Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OCI-296

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure subie par un homme de 31 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 5 novembre 2020, à 14 h, le Service de police régional de Peel a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant.

Le Service de police régional de Peel a signalé que, le 5 novembre 2020, il avait exécuté une ordonnance de communication à l’Hôpital Civic de Brampton pour l’obtention d’échantillons de sang prélevés à l’admission sur le plaignant en relation avec un incident de conduite avec facultés affaiblies survenu le 13 octobre 2020. Le Service de police a également reçu les dossiers médicaux indiquant que le plaignant s’était fracturé une côte.

Le Service de police régional de Peel a indiqué que, le 13 octobre 2020, vers midi, il avait reçu des appels au 911 au sujet d’un conducteur de véhicule qui semblait être en état d’ébriété et qui roulait en direction ouest sur la rue Queen à Brampton. Des agents se sont rendus sur les lieux de même qu’un agent du Service de police de Toronto qui n’était alors pas de service mais qui avait aussi observé la conduite dangereuse. Le véhicule suspect passait brusquement d’une voie à une autre et a failli heurter un poteau en quittant la chaussée près de Torbram Road. Les agents dépêchés ont arrêté le conducteur [maintenant identifié comme le plaignant], qui s’est mis à lutter. Le plaignant a été arrêté pour conduite avec facultés affaiblies et conduit à l’Hôpital Civic de Brampton pour des blessures non identifiées.

Pendant qu’il était à l’hôpital, le plaignant a été examiné par un médecin, qui a observé une fracture de la septième côte du côté droit.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés :

Plaignant :

Homme de 31 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue 

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue


Agent impliqué

AI A participé à une entrevue; notes reçues et examinées


Éléments de preuve

Les lieux

Les événements se sont déroulés près de l’intersection entre la rue Queen Est et Torbram Road. Le véhicule du plaignant, une CRV Honda de 2015, s’est immobilisé avec l’avant vers l’ouest, dans les voies en direction est de la rue Queen Est. Les voies en direction est et en direction ouest de la rue Queen Est étaient séparées par un terre-plein central. Il semblerait que le plaignant ait parcouru 500 à 600 mètres dans la mauvaise direction. Son véhicule CRV Honda avait fait une collision frontale avec une Caravan Dodge conduite par le TC no 2. Les dommages subis par les deux véhicules étaient minimes.

Éléments de preuves médicolégaux


Données téléchargées à partir d’une arme à impulsions


Le 13 octobre 2020, à 12 h 9 min 0 s, l’AI a armé son arme à impulsions [1].

À 12 h 9 min 3 s, l’AI a appuyé sur la détente de son arme à impulsions et l’a déployée en mode contact pendant une seconde.

À 12 h 9 min 4 s, l’AI a déployé son arme à impulsions en mode contact encore pour une seconde.

À 12 h 9 min 9 s, l’AI a déployé son arme à impulsions en mode contact pour la troisième fois pendant deux secondes.

Et, enfin, à 12 h 9 min 25 s, l’AI a procédé à un dernier déploiement en mode contact pendant une seconde.

L’AI a ensuite désarmé son arme à impulsions à 12 h 9 min 31 s.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques


Caméra de bord du plaignant


Le plaignant avait une caméra intégrée au tableau de bord de sa CRV Honda de 2015 le 13 octobre 2020, et celle-ci a capté ce qui suit.

Le plaignant roulait en direction ouest sur la rue Queen Est, lorsqu’il a dû s’immobiliser dans une file de voitures à un feu rouge à la hauteur de Airport Road. On entendait de la musique jouer à un volume élevé à l’intérieur de l’habitacle. Lorsque le feu est viré au vert, le plaignant s’est mis à avancer vers l’ouest dans la voie réservée aux véhicules continuant tout droit. Il semblait alors conduire normalement et il avançait au même rythme que les autres véhicules. Il a atteint une vitesse maximale de 74 km/h.

À 11 h 58 min 57 s, le plaignant s’est immobilisé à un feu rouge derrière un autre véhicule à la hauteur de Chrysler Drive. Il était sur la voie en bordure de la rue.

