandat de l’UES. Quoi qu’il en soit, il est clair, à la lumière du témoignage tant des témoins civils que des témoins de la police, que le plaignant s’était déjà infligé une coupure au cou avant l’arrivée des policiers. Sur les huit agents de police qui étaient présents avant la décharge de l’arme à impulsions qui a finalement neutralisé le plaignant en le faisant tomber au sol, sept ont observé le plaignant en train de se scier ou de se trancher la gorge, la seule exception étant l’AI, qui a indiqué avoir entendu les autres agents dire que le plaignant se coupait lui‐même la gorge, bien que l’AI ne pouvait lui‐même voir cela. Cette preuve est confirmée par le rapport d’appel au service d’ambulance dans lequel les ambulanciers ont noté qu’ils ont observé le plaignant en train de se couper le cou avec le couteau, par l’enregistrement des communications radio, qui a révélé que l’AT no 5 avait fait un appel radio à 00 h 10 et déclaré que le plaignant [traduction] « Se coupe maintenant lui‐même le cou avec le couteau », ainsi que par le témoignage de tous les témoins selon lesquels le plaignant a toujours eu le couteau en sa possession tout au long de son interaction avec la police et qu’aucune autre personne n’était en possession de quelque type que ce soit d’arme dentelée. Par conséquent, je n’ai aucune difficulté à conclure que la lacération profonde au cou du plaignant a été auto‐infligée et qu’aucune faute n’incombe aux policiers qui sont intervenus et ont aidé à appréhender le plaignant.

En ce qui concerne la fracture à la cheville du plaignant, une information a été reçue selon laquelle le plaignant s’était fracturé la cheville environ un mois avant cet incident et avait été transporté à l’hôpital par ambulance à ce moment‐là. Il s’est ensuite déplacé à l’aide de béquilles et n’a pas reçu d’autres traitements médicaux pour la fracture avant son interaction avec la police du 29 mars 2017. De plus, le plaignant avait déjà un rendez‐vous de fixé pour le 31 mars 2017, afin de recevoir un traitement pour la fracture. Sur ce fondement, je n’ai aucune difficulté à conclure que la fracture à la cheville que le plaignant a subie était une blessure préexistante et n’a aucunement été causée par son interaction avec la police.

Bien que ni l’une ni l’autre des blessures subies par le plaignant n’ait été causée ni accentuée par la police, puisqu’une enquête a été ouverte sur l’interaction du plaignant avec la police, je me sens obligé d’aborder la question de savoir si les actions de la police pendant son interaction avec le plaignant ont constitué l’emploi d’une force excessive au point d’entraîner le dépôt d’accusations criminelles, malgré l’absence de lien de causalité entre les blessures du plaignant et les actions de la police.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police peuvent seulement recourir à la force qui est raisonnablement nécessaire dans l’exécution d’une obligation légale. En ce qui concerne tout d’abord la légalité de l’appréhension du plaignant, il ressort clairement des déclarations de tous les témoins civils qui étaient présents sur les lieux, que ce soit à l’intérieur de la pharmacie ou dans le terrain de stationnement à l’extérieur, que le plaignant avait manifestement subi une blessure et que la police était légalement tenue d’enquêter sur l’origine de cette blessure et de déterminer si elle avait été causée par une activité criminelle. De plus, lorsque la police est arrivée sur les lieux et a essayé de prêter assistance au plaignant, le fait que le plaignant ait sorti le couteau de sa poche en l’agitant a donné à la police des motifs raisonnables de croire que le plaignant commettait une infraction de port d’arme dans un dessein dangereux, en contravention du paragraphe 88(1) du Code criminel, et, finalement, lorsque le plaignant a commencé à se couper lui‐même le cou, la police a eu des motifs raisonnables et probables de croire que le plaignant constituait un danger pour lui‐même, en vertu de l’article 17 de la Loi sur la santé mentale. Par conséquent, l’appréhension du plaignant était légalement justifiée dans les circonstances.

