Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-130

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport décrit l’enquête de l’UES sur la blessure grave qu’aurait subie un homme âgé de 23 ans lors de son arrestation, le 11 novembre 2016.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 29 mai 2017, vers 14 h 59, le Service de police de London (SPL) a avisé l’UES d’une blessure subie par le plaignant de 23 ans le 11 novembre 2016.

Le SPL a indiqué que le 11 novembre 2016, à 22 h 30, le plaignant a été arrêté à sa résidence pour avoir proféré des menaces. Le plaignant a été emmené au poste de police et, pendant qu’on lui retirait ses menottes, il a agressé un agent de police. Les policiers ont maîtrisé le plaignant et il a été placé dans une cellule. Le plaignant a été remis en liberté le 12 novembre 2016, à 15 h 50.

Le plaignant s’est rendu à l’hôpital après sa libération.

Le 16 février 2017, le Bureau du directeur indépendant de l’examen de la police (BDIEP) a transmis une plainte du plaignant au SPL pour enquête. Le SPL a commencé à enquêter sur l’affaire et a recueilli les éléments pertinents. Le 26 mai 2017, le SPL a reçu des dossiers médicaux indiquant que le plaignant avait subi une perte partielle de sa vision le 11 novembre 2016.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 0

L’UES a obtenu de l’hôpital une copie des dossiers médicaux du plaignant et a discuté avec le médecin traitant de la nature de la blessure du plaignant, avec le consentement du plaignant.

L’UES a communiqué avec la famille du plaignant pour obtenir confirmation de l’endroit où il habitait, et le plaignant a été questionné le 5 juin 2017.

Au moment de son arrestation, le plaignant habitait, avec quatre colocataires, une adresse dans la Ville de London. Le gestionnaire immobilier de cette adresse a été en mesure de fournir les coordonnées de ces personnes.

Le premier colocataire a déclaré qu’il était chez lui le matin du 11 novembre 2016, mais qu’il a quitté la résidence parce que le plaignant avait endommagé les biens personnels des colocataires.

Le deuxième colocataire a déclaré qu’il était au travail ce jour‐là, mais qu’il avait vu le plaignant plus tôt et que ce dernier était très perturbé par quelque chose. Par conséquent, ce colocataire est resté à l’extérieur de la maison et n’était pas présent lorsque le SPL a traité avec le plaignant.

Les deux autres colocataires ont déclaré qu’ils n’étaient pas à la maison ce jour‐là.

Plaignant :

Homme âgé de 23 ans; a participé à une entrevue; dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

Agents témoins (l’AT)

AT n° 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

AT n° 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

AT n° 3 A participé à une entrevue

AT n° 4 A participé à une entrevue

AT n° 5 A participé à une entrevue

Agents impliqués (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Description de l’incident

Le 11 novembre 2016, le plaignant était dans un état d’agitation extrême. Il a commencé à lancer des objets partout à l’intérieur de sa résidence et en a aussi jetés dans la rue. Il a également crié après ses voisins et des passants et leur a proféré des menaces.

Quelqu’un a fini par appeler la police et l’agent témoin (AT) no 2 et l’AT no 1 se sont présentés à la résidence, dans la Ville de London. Le plaignant a immédiatement été agressif avec les policiers et il a menacé de les tuer. Lorsque le plaignant s’est déplacé pour aller chercher des couteaux qu’il avait lancés sur l’entrée de cour de la résidence, l’AT no 1 et l’AT no 2 ont décidé de l’appréhender. Le plaignant a été menotté sans incident et placé sur la pelouse afin d’être fouillé. Une fois au sol, le plaignant a continué de lancer des menaces, si bien qu’il a été arrêté pour avoir proféré des menaces et avoir résisté aux efforts de la police pour le menotter.

Le plaignant a été amené à un véhicule de police pour être transporté jusqu’au poste de police, mais il a placé ses pieds contre le véhicule et a combattu les efforts des policiers pour le faire entrer dans le véhicule. Le plaignant a alors de nouveau été placé au sol, de manière contrôlée, et l’AT no 2 a demandé qu’on envoie un fourgon cellulaire pour transporter le plaignant.

C’est l’agent impliqué (AI) qui conduisait le fourgon, et il s’est rendu sur les lieux. Le plaignant a été placé à l’intérieur du fourgon cellulaire, puis les trois agents sont partis pour le poste de police.

