Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 18-PVI-175

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Le présent rapport a trait à l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 34 ans lors d’une collision automobile le 9 juin 2018.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 10 juin 2018, à 12 h 29, la Police provinciale de l’Ontario (PPO) a signalé la blessure qu’avait subie le plaignant durant la collision automobile.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 2

Plaignant :

Entretien avec l’homme de 34 ans

Témoins civils (TC)

TC n° 1 A participé à une entrevue

TC n° 2 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT n° 1 A participé à une entrevue

Agent impliqué (AI)

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Description de l’incident

Le 9 juin 2018, vers 22 h, le plaignant et l’AI ont été impliqués dans une collision automobile à l’intersection du chemin du comté de Bruce 3 et du chemin du comté de Bruce 2, près de Walkerton. Le plaignant conduisait une motocyclette en direction nord sur le chemin du comté de Bruce 3. L’AI circulait en direction sud sur le chemin du comté de Bruce 3 et a soudainement viré à gauche vers le chemin du comté de Bruce 2 – coupant le chemin au plaignant. Le plaignant roulait à une vitesse légèrement supérieure à la limite de vitesse de 80 km/h et n’a pas réussi à s’arrêter. Il est entré en collision avec le côté de la voiture de patrouille de l’AI, a été jeté de sa motocyclette et a atterri sur la chaussée. À la suite de la collision, le plaignant a subi de graves blessures. L’AI affirme qu’il n’a pas vu le plaignant et assume la responsabilité de la collision.

Preuve

Les lieux de l’incident

Le chemin du comté de Bruce 3 est une route asphaltée comportant une voie vers le sud et une voie vers le nord. Lorsqu’on s’approche en venant du sud du chemin du comté de Bruce 2, il y a une voie additionnelle de virage à gauche et lorsqu’en s’approche venant du nord, il y a une voie additionnelle de virage à droite, toutes deux délimitées par des lignes et flèches de virage blanches peintes sur l’asphalte.

Le chemin du comté de Bruce 2 est une route asphaltée qui comporte une voie vers l’ouest et une voie vers l’est. Il croise le chemin du comté de Bruce 3 à des angles pratiquement droits. Sur le chemin du comté de Bruce 2, il y a des panneaux d’arrêt réglementaires à l’intersection avec le chemin du comté de Bruce 3.

Les voies des deux chemins sont délimitées par une double ligne continue de couleur jaune au centre et par des lignes blanches et des accotements de gravier aux côtés.

Les chemins du comté de Bruce 2 et 3 traversent des terres rurales.

Dans le secteur où est survenue la collision, la limite de vitesse n’est pas affichée sur les deux chemins, mais elle est présumée être de 80 km/h.

Les deux véhicules n’ont laissé aucune trace de pneu sur la chaussée avant la collision.

Schéma des lieux

Schéma des lieux

Preuve matérielle

Véhicules impliqués

Une Ford Explorer 2016 portant les marques de la Police provinciale de l’Ontario (PPO) faisait face au sud-est dans la voie nord du chemin du comté de Bruce 3, à l’intersection avec le chemin du comté de Bruce 2. L’aile avant droite, l’assemblage de roue et l’essieu avaient été endommagés récemment.

Une motocyclette BMW 2012 était couchée sur le côté gauche et faisait face au sud-ouest dans la voie nord du chemin du comté de Bruce 3, à l’intersection avec le chemin du comté de Bruce 2. La roue avant et ses fourches étaient détachées du cadre de la motocyclette. L’entière partie avant était écrasée, et les extrémités des fourches avant étaient endommagées. La jante du pneu avant était pliée à de nombreux endroits. Le phare, le radiateur et le pare-brise étaient détachés.

Données MPS/GPS de la voiture de patrouille conduite par l’AI

L’UES a obtenu et examiné les données GPS de la voiture de patrouille de la Police provinciale de l’Ontario conduite par l’AI. Juste avant l’impact avec la motocyclette du plaignant vers 21 h 53, la vitesse de la voiture de patrouille était de 24,15 km/h.

À 21 h 52 m 25 s, la voiture de patrouille de l’AI était arrêtée.

