Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-TFP-347

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la décharge d’une arme à feu par un agent sur un homme de 33 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 11 décembre 2020, à 23 h 09, le Service de police de Toronto (SPT) a signalé l’UES de la décharge d’une arme à létalité atténuée sur un individu.

Vers 21 h 42, ce soir-là, le SPT a été appelé au refuge pour nouveaux arrivants et réfugiés situé au 5800, rue Yonge, à Toronto, parce qu’un résident du refuge était en crise et brandissait un couteau. Les agents du SPT qui sont intervenus ont déployé une arme à létalité atténuée et une arme à impulsions. Le plaignant a été appréhendé et emmené à l’Hôpital général de North York.

Le SPT a précisé qu’une fois à l’hôpital, le plaignant était toujours agité à l’hôpital et incohérent. Apparemment, il avait des ecchymoses résultant du tir de projectiles de l’arme à létalité atténuée.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 12 décembre 2020 à 0 h 25

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 12 décembre 2020 à 1 h 04

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 33 ans, n’a pas participé à une entrevue [1]


Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue le 21 janvier 2021
TC no 2 A participé à une entrevue le 21 janvier 2021

Agent impliqué (AI)

AI A participé à une entrevue le 8 février 2021; ses notes ont été reçues et examinées


Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue le 20 janvier 2021; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 2 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire


Éléments de preuve

Les lieux

L’UES est arrivée sur les lieux à 1 h 04 le 12 décembre 2020.


Figure 1 – Vue aérienne du site (Google)

Figure 1 – Vue aérienne du site (Google)

Le 5800 rue Yonge est un immeuble de bureaux dont la démolition est prévue pour permettre la construction de deux tours de condominiums. L’immeuble avait été loué à la Homes First Society pour servir de centre de réchauffement et refuge, en attendant le début des travaux de démolition.

L’immeuble est situé du côté ouest de la rue Yonge et comporte une allée circulaire sur le devant (côté est). Le long du côté sud, une rampe accessible aux fauteuils roulants mène aux portes de l’immeuble. Il y a une rangée de places de stationnement au sud de la rampe. L’allée continue jusqu’à l’arrière de l’immeuble, où se trouve un grand stationnement (à l’ouest de l’immeuble).

La scène a été examinée et deux projectiles Super-Sock à létalité atténuée ont été récupérés dans le stationnement au sud de l’immeuble. Deux coques de projectiles Super-Sock ont été récupérées sur la rampe accessible en fauteuil roulant.


Figure 2 – Un projectile Super-Sock trouvé sur les lieux

Figure 2 – Un projectile Super-Sock trouvé sur les lieux


Figure 3 – L’arme à feu à létalité atténuée de l’AI

Figure 3 – L’arme à feu à létalité atténuée de l’AI


Figure 4 – Le couteau du plaignant

Figure 4 – Le couteau du plaignant


Les enquêteurs de l’UES ont examiné le stationnement arrière, où l’AT no 1 a présumément déployé son arme à impulsions, mais n’ont trouvé aucune étiquette d’identification antifélons (AFID) qui leur aurait permis de déterminer l’endroit précis où cette arme a été déployée.

Un employé du refuge a déclaré que les caméras de surveillance fixées à l’extérieur de l’immeuble ne fonctionnaient pas.

Les enquêteurs de l’UES se sont ensuite rendus au poste de la division 31 du SPT, où ils ont téléchargé les données de l’arme à impulsions de l’AT no 1 et photographié l’arme à létalité atténuée. Le SPT leur a remis le couteau pliant du plaignant.

Les enquêteurs ne se sont pas rendus à l’hôpital, en raison de l’épidémie de COVID-19 et des rapports de la police selon lesquels le plaignant était encore très agité.

Éléments de preuve matériels


Rapport du système de répartition assistée par ordinateur (RAO)


Le 21 janvier 2021, le SPT a remis une copie du rapport RAO à l’UES qui est résumé ci-après.