Une fois au poste de police, il a été constaté que les portes arrière du fourgon cellulaire étaient ouvertes et que le plaignant avait pu forcer l’ouverture de la porte du compartiment intérieur en y donnant des coups de pied. Le plaignant avait été capable de déplacer ses mains menottées de l’arrière à l’avant de son corps et il avait enlevé tous ses vêtements sauf sa camisole, qu’il n’a pas pu enlever en raison des menottes.

L’AT no 2, l’AT no 1 et l’AI ont placé le plaignant contre un mur de la zone d’une entrée sécurisée, laquelle était « couverte » par une caméra de surveillance vidéo, et l’AT no 2 a tenté de repositionner les menottes dans le dos du plaignant pendant que l’AI tenait le côté gauche du plaignant et que l’AT no 1 contrôlait le côté droit du plaignant. Tandis que l’AT no 2 s’employait à repositionner les menottes, le plaignant s’est tourné et a levé son genou jusqu’au niveau de l’aine de l’AI. L’AI lui a immédiatement administré trois coups, dont au moins un a atteint la tête du plaignant. L’AI a alors saisi le plaignant par le cou et l’a amené au sol.

Les menottes ont ensuite été repositionnées et le plaignant a été porté directement à une cellule, où il a passé la majeure partie des heures qui ont suivi à faire les cent pas et à être agité.

Nature de la blessure et traitement

Le plaignant a subi un scotome, qui est un trouble visuel parfois associé à une commotion. Le plaignant a dit à l’UES que les effets du scotome sont passagers et qu’ils surviennent le plus souvent lorsqu’il se déplace entre des zones d’intensité lumineuse différente. Les effets surviennent brièvement et disparaissent rapidement.

Preuve

Les lieux de l’incident

La scène n’a pas été examinée en raison du temps écoulé.

Preuve criminalistique

Aucun élément n’a été envoyé pour analyse au Centre des sciences judiciaires.

Preuve vidéo/audio/photographique

Vidéos des zones de l’entrée sécurisée, de l’aire de mise en détention et du bloc cellulaire du quartier général du SPL

Le 11 novembre 2016, à 23 h 06, l’AT no 1, l’AT no 2 et l’AI se trouvaient à l’arrière du fourgon cellulaire, qui était garé dans l’entrée sécurisée du quartier général du SPL. L’AI a ouvert les deux portes arrières du fourgon, et il semblait qu’il était en train de déverrouiller les portes de la cage intérieure lorsque celles‐ci se sont ouvertes d’un coup. Le plaignant se trouvait à l’intérieur du fourgon cellulaire, allongé sur le dos. Le plaignant s’était déplacé jusqu’à l’arrière ouvert du fourgon et il ne portait qu’une camisole. Ses mains menottées étaient devant lui.

Le plaignant a été déplacé par les policiers jusqu’à un mur de l’entrée sécurisée, tandis que l’AI lui tenait le bras gauche et l’AT no 1, le bras droit. Pendant que l’AT no 2 s’employait à repositionner les menottes, le plaignant a levé son pied droit légèrement vers l’arrière et l’AT no 1 a placé son propre pied droit sur le pied droit du plaignant afin de maintenir au sol le pied du plaignant.

À 23 h 07 m 06 s, l’AT no 2 s’est placée derrière le plaignant, le plaignant s’est rapidement tourné vers la gauche, du côté de l’AI, et il a levé son genou droit en direction de l’AI. En raison du positionnement de l’AT no 1 par rapport à l’angle de la caméra, on ne peut pas déterminer, sur la séquence vidéo, si le genou levé du plaignant a fait contact ou non avec l’AI. L’AT no 2 et l’AT no 1 ont réagi en poussant le plaignant contre le mur de l’entrée sécurisée, et l’AI a réagi en donnant trois coups de poing au plaignant. Le premier coup a semblé toucher la zone de l’épaule du plaignant, le deuxième l’arrière de son cou et le troisième le côté gauche de la tête du plaignant.

L’AI a alors saisi le plaignant par le cou et l’a renversé sur le sol de l’entrée sécurisée. Les bras du plaignant n’étaient pas menottés à ce moment‐là, ce qui indique que l’AT no 2 avait pu enlever au moins une menotte avant que le plaignant soit renversé sur le sol.