À 11 h 59 min 45 s, le plaignant a commencé à émettre des sons gutturaux incohérents. Le feu de circulation est viré au vert à 12 h. Les véhicules en direction ouest ont commencé à traverser l’intersection, mais le véhicule du plaignant ne s’est pas mis à avancer. Le conducteur de la camionnette Ford noire qui était arrêtée derrière le plaignant a décidé de contourner le véhicule du plaignant du côté du passager, il s’est arrêté et il est sorti de son véhicule. La camionnette et son conducteur étaient alors hors du champ de la caméra, car ils étaient à côté de la voiture du plaignant. On a aussi observé que d’autres automobilistes avaient contourné le véhicule du plaignant pour continuer de se diriger vers l’ouest. On entendait le plaignant émettre des sons donnant l’impression qu’il avait de la difficulté à parler et à respirer. Le feu de circulation est devenu rouge à 12 h 1 min 28 s et il a fait tout un cycle pour redevenir vert à 12 h 2 min 55 s. Le plaignant n’a toujours pas avancé lorsque le feu est redevenu vert. On l’entendait grogner, tousser et se racler la gorge.

À 12 h 3 min 17 s, le véhicule du plaignant s’est mis à avancer lentement pour traverser l’intersection. Il semblerait que le plaignant ait levé le pied du frein, mais il n’a pas accéléré. Sa vitesse était alors d’au maximum 7 km/h. Le véhicule du plaignant a commencé à se déplacer vers la droite en traversant l’intersection.

À 12 h 4 min 9 s, le plaignant a accéléré pour atteindre 50 km/h, il est monté sur la bordure de chaussée nord et il a heurté un panneau indicateur de vitesse avant de retourner sur la chaussée. Le véhicule a continué sa trajectoire en direction ouest, sans accélérer davantage, et il est remonté lentement sur la bordure de chaussée nord à l’intersection où se trouvait le restaurant Tim Horton’s, avant de revenir encore une fois sur la route.

À 12 h 5 min 56 s, le plaignant a traversé les trois voies en direction ouest à vitesse réduite, soit à 2 ou 3 km/h, il a traversé le terre-plein central juste avant de traverser les trois voies en direction est en roulant à contresens. Il s’est rendu jusqu’au côté sud du boulevard après avoir traversé les voies en direction est, puis son véhicule s’est immobilisé.

Un inconnu au volant d’un véhicule Range Rover blanc s’était arrêté et était sorti et il courait en direction du véhicule du plaignant. On entendait l’homme crier quelque chose au plaignant, mais ses mots étaient inaudibles. Le plaignant lui a répondu d’aller se faire foutre.

À 12 h 6 min 3 s, le plaignant a accéléré pour retourner sur la route et il a continué à rouler en direction ouest sur les voies en direction est. L’inconnu est alors retourné à son véhicule Range Rover.

À 12 h 6 min 20 s, le plaignant a immobilisé sa voiture dans la voie en bordure de la route à un feu rouge, à la hauteur de Torbram Road, et il était alors toujours à contresens.

À 12 h 6 min 30 s, on a commencé à entendre des coups (comme si quelqu’un à l’extérieur du véhicule essayait d’ouvrir la portière du conducteur du véhicule du plaignant). Le plaignant s’est alors mis à crier : [Traduction] « Hé! Qu’est-ce que tu fais là? Va te faire foutre, salaud. » On a entendu un inconnu demander au plaignant d’ouvrir la portière. Celui-ci lui a répété à plusieurs reprises d’aller se faire foutre. Un inconnu est passé derrière le véhicule du plaignant pour se rendre du côté du conducteur.

À 12 h 7 min 11 s, une minifourgonnette de couleur foncée s’est placée devant le véhicule du plaignant et a avancé lentement. Il a semblé que les deux véhicules étaient entrés en contact avant que la minifourgonnette s’immobilise. Un autre véhicule, soit un VUS de couleur foncée, s’est aussi placé devant le véhicule du plaignant, du côté sud par rapport à la minifourgonnette. Ces deux véhicules étaient placés de manière à empêcher le plaignant d’avancer. Celui-ci continuait de hurler : [Traduction] « Que diable êtes-vous en train de faire, hein? » On a vu le conducteur du Range Rover passer en courant derrière le véhicule du plaignant pour se rendre du côté du conducteur, puis on a entendu les bruits d’une lutte donnant l’impression qu’on était en train de sortir le plaignant du véhicule.

À 12 h 8 min 10 s, une sirène de police a retenti. La voiture de police n’est pas entrée dans le champ de la caméra. On entendait le plaignant gémir.

À 12 h 8 min 52 s, une ambulance est arrivée sur les lieux.

À 12 h 8 min 58 s, une voiture du Service de police régional de Peel est arrivée sur les lieux.

