Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-168

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Le présent rapport décrit l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 34 ans lors de son arrestation le 4 juillet 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Vers 7 h 45, le mardi 4 juillet 2017, le Service de police de Chatham-Kent (SPCK) a informé l’UES de la blessure subie par le plaignant durant sa mise sous garde.

Le SPCK a déclaré que le 4 juillet 2017, à 4 h 31, des agents de police avaient arrêté le plaignant pour voies de fait contre sa partenaire, la témoin civile (TC) no 2. Le plaignant a résisté et a été mis au sol. Pendant qu’il était transporté au poste de police, il a commencé à se cogner le visage contre l’écran de sécurité dans la voiture de patrouille. Il a ensuite été transporté à l’hôpital où il a reçu des soins parce qu’il avait le nez cassé.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 2

Plaignant :

Homme de 34 ans, interviewé, dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC n° 1 A participé à une entrevue

TC n° 2 A participé à une entrevue

TC n° 3 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT n° 1 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

AT n° 2 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

AT n° 3 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

[Remarque : Un agent témoin est un agent de police qui, de l’avis du directeur de l’UES, est en cause dans l’incident qui fait l’objet d’une enquête, mais qui n’est pas un agent impliqué.

En vertu du Règlement de l’Ontario 267/10, pris en vertu de la Loi sur les services policiers, les agents témoins sont tenus de rencontrer l’UES et de répondre à ses questions après avoir reçu une demande d’entrevue de celle-ci. L’UES a aussi le droit d’obtenir une copie de leurs notes auprès du service de police dont ils sont membres.]

Agents impliqués (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

AI no 2 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

AI no 3 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Description de l’incident

Le 4 juillet 2017, le SPCK a reçu un appel au numéro 9‐1‐1 signalant que le plaignant se comportait de façon étrange parce qu’il avait ingéré des stupéfiants et qu’il s’était attaqué à une occupante dans sa résidence dans la municipalité de Chatham-Kent. Initialement, l’agent impliqué (AI) no 1 et l’AI no 2 ont été dépêchés à la résidence. Quand ces deux agents ont appelé pour demande de l’aide, l’AI no 3 s’est également rendu à l’adresse.

Les agents de police ont tenté d’arrêter le plaignant pour voies de fait contre un membre de la famille, mais il a résisté et ils l’ont amené au sol, où il s’est heurté le visage sur les pierres de la terrasse, après quoi son visage a commencé à saigner. Puis, le plaignant a été arrêté et après avoir été transporté d’abord au poste de police, avant même qu’il sorte de la voiture de patrouille, on a décidé de l’amener directement à l’hôpital.

Nature des blessures et traitement

Le 4 juillet 2017, à 5 h 02, le plaignant a été transporté à l’hôpital par le SPCK. Selon le diagnostic, il avait une fracture communitive (cassure/fractionnement de l’os en plus de deux morceaux) de l’os nasal et de la cloison nasale.

Le plaignant n’a pas suivi de traitement particulier et il a reçu son congé de l’hôpital à 11 h 10.

Preuve

Les lieux de l’incident

La résidence où le plaignant a été arrêté est un logement résidentiel unifamilial. Il y avait un petit trottoir menant de l’entrée au côté ouest du bâtiment vers l’est jusqu’à la porte d’entrée de la résidence. Il y avait plusieurs endroits sur le trottoir où il y avait des taches soupçonnées d’être du sang. Il y avait un gros contenant en plastique près du trottoir où le même genre de taches semblait avoir formé une mare.

La portée d’entrée menait à un petit salon. Il y avait une table basse au centre de la pièce dont un des bords était endommagé. Un escalier ouvert donnait accès à un loft ainsi qu’à une chambre à coucher au deuxième étage; au haut de l’escalier, il y avait une porte endommagée qui avait été retirée de ses charnières.

Éléments de preuve médico-légaux

Aucun document ou élément n’a été soumis au Centre des sciences judiciaires.

Preuve vidéo/audio/photographique

Résumé de la vidéo filmée dans l’entrée sécurisée du poste de police du SPCK :

L’AI no 2 a conduit son véhicule dans l’entrée sécurisée, et l’AT no 1 l’a rencontré à la porte de l’aire de mise en détention. L’AI no 2 est sorti du véhicule de police et lui et l’AT no 1 ont eu une brève conversation. Le plaignant est demeuré dans le véhicule de police, et l’AI no 2 y a repris place et a quitté l’entrée sécurisée.