À 23 h 07 m 27 s, l’AT no 5 et l’AT no 4 sont arrivés dans l’entrée sécurisée pour prêter assistance.

Les mains du plaignant ont été attachées dans son dos et on a carrément porté le plaignant jusqu’à une cellule dans laquelle on l’a placé en lui faisant traverser la salle de mise en détention, l’AT no 2 demeurant dans cette salle.

L’AT no 2 a déclaré à l’agent de mise en détention, l’AT no 3, que le plaignant avait jeté tout ce qui se trouvait dans sa résidence à l’extérieur. Elle a expliqué que l’AT no 1 et elle ont cogné à la porte avant de la résidence et ont sonné. Lorsque le plaignant a fini par se présenter à la porte, il a été immédiatement agressif. Le plaignant a commencé à se diriger vers un couteau et disait qu’il allait tuer les policiers. L’AT no 2 a dit à l’AT no 3 que l’AT no 1 et elle ont mis le plaignant au sol et ont demandé l’envoi d’un fourgon cellulaire.

Immédiatement après que le plaignant fût placé dans la cellule, et pendant qu’il était allongé sur le sol, il a fait passer ses mains menottées de derrière son dos à l’avant de son corps, et ce, sans difficulté. Pendant les quelques heures qui ont suivi, le plaignant a fait les cent pas dans la cellule. On l’a fait sortir de la cellule à 5 h 46.

Enregistrements des communications

Les enregistrements de l’appel au 9‐1‐1 et des communications radio de la police ont été obtenus et écoutés.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a demandé au SPL les éléments et documents suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • enregistrements vidéo de l’aire de mise en détention du quartier général du SPL
  • enregistrements des transmissions radio de la police
  • feuilles de données sur la mise en détention
  • rapport d’incident général
  • résumés des conversations téléphoniques entre le plaignant et un sergent du Bureau des normes professionnelles (BNP) du SPL
  • transcription des conversations enregistrées sur l’une des séquences vidéo de l’aire de mise en détention
  • enregistrement de l’appel au 9‐1‐1
  • notes des AT nos 1 et 2
  • déclaration écrite des AT nos 1 à 3

L’UES a obtenu et examiné les documents suivants provenant d’autres sources :

  • dossiers médicaux du plaignant

Dispositions législatives pertinentes

Article 129 du Code criminel – Infractions relatives aux agents de la paix

129 Quiconque, selon le cas :

  1. volontairement entrave un fonctionnaire public ou un agent de la paix dans l’exécution de ses fonctions ou toute personne prêtant légalement main-forte à un tel fonctionnaire ou agent, ou lui résiste en pareil cas
  2. omet, sans excuse raisonnable, de prêter main-forte à un fonctionnaire public ou à un agent de la paix qui exécute ses fonctions en arrêtant quelqu’un ou en préservant la paix, après un avis raisonnable portant qu’il est requis de le faire
  3. résiste à une personne ou volontairement l’entrave dans l’exécution légitime d’un acte judiciaire contre des terres ou biens meubles ou dans l’accomplissement d’une saisie légale

est coupable :

  1. soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans
  2. soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire

Article 264.1 du Code criminel – Proférer des menaces

264.1 (1) Commet une infraction quiconque sciemment profère, transmet ou fait recevoir par une personne, de quelque façon, une menace :

  1. de causer la mort ou des lésions corporelles à quelqu’un
  2. de brûler, détruire ou endommager des biens meubles ou immeubles
  3. de tuer, empoisonner ou blesser un animal ou un oiseau qui est la propriété de quelqu’un

Paragraphe 270(1) du Code criminel – Voies de fait contre un agent de la paix

270 (1) Commet une infraction quiconque exerce des voies de fait :

  1. soit contre un fonctionnaire public ou un agent de la paix agissant dans l’exercice de leurs fonctions, ou une personne qui leur prête main-forte
  2. soit contre une personne dans l’intention de résister à une arrestation ou détention légale, la sienne ou celle d’un autre, ou de les empêcher
  3. soit contre une personne, selon le cas :
    1. agissant dans l’exécution légale d’un acte judiciaire contre des terres ou des effets, ou d’une saisie
    2. avec l’intention de reprendre une chose saisie ou prise en vertu d’un acte judiciaire

Article 17 de la Loi sur la santé mentale – Intervention de l’agent de police

17 Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :

  1. soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire
  2. soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles
  3. soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même

et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :

  1. elle s’infligera des lésions corporelles graves
  2. elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne
  3. elle subira un affaiblissement physique grave

et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.

