Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-TCD-063

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Le rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 39 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 21 mars 2021, à 14 h 20, le Service de police de Toronto a avisé l’UES du décès du plaignant. Selon le Service de police, à 14 h 24, des agents se sont rendus à une résidence d’Etobicoke pour prêter assistance aux services ambulanciers qui devaient intervenir auprès d’un homme violent. Les agents dépêchés ont menotté le plaignant après une lutte, et on a constaté que ce dernier n’avait plus de signes vitaux. Le plaignant a été transporté au Centre de santé St Joseph, où il a été déclaré mort à 13 h 29 [1].

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Deux enquêteurs et un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES ont été assignés et ont entrepris une enquête. En raison de la pandémie de COVID 19, l’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES est arrivé sur les lieux à 16 h 42. Il a pris des photos numériques des lieux et des biens du plaignant ainsi que de l’autopsie du plaignant.

Plaignant

Homme de 39 ans, décédé


Témoins civils

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue
TC no 5 A participé à une entrevue
TC no 6 A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 4 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées


Agents impliqués

AI no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AI no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées


Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est produit dans la chambre d’un logement de sous-sol situé dans une maison de plain-pied à Etobicoke. Le logement converti, qui contenait peu de meubles, comprenait une cuisine et deux chambres. Le plancher était en ciment et recouvert de tapis. Le logement était accessible par un escalier au rez-de-chaussée de la résidence.

Enregistrements des communications de la police


Enregistrements audio des communications du Service de police de Toronto


Les enregistrements ont été faits le 21 mars 2020. Voici un résumé du contenu.

12 h 9 min 12 s : Le TC no 2 a appelé le 911 pour demander qu’une ambulance soit envoyée à une résidence déterminée à Etobicoke pour une personne [maintenant identifiée comme le plaignant] ayant besoin de soins médicaux. Il a dit au téléphoniste que le plaignant était en train de vivre un « épisode » en ajoutant : [Traduction] « il se bat avec quelque chose dans son sommeil… Je ne sais pas s’il a pris quelque chose. On n’arrive pas à le réveiller. »
12 h 23 min 52 s : Le téléphoniste a demandé l’intervention de la police pour un homme dans la quarantaine qui vivait un épisode dans son sommeil, qui pouvait être violent et qui avait peut-être pris de la drogue, car on avait trouvé une feuille d’étain près de lui.
12 h 26 min 24 s : Les AI nos 1 et 2 ont été dépêchés sur les lieux.
12 h 26 min 59 s : L’AT no 4 a signalé que la feuille d’étain était le signe d’une consommation potentielle de fentanyl.
12 h 40 min 15 s : L’AI no 1 a dit : [Traduction] « On doit un peu lutter avec lui à vrai dire. » (inaudible)
12 h 41 min 19 s : Le plaignant a été menotté et immobilisé.
12 h 44 min 34 s : Le plaignant a perdu connaissance et est revenu à lui tour à tour à plusieurs reprises. L’AI no 1 a demandé qu’on envoie une autre unité sur les lieux.
12 h 44 min 41 s : L’AT no 2 a été dépêché.
12 h 45 min 7 s : Le plaignant a perdu ses signes vitaux.
12 h 45 min 13 s : L’AT no 3 a été envoyé en renfort.
12 h 45 min 33 s : L’AT no 4 a demandé qu’on l’inclue dans l’appel.
12 h 47 min 52 s : L’AI no 2 a demandé un superviseur.
12 h 51 min 48 s : L’AT no 4 a envoyé un message par radio pour indiquer que les manœuvres de réanimation cardiopulmonaire avaient été entreprises.
12 h 53 min 21 s : On a demandé que le sergent-chef de service soit avisé.
13 h 8 min 3 s : Le plaignant avait un faible pouls. L’AI no 1 a demandé qu’on envoie d’autres unités.
13 h 10 min 5 s : L’AI no 1 a signalé que le plaignant allait être escorté en ambulance au Centre de santé St Joseph.
13 h 20 min 52 s : Le plaignant était dans une ambulance. Les AI nos 1 et 2 étaient chargés de diriger l’escorte.
13 h 24 min 34 s : L’AI no 1 a indiqué que l’escorte d’urgence avait commencé.
13 h 29 min 23 s : Le plaignant est arrivé au Centre de santé St Joseph.

Éléments obtenus auprès du Service de police

Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants du Service de police de Toronto :
  • les enregistrements audio des communications;
  • le rapport du système de répartition assisté par ordinateur sur les détails de l’événement;
  • le courriel contenant la liste des agents impliqués avec leur rôle ainsi que la liste des ambulanciers qui se sont rendus sur les lieux;
  • les notes de l’AI no 1;
  • les notes de l’AT no 3;
  • les notes de l’AI no 2;
  • les notes de l’AT no 2;
  • les notes de l’AT no 4;
  • les notes de l’AT no 1.

Éléments obtenus d’autres sources

L’UES a également obtenu et examiné les documents suivants de sources autres que la police :
  • le rapport d’autopsie du 5 décembre 2020 établi par le Bureau du coroner en chef;
  • les rapports d’appel d’ambulance et les rapports d’incident des services ambulanciers de Toronto;
  • les rapports d’incident des services d’incendie de Toronto.