Enregistrements de communications

Résumé de l’appel au numéro 9‐1‐1 :

Le 4 juillet 2017, à 4 h 38, la TC no 1 a appelé au numéro 9‐1‐1 et a signalé que le plaignant était devenu psychotique parce que la TC no 2, qui habitait avec lui depuis trois ans, l’avait trompé.

L’appelante a expliqué que vers 2 h 30, le plaignant avait arraché une porte de ses charnières et l’avait jetée en bas des escaliers, heurtant le nez de la TC no 2. L’appelante a indiqué qu’à son avis, le plaignant souffrait d’une maladie mentale et qu’il devait aller à l’hôpital.

Puis, la TC no 2 était venue au téléphone et avait expliqué que le plaignant prenait des médicaments pour son état de santé mentale, qu’il fumait de la marijuana et qu’il prenait ses médicaments à la méthadone. La TC no 2 a indiqué qu’elle pensait que le plaignant devenait fou et qu’il dérangeait le quartier et qu’elle craignait pour sa propre vie, même si le plaignant ne l’avait jamais frappée par le passé.

Le répartiteur a dit qu’il y avait deux agents de police à la porte et une fois que la TC no 1 a confirmé leur présence, l’appel téléphonique s’est terminé.

Résumé de l’enregistrement des communications du SPCK :

L’enregistrement des transmissions de la police a révélé ce qui suit :

L’AI no 1 et l’AI no 2 ont été envoyés en réponse à un appel concernant un conflit familial. On a dit aux deux agents de police que le plaignant avait arraché une porte et l’avait jetée vers la TC no 2. Le plaignant se trouvait dans la chambre à coucher et il avait des problèmes de santé mentale. Le plaignant faisait l’objet d’une mise en garde faisant état d’un risque de violence, parce qu’il avait utilisé des armes à feu prohibées par le passé.

L’AI no 2 a signalé qu’ils se trouvaient dans la résidence et que le plaignant était assez agressif. L’AI no 2 a demandé l’envoi d’une troisième unité pour prêter secours, et l’AI no 3 a été envoyé et est arrivé à l’adresse. L’AI no 2 a dit au plaignant qu’il était en état d’arrestation pour voies de fait avec une arme.

L’AI no 2 a dit au plaignant qu’il serait amené au poste de police, et des arrangements ont été pris pour que d’autres agents de police se rendent à l’aire de mise en détention.

L’AI no 2 et le plaignant sont alors arrivés au poste de police. Peu après, le plaignant a été transporté à l’hôpital, et l’on a communiqué avec le service d’urgence pour annoncer son arrivée.

Documents obtenus du service de police

L’UES a demandé au SPCK les documents et éléments suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • rapport d’arrestation du plaignant
  • chronologie des événements
  • rapport sur les détails de l’incident
  • notes des AT nos 1, 2 et 3
  • enregistrements de l’appel au numéro 9‐1‐1 et des communications de la police
  • vidéo de l’entrée sécurisée au poste de police du SPCK
  • procédure : lignes directrices sur le recours à la force de la CPO (avril 2013)
  • procédure : modèle de recours à la force de l’Ontario (nov. 2011)
  • procédure : recours à la force (nov. 2011)
  • dossiers de formation des trois AI

L’UES a obtenu et a examiné les documents suivants provenant d’autres sources :

  • Dossiers médicaux du plaignant.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel – Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Article 267 du Code criminel - Agression armée ou infliction de lésions corporelles

267 Est coupable soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans, soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et passible d’un emprisonnement maximal de dix-huit mois quiconque, en se livrant à des voies de fait, selon le cas :

  1. porte, utilise ou menace d’utiliser une arme ou une imitation d’arme
  2. inflige des lésions corporelles au plaignant