Analyse et décision du directeur

Le 11 novembre 2016, le Service de police de London (SPL) a reçu un appel 9‐1‐1 vers 22 h 10 demandant une intervention policière à une adresse dans la ville de London. L’appelant a déclaré [traduction] « Il y a un jeune là, qui lance des bouteilles de bière et saccage la place. » L’appelant a aussi indiqué que le jeune en question lançait des morceaux de verre à travers sa porte et sur des voitures. À la suite de cet appel, l’agent témoin (AT) no 1 et l’AT no 2 ont été envoyés sur place.

Une fois sur les lieux, ils ont frappé à la porte et le plaignant est finalement venu répondre à la porte. Le plaignant semblait agité et était agressif avec la police. Lorsque le plaignant a menacé de tuer les policiers et a semblé se diriger vers des couteaux qu’il avait lancés sur le trottoir à l’extérieur de son domicile, il a été mis au sol et arrêté pour avoir proféré des menaces et résisté à son arrestation. Par la suite, lorsque le plaignant a opposé une résistance pendant que les policiers essayaient de lui faire prendre place à l’intérieur du véhicule de police pour le transporter au poste, l’AT no 2 a appelé le répartiteur et a demandé qu’on envoie un fourgon cellulaire pour transporter le plaignant. L’agent impliqué (AI) est alors arrivé en conduisant le fourgon, et le plaignant a été placé à l’intérieur.

Après que les policiers furent arrivés au poste de police, l’intégralité de l’incident qui a suivi a été enregistrée par la caméra du système de télévision en circuit fermé (TVCF) de l’entrée sécurisée de la division. Par conséquent, les faits ne peuvent être contestés.

L’enregistrement vidéo montre le fourgon cellulaire garé dans le garage (l’entrée sécurisée) lorsqu’à 23 h 06, l’AT no 2, l’AT no 1 et l’AI se rendent à l’arrière du fourgon pour faire sortir le plaignant. L’AI ouvre les deux portes arrières du fourgon cellulaire, et le plaignant semble avoir déverrouillé la porte de la cage intérieure lorsque les portes sont déjà grandes ouvertes. On voit alors le plaignant à l’intérieur du fourgon, allongé sur le dos, qui se met à glisser vers l’arrière ouvert du fourgon. Le plaignant est complètement nu si ce n’est qu’il porte une camisole. Bien qu’on l’eut menotté dans le dos sur les lieux de l’incident, ses mains menottées se trouvent maintenant devant son corps.

Les policiers font alors sortir le plaignant du fourgon et le déplacent jusque contre le mur de l’entrée sécurisée, l’AI tenant le bras gauche du plaignant et l’AT no 1, le bras droit. Pendant que l’AT no 2 semble s’employer à repositionner les menottes, le plaignant soulève légèrement son pied droit vers l’arrière et l’AT no 1 place son propre pied droit sur celui du plaignant, apparemment pour maintenir au sol le pied droit du plaignant.

À 23 h 07 m 06 s, alors que l’AT no 2 se place derrière le plaignant, vraisemblablement pour le menotter à nouveau dans le dos, le plaignant se tourne rapidement vers la gauche, vers l’AI, et il soulève son genou droit en direction de l’AI. En raison de l’emplacement de l’AT no 1 par rapport à l’angle de la caméra, je suis incapable de déterminer si le genou levé du plaignant a effectivement ou non fait contact avec l’AI. On voit l’AT no 2 et l’AT no 1 réagir à ce geste en poussant le plaignant contre le mur de l’entrée sécurisée, tandis que l’AI administre trois coups de poing au plaignant; Le premier semble l’atteindre quelque part sur la zone de l’épaule, le second touche à l’arrière du cou et le troisième le frappe sur le côté gauche de la tête.

On voit ensuite l’AI saisir le plaignant par le cou et le renverser sur le sol de l’entrée sécurisée. Les bras du plaignant ne semblent pas menottés à ce moment‐là, ce qui indique que l’AT no 2 n’avait pas encore réussi à réappliquer les menottes dans le dos du plaignant. Le plaignant est ensuite porté jusqu’à l’intérieur du bloc cellulaire du poste de police, puis est placé dans une cellule pour la nuit.

