Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-PCI-186

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant les blessures graves subies par un homme de 49 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 26 juillet 2020, vers 12 h 32, la Police provinciale de l’Ontario (la Police provinciale) a communiqué avec l’UES pour signaler ce qui suit.

Le 25 juillet 2020, vers 21 h 46, la Police provinciale a répondu à un appel concernant un incident louche à un centre de distribution de Hydro One. On avait vu deux hommes découper une ouverture dans la clôture, entrer dans un entrepôt, y prendre du fil de cuivre et le placer dans leur véhicule. Lorsque les agents de police sont arrivés, les hommes ont pris la fuite à pied. Un chien de police a attrapé un homme (on sait maintenant qu’il s’agissait du TC), qui a été arrêté et mis sous garde. Le chien de police a ensuite poursuivi un autre homme (on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant), que l’on a alors vu passer par dessus une clôture. Le chien a contourné la clôture et a trouvé le suspect caché dans des herbes hautes. Le plaignant a été arrêté après une brève lutte.

Les deux hommes ont été transportés en ambulance au campus de Chatham de l’Alliance Chatham-Kent pour la santé. Le TC a été traité pour une morsure de chien mineure, puis a été remis à la garde de la police. Le plaignant, pour sa part, avait subi une morsure de chien et avait deux côtes fracturées. Après avoir reçu des traitements, il a également été remis à la garde de la police. 

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Plaignant :

Homme de 49 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés


Témoin civil (TC)

TC A participé à une entrevue 

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue
AT no 5 A participé à une entrevue


Agent impliqué (AI)

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué


Éléments de preuve

Les lieux

L’adresse du centre de distribution de Hydro One, consignée dans le contexte de l’appel au 9 1 1, est le 22200, route Lakeshore 303, Tilbury. La parcelle de terrain située du côté nord de la route Lakeshore s’étend sur environ 270 mètres depuis la route Lakeshore même jusqu’à une voie ferrée située au nord de la propriété. La dernière portion de la propriété est marécageuse et comporte une épaisse végétation composée de quenouilles.

La propriété comporte des poteaux électriques, des lignes de transport d’électricité, des pylônes, des transformateurs et des entrepôts.

Au nord de la voie ferrée se trouve une propriété industrielle.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques

Le fournisseur de services de sécurité à distance de Hydro One a remis les enregistrements vidéo des événements du 25 juillet 2020. La vidéo a été enregistrée par un système de caméras infrarouges dont l’angle et le zoom sont contrôlés à distance par un opérateur. La vidéo montre les événements qui se sont déroulés de 21 h 40 à 22 h 18 environ. On y voit le plaignant et le TC découper une ouverture dans la clôture, entrer sur la propriété de Hydro One, prendre du fil de cuivre et le placer dans leur véhicule. Elle montre également l’arrivée des agents de police et le plaignant qui fuit les lieux. On y voit aussi la capture du TC par le chien de police. La vidéo montre clairement qu’un seul chien était présent, mais ne montre pas le moment où le plaignant a été trouvé et arrêté, car cela s’est produit à un endroit bien en dehors du champ des caméras de sécurité.

Enregistrements de communications


Enregistrements des appels téléphoniques


Les appels téléphoniques suivants, qui ont été effectués par l’intermédiaire du centre des communications de la Police provinciale, ont été examinés. On ne connaît pas l’heure à laquelle les appels ont été effectués, à l’exception du premier appel, et on n’a pu déterminer non plus la durée des appels.

Appel no 1, 25 juillet 2020, 21 h 48 min 6 s

L’AT no 4 appelle au centre des communications et demande à ce que l’on sollicite l’aide du détachement de Chatham de la Police provinciale et du Service de police de Chatham Kent (SPCK).


Appel no 2, 25 juillet 2020

Un membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale appelle au centre des communications du SPCK, et on lui répond que toutes les unités du SPCK sont occupées et qu’on ne peut donc pas offrir d’aide quant à l’appel à propos d’une introduction par effraction près de Tilbury.

Appel no 3, 25 juillet 2020

Un membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale communique avec l’entreprise Caliber Communications pour demander un bilan en direct tandis que les agents de la Police provinciale interviennent à l’installation de Hydro One. Le membre du personnel de Caliber Communications dit à la Police provinciale que des membres du personnel du centre de conduite du réseau d’électricité de l’Ontario, qui assure la sécurité pour Hydro One, se rendent également sur les lieux.