Le 11 décembre 2020, à 21 h 42, le SPT est informé qu’un homme de 33 ans est dans le stationnement du 5800, rue Yonge, et menace de se faire du mal. L’homme – le plaignant – n’est pas violent, mais il hurle dans le stationnement depuis deux heures. Le plaignant crie qu’il a l’intention de se suicider si quelqu’un tente de l’approcher. À 21 h 45, il est signalé que le plaignant a un couteau. Il est également signalé que d’autres résidents du refuge ont tenté d’approcher le plaignant, mais qu’il a menacé de se suicider ou de les tuer.

À 22 h 04, il est signalé que le plaignant est sous garde et que le couteau a été récupéré.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies


Enregistrement du système de caméra à bord de véhicules de police du SPT


Le 25 janvier 2021, le SPT a remis à l’UES dix DVD contenant des vidéos de caméras de dix véhicules de police.

À 21 h 56, un véhicule de police du SPT arrive au refuge. Le policier au volant ce véhicule voit un homme [le plaignant] debout dans l’allée sud, qui tient un couteau dans la main droite, au-dessus de sa tête. Le plaignant se dirige vers le véhicule de police tout en criant des propos incompréhensibles et en agitant la main gauche. L’agent fait marche arrière et gare son véhicule dans le rond-point de l’allée, derrière une ambulance.

L’agent dégaine son arme à impulsions et la tient dans la main droite. Il annonce par radio que le plaignant crie et hurle et qu’il est du côté sud de l’immeuble et tient un couteau dans la main droite. L’agent demande qu’on envoie le Groupe d’intervention d’urgence.

À 21 h 53, l’AI demande à être ajouté à l’appel. L’AI dit qu’il a un fusil à létalité atténuée dans son véhicule. À 21 h 55, l’AI arrive au refuge.

Le plaignant est seul au sud de l’allée et tient un objet brillant [son couteau] dans la main droite. Le plaignant agite le couteau qu’il tient de la main droite.

Pendant qu’un agent commence à parler au plaignant, l’AI, son fusil à létalité atténuée en main, se met à l’abri derrière un grand arbre.

L’AI et environ huit autres agents de police forment une rangée face au plaignant, à une distance sécuritaire. Un des agents tient une arme à impulsions. Deux ambulanciers paramédicaux sont derrière la rangée de policiers.

Le plaignant continue de crier et de gesticuler, le couteau dans la main droite. Il commence à reculer et l’AI se dirige vers la rampe d’accessibilité au sud de l’immeuble. Le plaignant continue de reculer, suivi par la rangée de policiers.

À 22 h 02, le plaignant continue de se déplacer vers l’arrière de l’immeuble, suivi par environ six policiers. Il crie et gesticule, le couteau toujours dans la main droite. À 22 h 03, l’AI tire avec son arme à létalité atténuée. Trois secondes plus tard, on entend un deuxième tir tandis que les agents avancent vers le plaignant.

À 22 h 03, plusieurs agents courent vers l’ouest de l’immeuble et disparaissent du champ de vision de la caméra. Un agent crie [traduction] : « Lâche le couteau » et « Mets-toi à terre ».

À 21 h 57, la caméra d’un autre véhicule de police a enregistré un dialogue entre le plaignant et les agents du SPT.

Un agent parle avec le plaignant, tandis qu’une rangée d’agents se tient à distance. [Ce qui suit est une traduction du dialogue]. L’agent dit au plaignant : « Et l’ami, comment ça va ? Comment t’appelles-tu? » Le plaignant répond : « Va te faire foutre! » L’agent dit : « Personne ne veut te faire du mal, d’accord? ». Le plaignant répond « Tire-moi dessus ». L’agent dit : « Personne ne va te tuer… peux-tu me faire une faveur et laisser tomber le couteau? » Le plaignant répond « Non ».

L’agent continue d’essayer de mettre le plaignant en confiance. Le plaignant répète à l’agent de le laisser tranquille. À 22 h, le plaignant dit : « Je veux que tu me tues. » L’agent répond : « Personne ne veut te tirer dessus… nous sommes là pour t’aider, d’accord? »

Le plaignant remarque les agents près de lui et commence à reculer vers l’arrière de l’immeuble.