Le lendemain, après avoir été libéré, le plaignant s’est rendu à l’hôpital, où on lui a diagnostiqué une commotion. Un tomodensitogramme n’a révélé aucune anomalie. Le plaignant a toutefois indiqué qu’il souffre maintenant d’une sensibilité à la lumière à l’œil droit et qu’il voit parfois des points ou des flashs. Le plaignant a indiqué que, lorsque son œil s’ajuste d’une zone sombre à une zone éclairée ou vice versa, il remarque une sorte de vision voilée à son œil. Le plaignant a indiqué que d’autres fois il n’a aucun problème et que ce problème qu’il a à l’œil droit est de nature mineure; il l’a catégorisé, sur une échelle de un à dix – un étant de l’irritation et dix étant l’incapacité de voir – comme un problème d’intensité un.

Le plaignant était le seul témoin civil présent durant son interaction avec la police au poste de police et, malheureusement, il n’avait que peu ou pas de souvenir de l’incident, à part ce que d’autres lui ont dit. En plus du plaignant, durant le déroulement de cette enquête, un autre témoin civil de l’incident à la résidence a été questionné, de même qu’un médecin. Les enquêteurs ont aussi interrogé six agents de police, dont l’AI, et ont examiné les notes de deux de ces agents, ainsi que les déclarations écrites préparées par trois des agents. L’AI n’a pas fourni ses notes pour examen, comme il en a légalement le droit. Comme je l’ai indiqué plus haut, cependant, l’intégralité de l’incident où il semble que le plaignant se soit blessé a été captée sur vidéo, et l’enregistrement vidéo a révélé le gros de la preuve sur laquelle je me suis fondé pour former mon opinion.

D’après l’opinion d’un expert médical quant à la blessure subie par le plaignant, elle a été décrite comme étant un « scotome », ce qui est une altération partielle du champ de vision qui diminue l’acuité visuelle. D’autres résultats d’analyse et tomodensitogrammes ont permis d’écarte la possibilité d’une hémorragie cérébrale ou d’un saignement dans les globes oculaires. Malheureusement, en l’absence de résultats d’analyse de la vision du plaignant datant d’avant son interaction avec la police du 11 novembre, les médecins ne pouvaient se fier qu’aux propres observations du plaignant. L’expert a ajouté que le scotome est l’un des symptômes possibles d’une commotion et que, à l’instar des autres symptômes d’une commotion, comme les étourdissements ou les vomissements, le scotome peut ne durer que brièvement ou avoir un effet plus durable.

L’auteur de l’appel au 9‐1‐1, qui a regardé le plaignant jeter ses affaires dans la rue et [traduction] « s’emballer », a observé l’AT no 2 et l’AT no 1 traiter avec le plaignant à la résidence. Il a décrit le plaignant comme ayant une attitude belliqueuse et disant des choses terribles aux policiers, lesquels ont finalement dû le maîtriser en le mettant au sol, sur la pelouse, et en le menottant. Le plaignant a alors opposé une résistance lorsque les policiers ont tenté de lui faire prendre place à l’intérieur de l’autopatrouille, si bien qu’un fourgon cellulaire a été appelé. Une fois que le plaignant a été placé à l’intérieur du fourgon, l’auteur de l’appel au 9‐1‐1 a observé le plaignant en train de se balancer d’avant en arrière à l’intérieur du fourgon et en train de donner des coups de pied et de crier. À aucun moment n’a‐t‐il vu un agent de police frapper le plaignant ni n’a remarqué que le plaignant avait des blessures.

L’AI a indiqué qu’il a conduit le fourgon cellulaire jusqu’au lieu de l’incident, que le plaignant a été placé à l’intérieur du fourgon, à l’arrière, et qu’il a alors commencé à donner des coups de pied sur la porte et à frapper partout. Pendant qu’ils étaient en route vers la division, le plaignant a proféré des menaces de mort à l’AI et a continué de se jeter contre l’arrière du fourgon.

À leur arrivée à la zone de l’entrée sécurisée du quartier général du SPL, l’AI a conseillé à l’AT no 2 et à l’AT no 1 d’être prudents au moment de faire sortir le plaignant, car son comportement instable semblait avoir empiré.