Appel no 4, 25 juillet 2020

Le membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale communique avec Caliber Communications pour obtenir une meilleure description de l’emplacement du véhicule en cause et de ce que font les voleurs. Pendant cet appel, le membre du personnel de Caliber Communications dit au membre du personnel du centre des communications qu’on a vu des agents de la Police provinciale arriver sur les lieux et intervenir auprès du [traduction] « suspect ».

Appel no 5, 25 juillet 2020

Un membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale communique avec le répartiteur des services médicaux d’urgence de London et demande l’envoi d’une ambulance sur les lieux.

Appel no 6, 25 juillet 2020

Un membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale communique avec le répartiteur des services médicaux d’urgence de London et demande l’envoi d’une deuxième ambulance sur les lieux.

Appel no 7, 25 juillet 2020

Un membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale communique avec le répartiteur des services médicaux d’urgence de Wallaceburg et confirme la demande d’envoi d’une deuxième ambulance sur les lieux.

Appel no 8, 25 juillet 2020

Un membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale communique avec le répartiteur des services médicaux d’urgence de Wallaceburg pour donner de nouveaux éléments d’information sur l’emplacement où l’ambulance est requise.

Appel no 9, 25 juillet 2020

Un membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale demande qu’on envoie une dépanneuse.

Appel no 10, 25 juillet 2020

L’AT no 4 informe le membre du personnel du centre des communications de la Police provinciale que les deux hommes ont subi des morsures de chien et demande qu’un sergent soit avisé.

Appel no 11, 25 juillet 2020

L’AI appelle au centre des communications de la Police provinciale et demande l’heure à laquelle l’appel a été reçu, l’heure à laquelle il est arrivé sur les lieux et l’heure à laquelle le deuxième homme a été arrêté.

Appel no 12, 25 juillet 2020

L’AT no 3 appelle au centre des communications de la Police provinciale pour dire qu’elle se trouve à l’hôpital de l’Alliance Chatham-Kent pour la santé et qu’elle donnera des comptes rendus. 

Enregistrements de communications


Les enregistrements des communications en lien avec cet incident couvrent la période allant de 21 h 46 à 23 h 40 environ. Les divers enregistrements ne sont pas horodatés.

À 21 h 46, le personnel du centre des communications affecte l’AT no 1 à l’appel. L’AT no 2 demande à ce qu’on l’affecte aussi à l’appel.

On informe les agents qu’une personne suit en direct les événements se déroulant sur la propriété de Hydro One, où deux hommes ont découpé une ouverture dans la clôture et volent du fil de cuivre.

L’AT no 3 demande à ce qu’on l’affecte à l’appel, et l’AI demande, pour sa part, qu’un sergent autorise une unité du commissariat de police de Tilbury à répondre à cet appel également.

L’AT no 4 demande à ce qu’on l’affecte à l’appel et à ce qu’on lui donne des détails. Il demande aussi à ce que les agents s’approchent des lieux sans activer leurs gyrophares ni leurs sirènes.

Le personnel du centre des communications donne de l’information à jour aux agents. L’AT no 4 et les autres agents sont en voie de planifier les détails logistiques de leur arrivée au moment où on leur dit que les voleurs ont remarqué leur présence et que l’un d’entre eux s’est enfui en courant dans les broussailles.

Les agents ne transmettent aucun message pour indiquer qu’ils sont arrivés sur les lieux; par la suite toutefois, l’AT no 2 fait savoir qu’une personne est sous sa garde (on sait maintenant qu’il s’agissait du TC) et demande qu’on envoie une ambulance.

Dans son message suivant, l’AT no 4 demande, à bout de souffle, la présence d’une deuxième voiture, et tout juste après, l’AT no 3 demande de l’information concernant une plaque d’immatriculation.

Après quelques messages inaudibles, un membre du personnel du centre des communications demande à ce que les messages soient répétés; ensuite, l’AT no 4 indique l’endroit où doit se rendre la deuxième voiture demandée.

L’AT no 2, également à bout de souffle, avise le personnel du centre des communications que les agents ont arrêté un deuxième homme [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] et qu’une autre ambulance sera nécessaire.

Dans les autres messages, on donne des instructions quant à la direction que doivent prendre les ambulances à leur arrivée.