Description de l’incident

Même si des aspects importants des événements en question sont contradictoires, le scénario qui suit est celui qui ressort d’après le poids des éléments de preuve fiables recueillis par l’UES, notamment les entrevues avec le frère du plaignant, soit le TC no 2, les deux agents impliqués ainsi que les ambulanciers et les pompiers qui étaient présents et qui sont intervenus activement pendant l’incident. L’analyse des enregistrements des communications de la police et du rapport d’autopsie a également été utile pour l’enquête.

Vers 12 h 10, le TC no 2 a appelé le 911 pour demander une ambulance. Son frère, le plaignant, était étendu par terre dans son logement de sous-sol à Etobicoke et avait besoin de soins médicaux. Le TC no 2 a signalé que sa mère et lui étaient incapables de réveiller le plaignant et que celui-ci avait peut-être pris quelque chose.

Des ambulanciers et des pompiers ont été dépêchés à l’adresse en question. Le TC no 2 avait avisé le téléphoniste du 911 que son frère pouvait être violent, et des agents de police ont également été envoyés en renfort.

Les ambulanciers de premier niveau ont été les premiers à arriver sur place vers 12 h 20. Le plaignant a été retrouvé étendu sur le dos sur le plancher de la chambre, entre un lit et une commode. Afin de faire de la place dans la chambre exiguë, les ambulanciers ont enlevé le lit. Le plaignant a commencé à rouler d’un côté à l’autre, puis sur le ventre et sur le dos. Son agitation et ses mouvements ont empêché les ambulanciers d’effectuer immédiatement une évaluation médicale.

Ce sont les pompiers, soit les TC nos 5 et 6, qui sont ensuite arrivés sur les lieux. À ce stade, le plaignant battait des bras et des jambes et continuait de rendre la tâche des ambulanciers difficile. Selon les déclarations des témoins, les mouvements du plaignant étaient involontaires et convulsifs.

Lorsque les AI nos 1 et 2 sont arrivés, soit vers 12 h 34, les ambulanciers, soupçonnant une surdose potentielle d’opioïdes, avaient réussi à injecter une dose de naloxone au plaignant dans son deltoïde droit. Le plaignant a continué de battre des bras et des jambes et de se rouler par terre, se frappant la tête sur le sol et sur les murs. Les agents ont alors décidé d’immobiliser ses membres. L’AI no 1 a attrapé les jambes du plaignant et a réussi à installer un dispositif de contention. L’AI no 2 a lutté avec le plaignant pour lui attraper les bras et il lui a passé les menottes, les bras derrière le dos. Peu après, le plaignant a perdu ses signes vitaux.

À ce stade, des ambulanciers de niveau avancé étaient arrivés sur les lieux et ont commencé à pratiquer des manœuvres de sauvetage. On a enlevé le dispositif de contention aux jambes et les menottes du plaignant, on a roulé celui-ci sur le dos et on a entrepris des manœuvres de réanimation cardiopulmonaire. Vers 13 h 8, avant qu’il soit placé sur un brancard et dans une ambulance, le plaignant avait un faible pouls. Peu après, il n’avait plus de pouls.

D’autres manœuvres de réanimation ont été effectuées durant le trajet vers l’hôpital et à l’urgence, mais sans succès. Le plaignant a été déclaré mort à 13 h 40.

Cause du décès


Le médecin légiste ayant procédé à l’autopsie a indiqué que le décès du plaignant était attribuable à la toxicité du fentanyl et de la cocaïne associée au fait qu’il s’agissait d’un homme obèse, couché sur le ventre, agité, immobilisé de force et ayant des blessures contondantes.

Dispositions législatives pertinentes

Les articles 219 et 220 du Code criminel -- Négligence criminelle ayant causé la mort

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. 
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

220 Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d’une autre personne est coupable d’un acte criminel passible :
a) s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans;
b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant est décédé le 21 mars 2020 après que des ambulanciers, des pompiers et des agents de police sont venus chez lui à la suite d’un appel de service concernant des soins médicaux. Les AI nos 1 et 2 du Service de police de Toronto étaient parmi les agents s’étant rendus sur les lieux et ils ont été identifiés comme les agents impliqués pour les besoins de l’enquête de l’UES. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’un ou l’autre des agents a commis une infraction criminelle en relation avec le décès du plaignant.

La seule infraction à prendre en considération dans cette affaire serait la négligence criminelle ayant causé la mort contraire aux exigences de l’article 220 du Code criminel. Un simple manque de diligence qui cause un décès ou y contribue n’est pas suffisant pour donner lieu à une responsabilité en vertu de cette disposition. Il faut que la conduite représente un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation. À mon avis, même s’il y a certains éléments dans la manière dont les agents ont agi qui méritent d’être examinés de près, les fautes commises par les agents n’étaient pas suffisantes pour représenter un non-respect des normes de diligence prescrites par le droit criminel.

