Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OCI-354

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales


En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par une femme de 54 ans (la « plaignante »).

L’enquête

Notification de l’UES


Le 16 décembre 2020, à 14 h 11, le Service de police de Belleville (SPB) a avisé l’UES de la blessure subie par la plaignante.

Le SPB a signalé que le 15 décembre 2020, à 23 h 30, il avait reçu un appel lui demandant d’aider les services médicaux d’urgence à une résidence de Belleville. La plaignante avait quitté l’Hôpital général de Belleville et le personnel des services médicaux d’urgence souhaitait qu’elle y retourne.

Lorsque les agents sont arrivés sur place, ils ont aidé les ambulanciers paramédicaux, et la plaignante a été transportée à l’Hôpital général de Belleville. Le personnel de l’hôpital a refusé d’admettre la plaignante, indiquant qu’elle avait déjà reçu son congé. Les agents ont décidé d’arrêter la plaignante pour avoir troublé la paix et l’ont emmenée au commissariat de police; ils y sont arrivés à 23 h 55. La plaignante a été placée dans une cellule.

Le 16 décembre 2020, à 2 h 15, on a remarqué que la plaignante vomissait, et on a appelé les services médicaux d’urgence. La plaignante a été de nouveau transportée à l’Hôpital général de Belleville, où on l’a branchée à un système de maintien des fonctions vitals.


L’équipe
 

Date et heure de l’envoi de l’équipe :     19 décembre 2020, à 10 h 39

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux :     21 décembre 2020, à 11 h 30

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés :     3


Trois enquêteurs de l’UES ont été assignés pour enquêter sur l’incident. En raison de la pandémie de COVID 19 et des protocoles connexes, des mesures ont été prises pour permettre aux enquêteurs de l’UES de réaliser des entrevues avec la plaignante, des témoins civils et des agents témoins par téléphone. 
  
À la suite d’une enquête préliminaire, l’AI a été désigné comme agent impliqué le 17 décembre 2020. L’AI s’est présenté pour une entrevue par téléconférence avec son avocat le 14 janvier 2021, mais n’a pas consenti à ce que ses notes soient divulguées à l’UES.

L’AT no 1, l’AT no 2 et l’AT no 3 ont été désignés comme agents témoins. Après avoir examiné leurs notes et les rapports d’incident, on a déterminé que ces agents n’avaient pas pris part directement à l’interaction avec la plaignante au commissariat du SPB et qu’ils ne pouvaient donc pas offrir d’autres éléments de preuve qui seraient utiles à l’enquête.

Personne concernée (« plaignante »”) :


Femme de 54 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

La plaignante a participé à une entrevue le 21 décembre 2020.

Témoins civils (TC)
 

TC no 1     A participé à une entrevue
TC no 2     N’a pas participé à une entrevue (professionnel de la santé; rapport reçu)
TC no 3     N’a pas participé à une entrevue (professionnel de la santé; rapport reçu)

Le TC no 1 a participé à une entrevue le 21 décembre 2020.

Agent impliqué (AI)
 

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

L’AI a participé à une entrevue le 14 janvier 2021.


Agents témoins (AT)
 

AT no 1     N’a pas participé à une entrevue et n’a pas pris de notes [1]
AT no 2     N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées
AT no 3     N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées
AT no 4     A participé à une entrevue
AT no 5     A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 22 décembre 2020.


Retards dans l’enquête

Il y a eu des retards dans l’obtention des dossiers médicaux de la plaignante et les entrevues avec les témoins civils en raison des Fêtes.


 

Éléments de preuve

Les lieux 
 

L’UES n’a pas examiné les lieux de l’incident dans le cadre de cette enquête. L’incident s’est produit dans la cellule no 1 du commissariat du SPB. La cellule était surveillée par l’agent responsable du commissariat, et des enregistrements vidéo et audio de l’incident ont été captés.


Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies
 

Sommaire des démarches de répartition et des communications des services médicaux d’urgence et du SPB:

15 décembre 2020
À 23 h 11 min 35 s, les services médicaux d’urgence appellent le service des communications du SPB pour demander l’aide d’agents de police dans le cadre de leur intervention à une résidence située à Belleville. Une femme de 50 ans se trouve dans la résidence; elle est agitée et violente, et il est possible qu’elle soit en train de faire une surdose.

À 23 h 12 min 51 s, l’AT no 4 et l’AT no 5 sont dépêchés à la résidence; une ambulance est aussi en chemin.

À 23 h 13 min 48 s, en cherchant l’adresse dans le système, on trouve des renseignements sur la plaignante, à propos de laquelle il y a des indications de problèmes de santé, de violence et de tendances suicidaires.

À 23 h 14 min 5 s, on note que l’adresse est associée à des antécédents d’appels d’ambulance, d’infractions liées à la drogue et d’incidents relatifs à la Loi sur la santé mentale.

À 23 h 17 min 36 s, l’AT no 5 signale qu’elle est sur les lieux avec les services médicaux d’urgence.

À 23 h 27 min 58 s, l’AT no 5 dit au répartiteur du SPB que la plaignante se trouve dans le véhicule de police et que les agents la transportent à l’Hôpital général de Belleville. La plaignante y est amenée par la police parce qu’elle n’a pas suffisamment coopéré avec les ambulanciers paramédicaux pour être transportée en ambulance.

À 23 h 49 min 14 s, l’AT no 5 dit au répartiteur du SPB qu’il y a un changement dans ce qui était prévu, à savoir que la plaignante ne peut pas rester à l’hôpital et que les agents l’emmènent au commissariat du SPB pour avoir troublé la paix. On entend la plaignante crier en arrière-plan.


16 décembre 2020
À 1 h 9 min 36 s, la TC no 1 téléphone au commissariat du SPB pour s’informer au sujet de la plaignante. La TC no 1 indique qu’elle a téléphoné à l’Hôpital général de Belleville et que la plaignante ne s’y trouvait pas. Un agent de police lui dit que la plaignante est au commissariat du SPB puisque le personnel de l’hôpital a refusé de l’admettre, car elle causait des problèmes; il ajoute que la plaignante est dans une cellule et qu’elle dort. La TC no 1 se dit inquiète, puisque la plaignante s’est montrée violente et qu’elle a pris une grande quantité de médicaments plus tôt. On dit à la TC no 1 qu’on surveille la plaignante dans la cellule. La TC no 1 ajoute qu’elle craint que la plaignante fasse une crise d’épilepsie, ce qui est déjà arrivé quelques années auparavant. Elle dit à l’agent que la plaignante s’était rendue à l’hôpital et qu’on avait également refusé de l’admettre à ce moment-là. Elle veut savoir si l’hôpital est autorisé par la loi à la refuser. La TC no 1 dit qu’elle ne peut rien faire. L’agent lui dit qu’ils s’occuperont de la plaignante.

À 2 h 5 min 39 s, l’AI appelle par radio le répartiteur du SPB pour demander que les services médicaux d’urgence se rendent au commissariat du SPB, puisque la plaignante a vomi dans la cellule et saigne peut-être du nez.

À 2 h 5 min 59 s, le répartiteur du SPB appelle les services médicaux d’urgence de Belleville pour demander que des ambulanciers paramédicaux se présentent au bloc cellulaire afin de transporter la plaignante à l’Hôpital général de Belleville. Le répartiteur du SPB dit à celui des services médicaux d’urgence que la plaignante est la femme auprès de laquelle ils étaient intervenus plus tôt, le 15 décembre 2020.


   

Sommaire de la vidéo captée dans la cellule
 

La cellule est en béton; d’un côté, il y a un lit/siège en béton, et de l’autre, un évier en acier inoxydable et une toilette. Une caméra du système de télévision en circuit fermé (TVCF) est fixée au plafond, dans l’un des coins de la cellule, près de la porte et du lit.

16 décembre 2020
À 12 h 3 min 4 s, l’AT no 5 emmène la plaignante dans la cellule.