L’AI a indiqué que, tandis que l’AT no 1 et lui ouvraient les portes extérieures du fourgon, le plaignant avait ouvert les portes de la cage interne en donnant des coups de pied et qu’ils ont vu qu’il n’était vêtu que d’une camisole et qu’il avait déplacé ses mains menottées du dos vers l’avant de son corps. L’AI a décrit la situation comme suscitant des craintes pour la sécurité des agents, vu que le plaignant avait déjà menacé de tuer les trois agents et leurs enfants, qu’il transpirait abondamment à ce moment‐là et qu’il semblait surexcité. L’AI a exprimé l’avis que le plaignant pouvait avoir été sous l’effet de drogues illégales. L’AI a indiqué que, du fait que les menottes du plaignant se trouvaient maintenant devant son corps et qu’il avait déjà résisté à la police à sa résidence, il a estimé qu’il fallait repositionner les menottes dans le dos du plaignant.

L’AI a indiqué que l’AT no 1 et lui ont amené le plaignant jusqu’à la zone de fouille de l’entrée sécurisée et qu’il a demandé à l’AT no 2 de retirer les menottes afin de menotter de nouveau le plaignant dans le dos. Dès que l’AT no 2 a enlevé la première des deux menottes, le plaignant s’est rapidement tourné et a donné un coup de pied dans l’entrejambe de l’AI, faisant perdre à l’AI le contrôle du bras gauche du plaignant. L’AI a alors administré trois coups de distraction au plaignant, un à mi‐hauteur et deux sur la tête. L’AI a indiqué que ces coups n’ont pas été donnés à titre de représailles pour le coup de pied reçu dans son entrejambe mais plutôt pour reprendre le contrôle du plaignant, qui était violent et hors de contrôle. De plus, l’AI était d’avis que la menotte qui pendait maintenant du poignet du plaignant pouvait être utilisée comme une arme.

L’AI a indiqué que les trois coups administrés ne se voulaient pas des [traduction] « coups de knockout » – j’imagine que l’AI entend par là des coups dévastateurs pleine force – mais plutôt des « jabs » (coups de poing directs) qui ont été utilisés pour reprendre le contrôle du plaignant. L’AI a indiqué qu’il pensait que ces coups étaient sa seule option à ce moment‐là, puisque les policiers avaient perdu le contrôle d’un prisonnier agile et violent. Du fait que les trois agents se trouvaient si près du plaignant, l’utilisation d’Oléorésine de capsicum (OC ou gaz poivré) ou d’une arme à impulsions (Taser) n’était pas une option viable. L’AI a aussi jugé qu’il lui fallait agir rapidement du fait que le plaignant avait maintenant une menotte qui pendait de son poignet et qu’il pouvait utiliser comme une arme.

Lorsque le coup administré sur le côté du plaignant n’a suscité aucune réaction de la part du plaignant, l’AI en est venu à administrer deux coups à la tête du plaignant. L’AI a indiqué que les coups n’avaient pas pour but de blesser le plaignant, mais plutôt de le distraire en sorte que les policiers puissent reprendre le contrôle du plaignant. Le plaignant a alors été mis au sol, sur le ventre, où on l’a de nouveau menotté dans le dos en lui signifiant qu’il était maintenant aussi arrêté pour voies de fait sur un agent de police. Lorsque les agents ont demandé au plaignant de se redresser, il a refusé de le faire, si bien qu’il a été porté directement jusqu’à la cellule et qu’on ne lui a pas enlevé les menottes.

L’intégralité du témoignage de l’AI concernant ce qui s’est produit et à quel moment concorde avec les images de l’enregistrement vidéo de TVCF, à l’exception du coup de genou à son aine, que l’enregistrement vidéo ne me permettait pas de confirmer car l’angle de la caméra était bloqué par la présence de l’AT no 1.

Cela dit, l’AT no 2 et l’AT no 1 ont tous deux indiqué qu’ils ont vu que le plaignant a fait contact avec l’AI lorsqu’il lui a donné un coup de genou dans l’entrejambe, l’AT no 2 précisant que l’AI a immédiatement fait un pas en arrière après avoir reçu le coup de genou et l’AT no 1 indiquant que, dès qu’il a été agressé, l’AI a frappé le plaignant à l’estomac puis au visage afin d’arrêter la menace et de faire obtempérer le plaignant.

