Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OCD-296

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la mort d’un homme de 48 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 7 septembre 2021, à 21 h 54, le Service de police d’Ottawa (SPO) a informé l’UES du décès du plaignant.

Le SPO a indiqué que le 7 septembre 2021, à 12 h 13, des agents de police s’étaient rendus dans un secteur rural près d’Andrewsville, à l’ouest d’Ottawa, afin de donner suite à un appel concernant un homme suicidaire. En effet, la petite amie du plaignant, le témoin civil (TC) n° 1, avait appelé le SPO pour lui dire que l’homme avait l’intention de se suicider et qu’il se trouvait probablement à son camp de chasse.

Le plaignant avait des antécédents de troubles mentaux et avait tenté ou envisagé de se suicider l’année précédente. Le plaignant était propriétaire d’une arme d’épaule.

Le véhicule du plaignant a été retrouvé, les clés à l’intérieur de celui-ci, près du camp. Le SPO a demandé l’aide de son unité tactique, à un robot, à un véhicule blindé, à des drones et à des ambulanciers paramédicaux.

Le plaignant se trouvait dans les bois vers 17 h. À 17 h 43, un négociateur tactique a pris contact avec lui. Il avait préparé une arme d’épaule pour qu’elle se décharge dans sa poitrine. À 20 h 16, on a entendu un coup de feu. Les agents de l’unité tactique se sont approchés et ont trouvé l’homme blessé par balle à la poitrine.

Des ambulanciers tactiques ont confirmé que les signes vitaux du plaignant étaient absents, mais les responsables de l’hôpital avec lequel ils communiquaient leur a demandé de transporter le plaignant à l’Hôpital d’Ottawa afin que la mort de ce dernier soit constatée.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 7 septembre à 23 h 6

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 8 septembre 2021 à 0 h 5

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (« le plaignant »)

Homme de 48 ans, décédé

Témoins civils

TC n° 1 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC n° 2 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)

Agents impliqués

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

Agents témoins

AT n° 1 A participé à une entrevue
AT n° 2 A participé à une entrevue
AT n° 3 A participé à une entrevue
AT n° 4 A participé à une entrevue
AT n° 5 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 10 septembre et le 4 octobre 2021.
 

Éléments de preuve

Les lieux

Un enquêteur de l’UES s’est rendu sur les lieux le 8 septembre 2021 à 1 h 8. C’était la nuit, le ciel était couvert et il pleuvait légèrement. Il faisait environ 18 °C.

Il faisait noir, car il n’y avait pas de lampadaires près des lieux. L’éclairage était assuré par des lampes portatives et une génératrice.

Plusieurs véhicules du SPO, une remorque de camping, une camionnette GMC et un véhicule de l’unité tactique du SPO se trouvaient sur place. Dans la clairière se trouvaient quelques buissons et arbres. Des buissons et des arbres denses se trouvaient au nord. Au delà de la zone boisée, à 50 mètres au nord, se trouvait une route rurale, qui n’était pas visible. À 6 ou 7 mètres devant le véhicule de l’unité tactique se trouvaient une chaise de jardin en plastique renversée et un fusil de chasse, ainsi qu’un paquet de cigarettes, des mégots, une bouteille de Gatorade et une casquette. Il y avait des taches de sang sur la chaise et juste devant celle-ci.

Lorsque les agents de police ont trouvé le plaignant, ce dernier avait une blessure mortelle à la poitrine qui avait été causée par un fusil de chasse. Le corps de l’homme a été transporté à l’Hôpital d’Ottawa.

La scène a été photographiée au moyen d’un appareil photo avec flash et de la lumière ambiante.
Un fusil 48 Topper de calibre 12 à tir coup par coup et à mécanisme à bascule, de H&R Arms, contenant un projectile de type Heavy Game de calibre 12 de Winchester dans la culasse, a été recueilli sur place.



Figure 1 – Le fusil de chasse trouvé sur les lieux.
 
Le fusil de chasse était posé au sol, le mécanisme à bascule n’était pas ouvert; il se trouvait à 1,2 mètre devant la chaise. Si l’on s’asseyait sur la chaise, le canon du fusil pointait vers la gauche, ou l’est, et la monture du fusil pointait vers la droite, ou l’ouest. Les mesures générales du fusil de chasse sont les suivantes : 115,5 centimètres de long, canon de 76 centimètres, et 79,3 centimètres de l’extrémité du canon à la détente. Il n’y avait pas de corde ou de mécanisme attaché au fusil qui permettrait de le décharger à distance.

Dans la console centrale de la camionnette se trouvaient une balle de fusil de calibre .243 non tirée et une cartouche de fusil de chasse de calibre 12 non tirée.

Les lieux ont également été photographiés et filmés en plein jour.

Le fusil de chasse et des munitions, ainsi qu’un portefeuille et un téléphone cellulaire, ont été recueillis, mis sous scellés et entreposés.