Analyse et décision du directeur

Le 4 juillet 2017, vers 4 h 09, le Service de police de Chatham‐Kent (SPCK) a reçu un appel au numéro 9‐1‐1 de la témoin civile (TC) no 1, qui a indiqué que le plaignant traversait un épisode psychotique et qu’elle avait besoin de l’aide de la police. Dans l’enregistrement de l’appel au numéro 9‐1‐1, on entend la TC no 1 dire au répartiteur qu’à environ 2 h 30 ce matin‐là, le plaignant avait arraché une porte de ses charnières et l’avait jetée en bas de l’escalier à la TC no 2 et que la porte avait heurté la TC no 2 au nez. Puis, on entend la TC no 2 venir au téléphone et dire qu’elle avait le sentiment que le plaignant devenait fou et qu’elle avait peur pour sa vie, même si le plaignant ne l’avait jamais frappée. Par conséquent, l’agent impliqué (AI) no 1, l’AI no 2 et l’AI no 3 ont été dépêchés à la résidence dans la municipalité de Chatham-Kent. Par la suite, le plaignant a été arrêté pour voies de fait contre sa partenaire, la TC no 2 (en contravention de l’art. 266 du Code criminel). Après son interaction avec la police, le plaignant a été transporté à l’hôpital, où, selon le diagnostic posé, il avait une fracture communitive à l’os nasal et à la cloison nasale.

Le plaignant allègue que le 4 juillet 2017, il avait eu une dispute avec la TC no 2 durant laquelle il était devenu extrêmement bouleversé. Le plaignant allègue qu’après qu’il avait brisé sa commode (la commode du plaignant), six à huit agents de police s’étaient manifestés, mais il n’était pas en mesure de dire pourquoi ils étaient venus, mais qu’il se pourrait fort bien qu’il s’agissait d’un appel à la suite d’un conflit familial. Il a affirmé que quatre agents de police s’étaient retrouvés dans sa chambre à coucher et avaient manqué de respect envers lui et qu’il était sorti dehors avec eux. Les agents lui avaient dit qu’il était en état d’arrestation pour voies de fait contre un membre de la famille et il avait eu un vif échange avec eux, puisqu’il n’était pas d’accord. Il a indiqué qu’un agent de police lui avait mis une menotte à la main droite, mais qu’elle faisait mal et qu’il avait reculé brusquement. Il a précisé qu’il était bouleversé, qu’il ne résistait pas, et qu’un agent de police lui avait alors donné un coup de poing au nez, qui avait commencé à saigner. Puis, le plaignant s’était rendu à une voiture de patrouille et avait insulté les agents et il s’était mis dans le siège arrière et avait dit aux agents qu’il casserait la vitre du côté passager parce qu’il était terriblement bouleversé par le fait que son nez avait été cassé. Le plaignant a indiqué qu’il n’avait en fait jamais cogné son visage contre l’écran de sécurité dans la voiture de patrouille. Initialement, le plaignant avait été amené au poste de police et non pas à l’hôpital.

Durant l’enquête, les enquêteurs de l’UES se sont entretenus avec quatre témoins civils, dont le plaignant, et les trois AI ont subi une entrevue. De plus, les enquêteurs de l’UES avaient accès aux enregistrements de l’appel au numéro 9‐1‐1 et des transmissions radio de la police, ainsi qu’aux dossiers médicaux du plaignant et aux données téléchargées de l’arme à impulsions en la possession de l’AI no 3, à la date de l’incident.

La TC no 1 a déclaré que le plaignant était sorti de sa chambre, avait crié contre elle et puis était retourné dans sa chambre où apparemment il avait poussé la porte de celle-ci hors de ses charnières et l’avait jetée par-dessus la balustrade; la porte avait d’abord percuté l’aquarium pour ensuite rebondir et heurter une table basse située proche, créant une bosse dans ce meuble, avant de toucher la TC no 2 au nez. Puis, le plaignant était descendu des escaliers, avait saisi la porte et était retourné à sa chambre à coucher, et la TC no 1 avait appelé au numéro 9‐1‐1.