À 12 h 3 min 9 s, l’AT no 5 aide la plaignante à s’asseoir sur le lit. L’AT no 5 sort rapidement de la cellule, et la porte se ferme. La plaignante demeure assise sur le lit et est très agitée, bougeant constamment les jambes et les bras.

À 12 h 56 min 36 s, la plaignante tente de se lever du lit, où elle est assise, mais a de la difficulté à le faire; elle se rassoit sur le lit.

À 12 h 53 min 21 s, la plaignante se lève; elle est instable sur ses pieds et semble avoir beaucoup de difficulté à maintenir son équilibre. Elle tombe alors sur le sol de la cellule, sur son côté droit.

À 12 h 57 min 45, la plaignante est couchée au sol. Elle bouge constamment et se cogne légèrement la tête sur la base du lit de béton à de nombreuses reprises. Elle continue de bouger sur le plancher et se cogne le dessus de la tête plusieurs fois, à force modérée, sur le côté du lit de béton. Elle s’arrête, se place sur ses genoux, face au lit, puis elle se cogne la tête sur le lit sept fois, un peu plus fort.
À 12 h 59 min 19 s, la plaignante est assise au sol et elle balance le haut de son corps de l’avant vers l’arrière. Elle passe près de se frapper la tête sur l’évier en acier inoxydable et la toilette. Elle se couche ensuite au sol, sur le ventre, puis elle roule lentement sur le dos. Elle roule sur le ventre, puis sur le dos à répétition. Elle porte toujours son masque (en raison de la COVID). Peu après, elle s’endort sur le plancher, couchée sur le dos. Le haut de son corps bouge constamment.

À 2 h 3 min 28 s, la plaignante roule sur le ventre, et on voit une petite quantité de vomissure sur le plancher, près de la porte et de l’évier. La plaignante se retourne de nouveau et vomit une deuxième fois, au même endroit.

À 2 h 6 min 20 s, un agent de police en uniforme entre dans la cellule et se penche vers la plaignante. Elle est couchée sur le dos, sur le plancher, la tête sous l’évier. L’agent porte un masque de protection ainsi que des gants noirs. Il se lève et marche jusqu’à la porte de la cellule, puis regarde la plaignante.

À 2 h 7 min 15 s, un autre agent de police en uniforme – son uniforme muni d’épaulettes de sergent –, que l’on croit être l’AI, entre dans le champ de vision de la caméra; il demeure ensuite debout devant la porte de la cellule. Le premier agent quitte la cellule et l’AI y entre, puis se retourne et la quitte rapidement.

À 2 h 8 min 24 s, le premier agent entre dans la cellule, puis reste debout et surveille la plaignante, qui est toujours couchée au sol. Il quitte la cellule après environ 25 secondes.

À 2 h 24 min 10 s, une ambulancière paramédicale vêtue d’une veste jaune entre dans la cellule, suivie par une autre ambulancière, vêtue de la même manière. Les deux ambulancières se placent à gauche de la plaignante, qui est toujours couchée au sol. Deux agents de police en uniforme entrent dans la cellule. Les deux ambulancières, avec l’aide des deux agents, tentent de placer la plaignante en position assise. Ils ont de la difficulté. Les quatre personnes aident la plaignante à se lever. La plaignante semble avoir beaucoup de mal à rester en équilibre et ne pas pouvoir, ou vouloir, se tenir debout par elle-même.

À 2 h 26 min 22 s, les deux ambulancières paramédiacles, les deux agents de police et la plaignante sortent de la cellule et du champ de la caméra.


Enregistrement du système de TVCF de l’aire de mise en detention
 

15 décembre 2020
À 23 h 59, on voit la plaignante marcher par elle-même dans l’aire de mise en détention, et elle lance constamment des jurons d’une voix forte. Elle crie contre les agents qui se trouvent à cet endroit.