En ce qui concerne le degré de force employé par les agents dans leurs tentatives de maîtriser le plaignant, j’estime que leur comportement était tout à fait justifié dans les circonstances et qu’ils n’ont pas recouru à plus de force que nécessaire pour maîtriser le plaignant, lequel s’infligeait activement des blessures à lui‐même et semblait représenter un danger tant pour la population en général que pour les agents de police qui essayaient de l’aider, notamment pour l’AT no 4 sur lequel le plaignant semblait fixer son attention. Compte tenu du fait qu’il s’était déjà coupé la gorge d’un bord à l’autre, ce n’était pas une exagération que de croire qu’il était capable de le faire de nouveau et qu’il pouvait ainsi mettre fin à sa vie si on ne le maîtrisait pas. Qui plus est, le plaignant avait déjà reçu à quatre reprises des décharges d’armes à impulsions, sans que cela eu sur lui d’effet apparent, et les policiers commençaient rapidement à être à court d’options pour assurer leur propre sécurité. Tout en concluant que les blessures du plaignant n’ont pas été causées par la police, j’ajouterais que, même si elles avaient été causées par les actions des agents visant à maîtriser le plaignant, je ne saurais conclure qu’il y aurait eu emploi d’une force excessive en l’espèce. Ayant observé l’inefficacité du déploiement de l’arme à impulsions par l’AT no 3 sur le plaignant, que plusieurs agents avaient déjà dégainé leurs armes à feu, que l’AT no 4 était attaqué par le plaignant et que le plaignant courait le risque imminent de prendre une balle tirée par l’AT no 4, l’AI, en ayant eu la capacité d’évaluer la situation, en ayant écarté l’utilisation de son arme à feu comme moyen sûr et efficace de composer avec le plaignant et en ayant utilisé plutôt son arme à impulsions d’une manière qui était la plus susceptible d’être conforme à sa formation, a agi de façon prudente et professionnelle. Dans le présent dossier, il est clair que la force employée par l’AI, de même que la force employée par les quatre autres agents ayant déchargé leurs armes à impulsions sur le plaignant, était non seulement justifiée mais aussi absolument nécessaire pour sauver la vie et de l’AT no 4 et de l’AI. À la lumière de cette preuve, il est clair que si l’AI n’était pas intervenu et n’avait pas déployé une cinquième décharge d’arme à impulsions sur le plaignant, il est très probable que le plaignant aurait été blessé par balle. Les actions de l’AI étaient prudentes, mûrement réfléchies et parfaitement justifiées pour traiter et surmonter la résistance du plaignant ainsi que son étonnante tolérance à l’utilisation de l’arme à impulsions, et ces actions sont demeurées dans les limites de ce qui était raisonnablement nécessaire dans les circonstances pour procéder à la mise sous garde légale du plaignant.

En dernière analyse, je suis convaincu, pour les motifs qui précèdent, que l’appréhension du plaignant et la manière dont cela s’est fait étaient légales et pleinement justifiées dans les circonstances, que les actions de tous les agents qui ont déployé leurs armes à impulsions étaient justifiées et que les actions de l’AI étaient non seulement justifiées mais franchement admirables et très réfléchies, et l’on peut probablement lui attribuer le mérite d’avoir sauvé la vie du plaignant, qui aurait pu soit recevoir une balle soit mettre fin à ses jours en se tranchant la gorge. L’AI est arrivé tard sur les lieux de l’interaction; il a évalué la situation avec un regard neuf, il a évalué ses options et il n’a pas paniqué, attendant plutôt le moment propice où le plaignant serait dans un position optimale avant de déployer son arme à impulsions. J’estime en outre digne de mention que les actions de la police qu’on observées nombre de témoins civils, ont été jugées appropriées dans les circonstances et non excessives par ces témoins. Un témoin, en particulier, se dit étonné que l’AT no 7 n’ait pas tiré sur le plaignant et avait l’impression que le plaignant allait s’enlever la vie lorsqu’il se tranchait le cou. Je suis donc convaincu, pour des motifs raisonnables dans ce dossier, qu’il n’y a pas de lien de causalité entre les blessures subies par le plaignant et les actions de la police et que les gestes posés par les agents étaient dans les limites prescrites par le droit criminel et qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations en l’espèce.

Date : 27 février 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) [1] Le mode paralysant consiste à placer l’arme à impulsions directement sur la surface du corps afin d’induire un courant électrique. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.