La TC no 1 a indiqué que le TC no 3 était sorti dehors et avait amené les deux agents de police à l’intérieur de la résidence. Elle a précisé que les agents avaient appelé le plaignant, qui était descendu volontairement et calmement pour leur parler. Puis, les agents avaient attiré le plaignant à l’extérieur et se tenaient debout sur une terrasse en pierre juste de l’autre côté de la porte, pendant qu’elle restait à l’intérieur. La TC no 1 a indiqué que depuis l’intérieur de la maison, elle avait pu voir le plaignant tendre ses bras et demander plusieurs fois pourquoi on l’arrêtait, mais qu’elle n’avait pas entendu de réponse de la part des agents. Puis, elle avait vu l’un des agents dégainer soudainement une arme à impulsions de son côté gauche et elle avait entendu le son de la décharge de l’arme à impulsions pendant environ cinq secondes, après quoi le plaignant avait hurlé et était tombé vers l’arrière et hors de sa vue. La TC no 1 avait alors entendu deux décharges additionnelles de l’arme à impulsions, chaque décharge durant dix secondes, tandis que le plaignant continuait de hurler de douleur.

Dans sa déclaration, la TC no 2 a indiqué qu’elle était assise dans le salon sur le canapé lorsque soudainement la porte de la chambre à coucher était passée par-dessus la rampe d’escalier et l’avait manquée de peu. Le plaignant insultait la TC no 2. Puis, le plaignant était descendu des escaliers, avait ramassé la porte et l’avait ramenée à la chambre à coucher, où il continuait de crier et de pleurer. La TC no 1 avait alors appelé le numéro 9‐1‐1, et deux agents de police étaient venus. La TC no 2 a expliqué que le plaignant était devenu fou et qu’il était hors contrôle et avait besoin d’aide. La TC no 2 a déclaré que les deux agents de police, sans parler à qui que ce soit, étaient montés, et étaient suivis plus tard par deux autres agents de police. Les agents avaient traîné le plaignant sur les marches et à l’extérieur; le plaignant ne résistait pas.

La TC no 2 est restée à l’intérieur de la maison et ne pouvait voir ce qui se passait dehors, mais elle a entendu le plaignant crier de douleur et hurler [traduction] « Aidez‐moi! Pourquoi? » et la TC no 1 lui avait dit que la police utilisait le « Taser » (arme à impulsions) contre le plaignant. Même si la TC no 2 n’avait pas entendu le son de l’arme à impulsions, elle avait regardé dehors et avait vu des dards plantés dans le corps du plaignant et l’un des quatre ou cinq agents de police tenir une arme à impulsions entre les mains.

Le TC no 3 a déclaré que vers 4 h, le plaignant avait commencé à crier contre les trois autres occupants de la maison. Le plaignant était devenu bouleversé et avait jeté une porte depuis l’étage vers le salon, où le TC no 3 avait réussi à arrêter le trajet de la porte afin d’éviter qu’elle touche quelqu’un, mais il n’était pas sûr si la TC no 2 avait été touchée ou non. La TC no 1 avait alors appelé le numéro 9‐1‐1 vers 4 h 30 et deux agents de police étaient arrivés, dont un avait parlé aux trois résidents pour savoir ce que le plaignant avait fait.

Puis, le plaignant était sorti dehors et se trouvait devant la porte avant lorsqu’il avait de nouveau commencé à [traduction] « piquer une crise »; à ce moment‐là, il y avait trois agents de police ou plus sur les lieux. Le TC no 3 a indiqué qu’il était resté à l’intérieur de la maison et qu’il n’avait pas vu l’arrestation, mais qu’il avait entendu des cris et les agents dire au plaignant qu’il était en état d’arrestation. Le TC no 3 avait entendu le plaignant résister aux agents de police, qui avaient été obligés d’utiliser une arme à impulsions. Le TC no 3 a déclaré qu’il n’avait entendu aucun ordre ni avertissement venant de la police avant l’utilisation de l’arme à impulsions et que la décharge avait duré une à deux minutes. Le TC no 3 pensait que le plaignant était alors tombé au sol en atterrissant sur le visage et où il avait été menotté les mains derrière le dos.

