Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OCI-276

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Le rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur une blessure subie par une femme de 30 ans (plaignante).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 20 octobre 2020, à 11 h 22, le Service de police de Brantford a avisé l’UES de la blessure subie par la plaignante. Il a signalé que, le 20 octobre 2020, à 1 h 49, des agents, soit l’agent témoin (AT) no 1 et l’agent impliqué (AI), s’étaient rendus à une résidence pour un incident de violence familiale. La plaignante et son petit ami, soit le témoin civil (TC), s’étaient disputés et les deux allaient être arrêtés pour voies de fait contre un membre de la famille. Le TC devait être relâché après avoir reçu une citation à comparaître, tandis que la plaignante allait être gardée parce qu’elle était sous l’effet de l’alcool. Durant son arrestation, elle a résisté vigoureusement. Elle a été conduite au poste, où elle a été gardée dans une cellule. Dans la matinée, elle s’est plainte de douleur à un poignet et elle a été transportée à l’Hôpital général de Brantford. Elle a par la suite reçu un diagnostic de fracture du poignet droit. Son poignet a été mis dans le plâtre, et la plaignante a par la suite été relâchée conformément à une ordonnance de mise en liberté.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Plaignante :

Femme de 30 ans; a participé à une entrevue

Témoin civil

TC A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue

Agent impliqué

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué


Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est déroulé à la résidence du TC, à Brantford.

Éléments de preuve matériels


Enregistrement vidéo de l’aire de transfert

L’AI a pénétré dans l’aire de transfert à 2 h 43 et il a attendu en dehors de sa voiture de police. La plaignante est demeurée sur la banquette arrière, toujours menottée. Elle a été sortie à 3 h 12.


Enregistrement vidéo de la salle d’administration d’alcootests

L’enregistrement vidéo de cette salle montre la plaignante escortée jusqu’à la salle pour y subir une fouille de son soutien-gorge.

L’AT no 2 ainsi que l’AI sont demeurés hors de la salle. La plaignante s’est montrée coopérative au début, mais quand l’AT no 1 a voulu commencer la fouille, la plaignante s’est mise à résister. L’AT no 2 et l’AI sont entrés dans la salle pour vérifier si l’AT no 1 était en sécurité. Une fois la plaignante menottée de nouveau, les mains derrière le dos, elle a été sortie de la salle d’administration d’alcootests sous escorte, sans aucun autre incident. Le fait de remettre les menottes à la plaignante et l’usage de la force par les agents n’ont pas semblé poser de problèmes.

Enregistrements des communications de la police

À 0 h 1 le 20 octobre 2020, la plaignante a appelé le Service de police de Brantford pour porter plainte contre son petit ami, le TC, qui venait de la frapper. Elle a refusé l’ambulance et voulait seulement qu’on vienne le chercher. Elle a précisé qu’aucune arme n’était en cause. La plaignante a indiqué qu’elle s’isolerait dans une autre pièce.

À 1 h 49, la plaignante a été arrêtée. Le TC a été relâché après avoir reçu une citation à comparaître.

Éléments obtenus auprès du Service de police

Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants du Service de police de Brantford :
  • le rapport d’enregistrement d’arrestation;
  • les accusations;
  • les données sur la répartition provenant du système de répartition assisté par ordinateur;
  • le rapport de personne en cause;
  • le rapport de vérification des dossiers par l’AT no 1;
  • le rapport de l’AT no 1;
  • la politique relative à l’arrestation, à la sécurité et à la maîtrise des prisonniers et aux soins à leur prodiguer;
  • les enregistrements de communications;
  • la lettre de divulgation du Service de police de Brantford;
  • les notes de l’AT no 1;
  • la politique relative au recours à la force;
  • le journal de la formation sur le recours à la force suivie par l’AI;
  • l’enregistrement vidéo de l’aire de garde.