À 12 h 9 min 55 s, un véhicule du service des incendies de Peel ainsi que deux autres voitures de police sont arrivés. On a entendu une lutte, et le plaignant continuait de crier.

L’enregistrement s’est terminé à 12 h 11 min 13 s.

Aucune image des contacts physiques entre le plaignant, les agents et les témoins civils sur place n’a été captée.

Enregistrement vidéo fait par le TC no 2


Le TC no 2 a immobilisé son véhicule, le devant collé sur le devant du véhicule Honda du plaignant. À l’aide de son téléphone cellulaire, il a fait un enregistrement vidéo de 21 secondes montrant les interactions entre les agents du Service de police régional de Peel et le plaignant. L’enregistrement a été fait à partir de l’intérieur du véhicule du TC no 2 et était de piètre qualité. Il n’a pas fourni d’éléments de preuve utiles pour l’enquête.

Enregistrements des communications de la police


Enregistrements des appels au 911


Le Service de police régional de Peel a reçu onze appels au 911 le 13 octobre 2020 signalant l’incident. En voici le résumé.

À 11 h 59 min 4 s, un appel au 911 a été fait par un inconnu qui indiquait qu’une personne [maintenant identifiée comme le plaignant] avait une crise dans son véhicule. L’appel a été transféré au répartiteur des services ambulanciers et la communication a été interrompue.

À 12 h 2 min 2 s, quelqu’un a signalé que le conducteur d’un véhicule sur la rue Queen, à la hauteur de Chrysler Drive, était inconscient. Il a dit que le conducteur avait heurté un poteau et roulait maintenant sur la route et risquait de heurter quelqu’un. Il a ajouté que le conducteur en question [maintenant identifié comme le plaignant] conduisait d’abord lentement, puis avait accéléré et roulait maintenant vers l’ouest, en direction de Dixie Road. Il a mentionné que la voiture était une CRV Honda grise. L’homme a ajouté que quelqu’un se dirigeait vers le véhicule pour tenter d’aider le plaignant. On a alors demandé si le véhicule était immobilisé, et il a répondu que non. Il a ensuite indiqué que le véhicule s’était arrêté à Torbram Road. Des gens s’approchaient du véhicule pour tenter de le déverrouiller. Il ne voyait pas la plaque d’immatriculation. Il distinguait toutefois que la personne au volant était un homme. La voiture était arrêtée sur la rue Queen en direction ouest, à la hauteur de Torbram Road. L’homme a ensuite précisé que la police était là.

À 12 h 3 min 53 s, un inconnu a indiqué qu’il se trouvait à l’intersection entre Chrysler Drive et la rue Queen et qu’il voyait un homme dans une Civic Honda grise d’un vieux modèle qui était en piteux état, sous l’influence d’une drogue ou autre chose. Il a dit que l’homme dodelinait de la tête, qu’il venait de faire une sortie de route et qu’il avait failli heurter un autre véhicule. La voiture était en direction ouest sur la rue Queen. La personne qui a appelé roulait dans le sens opposé et n’a pu voir la plaque d’immatriculation. Elle a ajouté que le conducteur n’était pas de couleur blanche, qu’il avait brûlé un feu rouge et qu’il était passé à côté d’elle au ralenti. En regardant dans son rétroviseur extérieur, la personne a vu le véhicule prendre de la vitesse et sortir de la route pour passer sur le trottoir et venir près d’emboutir un poteau électrique. Le conducteur avait l’air d’un jeune homme, entre 25 ans et 30 ans, avec des cheveux foncés coupés court [maintenant identifié comme le plaignant]. Le téléphoniste du 911 a fait savoir à la personne au bout du fil que la police avait intercepté le véhicule et que le plaignant avait une crise.

À 12 h 3 min 9 s, un inconnu a signalé un conducteur ayant une conduite désordonnée [maintenant identifié comme le plaignant] à l’intersection de Torbram Road et de la rue Queen. Il a ajouté que le plaignant avait heurté quelques panneaux de signalisation et avait failli percuter quelques voitures. Quelques personnes avaient arrêté le véhicule et tentaient de pénétrer à l’intérieur. Une voiture de police était sur les lieux et des personnes tentaient de sortir le conducteur. L’homme a indiqué qu’il s’agissait d’une petite voiture, une CRV Honda gris foncé.