Pour les motifs qui suivent, je ne puis accorder de crédibilité à la preuve fournie par le plaignant et les trois autres TC et je conclus que leur témoignage n’offre pas le degré de fiabilité requis pour me convaincre, pour des motifs raisonnables, que l’interaction entre la police et le plaignant s’est produite comme l’ont décrite les différents témoins; ces versions manquent totalement de cohérence en ce qui concerne un grand nombre de détails. Voici des exemples de ces manques de cohérence :

Le plaignant a prétendu que six à huit agents de police s’étaient présentés à sa résidence le 4 juillet 2017, et que quatre d’entre eux s’étaient rendus dans sa chambre à coucher, tandis que la TC no 2 a indiqué que le nombre des agents était de quatre et qu’ils étaient tous montés à la chambre à coucher. Or, d’après les enregistrements et le dossier des transmissions radio, il est clair que seulement trois agents avaient été envoyés à la résidence, à savoir l’AI no 2, qui y a été dépêché à 4 h 14 m 20 s et qui y est arrivé à 4 h 23 m 05 s, l’AI no 1, qui y a été dépêché à 4 h 14 m 23 s et qui était le premier à arriver sur les lieux à 4 h 20 m 04 s et l’AI no 3, qui y a été envoyé à 4 h 23 m 02 s après que les deux autres agents étaient déjà sur place et y est arrivé à 4 h 26 m 38 s. Ces éléments appuient le témoignage des trois AI selon lequel ils étaient les seuls agents à s’être présentés et contredisent le témoignage du plaignant et de la TC no 2.

La TC no 2 a déclaré qu’elle avait vu des dards de l’arme à impulsions plantés dans le corps du plaignant, tandis qu’aussi bien le TC no 3 que la TC no 1 ont affirmé qu’ils avaient entendu l’utilisation de l’arme à impulsions : la TC no 1 a indiqué qu’elle l’avait entendue trois fois, d’abord pendant cinq secondes et puis à deux reprises pendant dix secondes chaque fois, tandis que le TC no 3 a déclaré qu’il avait entendu la décharge de l’arme à impulsions pendant environ une à deux minutes. Cette preuve est contredite directement par le plaignant lui‐même, qui n’a jamais mentionné l’utilisation d’une arme à impulsions, ainsi que par les données téléchargées de l’arme à impulsions en la possession de l’AI no 3, qui corroborent le témoignage des trois agents impliqués qu’aucune arme à impulsions n’a jamais été utilisée.

La TC no 2 a déclaré que la police s’était rendue directement à la chambre du plaignant sans parler à qui que ce soit dans la maison, tandis que le TC no 3 a affirmé qu’il avait parlé à deux agents de police à l’extérieur de la maison et que l’un des agents était alors entré et avait parlé aux trois résidents autres que le plaignant. Le témoignage du TC no 3 est confirmé par la TC no 1 et contredit directement le témoignage de la TC no 2, mais est entièrement compatible avec les affirmations des trois agents impliqués.

La TC no 2 a déclaré que les agents de police avaient traîné le plaignant en bas de l’escalier à partir de sa chambre à coucher au deuxième étage et puis à l’extérieur, en dépit du fait que le plaignant ne résistait pas, tandis que la TC no 1 a déclaré que les agents avaient appelé le plaignant et qu’il était descendu volontairement et calmement des escaliers pour leur parler et qu’ensuite, les agents l’avaient attiré à l’extérieur. Le témoignage de la TC no 1 contredit complètement celui de la TC no 2, mais confirme le témoignage des trois agents impliqués.

Le plaignant allègue qu’il avait été amené au poste de police et non pas à l’hôpital, ce qui est contredit directement par la vidéo enregistrée au poste de police du SPCK dans l’entrée sécurisée où l’on voit la voiture de patrouille y pénétrer; on voit l’AT no 1 regarder à l’intérieur du véhicule et avant même que le plaignant sorte de la voiture, la voiture repart avec lui à son bord. Les dossiers médicaux du plaignant confirment également qu’on l’avait examiné à l’hôpital.

Dans sa déclaration, le plaignant ne mentionne jamais qu’il avait jeté la porte de la chambre à coucher en bas des escaliers, indiquant seulement qu’il croyait que les agents étaient peut‐être venus à la résidence parce qu’il avait brisé une commode. Les trois témoins civils ont indiqué clairement que la porte de la chambre à coucher avait été jetée en bas de l’escalier par le plaignant, et la porte elle‐même se trouvait en haut des escaliers lorsque les enquêteurs de l’UES ont examiné les lieux plus tard la même journée.