À 21 h 52 m 29 s, la voiture de patrouille est devenue mobile et a accéléré de façon constante pour atteindre une vitesse maximale de 67,62 km/h à 21 h 52 m 39 s. De 21 h 52 m 43 s à 21 h 52 m 51 s, peu avant la collision, la vitesse de la voiture de patrouille de l’AI a diminué de façon constante, tombant de 62,79 km/h à 40,25 km/h. La limite de vitesse à l’endroit où est survenue la collision était de 80 km/h.

Témoignage d’expert

Évaluation de la collision par le reconstitutionniste

Vers 21 h 53, le samedi 9 juin 2018, l’AI, qui conduisait un VUS identifié de la PPO, se dirigeait vers le sud sur le chemin du comté de Bruce 3 et a ralenti pour tourner à gauche sur le chemin du comté de Bruce 2. C’était au crépuscule, le temps était dégagé, et les routes étaient sèches.

La limite de vitesse sur le chemin du comté de Bruce 3 est de 80 km/h et n’est pas affichée dans le secteur où s’est produite la collision.

Au même moment, une motocyclette BMW de 2012 conduite par le plaignant se déplaçait en direction nord dans la voie nord du chemin du comté de Bruce 3 et s’approchait du chemin du comté de Bruce 2.

L’examen d’une éraflure sur la chaussée, légèrement à gauche du centre de la voie nord du chemin du comté de Bruce 3 et à un angle de glissement latéral, permet de conclure que la roue avant de la motocyclette a touché la roue avant droite et l’aile droite de la voiture de patrouille. L’aiguille bloquée de l’indicateur de vitesse suggère que la vitesse d’impact était plus proche de 70 km/h.

À une vitesse de 90 km/h (la vitesse initiale présumée du plaignant), le plaignant et sa motocyclette auraient été visibles pendant huit secondes après avoir franchi le haut de la colline à 200 mètres au sud du lieu de l’impact.

La motocyclette du plaignant a fait une embardée vers la gauche, et le guidon droit a frappé le dessus du capot du côté droit de la voiture de patrouille. Par conséquent, le plaignant a été lancé vers l’avant et son casque a heurté le côté droit du pare-brise de la voiture de patrouille. Le plaignant a été lancé dans les airs et a atterri sur l’asphalte à environ 5,9 mètres au nord-ouest du lieu de l’impact. Sa motocyclette a glissé vers l’arrière et s’est retrouvée à environ 2,2 mètres au sud-ouest du lieu de l’impact. La voiture de patrouille s’est immobilisée à environ 2,2 mètres au sud-est du lieu de l’impact, ce qui dénote une vitesse d’impact peu élevée. Il n’a pas été possible de calculer la vitesse de la voiture de patrouille juste avant la collision. En raison de la collision, le plaignant a subi de graves blessures.

Enregistrements des communications

Enregistrements des communications de la PPO

Les enregistrements ont été examinés; toutefois, ils ne précisaient pas comment et pourquoi la collision s’était produite.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a demandé au détachement de Bruce sud de la PPO les éléments et documents suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • Affidavit de l’analyste technique de la PPO concernant les données du terminal de données mobiles (TDM) (1)
  • Affidavit de l’analyste technique de la PPO concernant les données du terminal de données mobiles (TDM) (2)
  • Détails de l’événement - Système de répartition assistée par ordinateur (RAO)
  • Enregistrements des communications
  • Relevé de la formation du conducteur – AI
  • Rapport sur les détails de l’incident
  • Dossiers d’entretien de la voiture de patrouille de la PPO conduite par l’AI
  • Données SMP/GPS de la voiture de patrouille de la PPO conduite par l’AI (9 juin 2018)
  • Rapport sur les détails de l’incident
  • Liste de vérification des demandes de documents
  • Historique de l’unité ayant trait à la voiture de patrouille conduite par l’AI (9 juin 2018)

Affidavit de l’analyste technique de la PPO[1]

Un analyste technique de la Section de la sécurité technique et de l’infrastructure de la PPO a effectué une recherche dans la base de données du système de répartition assistée par ordinateur (RAO) du Centre des communications de la police (CCP) de London pour trouver tous les messages envoyés ou reçus dans le système RAO pendant la période allant de 18 h à 22 h 30 le 9 juin 2018. D’après l’affidavit, le système RAO ne contenait aucun message qui aurait été envoyé par un préposé aux appels, un répartiteur, des agents (par l’entremise du système MPS) ou des superviseurs à l’AI, qui n’a pas communiqué avec eux non plus. De plus, aucun message n’a été envoyé ou reçu par I/Netviewer pendant cette période[2].