Éléments de preuve médico-légaux

Examen post-mortem

Le 9 septembre 2021, à 9 h 10, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu à l’Hôpital d’Ottawa et a rencontré le médecin légiste chargé de l’examen post mortem. À 9 h 20, l’autopsie a commencé, et des radiographies de la région thoracique ont été prises. Le corps a été photographié selon les directives. À 10 h 20, l’autopsie a pris fin. Les résultats préliminaires de l’autopsie indiquent que le décès est attribuable à une « blessure par balle à la poitrine ».

Le médecin légiste a indiqué qu’il était possible pour une personne de la taille du plaignant de se pencher et de tirer une arme d’épaule dans sa propre poitrine.

Rapport de communication et de négociation

L’appel initial concernant un homme suicidaire, le plaignant, a été reçu à 12 h 12. Le TC n° 1 a indiqué que le plaignant avait fait une tentative de suicide l’année précédente. À l’époque, le plaignant s’était rendu à son camp de chasse muni d’une arme à feu et la police était intervenue.

À cette date, le TC n° 1 a indiqué que le plaignant lui avait laissé une enveloppe contenant de l’argent. Selon le TC n° 1, le plaignant était bouleversé par une dispute concernant la garde des enfants avec son ex-femme. Le TC n° 1 s’est rendu au camp de chasse où elle a trouvé la camionnette du plaignant. Le portefeuille et le téléphone cellulaire du plaignant se trouvaient sur le capot du véhicule. Le TC n° 1 a confirmé que le plaignant avait une arme à feu, mais il n’a pas été en mesure de décrire le type d’arme.

Les enregistrements des négociations, qui comprenaient environ trois heures d’audio, ont révélé que le plaignant avait engagé une conversation avec l’AT n° 1. Le plaignant semblait calme et disposé à converser, sauf lorsqu’il a parlé de la garde de ses enfants avec son ex femme et du procès en cours relatif à une accusation de conduite avec facultés affaiblies, moment où la voix et le comportement du plaignant se sont aggravés. Il a demandé une veste et des cigarettes, qui lui ont été livrées à l’aide d’un robot à 19 h 12. Le plaignant a également demandé son téléphone cellulaire, mais on ne le lui a pas fourni, car on craignait qu’il ne tente de communiquer avec son ex-femme.

Un plan afin qu’il se rende semblait se concrétiser. Le plaignant était prêt à déposer son arme à feu et à se rendre à l’AI. Peu de temps après que ce dernier a commencé à discuter avec le plaignant, on a entendu un coup de feu, à 21 h 16. Le plaignant avait déchargé son arme à feu, qui a entraîné une blessure mortelle à la poitrine.

Éléments obtenus auprès du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le SPO :
  • Copie papier de l’appel de la répartition assistée par ordinateur
  • Liste des premiers intervenants qui ont été témoins de l’incident
  • Liste des agents impliqués
  • Description de l’incident par les agents témoins
  • Notes des agents témoins
  • Appel au service 9-1-1
  • Enregistrement de la négociation
  • Communications radio
  • Photos des lieux
  • Détails sur la mort subite
  • Copie papier de la personne - le plaignant (x2)
  • Politique - Incidents de santé mentale
  • Documents du Programme canadien des armes à feu
  • Dossier de formation - AI

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage des preuves recueillies par l’UES, qui comprenait des entrevues avec des agents de police présents au moment de l’incident en question et un examen des enregistrements audio des heures de négociations avec le plaignant. Comme il en avait le droit, l’AI a choisi de ne pas se soumettre à une entrevue avec l’UES et de ne pas autoriser la diffusion de ses notes.

Le 7 septembre 2021, vers 12 h 12, le SPO a reçu un appel au service 9-1-1 de la part de la partenaire du plaignant, soit le TC n° 1, qui voulait signaler que le plaignant pourrait s’être suicidé. Le TC n° 1 a expliqué que le plaignant était parti le matin même en lui laissant une enveloppe pleine d’argent et qu’il n’était pas arrivé sur son lieu de travail. Comme l’homme avait déjà tenté de se suicider à l’aide d’une arme à feu alors qu’il se trouvait à son camp de chasse, le TC n° 1 s’était rendu sur place et avait trouvé la camionnette du plaignant. Le plaignant n’était pas là, mais le TC n° 1 a trouvé son portefeuille et son téléphone cellulaire dans le véhicule. Le TC n° 1 a confirmé que le plaignant avait une arme à feu, sans toutefois être en mesure de la décrire.

Des membres du SPO ont été dépêchés sur les lieux et de l’équipement a été utilisé pour aider à trouver le plaignant. Il s’agissait d’une équipe tactique composée d’agents, de négociateurs qualifiés en situation de crise, d’appareils de surveillance aérienne, d’un robot, d’un chien policier et d’un véhicule blindé. On a fouillé le camp de chasse et ses environs, y compris une remorque installée sur la propriété et une camionnette. Vers 17 h 45, le plaignant a été trouvé dans une zone broussailleuse et boisée au nord de la remorque. Il tenait un fusil de chasse.