À 12 h 3 min 21 s, le répartiteur des services ambulanciers a appelé pour aviser que quelqu’un avait téléphoné en disant qu’un homme était inconscient dans une Honda de couleur grise à l’intersection de la rue Queen et du boulevard Gateway.

À 12 h 3 min 5 s, une femme a appelé le 911 pour signaler qu’une voiture avait fait une sortie de route et s’était presque retrouvée dans un fossé et qu’elle était en train de se retourner pour rouler à contresens sur la rue Queen près de Torbram Road, à proximité du restaurant McDonald’s. Elle voyait le conducteur qui dodelinait de la tête et a supposé qu’il avait un malaise ou qu’il conduisait avec les facultés affaiblies. La femme a ajouté que la voiture n’était pas entrée dans le fossé mais avait roulé sur l’herbe et heurté quelques panneaux de signalisation du côté nord de la route. Elle a eu l’impression que le véhicule se dirigeait vers des voies en contresens, mais elle l’a perdu de vue en poursuivant son chemin en direction est.

À 12 h 3 min 54 s, un inconnu a appelé pour signaler un incident, en disant que la police était déjà sur les lieux, puis la communication a été coupée.

À 12 h 3 min 59 s, un homme a appelé et on l’entendait répéter : [Traduction] « Ouvrez la porte. », pendant qu’il attendait que le téléphoniste du 911 lui réponde. Plusieurs hommes disaient : [Traduction] « Éteignez le moteur, vous pourriez blesser quelqu’un. » Puis, on a entendu : [Traduction] « Ouvrez la porte. » Un homme a dit que la portière était ouverte, puis des bruits de lutte ont été entendus. Au bout de 2 min 10 s, le téléphoniste du 911 a répondu. L’homme a indiqué qu’il était un policier qui n’était pas de service [maintenant identifié comme l’AT no 3], et la communication a été interrompue.

À 12 h 4 min 6 s, quelqu’un a appelé, a été mis en attente pendant plus de deux minutes et a raccroché. Le téléphoniste du 911 a rappelé deux minutes plus tard. La personne a dit qu’elle n’avait plus besoin de la police, car des agents étaient arrivés sur les lieux.

À 12 h 5 min 12 s, une autre personne a été mise en attente pendant plusieurs minutes et a fini par raccrocher. Le téléphoniste du 911 a rappelé après quatre minutes et demie. La personne a répondu que la police était arrivée, et la communication a été interrompue.

À 12 h 6 min 46 s, une inconnue est restée en attente pendant trois minutes avant que son appel soit transféré à un téléphoniste. Elle a dit avoir vu une voiture roulant en direction ouest sur les voies en direction est de la rue Queen. Elle a précisé que des véhicules de la police et des services d’urgence étaient sur les lieux et qu’elle-même n’était plus là.

Enregistrements de communications


Les enregistrements ont été faits le 13 octobre 2020. Voici un résumé du contenu.

À 12 h 3 min 53 s, le répartiteur a demandé aux unités qui se trouvaient dans le secteur de la rue Queen et de Chrysler Drive de se rendre à l’endroit où un conducteur en état d’ébriété avait été vu. L’AI a envoyé un message radio pour indiquer qu’il était dans le secteur et qu’il se rendrait sur les lieux. Le répartiteur a précisé que le véhicule en question était une CRV Honda de couleur grise. La personne qui a téléphoné a signalé que des gens essayaient de l’arrêter et que le véhicule roulait en direction ouest sur la rue Queen. Le conducteur semblait dormir. L’AT no 4 a dit à la radio de police qu’il viendrait aussi.

Le répartiteur a annoncé que le véhicule venait de traverser Torbram Road et se dirigeait toujours vers l’ouest sur la rue Queen. Le conducteur était un homme [maintenant identifié comme le plaignant], et il y avait plusieurs personnes autour du véhicule qui essayaient de le faire sortir. Le conducteur avait failli heurter plusieurs choses. L’AT no 2 s’est acheminé vers les lieux.

À 12 h 6 min 13 s, l’AT no 1 a signalé à la radio de police qu’il était dans le secteur et a demandé où se trouvait le véhicule.

À 12 h 6 min 58 s, le répartiteur a annoncé qu’un autre appel concernant le véhicule avait été reçu et que celui-ci se trouvait, semble-t-il, à l’intersection de la rue Queen et de Torbram Road. La dernière fois qu’il avait été aperçu, il roulait vers l’est sur la rue Queen et avait failli emprunter les voies en contresens.