Dossiers d’entretien de la voiture de patrouille de la PPO

L’UES a obtenu et examiné les plus récents dossiers d’entretien de la voiture de patrouille de l’AI, soit ceux d’août 2017 à mai 2018. Rien n’indiquait que la voiture de patrouille présentait des déficiences mécaniques ou autres.

Dispositions législatives pertinentes

Article 249 du Code criminel – Conduite dangereuse

(1) Commet une infraction quiconque conduit, selon le cas :

  1. un véhicule à moteur d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu; [...]

(3) Quiconque commet une infraction mentionnée au paragraphe (1) et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant conduisait sa motocyclette sur le chemin du comté de Bruce 3, près de Walkerton, lorsque l’AI a soudainement tourné à gauche devant lui. Le plaignant, qui avait le droit de passage, n’a pas pu s’arrêter et est entré en collision avec le véhicule de police de l’AI. En raison de la collision, le plaignant a subi de graves blessures et l’UES a invoqué son mandat. L’enquête de l’UES sur cet incident comprenait des entrevues avec le plaignant, l’AI, deux témoins civils et un agent témoin. Les communications radiophoniques de la PPO et les données GPS provenant du véhicule de l’AI ont également été obtenues et examinées. Cette preuve était essentiellement cohérente et les circonstances factuelles entourant la collision sont donc claires. Pour les raisons qui suivent, je ne peux trouver des motifs m’amenant à croire que l’AI a commis une infraction criminelle en rapport avec la collision.

Le 9 juin 2018, juste avant 22 h, l’AI et le plaignant se déplaçaient sur le chemin du comté de Bruce 3, près de Walkerton. Le chemin du comté de Bruce 3 est une route asphaltée comportant deux voies (une en direction nord et une en direction sud) et la limite de vitesse y est de 80 km/h. L’AI conduisait un véhicule identifié de la PPO en direction sud et le plaignant conduisait une motocyclette BMW en direction nord. Les deux véhicules s’approchaient de l’intersection du chemin du comté de Bruce 3 et du chemin du comté de Bruce 2, qui comprend des voies additionnelles pour les véhicules qui tournent; il y a un panneau d’arrêt faisant face à la circulation sur le chemin du comté de Bruce 2. Un véhicule avec à son bord deux témoins civils attendait au panneau d’arrêt sur le chemin du comté de Bruce 2 et faisait face à l’ouest.

Le véhicule de l’AI se trouvait dans la voie sud, se préparant à effectuer un virage à gauche sur le chemin du comté de Bruce 2. Le plaignant avait le droit de passage à l’intersection, mais lorsqu’il s’est approché de celle-ci, l’AI a soudainement viré à gauche devant sa motocyclette. Le plaignant est entré en collision avec la roue avant du côté passager du véhicule de police de l’AI et a atterri sur la route[3]. L’AI est sorti de son véhicule et a dit au plaignant de ne pas bouger. Le plaignant a été transporté à l’hôpital de Walkerton, où selon le diagnostic posé, il avait des blessures graves.

Dans de telles circonstances, la seule accusation criminelle à prendre en considération est celle de conduite dangereuse causant des lésions corporelles, en contravention du paragraphe 249(3) du Code criminel. Dans l’arrêt R. c. Beatty, [2008] 1 R.C.S. 49, la Cour suprême du Canada a statué que pour que cette infraction s’applique, il faut établir que la personne conduisait « d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu ». À mon avis, la manœuvre faite par l’AI satisfait à ce critère parce qu’il a bloqué la circulation en sens inverse sans laisser suffisamment d’espace pour accomplir le virage en toute sécurité. Même s’il s’agit d’une route rurale, la limite de vitesse affichée sur le chemin du comté de Bruce 2 est de 80 km/h. Le fait de couper le chemin à la circulation en sens inverse présente un risque évident pour le public.