Éléments obtenus auprès du Service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants de la Police provinciale, et les a examinés :
  • rapport opérationnel de l’unité canine;
  • rapport sur les détails de l’événement;
  • notes des agents témoins;
  • résumé de l’incident;
  • documents sur les incidents concernant le plaignant;
  • liste des témoins civils fournie par la Police provinciale;
  • enregistrements des communications radio;
  • enregistrements des appels au 9-1-1;
  • rapport sur les lieux de l’incident rédigé par un agent;
  • dossier de formation de l’AI sur le recours à la force.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

Sur demande, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants auprès de sources autres que la police, et les a examinés :
  • vidéo de surveillance du terrain de la propriété d’Hydro One;
  • dossiers médicaux du plaignant;
  • dossiers médicaux du TC.

Description de l’incident

Le scénario qui suit est fondé sur les éléments de preuve recueillis par l’UES, dont les déclarations du plaignant, de son associé – le TC – et d’agents qui ont participé à l’arrestation du plaignant. Dans le cadre de l’enquête, on a également pu examiner les enregistrements des caméras de sécurité, qui ont capté les événements ayant précédé l’arrestation. L’AI n’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes de service, comme la loi l’y autorise.

Dans la soirée du jour en question, la Police provinciale a reçu un appel d’une entreprise de sécurité. Le personnel de l’entreprise, qui surveillait une vidéo en temps réel d’une propriété de Hydro One située à Tilbury, a signalé que deux hommes s’étaient introduits sur les lieux et volaient du fil de cuivre. Les deux hommes étaient le plaignant et le TC. Des agents ont ainsi été dépêchés sur les lieux pour prendre connaissance de la situation.

L’AT no 2 et le chien de police ont été les premiers à arriver sur les lieux, peu après 22 h. À ce moment-là, le plaignant et le TC, qui étaient remontés dans le véhicule dans lequel ils étaient arrivés sur les lieux, reculaient en direction est vers le chemin principal, orienté nord-sud, qui relie la propriété de Hydro One à la route Lakeshore. Lorsque le véhicule de police de l’AT no 2 s’est approché d’eux, le plaignant, qui conduisait le véhicule, a immobilisé celui ci. Il en est descendu par la porte côté passager et a pris la fuite en courant en direction ouest. Le TC, quant à lui, est sorti par la porte avant côté passager, a fait le tour du véhicule par l’avant de celui-ci et s’est avancé vers le véhicule de police, les mains en l’air. Le chien de police a couru vers lui, a sauté sur son torse et l’a agrippé par le haut du corps, du côté droit. L’AT no 2, puis par l’AT no 3 et l’AT no 1, qui étaient arrivés sur les lieux dans leur propre voiture, sont alors intervenus rapidement. Ces deux derniers agents ont agrippé les bras du TC tandis que l’AT no 2 s’efforçait de faire relâcher sa prise au chien. Après quelques secondes, le chien a relâché le TC, qui a été porté au sol et menotté [1].

Pendant l’arrestation du TC, l’AT no 4 est arrivé sur les lieux et a rejoint l’AT no 2, qui se préparait à chercher le plaignant avec l’aide du chien de police. Le chien a mené les agents à un marais recouvert de quenouilles et rempli d’eau et de boue jusqu’à la hauteur des genoux. L’AI a également été dépêché et s’est vite joint à la poursuite.

Le chien de police et les trois agents ont marché en direction nord-ouest, ce qui les a menés à une voie ferrée. Les agents ont traversé celle-ci et ont suivi le chien en direction nord-est, vers un complexe industriel clôturé situé au nord de l’installation de Hydro One. Le chien s’est arrêté à un certain endroit devant la clôture et a tenté de grimper sur celle-ci, ce qui signifiait, vraisemblablement, que le plaignant avait fait de même peu de temps avant. Les agents ont trouvé une porte dans la clôture et ont continué d’avancer en direction nord, jusqu’à ce qu’ils arrivent à une autre clôture le long de la limite nord du complexe. Peu après, à l’ouest d’où ils se tenaient, le chien a trouvé le plaignant couché dans un fossé; ce dernier tentait de se cacher dans les quenouilles.