Enregistrement du système de TVCF de l’entrée des véhicules
 

15 décembre 2020
À 23 h 57 min 38 s, un agent de police en uniforme arrive par une porte depuis le garage de l’entrée des véhicules, et on l’entend parler avec un autre agent, que l’on croit être l’AI. Cet agent dit [traduction] « on nous a dit, à l’hôpital, qu’elle était partie avant d’être évaluée, et qu’elle ne coopérait pas avec les services médicaux d’urgence. Nous l’avons emmenée à l’hôpital pour qu’elle soit évaluée et [la plaignante] est partie d’elle-même. Elle a simplement perdu la tête ». On entend la plaignante dans le garage de l’entrée des véhicules; elle crie très fort et jure contre les agents.


Enregistrement audio de la cellule no 1
 

15 décembre 2020
La plaignante est placée dans la cellule. Elle jure constamment; cela dure près d’une heure. Lorsqu’elle est couchée au sol, on l’entend respirer fort et ronfler. Lorsqu’elle vomit, on l’entend tousser. Un agent de police arrive et dit [traduction] « [la plaignante], que se passe-t-il? Enlevez votre masque. » Cet agent est le premier à entrer dans la cellule.

À 2 h 6 min 39 s, le même agent demande [traduction] « [la plaignante], voulez-vous aller à l’hôpital et voulez-vous de l’eau? ». Il répète cela deux fois à la plaignante. Plus tard, on entend une ambulancière paramédiale demander à la plaignante « ouvrez les yeux » et « pouvons-nous vous asseoir? ». Les deux ambulancières paramédicales et deux agents de police aident la plaignante à sortir de la cellule et la placent sur une civière qui se trouve dans le couloir des cellules.


Documents obtenus du service de police
 

L’UES a obtenu les documents suivants de la part du SPB le 23 décembre 2020 :

  •  rapport d’arrestation;
  •  SPB – divulgation;
  •  enregistrements des communications;
  •  vidéo – mise en détention;
  •  procédure d’arrestation;
  •  procédure de garde et de contrôle des détenus;
  •  registre de garde et feuille de mise en détention concernant la plaignante;
  •  notes de l’AT no 2, de l’AT no 3, de l’AT no 4 et de l’AT no 5.

Éléments obtenus auprès d’autres sources
 

L’UES a obtenu les éléments suivants de la part de l’Hôpital général de Belleville et les a examinés :

  •  dossiers médicaux de la plaignante, reçus le 10 février 2021. 
     

Description de l’incident

Le scénario qui suit se dégage des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des entrevues avec la plaignante et l’AI ainsi que des enregistrements vidéo captés pendant que la plaignante était sous la garde de la police. Vers 23 h 12 le 15 décembre 2020, des agents ont été dépêchés à une résidence de Belleville pour aider les ambulanciers paramédicaux à s’occuper d’une patiente – la plaignante. Plus tôt ce soir-là, la plaignante s’était rendue à l’Hôpital général de Belleville et était retournée à la maison contre avis médical.

L’AT no 4 et l’AT no 5 se sont rendus à la résidence et, après avoir passé un certain temps à tenter de convaincre la plaignante de se rendre à l’hôpital avec les ambulanciers paramédicaux, ont menotté celle ci et l’ont mise sous garde. Leur intention était de ramener la plaignante à l’hôpital. Toutefois, à l’hôpital, les agents ont été avisés que la plaignante avait été évaluée plus tôt et qu’elle n’était plus la bienvenue dans l’établissement en raison de son comportement perturbateur. Puisque la plaignante criait, lançait des jurons et causait de l’agitation, l’AT no 4 et l’AT no 5 l’ont arrêtée et l’ont emmenée au commissariat de police.

La plaignante, qui est arrivée au commissariat vers 23 h 55, a été présentée à l’AI, puis placée dans une cellule.

Peu après 2 h, l’AI a vu la plaignante, sur le moniteur vidéo, tenter de vomir sur le plancher de la cellule et a appelé une ambulance. Les ambulancières paramédicales qui se sont présentées, avec l’aide d’agents de police, ont placé la plaignante sur une civière et l’ont emmenée à l’hôpital.

À l’hôpital, la plaignante a reçu un traitement pour une surdose.

Dispositions législatives pertinentes

Articles 219 et 221, Code criminel – Négligence criminelle causant des lésions corporelles

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.


(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.                  

221 Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.