L’AT no 4 a indiqué qu’il a entendu quelqu’un crier pour obtenir de l’aide dans l’aire de l’entrée sécurisée et que l’AT no 5 et lui s’y sont rendus pour prêter assistance. L’AT no 4 a indiqué qu’il a vu l’AT no 1 et l’AI essayer de menotter le plaignant, lequel était au sol sur le ventre et agitait ses jambes tout en criant et en se débattant avec les agents pour tenter de se dégager. L’AT no 4 a indiqué qu’il a mis son pied sur le talon du plaignant pour l’empêcher de donner des coups de pied aux agents.

Dans ces circonstances, il est heureux qu’on ait pu disposer de l’enregistrement vidéo de TVCF de l’entrée sécurisée pour le visionner, car ni l’AT no 2 ni l’AT no 3, même après avoir visionné la vidéo qui montrait clairement l’AI administrer trois coups de poing au plaignant, n’aurait admis que l’AI avait fait cela.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police peuvent seulement recourir à la force qui est raisonnablement nécessaire dans l’exécution d’une obligation légale. En ce qui concerne tout d’abord la légalité de l’appréhension du plaignant, il ressort clairement de l’appel au 9‐1‐1, ainsi que cela a été confirmé par les témoins présents sur la scène de l’incident, que le plaignant avait un comportement instable, qu’il lançait ses affaires sur la pelouse et en direction de passants et qu’il [traduction] « s’emballait. » Par conséquent, il était du devoir de la polie d’intervenir et d’enquêter afin d’assurer la sécurité tant du plaignant que des citoyens.

Lorsque le plaignant est ensuite devenu agressif verbalement, a menacé de trancher la gorge des agents et a commencé à se diriger vers un endroit où il avait lancé un certain nombre de couteaux, la police avait des motifs raisonnables d’arrêter le plaignant pour avoir proféré des menaces. Qui plus est, même s’ils ne l’ont pas explicitement dit, les policiers avaient aussi des motifs raisonnables d’appréhender le plaignant en vertu de la Loi sur la santé mentale en raison de son comportement bizarre et insensé, puisqu’il représentait un danger pour lui‐même et pour autrui. Ainsi, l’appréhension et l’arrestation du plaignant étaient légalement justifiées dans les circonstances.

En ce qui concerne la force employée par les agents, à la lumière du témoignage du témoin civil indépendant qui était présent sur place, il ne fait aucun doute que les agents qui se sont présentés à la résidence n’ont employé que la force nécessaire pour amener le plaignant au sol et le menotter. Selon toute vraisemblance, compte tenu de l’ensemble de la preuve, si le plaignant a été blessé, sa blessure s’est produite dans l’aire de l’entrée sécurisée du poste de police, quoi qu’il demeure possible qu’il se soit blessé soit avant l’arrivée de la police[1], soit lorsqu’il n’arrêtait pas de se jeter contre les parois du compartiment arrière du fourgon cellulaire.

Je me penche à présent sur les gestes de l’AI après que le plaignant a levé son genou pour le frapper à l’entrejambe pendant que l’AT no 2 tentait de remenotter le plaignant dans le dos. Bien que l’on ne voit pas clairement sur la vidéo si le plaignant a fait contact ou non avec l’AI, je n’ai aucune raison de ne pas accepter le témoignage des trois agents, soit l’AI, l’AT no 1 et l’AT no 2, selon lequel le plaignant a bel et bien donné un coup de genou à l’AI à l’entrejambe, puisqu’il n’y a aucune preuve du contraire. Qui plus est, alors que la totalité du reste du témoignage de l’AI et de l’AT no 1 est entièrement confirmée par la séquence vidéo de TVCF, j’estime que leur version des événements est crédible et je tiens pour véridique ce seul point que je n’ai pu observer du fait qu’il n’a pas été capté par la vidéo.

Bien qu’il soit vrai que si l’AI avait frappé le plaignant à trois reprises dans une réaction de colère parce qu’il l’avait agressé ou encore pour se venger de cette agression, cela n’aurait pas constitué un recours justifié à la force, il demeure que je ne dispose que du témoignage de l’AI quant à son processus de réflexion à ce moment‐là. Si je retiens le raisonnement de l’AI selon lequel il a administré les trois « jabs » au plaignant parce que le plaignant était hors de contrôle, avait maintenant une menotte qui lui pendait du poignet et dont il pouvait se servir comme une arme et avait déjà agressé l’AI, j’accepte que les gestes de l’AI auraient été justifiés dans les circonstances et qu’ils n’auraient pas représenté un recours excessif à la force.