Un membre de l’équipe tactique, l’AT n° 4, avait trouvé le plaignant. L’agent a demandé au plaignant de baisser son arme. Le plaignant a répondu qu’il ne le ferait pas. Un autre agent tactique, l’AT n° 5, a rapidement rejoint l’AT n° 4 et a pris l’initiative de parler avec le plaignant. L’agent y est resté pendant 30 à 40 minutes avant que les négociateurs de crise, les AT n° 1 et n° 3, n’arrivent sur les lieux et ne prennent le relais. À ce moment-là, le véhicule blindé avait été positionné à quelques mètres au sud de l’endroit où se trouvait le plaignant. À l’abri derrière le véhicule blindé, des agents ont engagé la conversation avec le plaignant.

Au cours des trois heures qui ont suivi, les négociateurs ont tenté de persuader le plaignant de se rendre pacifiquement. La plupart du temps, le plaignant parlait calmement, sauf lorsqu’il a été question d’une dispute pour la garde de son jeune fils. À sa demande, des cigarettes et une veste lui ont été fournies à l’aide d’un robot. Alors que les négociations progressaient et que le plaignant semblait être devenu réceptif à une résolution pacifique de la situation, l’AI a été présenté au plaignant comme étant l’agent chargé d’organiser le tout. Peu de temps après, vers 21 h 16, on a entendu un coup de feu. Le plaignant s’était tiré une balle avec son fusil de chasse.

Les agents se sont rendus à l’endroit où se trouvait le plaignant et l’ont découvert allongé sur le dos dans la chaise où il avait été assis pendant les négociations. Devant la chaise se trouvait le fusil de chasse. Le plaignant avait subi une blessure grave à la poitrine. Des ambulanciers paramédicaux ont été dépêchés sur place pour soigner le plaignant.

Le plaignant a été transporté à l’hôpital et sa mort a été constatée à 22 h 28.

Dispositions législatives pertinentes

Articles 219 du Code criminel -- Négligence criminelle

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

Articles 220 du Code criminel -- Négligence criminelle

220 Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d’une autre personne est coupable d’un acte criminel passible :
a) s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans;
b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.

Analyse et décision du directeur

Le 7 septembre 2021, le plaignant est mort d’une blessure par balle qu’il s’est infligée à la poitrine. Comme il était entouré d’agents du SPO à ce moment-là, l’UES a été prévenue et a ouvert une enquête. L’un des agents impliqués, l’AI, a été identifié comme l’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI, ou tout autre agent du SPO, a commis une infraction criminelle relativement à la mort du plaignant.

L’infraction à prendre en considération est la négligence criminelle causant la mort en contravention de l’article 220 du Code criminel. Cette infraction est réservée aux cas graves de négligence démontrant une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. La négligence simple ne suffira pas à justifier la responsabilité. Il faut plutôt, en partie, un écart marqué et substantiel par rapport au niveau de soin qu’une personne raisonnable aurait observé dans les circonstances. Dans le cas présent, la question est de savoir s’il y a eu un manque de diligence de la part des agents impliqués dans l’opération policière le jour en question qui a contribué au décès du plaignant et qui était suffisamment flagrant pour entraîner une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

Les agents qui sont intervenus dans le secteur du camp de chasse du plaignant étaient dans l’exercice de leurs fonctions et placés légalement tout au long de l’incident en question. Le principal devoir d’un agent est de protéger et de préserver la vie. Ayant été informés par le TC n° 1 de ses préoccupations concernant le plaignant, les agents avaient le devoir de faire ce qu’ils pouvaient pour empêcher que le plaignant ne se blesse.

Une fois qu’ils étaient sur les lieux, je suis convaincu que les agents se sont comportés avec le soin et l’attention voulus pour le bien-être du plaignant. Il semblerait que des ressources adéquates aient été déployées sur place et utilisées efficacement pour trouver le plaignant (surveillance aérienne, équipe cynophile, agents tactiques) et tenter de parvenir à un règlement pacifique (véhicule blindé, robot, négociateurs en situation de crise). Des armes à létalité atténuée pouvaient être utilisées, comme une ARWEN, mais l’occasion ne s’est pas présentée étant donné le contexte dans lequel les agents travaillaient. Il ne semble pas non plus que la prise d’assaut du plaignant ait été une option réaliste étant donné qu’il possédait une arme à feu. Quant aux négociations elles-mêmes, il n’y a rien dans le dossier qui suggère des indiscrétions ou des erreurs évidentes de jugement de la part des négociateurs. Dans ce contexte, même si les agents n’ont pas pu empêcher le plaignant de s’enlever la vie, ce n’est pas faute d’efforts raisonnables de leur part.

Pour les raisons qui précèdent, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que les agents impliqués du SPO, notamment l’AI, ont transgressé les limites de la prudence prescrites par le droit pénal. Par conséquent, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire, et le dossier est clos.


Date : 5 janvier 2022


Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.