À 22 h, l’agent, s’adressant au plaignant, lui dit : « S’il te plait, approche-toi. Je veux t’aider, d’accord? Mais pour pouvoir t’aider, j’ai besoin que tu lâches le couteau ? Le plaignant répond « Non ». L’agent demande : « Peux-tu le mettre dans ta poche alors? »

L’agent dit : « Regarde autour de toi. On est tous là pour t’aider ». Le plaignant répond : « Je veux mourir. » L’agent répond : « Personne ne veut que tu meures. Tout le monde est là pour t’aider. Personne ne veut te tirer dessus. On est là pour t’aider. J’ai besoin que tu m’écoutes ». Le plaignant répond : « Je m’en fous. Tue-moi maintenant. »

À 22 h 03, alors que l’agent de police continue d’implorer le plaignant de laisser tomber le couteau, l’AI tire avec son arme à létalité atténuée. L’AI tire une deuxième fois; plusieurs agents de police poursuivent le plaignant à pied et disparaissent du champ de vision de la caméra.

À 22 h 04, il est signalé que le plaignant est sous garde et que le couteau a été récupéré. L’ambulance se déplace vers l’arrière de l’immeuble.

À 22 h 07, on entend le plaignant dire qu’il veut mourir. À 22 h 09, le plaignant dit : “Je vous en prie, je dois mourir. Je veux mourir. »

Le véhicule de police le plus proche, celui de l’AT no 2, a capturé l’interaction du plaignant avec les membres du SPT. La vidéo de cette caméra montre ce qui suit : L’AT no 2 arrive sur les lieux à 21 h 58 et, en sortant de son véhicule, dégaine son arme à impulsions.

Au moins cinq agents forment une rangée face au plaignant, qui gesticule avec un couteau dans la main droite. Le micro de l’AT no 2 n’est pas activé.

Alors que le plaignant recule en agitant un couteau dans la main droite, la rangée de policiers avance. Trois agents sont sur la rampe, au sud de l’immeuble.

À 22 h 03, le plaignant est frappé par un projectile de l’arme à létalité atténuée de l’AI; il court vers l’arrière de l’immeuble. Le plaignant est frappé par un deuxième projectile de la même arme et continue de courir, poursuivi par des agents.

À 22 h 16, l’AT no 2 retourne à son véhicule de police. Il tient une arme à impulsions qui été déployée.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, le SPT a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 29 et le 11 mars 2021 :
  • Rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
  • Enregistrements des caméras à bord de dix véhicules de police;
  • Notes de l’AI;
  • Notes de l’AT no 2;
  • Notes de l’AT no 1.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a reçu le dossier suivant d’une source autre que la police le 28 janvier 2021 :
  • Rapport d’incident du Willowdale Welcome Center.

Description de l’incident

Le déroulement de l’incident en question peut être établi clairement grâce à des vidéos qui en ont capturé des portions, ainsi qu’à des entrevues avec l’AI, avec un témoin de la police et avec deux civils qui se trouvaient dans le secteur. Le 11 décembre 2020, le jour de la fusillade, le plaignant – un résident occasionnel du refuge Willowdale Welcome Centre au 5800, rue Yonge – était en état de détresse mentale. Un couteau de poche en main, il était retourné au refuge et criait aux autres résidents qu’il voulait qu’on l’abatte. Malgré leurs efforts, les autres résidents n’étaient pas parvenus à le calmer. S’inquiétant pour le bien-être du plaignant et pour la sécurité des résidents et du personnel, un employé du refuge, le TC no 1, a ordonné d’appeler la police et une ambulance. Il était environ 21 h 40.

Les ambulanciers paramédicaux sont arrivés en premier, suivis de près par plusieurs agents, à partir de 21 h 55 environ. L’AI, armé d’un fusil à létalité atténuée (à projectiles en sachets), étaient l’un de ces agents. Les agents se sont approchés à pied du plaignant, sur le côté sud de l’immeuble, et ont tenté de communiquer avec lui. Ils ont demandé au plaignant ce qui n’allait pas, lui ont expliqué qu’ils étaient là pour l’aider et l’ont encouragé à lâcher le couteau.