Je conviens que la conduite des AI nos 1 et 2 a joué un rôle dans le décès du plaignant [2]. Ils ont reconnu avoir utilisé des dispositifs de contention pour retenir les membres du plaignant pendant que celui-ci était couché sur le ventre. Même si les études sur le sujet indiquent dans une certaine mesure que la position à plat ventre peut contribuer à la mort subite de personnes sous la garde de la police, le médecin légiste a finalement conclu que la position à plat ventre et l’obésité ainsi que les dispositifs de contention jumelés à l’application d’un poids ou d’une force supplémentaire sur le dos et le torse pouvaient très vraisemblablement être des facteurs ayant contribué au décès.

La question litigieuse est de savoir si le fait que les agents aient immobilisé le plaignant en position à plat ventre représentait un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation . Cette question est d’autant plus difficile à trancher que les déclarations concernant le comportement des agents à cet égard divergent.

Malgré les incertitudes quant aux éléments de preuve, je base mon analyse sur la version des faits la plus incriminante, car j’estime qu’elle ne suffit pas à conclure qu’il y a eu négligence criminelle. Dans ce scénario, tant l’AI no 1 que l’AI no 2 ont maintenu le plaignant couché sur le ventre pendant un certain temps, soit quelques secondes et peut être quelques minutes, malgré la connaissance des risques inhérents et les avertissements répétés de ne pas le faire. Même si les recherches médicales, dont je ne suis manifestement pas un expert, ne sont pas unanimes, j’oserais avancer que les premiers intervenants savent que la contention en position à plat ventre comporte des risques pour la santé, surtout en présence d’autres facteurs de risque tels que l’agitation, l’obésité et l’intoxication par la drogue. En effet, les AI nos 1 et 2 ont évoqué ces risques dans leurs déclarations à l’UES.

Cependant, la conduite des agents doit être placée dans son contexte. Les AI nos 1 et 2 avaient un choix difficile à faire et peu de temps pour réfléchir. Ils étaient au courant des risques de la contention en position à plat ventre, mais ils savaient également que le plaignant était dans une situation alarmante et avait besoin de soins médicaux immédiats. Tant qu’il gigotait sur le plancher et battait l’air de ses membres, les ambulanciers ne pouvaient pas l’évaluer ni le traiter efficacement, et il n’était pas possible non plus de le transporter rapidement à l’hôpital. En fait, les éléments de preuve indiquent que les ambulanciers n’ont pas pu commencer rapidement leur évaluation en raison de la combativité du plaignant, même si elle n’était pas intentionnelle. Compte tenu du climat tendu, les agents ont décidé de mettre le plaignant à plat ventre de force pour faciliter la mise en place des dispositifs de contention, en espérant qu’ils pourraient procéder le plus rapidement possible de manière à réduire le risque au minimum. Encore là, il est clair que les agents ont eu de la difficulté à vaincre la résistance du plaignant. Ce dernier était un homme corpulent, environ 1,8 m et 109 kg. À un moment donné, alors qu’il avait le visage contre le sol et que l’AI no 1 était sur le bas de son corps, le plaignant a réussi à soulever son menton et sa poitrine.

En dernière analyse, il est fort possible que les AI nos 1 et 2 auraient pu faire davantage pour éviter d’immobiliser le plaignant à plat ventre ou du moins le laisser dans cette position le moins longtemps possible. Par contre, compte tenu de la grande résistance physique opposée et de la nécessité de prodiguer des soins médicaux immédiats, je ne peux raisonnablement conclure avec certitude que les agents ont montré une insouciance téméraire ou déréglée à l’égard de la santé du plaignant en le mettant à plat ventre de force et en lui immobilisant les membres comme ils l’ont fait. Par conséquent, il n’y a pas lieu de porter des accusations dans cette affaire et le dossier est clos.


Date : 8 février 2021

Signature électronique

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) En fait, les éléments de preuve indiquent qu’il a été déclaré mort à 13 h 40. [Retour au texte]
  • 2) Le médecin légiste était également d’avis que diverses blessures contondantes constatées sur le corps du plaignant, notamment une série d’éraflures et d’ecchymoses sur la tête et les membres, même si elles n’ont pas contribué au décès en soi, pourraient avoir provoqué de la douleur et intensifié l’état d’éveil physiologique, ce qui, comme on pourrait raisonnement le présumer, peut accroître le risque d’arythmie cardiaque mortelle. Cependant, comme les éléments de preuve indiquent que les agents n’ont utilisé la force que pour lutter avec le plaignant afin de contrôler ses mouvements (aucune arme n’a été employée et aucun coup n’a été donné), il est probable que le plaignant ait subi les blessures contondantes mentionnées par accident alors qu’il gigotait sur le sol. C’est pourquoi j’estime que, pour trancher la question de la responsabilité criminelle potentielle des agents, il convient d’évaluer s’il y a eu négligence criminelle plutôt que de chercher à déterminer si les agents ont utilisé une force considérée comme déraisonnable et excessive d’après l’article 25 du Code criminel. Je signale également, même si j’estime que cela est évident d’après les éléments de preuve, que les agents impliqués sont entrés légalement dans la résidence pour accomplir leur devoir le plus important, soit protéger et préserver la vie. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.