La TC no 2 a déclaré qu’elle n’avait jamais été touchée par la porte jetée par le plaignant, ce qui a été contredit directement par la TC no 1, aussi bien durant l’appel au numéro 9‐1‐1 que lors de sa déclaration aux enquêteurs de l’UES, c’est-à-dire qu’elle avait vu la porte heurter la TC no 2 au nez, et par le témoignage de l’AI no 1, à qui l’on avait dit que la porte avait heurté la TC no 2 et qui avait constaté que la TC no 2 avait une petite coupure sur l’arête du nez qui correspondait à l’endroit où elle aurait été heurtée par la porte.

Finalement, tandis que le plaignant a dit qu’il n’avait jamais résisté à la police, ce qu’a affirmé aussi la TC no 2, la TC no 1 a dit que le plaignant avait peut‐être lutté avec la police sur la terrasse, tandis que la TC no 3 avait dit qu’il avait [traduction] « piqué une crise » et qu’il l’avait entendu résister aux agents de police. Cet élément de preuve confirme une fois de plus le témoignage des trois AI.

Outre les contradictions évidentes entre le témoignage du plaignant et celui des trois TC, ainsi que la preuve fournie par les quatre TC qui a été clairement contredite par la preuve matérielle, le TC no 3 a indiqué que les quatre témoins étaient sous l’influence d’une quelconque drogue, le TC no 3 et la TC no 1 ayant fumé de la marijuana, tandis que les quatre témoins s’entendaient pour dire que le plaignant et la TC no 2 s’étaient injectés de la méthamphétamine en cristaux avant leur interaction avec la police. Cette preuve est également confirmée par les dossiers médicaux du plaignant, dans lesquels on lit qu’une analyse toxicologique a révélé qu’il avait les drogues suivantes dans le corps au moment où il a été amené à l’hôpital : méthamphétamines, cannabinoïdes, ecstasy, méthadone, benzodiazépines et amphétamines. Par ailleurs, quand les enquêteurs ont abordé initialement le plaignant pour obtenir sa déclaration à la date de l’incident, il a précisé que son nez avait été cassé par la TC no 2; le lendemain, il a nié l’avoir dit lorsque les enquêteurs de l’UES l’ont à nouveau questionné.

Si je me fie à la preuve fournie par les trois TC quant à l’état d’esprit du plaignant au moment de leur appel au numéro 9‐1‐1, à savoir qu’il était psychotique et devenait fou, au fait que la TC no 2 a dit explicitement durant cet appel qu’elle craignait pour sa vie à cause de son comportement, à l’incapacité du plaignant de même se rappeler qu’il avait jeté la porte en bas de l’escalier et à ses commentaires initiaux faits aux enquêteurs de l’UES que c’était la TC no 2 qui avait cassé son nez, en y ajoutant les résultats de l’analyse du son sang révélant la présence de drogues, j’ai de sérieux doutes que le plaignant se souvienne réellement ou avec exactitude des incidents qui ont conduit à ses blessures et, par conséquent, je rejette sa déclaration que c’était un agent de police qui lui avait donné un coup de poing au nez et l’avait blessé.

Compte tenu de la preuve corroborée par certains éléments matériels, je conclus que seulement trois agents de police se sont présentés à la résidence en réponse à l’appel au numéro 9‐1‐1 de la TC no 1; que le plaignant est descendu de plein gré de sa chambre à coucher, à la demande de la police, et qu’il est sorti dehors avec les agents; qu’à aucun moment une arme à impulsions n’a été utilisée contre le plaignant; et que le plaignant s’est blessé lorsqu’il est tombé par terre avec les agents de police, ce qui va dans le sens du témoignage du TC no 3 et est confirmé par la présence de sang sur la terrasse et dans le bac à litière. Ayant rejeté en grande partie la preuve fournie par le plaignant et les trois TC, il demeure toutefois que le nez du plaignant s’est cassé durant son interaction avec la police et il reste à déterminer si la blessure a été causée ou non par un recours excessif à la force.