J’ai également tenu compte de la justification donnée par l’AI selon laquelle il a écarté les autres options possibles d’emploi de la force, les jugeant non viables dans ces circonstances particulières où le plaignant et les trois agents se trouvaient évoluaient dans un espace restreint et où toute utilisation soit d’une arme à impulsions soit de l’aérosol capsique aurait sans doute incapacité l’un des autres agents tout autant que le plaignant, et je conclus que son analyse était bien réfléchie et raisonnable à ces égards.

Étant donné que le témoignage de l’AI est entièrement confirmé par l’enregistrement vidéo de TVCF et que le seul point que la vidéo ne permet pas de déterminer[2] est corroboré par le témoignage des deux autres agents présents, je conclus que je n’ai pas de raison de rejeter la preuve de l’AI, si bien que je l’accepte comme étant une description exacte de son processus de réflexion à ce moment‐là. Par conséquent, bien que, selon toute vraisemblance, c’est le coup de poing donné à la tête du plaignant qui lui a causé sa blessure, je ne puis conclure que les actes de l’AI ont représenté un recours excessif à la force dans cette circonstance. J’accepte que le plaignant a été à la fois combatif et résistant sur les lieux de l’incident, qu’il a lutté avec les agents pour éviter qu’on le place dans l’autopatrouille, qu’il a ensuite manifesté sauvagement et de façon très physique son opposition après qu’on l’eut placé dans le fourgon cellulaire, qu’il menaçait verbalement les agents, qu’il avait déjà agressé l’AI, que le premier coup de poing reçu à mi‐hauteur par le plaignant n’avait suscité aucune réaction de sa part, qu’il avait ensuite accès à une arme potentielle et qu’il était capable de causer encore plus de dommages s’il n’était pas maîtrisé, et ce, rapidement.

Pour en arriver à la conclusion que l’AI n’a pas recouru à un emploi de la force injustifié lorsqu’il a administré les trois « jabs » au plaignant, j’ai tenu compte de la décision que la Cour suprême du Canada a rendue dans l’arrêt R. c. Nasogaluak [2010] 1 R.C.S. 206, qui dit ceci :

Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux‐ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. c. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C.‐B.) :

[traduction] Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait pas s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218].

J’ai également tenu compte de la décision que la Cour d’appel de l’Ontario a rendue dans l’affaire R. c. Baxter (1975) 27 C.C.C. (2d) 96 (C.A. de l’Ont.), selon laquelle on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention.

En fin de compte, en concluant que la blessure grave subie par le plaignant, s’il y en avait une, parce que l’évaluation n’était pas tout à fait définitive, a été causée par un coup que l’AI a donné sur la tête du plaignant après que le plaignant eut agressé l’AI et que le plaignant était maintenant en possession d’une arme potentielle avec laquelle il aurait pu infliger d’autres blessures aux agents de police, je ne saurais conclure que cette preuve est suffisante pour me convaincre qu’il y a des motifs raisonnables de croire que les actions de l’AI ont été excessives et/ou injustifiées dans ces circonstances. J’admets que l’AI a réagi rapidement face à une situation qu’il a perçue comme dangereuse et qu’il a agi en sorte de contrôler le plaignant le plus rapidement possible et d’assurer ainsi sa propre sécurité ainsi que celle de ses collègues policiers. Par conséquent, je suis convaincu, pour des motifs raisonnables, que les gestes posés par l’AI, bien qu’ils ne fussent pas parfaits, étaient dans les limites prescrites par le droit criminel et qu’il n’a pas de raison de croire que l’AI a commis une infraction criminelle, de sorte qu’aucune accusation ne sera portée contre lui.

Date : 4 avril 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) [1] Dans les notes du médecin, il est indiqué que le plaignant avait mentionné qu’il avait eu une sorte de bagarre avec ses colocataires. [Retour au texte]
  • 2) [2] Le corps de l’AT no 1 obstrue la vue lorsque le plaignant se tourne vers l’AI. [Retour au texte]

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