À 12 h 7 min 57 s, un agent non désigné a utilisé sa radio de police pour signaler que toutes les voies en direction est seraient fermées et qu’une ambulance était sur les lieux. L’AI a informé le répartiteur que la police était sur place et que la situation était maîtrisée.

À 12 h 9 min 25 s, l’agent non désigné a utilisé sa radio de police pour signaler que le plaignant était sous garde.

Éléments obtenus auprès du Service de police

L’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants du Service de police régional de Peel et du Service de police de Toronto :
  • les notes des AT nos 1, 2 et 4 et de l’AI;
  • les données de l’arme à impulsions;
  • les enregistrements des communications;
  • la chronologie des événements du système de répartition assisté par ordinateur du Service de police régional de Peel;
  • le rapport de collision de véhicule automobile du Service de police régional de Peel;
  • le rapport d’incident du Service de police régional de Peel;
  • les rôles des agents du Service de police régional de Peel;
  • les renseignements personnels relatifs au plaignant du Service de police régional de Peel;
  • la politique du Service de police régional de Peel sur la conduite avec facultés affaiblies;
  • la politique du Service de police régional de Peel sur les enquêtes criminelles;
  • la politique du Service de police régional de Peel relative à la santé mentale;
  • la liste des témoins du Service de police régional de Peel;
  • le rapport supplémentaire de l’AT no 3 du Service de police de Toronto.

Éléments obtenus d’autres sources

L’UES a également obtenu et examiné les documents et éléments suivants :
  • les dossiers médicaux de l’Hôpital Civic de Brampton;
  • l’enregistrement vidéo de la caméra de bord du plaignant;
  • l’enregistrement vidéo fait par le TC no 2.

Description de l’incident

Le scénario qui suit ressort du poids des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment les entrevues avec le plaignant, l’AI, l’agent du Service de police de Toronto qui n’était pas de service mais qui a aidé à sortir le plaignant de son véhicule et plusieurs témoins civils. Les enregistrements des communications de la police et un enregistrement vidéo de la caméra de bord du plaignant, qui a capté des parties de l’incident, ont aussi été utiles pour l’enquête.

Vers l’heure du midi le 13 octobre 2020, le Service de police régional de Peel a commencé à recevoir des appels au 911 au sujet d’un homme qui conduisait un véhicule en direction ouest sur la rue Queen et qui semblait avoir un malaise. Il s’agissait du plaignant et il était au volant d’une CRV Honda. L’une des personnes ayant appelé a indiqué que la Honda avait heurté un poteau, avait fait une sortie de route et avait failli percuter d’autres véhicules.

Le plaignant avait commencé à conduire de façon désordonnée sur la rue Queen en direction ouest tandis qu’il commençait à entrer en crise. Le véhicule a fini par déborder sur les voies en direction est de la rue Queen Est, où il a continué sa trajectoire vers l’ouest jusqu’à ce qu’il s’arrête à un feu rouge à Torbram Road. À ce stade, d’autres automobilistes, qui avaient vu le véhicule Honda se déplacer de manière dangereuse sur la chaussée, sont intervenus pour l’empêcher d’aller plus loin.

Parmi les automobilistes ayant observé les mouvements bizarres de la Honda se trouvait un agent du Service de police de Toronto qui n’était pas de service, soit l’AT no 3. Avec l’aide d’un autre automobiliste, qui s’était arrêté pour prêter assistance, soit le TC no 1, l’agent a tenté de sortir le plaignant du véhicule Honda. Le plaignant a réagi violemment contre l’agent et le TC no 1. Il s’est mis à jurer, il a tenté de frapper le TC no 1 et il s’est agrippé au volant pendant qu’ils tentaient de l’extirper du véhicule.

L’AI a été mis au courant de l’incident et il a décidé de se rendre sur les lieux, vu qu’il se trouvait à proximité, juste à l’est des lieux. Une fois à l’intersection entre la rue Queen et Torbram Road, il est sorti de sa voiture de police et a aidé l’AT no 3 à sortir le plaignant de la Honda par la portière du côté passager. Le plaignant a été étendu au sol sur la chaussée, où il a continué à lutter. Avec l’aide de l’AT no 3, l’AI a fini par réussir à menotter le plaignant les mains derrière le dos.