Description de l’incident

Le déroulement des événements pertinents ressort clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES, soit les entrevues avec la plaignante, l’un des deux agents ayant procédé à l’arrestation et un témoin civil, et il peut être résumé brièvement. Tôt dans la matinée du 20 octobre 2020, l’AI et l’AT no 1 sont arrivés à la résidence du TC après avoir été appelés pour un incident de violence familiale. La plaignante avait téléphoné à la police pour signaler qu’elle avait été frappée par son petit ami, soit le TC, et elle voulait qu’on vienne le sortir de la résidence.

Les agents ont discuté avec la plaignante et le TC, ont noté une blessure au visage du TC, ont demandé l’avis d’un supérieur qui n’était pas sur place et ont décidé d’arrêter les deux parties pour voies de fait. La plaignante a été menottée, les mains derrière le dos, par l’AI. Le TC a été arrêté mais relâché après avoir reçu une citation à comparaître.

La plaignante a été escortée à partir de la résidence et installée sur la banquette arrière de la voiture de police de l’AT no 1. Lorsqu’elle s’est plainte de douleur à un poignet, l’AT no 1 a vérifié les menottes pour s’assurer qu’elles n’étaient pas trop serrées.

Une fois au poste de police, la plaignante a refusé de coopérer pour l’enregistrement et a résisté à une fouille. L’AT no 2 et l’AI ont alors dû intervenir, mais la plaignante n’a pas signalé de blessures avant d’être placée dans une cellule.

Ce matin-là, la plaignante a été conduite à l’hôpital, où elle a reçu un diagnostic de fracture du poignet droit.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 20 octobre 2020, la plaignante a reçu un diagnostic de fracture du poignet droit, après avoir été arrêtée par des agents du Service de police de Brantford. L’AI était l’un des agents ayant participé à l’arrestation et il a été identifié comme l’agent impliqué pour les besoins de l’enquête de l’UES. D’après mon évaluation des éléments de preuve, je n’ai, à mon avis, pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en relation avec l’arrestation et la blessure de la plaignante.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents ne peuvent être reconnus coupables d’avoir fait usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire pour accomplir quelque chose que la loi les oblige ou les autorise à faire. Je considère que l’AI était dans l’exécution de ses fonctions légitimes lorsqu’il a décidé d’arrêter la plaignante et de lui passer les menottes. Compte tenu de l’information qu’il avait reçue à la suite de l’appel au 911 et de ce qu’il avait appris en faisant enquête avec l’AT no 1 sur les lieux de l’incident, il semblait avoir des motifs suffisants de croire que la plaignante était responsable de voies de fait.

Par la suite, hormis le faible niveau de force qui peut avoir été nécessaire pour tenir la plaignante, lui mettre les bras derrière le dos et lui passer les menottes, les éléments de preuve indiquent que l’arrestation a été effectuée sans problème. La plaignante n’a pas résisté au passage des menottes et l’AI ne semble pas avoir eu de difficulté à la menotter. De fait, la plaignante a elle-même avoué qu’elle ne savait pas trop comment elle avait été blessée, mais il importe de signaler qu’elle était alors en état d’ébriété. Il ressort qu’une certaine force a dû être exercée au poste de police pour maîtriser la plaignante, lorsqu’elle a résisté à la fouille, mais il ressort qu’elle a été blessée soit avant ou pendant son arrestation puisqu’elle s’est plainte de douleur au poignet dans la voiture de police sur les lieux de l’incident. Cela porte à croire qu’il se peut que la blessure soit survenue avant l’arrivée des agents, peut-être au cours de l’altercation avec le TC.

En définitive, que la blessure de la plaignante soit survenue ou non pendant qu’elle était arrêtée et menottée par l’AI, les éléments de preuve ne suffisent pas pour conclure que l’agent a agi de manière illégale en l’arrêtant ou qu’il a fait un usage excessif de la force pour ce faire. Par conséquent, il n’existe pas de motifs de porter des accusations dans cette affaire, et le dossier est donc clos.

Date :  22 mars 2021



 





Note:

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