L’article 215 du Code criminel – Défaut de fournir les choses nécessaires à l’existence

215 (1) Toute personne est légalement tenue :

c) de fournir les choses nécessaires à l’existence d’une personne à sa charge, si cette personne est incapable, à la fois :
(i) par suite de détention, d’âge, de maladie, de troubles mentaux, ou pour une autre cause, de se soustraire à cette charge,
(ii) de pourvoir aux choses nécessaires à sa propre existence.

(2) Commet une infraction quiconque, ayant une obligation légale au sens du paragraphe (1), omet, sans excuse légitime, de remplir cette obligation, si :
b) à l’égard d’une obligation imposée par l’alinéa (1)c), l’omission de remplir l’obligation met en danger la vie de la personne envers laquelle cette obligation doit être remplie, ou cause, ou est de nature à causer, un tort permanent à la santé de cette personne.

Analyse et décision du directeur

Tôt dans la matinée du 16 décembre 2020, la plaignante se trouvait dans une cellule du commissariat du SPB lorsqu’elle est tombée en détresse médicale aiguë, puis été transportée à l’hôpital. L’agent qui avait la responsabilité de la garde des détenus à ce moment-là – l’AI – a été désigné comme agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement aux problèmes de santé de la plaignante.

Les infractions possibles à l’étude sont l’omission de fournir les choses nécessaires à l’existence et la négligence criminelle causant des lésions corporelles, lesquelles se rapportent aux articles 215 et 221 du Code criminel, respectivement. La première infraction est fondée, en partie, sur une conduite constituant un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans les mêmes circonstances. La deuxième infraction est plus grave et nécessite, entre autres, que le comportement adopté constitue un écart marqué et important par rapport à la diligence dont ferait preuve une personne raisonnable dans des circonstances de même nature. Dans l’affaire qui nous concerne, la question est de savoir s’il y a eu, de la part de l’AI, tout manque de diligence qui aurait causé les problèmes de santé de la plaignante ou qui y aurait contribué, et, le cas échéant, s’il est suffisamment grave pour justifier des sanctions criminelles. À mon avis, ce n’est pas le cas.

D’abord, je reconnais qu’il était légitime que la plaignante se trouve sous la garde du SPB lorsqu’elle a été emmenée au commissariat et placée dans une cellule. Les éléments de preuve indiquent que la plaignante était bruyante, hostile et agressive au moment de sa deuxième visite à l’hôpital; d’ailleurs, elle a dû être retenue par trois agents à quelques reprises pendant que ceux ci parlaient avec le personnel médical. Dans ces circonstances, il semble qu’il y avait des motifs de procéder à l’arrestation de la plaignante pour avoir troublé la paix. En outre, je suis convaincu que l’un des facteurs ayant influencé la décision des agents de procéder à l’arrestation de la plaignante est la perturbation qu’elle causait à l’hôpital, ce qui justifie encore davantage son arrestation pour avoir troublé la paix, aux termes de l’article 175 du Code criminel.

Ainsi, je suis convaincu que l’AI a exercé une diligence raisonnable et qu’il a accordé une pleine attention à la santé et au bien-être de la plaignante pendant qu’elle se trouvait dans la cellule. L’agent savait qu’elle avait consommé une grande quantité de médicaments sur ordonnance et qu’on avait refusé de l’admettre à l’Hôpital général de Belleville. Il s’est donc employé à lui accorder une grande attention. Dès que la plaignante a vomi et que son état a semblé s’aggraver, l’AI a agi rapidement et a demandé qu’une ambulance soit envoyée sur les lieux. Dans ce dossier, je ne suis pas en mesure de conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, que l’AI n’a pas respecté les limites de diligence prescrites par le droit criminel.

Ainsi, puisqu’il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a agi autrement qu’en toute légalité tout au long de la période pendant laquelle la plaignante était sous garde, il n’y a pas de motifs de porter des accusations criminelles dans cette affaire, et ce dossier est clos.


Date : 1er avril 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) On a déterminé que l’AT no 1 n’avait pas eu d’interaction avec la plaignante. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.