Le plaignant s’est mis à gigoter et à essayer de donner des coups au sol pendant qu’il était menotté. En réaction, l’AI a déployé son arme à impulsions en mode contact à plusieurs reprises contre le plaignant. Les décharges n’ont pas permis de faire tranquilliser le plaignant. Avec l’aide d’autres agents, l’AI est toutefois parvenu à maîtriser le plaignant au sol pendant qu’ils attendaient l’ambulance.

À l’arrivée des ambulanciers, le plaignant a été installé sur un brancard, puis placé dans l’ambulance. En route vers l’hôpital, les ambulanciers ont administré un sédatif au plaignant.

À l’hôpital, on a diagnostiqué que le plaignant avait fait une crise d’épilepsie du lobe temporal et qu’il avait une côte fracturée du côté droit.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 13 octobre 2020, le plaignant a subi une fracture d’une côte lorsqu’il a été sorti de son véhicule immobile et étendu par terre par quelques agents. Parmi ces agents, l’AI a été identifié comme l’agent impliqué pour les besoins de l’enquête de l’UES. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en relation avec la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents ne peuvent être reconnus coupables d’avoir fait usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire pour accomplir quelque chose que la loi les oblige ou les autorise à faire. L’AI ainsi que l’AT no 3 ont cru que le plaignant avait conduit en état d’ébriété. Puisque l’AI avait été avisé des manœuvres dangereuses du véhicule Honda par radio et que l’AT no 3 avait lui-même observé ce qui s’était passé et avait notamment vu la Honda rouler à contresens sur la rue Queen tout en accélérant à l’approche de Torbram Road, je ne peux conclure que les agents n’avaient pas de motifs légaux d’arrêter le plaignant pour conduite d’un véhicule automobile en état d’ébriété. Ce qu’il faut déterminer, c’est le bien-fondé de la force employée par les agents pour procéder à l’arrestation du plaignant.

À mon avis, l’AI et l’AT no 3 n’ont pas fait usage d’une force plus grande que ce qui était nécessaire dans les circonstances. Même s’ils n’en étaient pas conscients sur le moment, la combattivité du plaignant était causée par la crise d’épilepsie. Cela dit, il apparaît clairement qu’aucun des deux agents n’a frappé le plaignant. Ils ont plutôt lutté avec lui pour le sortir de la voiture, puis brièvement sur la chaussée pour tenter de lui passer les menottes. Les agents n’avaient guère d’autre choix. Ils se trouvaient dans des voies de circulation avec des véhicules en mouvement, et il était absolument nécessaire de sortir le plaignant du véhicule Honda le plus vite possible de crainte qu’il ne se remette à rouler. Dans les circonstances, j’ai la conviction que ni l’AI ni l’AT no 3 n’ont fait usage d’une force excessive en étendant le plaignant au sol, même s’ils ont pu, ce faisant, provoquer une fracture d’une côte.

J’estime également que les décharges d’arme à impulsions par l’AI, soit quatre décharges de courte durée en mode contact, étaient parfaitement justifiables. Tout indique que le plaignant était extrêmement agité sur la chaussée, au point où l’AI et d’autres personnes ont dit qu’il avait l’air en plein délire. Cette intervention de l’AI ne visait pas à mettre le plaignant sous garde, puisqu’il était déjà menotté. Comme l’AI l’a expliqué, le but était de faire diminuer la combattivité du plaignant, qui gigotait en tous sens sur le sol, du moins pour l’empêcher de se blesser lui-même. À l’arrivée de l’AT no 4 sur les lieux, étant donné que l’arme à impulsions avait eu peu d’effet sur le plaignant, les agents s’y sont mis à plusieurs pour immobiliser le plaignant au sol en attendant l’arrivée de l’ambulance. L’AI avait le droit de faire tout en son pouvoir pour assurer la sécurité du plaignant pendant qu’il était sous garde, ainsi que la sécurité des personnes à proximité, et je considère qu’il n’y a pas de motifs suffisants de croire qu’il a outrepassé ses pouvoirs en utilisant son arme à impulsions.

En dernière analyse, même si je conviens que le plaignant a été blessé quand il a été étendu au sol par l’AI et l’AT no 3, il n’y a pas de motifs suffisants de croire que les agents n’ont pas agi en toute légalité durant l’interaction. Par conséquent, il n’existe pas de motifs de porter des accusations, et le dossier est donc clos.


Date : 16 février 2021


Signature électronique

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les heures indiquées sont basées sur l’heure à l’horloge interne de l’arme à impulsions et ne sont pas forcément exactes. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.