À la lumière de l’ensemble de la preuve crédible qui reste, il est clair que les AI nos 1 et 2 ont été envoyés à la résidence à Chatham en réponse à un appel au numéro 9‐1‐1 indiquant que le plaignant devenait fou et avait jeté une porte en bas des escaliers. L’AI no 1 est arrivé en premier et a parlé au TC no 3 à l’extérieur de la résidence, confirmant l’information signalée durant l’appel au numéro 9‐1‐1. Puis, l’AI no 2 s’est joint à lui et les deux agents sont entrés dans la maison. Ayant entendu du bruit causé par le plaignant dans sa chambre, l’AI no 2 a alors appelé pour qu’on envoie de l’aide et un agent muni d’une arme à impulsions et l’AI no 3 s’est présenté. Le plaignant est alors sorti de sa chambre à coucher et comme l’a confirmé la TC no 1, l’a fait de plein gré et volontairement, a descendu les escaliers et est sorti de la maison en la compagnie des deux agents de police qui étaient présents à ce moment‐là. L’AI no 3 a déclaré que lorsqu’il était arrivé, l’AI no 1 et l’AI no 2 étaient déjà à l’extérieur de la maison avec le plaignant, qu’il a décrit comme ne portant pas de chemise et comme transpirant abondamment.

Une fois à l’extérieur, comme l’a confirmé le plaignant lui‐même, on lui a dit qu’il était en état d’arrestation pour voies de fait contre un membre de la famille et quand l’AI no 1 a placé une menotte sur l’une de ses mains, le plaignant l’a retirée brusquement. L’AI no 1 a décrit le plaignant comme obtempérant initialement mais qu’après cela, une fois que ses mains étaient placées derrière son dos, il avait commencé à se débattre et était devenu agressif et l’AI no 3 lui avait dit d’arrêter d’être combatif ou de risquer de recevoir une décharge d’une arme à impulsions, après quoi le plaignant était devenu encore plus bouleversé et avait tordu son torse. Les trois agents de police ont indiqué dans leur déclaration que du fait que le plaignant ne portait pas de chemise et transpirait abondamment, il était difficile de le saisir pour le menotter.

Lorsque le plaignant avait éloigné son bras, l’AI no 1 avait réussi à saisir son bras droit, tandis que l’AI no 3 le tenait par le bras gauche, mais le plaignant avait continué de résister. Par conséquent, l’AI no 1 avait donné un coup de genou à la cuisse droite du plaignant, ce qui avait suffisamment brisé sa résistance pour que l’AI no 1 puisse mettre son bras droit derrière son dos et presque simultanément, l’AI no 3 avait donné deux coups de genou aux quadriceps supérieurs gauches du plaignant pour le distraire. Puis, le plaignant ainsi que les trois agents de police qui le tenaient étaient tombés au sol, le plaignant tombant le visage d’abord et incapable d’amortir sa chute, puisque les agents tenaient ses bras.

L’AI no 1 a indiqué qu’une fois qu’il était au sol, le plaignant avait continué de s’agiter dans tous les sens et de résister et l’AI no 2 a précisé qu’il avait alors donné deux coups de genou à l’épaule droite du plaignant pour le forcer à se soumettre. L’AI no 2 a indiqué que le plaignant bougeait sa tête dans tous les sens, et vers l’avant et vers l’arrière, la cognant contre le sol tandis que l’AI no 2 utilisait des techniques pour contrôler la position du plaignant afin d’éviter qu’il se heurte durement la tête au sol. Puis, les trois agents de police avaient continué de lutter avec le plaignant, mais avaient réussi à menotter ses deux mains derrière le dos et puis avaient remis le plaignant debout et l’avaient amené à une voiture de patrouille. C’est alors que l’AI no 1 avait remarqué qu’il y avait du sang sur le sol et dans le bac à litière. Fait peu surprenant, durant l’échauffourée, même si chaque agent a donné des coups de genou au corps du plaignant afin de le distraire, aucun agent n’a vu son collègue le faire.

Une fois que le plaignant se trouvait dans la voiture de patrouille, l’AI no 2 et l’AI no 3 ont vu le plaignant se cogner le nez et le visage contre l’écran en plexiglas et les barres de métal de la vitre arrière du compartiment réservé aux passagers, tandis que l’AI no 1 a entendu les coups en arrière‐plan, pendant que l’AI no 2 diffusait un message par la radio, et plus tard, il a vu du sang sur les barres à la fenêtre et sur le siège arrière.