Toutefois, l’arrêt Beatty a aussi clairement indiqué que la conduite d’un véhicule d’une façon qui présente un risque pour le public, à lui seul, ne suffit pas pour conclure que la personne a commis l’infraction criminelle de conduite dangereuse. La façon de conduire doit également être telle qu’elle correspond à « un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé ». Ce n’est qu’à ce moment-là qu’un conducteur peut être considéré moralement coupable au point où il mérite une condamnation au criminel. Cette distinction a été expliquée plus récemment dans R. c. Roy, [2012] 2 R.C.S. 60, lorsque la Cour suprême du Canada a souligné ceci :

La simple imprudence que même les conducteurs les plus prudents peuvent à l’occasion commettre n’est généralement pas criminelle. Tel qu’indiqué précédemment, la juge Charron a formulé ainsi cette idée au nom des juges majoritaires dans l’arrêt Beatty : « [s]’il faut considérer comme une infraction criminelle chaque écart par rapport à la norme civile, quelle qu’en soit la gravité, on risque de ratisser trop large et de qualifier de criminelles des personnes qui en réalité ne sont pas moralement blâmables » (par. 34). La Juge en chef a exprimé un point de vue semblable : « Même les bons conducteurs ont à l’occasion des moments d’inattention qui peuvent, selon les circonstances, engager leur responsabilité civile ou donner lieu à une condamnation pour conduite imprudente. Mais en général, ces moments d’inattention ne vont pas jusqu’à l’écart marqué requis pour justifier une déclaration de culpabilité pour conduite dangereuse » (par. 71).

Dans ces circonstances, il n’y a tout simplement pas suffisamment d’éléments de preuve laissant supposer qu’il y a eu un écart marqué par rapport à la norme de diligence qu’un conducteur raisonnable observerait dans les mêmes circonstances que l’AI. Bien qu’il soit clair que le virage à gauche était dangereux, il n’y a aucune preuve que la conduite précédant le virage était autre chose qu’une conduite normale et prudente[4]. Il n’y a pas non plus de preuve que l’AI était sous l’influence d’une substance intoxicante ou qu’il avait été autrement distrait en conduisant[5]. L’AI a dit à l’UES qu’il n’avait pas vu le plaignant avant de virer à gauche et je crois l’AI[6] Je conclus également que le plaignant aurait dû être visible pour l’AI[7]. La raison pour laquelle l’AI n’a pas vu le plaignant est inconnue; toutefois, rien dans la preuve ne laisse entendre qu’il y a eu plus qu’un manque d’attention momentané. Je ne peux donc pas conclure que la façon de conduire de l’AI constituait un écart marqué par rapport à la norme de diligence.

Bref, bien qu’il soit clair que le virage à gauche de l’AI a créé un danger qui a eu des conséquences très considérables, il n’y a tout simplement pas de preuves suffisantes que la conduite de l’AI satisfait au critère élevé qui permettrait de conclure qu’il y a eu un écart marqué par rapport à la norme de diligence[8]. Je ne peux donc pas trouver de motifs de croire que l’AI a commis une infraction criminelle lors de la collision, et le dossier sera fermé.

Date : 25 septembre 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Cet affidavit concernait les systèmes que les policiers utilisent pour communiquer. [Retour au texte]
  • 2) Cet affidavit concernait les systèmes que les policiers utilisent pour communiquer. [Retour au texte]
  • 3) L’indicateur de vitesse de la motocyclette du plaignant est resté bloqué juste en-dessous de 70 km/h. [Retour au texte]
  • 4) Les données GPS du véhicule de l’AI ont confirmé qu’il ne faisait pas d’excès de vitesse. Une minute avant la collision, sa vitesse maximale était de 67,62 km/h, mais l’AI a ralenti à 40,25 km/h, puis à 24,15 km/h. [Retour au texte]
  • 5) Aucun des témoins n’a observé des signes d’intoxication, et il a été confirmé que l’AI n’envoyait ni ne recevait de message dans le système de RAO juste avant la collision. [Retour au texte]
  • 6) L’AI était considéré comme un témoin fiable dont le récit de l’incident a été corroboré par les autres témoins. Je crois qu’il est crédible parce qu’il a franchement admis qu’il avait enfreint le Code de la route même s’il n’était pas tenu de parler à l’UES. [Retour au texte]
  • 7) Le reconstitutionniste de l’UES était d’avis que, en supposant que le plaignant roulait à environ 90 km/h (sa vitesse présumée), il aurait dû être visible pendant huit secondes après avoir franchi le haut d’une colline à environ 200 mètres au sud du lieu de la collision. [Retour au texte]
  • 8) Et comme même l’AI l’a admis, sa manœuvre contrevenait au Code de la route. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.