Le plaignant a repoussé toutes les tentatives de négociation des agents et leur a crié à plusieurs reprises qu’il voulait mourir et qu’on lui tire dessus. Il a commencé à reculer, suivi à distance par les agents, dont l’AI. Vers 22 h 03, alors qu’il se tenait à proximité d’une rampe d’accessibilité au sud de l’immeuble, l’AI a tiré une fois sur le plaignant avec son fusil à létalité atténuée. Le projectile a frappé le plaignant à l’estomac. Sous le coup, le plaignant s’est penché en avant, mais pas pour longtemps. Quelques secondes plus tard, l’AI a de nouveau tiré sur le plaignant alors que ce dernier, le couteau toujours en main, courait vers l’ouest.

Des agents – dont l’AI no 1, armé d’une arme à impulsions – se sont lancés à sa poursuite. Le plaignant s’est arrêté, a fait demi-tour pour faire face à l’AT no 1 et a fait un bond en avant vers l’agent. L’AT no 1 a déchargé son arme à impulsions. Les sondes ont frappé le plaignant, qui a montré des signes de douleur, puis a laissé tomber le couteau avant de reprendre sa fuite pour s’éloigner des agents.

Comme le plaignant ne tenait plus le couteau, les agents l’ont vite rattrapé et l’ont arrêté sans autre incident.

La seule blessure que le plaignant aurait subie était une ecchymose à l’estomac.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 11 décembre 2020, le plaignant a été frappé à deux reprises par un projectile (un « sac à pois ») tiré par un agent du SPT. L’UES a ouvert une enquête et a identifié l’AI, le tireur, comme étant l’agent impliqué aux fins de son enquête. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait pu commettre une infraction criminelle en lien avec l’incident.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les policiers sont exonérés de toute responsabilité criminelle lorsqu’ils ont recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, pour autant que cette force n’excède pas ce qui est raisonnablement nécessaire à l’accomplissement d’un acte qui leur est enjoint ou permis de faire en vertu de la loi. Les agents qui sont intervenus sur les lieux agissaient dans leurs droits en tentant de placer le plaignant sous garde. Le plaignant avait brandi un couteau en présence de résidents du refuge. Il menaçait également de se faire du mal et avait un comportement irrationnel. Dans les circonstances, le plaignant pouvait être appréhendé en vertu de l’article 17 de Loi sur la santé mentale et pour port d’arme dans un dessein dangereux en vertu du Code criminel.

Par la suite, je suis convaincu que l’AI a utilisé une force raisonnable en déchargeant son fusil à létalité atténuée sur le plaignant. Le couteau que tenait le plaignant, bien qu’un couteau de poche, pouvait infliger la mort ou des lésions corporelles graves à courte distance; les agents agissaient légalement en tentant de lui enlever son arme depuis une certaine distance. C’est exactement ce qu’a fait l’AI quand, depuis une distance d’environ neuf mètres, il a tiré deux fois sur le plaignant. Bien que les deux cartouches aient atteint leur cible (le torse du plaignant), elles n’ont pas forcé le plaignant à lâcher son couteau. Ce n’est qu’après le déploiement d’une arme à impulsions quelques instants plus tard que le plaignant a finalement laissé tomber le couteau et que les agents ont pu l’appréhender. Quoi qu’il en soit, je ne suis pas en mesure de conclure raisonnablement que le recours de l’AI à son arme à feu constituait une réaction disproportionnée à la situation.

Par conséquent, comme je suis convaincu, pour les raisons énoncées ci-avant, que l’AI a agi légalement en présence du plaignant, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles contre l’agent dans cette affaire, et le dossier est clos.



Date : 22 mars 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Le plaignant était sans abri et, malgré leurs efforts, les enquêteurs de l'UES n'ont pas réussi à le contacter pour une entrevue. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.