Compte tenu de ces faits, bien qu’il soit possible que le nez du plaignant se soit brisé ou que sa blessure se soit aggravée du fait qu’il se cognait la tête à l’intérieur de la voiture de patrouille de la police, j’accepte qu’il soit fort probable qu’il s’est cassé le nez lorsqu’il est tombé au sol avec les trois agents de police et s’est heurté le visage sur les pierres de la terrasse.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police peuvent seulement recourir à la force qui est raisonnablement nécessaire dans l’exécution d’une obligation légale. Me penchant d’abord sur la légalité de l’appréhension du plaignant, il ressort clairement de l’appel au numéro 9‐1‐1, tel que confirmé par les trois témoins civils sur les lieux, que le plaignant avait jeté la porte d’une chambre à coucher en bas de l’escalier et, ce faisant, avait soit heurté, soit failli heurter la TC no 2 et que, par conséquent, les agents de police avaient des motifs raisonnables de croire que le plaignant avait commis l’infraction de voies de fait avec une arme (l’arme étant la porte) en contravention de l’art. 267 du Code criminel. Par conséquent, l’appréhension du plaignant était légalement justifiée dans les circonstances.

En ce qui concerne la force employée par les agents dans leurs tentatives de maîtriser le plaignant, je conclus que leur conduite était justifiée dans les circonstances. Compte tenu des faits en l’espèce, où il avait déjà été allégué que le plaignant avait arraché une porte de ses charnières et qu’il l’avait lancée à sa petite amie, il était réellement possible qu’il soit capable de blesser l’un des agents, s’il n’était pas maîtrisé.

De plus, bien que je conclue que la blessure du plaignant a été causée par les agents de police au moment où ils sont tombés ensemble au sol et lorsque le plaignant a atterri sur le visage, je conclus qu’en vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents impliqués n’ont pas eu recours à plus de force que raisonnablement nécessaire dans l’exécution de leurs fonctions légitimes pour appréhender un homme qui résistait et qui était combatif et qui était sous l’influence de drogues psychotropes.

Je conclus également que le fait que le plaignant ne portait pas de chemise et transpirait abondamment constituait un important obstacle pour les agents de police lorsqu’ils tentaient de solidement saisir le plaignant et que cela a contribué à leur incapacité de procéder à son arrestation et de le menotter. Je conclus que la force avec laquelle le visage du plaignant a heurté le sol était peut‐être plus élevée que les agents ne le pensaient parce que la vitesse de la chute a augmenté lorsque les agents sont tombés avec lui, situation qui a été aggravée par le fait que le plaignant ne pouvait amortir sa chute parce que les agents de police contrôlaient ses bras derrière le dos.

Par ailleurs, je conclus que dans la mêlée, alors que chaque agent ne savait pas que l’autre avait donné un coup de genou au plaignant pour le distraire et pour tenter de le maîtriser, sa chute au sol n’était pas prévue et ainsi, ils n’ont pas pu exercer le contrôle dont ils auraient pu faire preuve si la mise au sol avait été délibérée.

Pour en arriver à la conclusion que les actions de ces trois agents de police ne constituaient pas un recours excessif à la force, malgré la blessure qui a été causée au plaignant, je garde à l’esprit l’état du droit, comme l’a énoncé la Cour suprême du Canada dans R. v. Nasogaluak [2010] 1 R.C.S. 206, qui dit ceci :

Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux-ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme l’a expliqué le juge Anderson dans l’affaire R. c. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C.-B.) :

[traduction] Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait pas s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218]

De plus, j’ai pris en considération la décision rendue par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire R. c. Baxter (1975), 27 C.C.C. (2d) 96 (C. A. de l’Ont.), selon laquelle on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention. Dans ce dossier, il est clair que la force employée par chacun des AI a progressé de façon mesurée et proportionnée pour neutraliser et vaincre la résistance du plaignant et que ce recours à la force était dans les limites de ce qui était raisonnablement nécessaire dans les circonstances pour procéder à la mise sous garde légale du plaignant.

En dernière analyse, je suis convaincu, pour les motifs qui précèdent, que la mise en détention du plaignant et la façon dont elle a été effectuée étaient légitimes malgré la blessure qu’il a subie et je suis donc convaincu, pour des motifs raisonnables dans ce dossier, que les gestes posés par les agents tombaient dans les limites prescrites par le droit criminel et qu’il n’y a aucun motif de porter des accusations en l’espèce, et aucune ne sera portée.

Date : 13 avril 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.