Lorsqu’il a trouvé le plaignant, le chien a couru vers celui-ci et lui a mordu l’intérieur de la cuisse droite. Le plaignant s’est débattu, donnant des coups de pied au chien et lui éraflant le visage. Le chien maintenait sa prise et l’AI, l’AT no 2 et l’AT no 4 sont alors arrivés à proximité. Après une courte altercation avec les agents, le plaignant a été maîtrisé et menotté.

À l’hôpital, après l’arrestation du plaignant, on a constaté que ce dernier avait subi une morsure de chien et plusieurs fractures aux côtes du côté droit.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 25 juillet 2020, le plaignant a subi des fractures aux côtes et une blessure causée par une morsure de chien pendant son arrestation par des agents de la Police provinciale à Tilbury. Parmi les agents ayant participé à l’arrestation, on a déterminé que l’AI était le plus susceptible d’avoir causé les blessures graves. Il a donc été désigné en tant qu’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement à l’arrestation et aux blessures du plaignant.

Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit, sur la base d’un jugement raisonnable, nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire. Il ne fait aucun doute que l’arrestation du plaignant et du TC était fondée. Ils ont été pris en flagrant délit, sur une vidéo en direct, en train de voler du fil de cuivre sur les lieux d’une propriété de Hydro One située sur la route Lakeshore 303, à Tilbury. La question à examiner porte sur le bien-fondé de la force utilisée lors de l’arrestation du plaignant.

Le recours au chien de police ainsi que les coups donnés par l’AI semblent avoir été des tactiques raisonnables. Les agents avaient été informés que le plaignant et le TC s’étaient introduits par effraction sur les lieux d’une installation de Hydro One et qu’ils étaient en train de voler du fil de cuivre. Lorsque les agents sont arrivés sur les lieux, le plaignant a pris la fuite dans un secteur marécageux pour échapper à une arrestation. En raison de la broussaille épaisse, de la faible visibilité et du terrain accidenté, les agents avaient raison de procéder avec prudence en cherchant le plaignant. Dans ces circonstances, je ne suis pas en mesure de reprocher aux agents leur décision d’avoir eu recours au chien pour trouver le plaignant et, une fois le plaignant repéré, d’être intervenus auprès de celui-ci à distance et uniquement après que le chien l’eut agrippé. Après avoir trouvé le plaignant, le chien semble s’être comporté de la manière prévue dans son entraînement, c’est-à-dire qu’il a agrippé l’un des membres du plaignant et a refusé de lâcher prise avant que son maître lui en donne l’ordre. L’AT no 2 a dit que lorsqu’il est arrivé sur place et qu’il a vu le plaignant lutter contre le chien, il a décidé de ne pas donner l’ordre au chien de lâcher prise avant que le plaignant ait été maîtrisé. Vu les circonstances, je ne suis pas en mesure de conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, que cette décision était déraisonnable. En effet, le plaignant a refusé de tendre les bras pour se laisser menotter et a ainsi reçu plusieurs coups de genou de l’AI, après lesquels les agents ont pu saisir ses mains; le chien a ensuite lâché sa prise. Compte tenu des événements qui ont précédé l’arrestation, y compris la fuite énergique du plaignant et la possibilité qu’il soit en possession d’une arme, je suis d’avis qu’il était justifié que l’AI souhaite procéder à l’arrestation du plaignant le plus rapidement possible. Ainsi, dans ce contexte, je ne suis pas en mesure de conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, que les coups de genou donnés par l’AI ont dépassé les limites prescrites par le droit criminel, même si je reconnais qu’ils ont probablement causé les fractures aux côtes subies par le plaignant [2].

Pour les raisons qui précèdent, je suis convaincu, sur la base d’un jugement raisonnable, que l’AI s’est comporté d’une manière conforme à la loi pendant toute son interaction avec le plaignant. Donc, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire, et le dossier est clos.


Date : 25 janvier 2021
Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales


Notes

  • 1) Le TC n’a pas subi de « blessure grave » au sens de la définition de l’UES. Par conséquent, dans le cadre de l’enquête de l’UES, on ne s’est pas concentré sur les circonstances de son arrestation. [Retour au texte]
  • 2) Je n’ai pas été en mesure d’accorder de poids à une version des événements selon laquelle l’un des agents (probablement l’AI) aurait donné des coups de poing aux côtes du plaignant de façon répétée et excessive. La fiabilité de ce témoignage est douteuse pour de multiples raisons, notamment parce qu’on y minimise le rôle du plaignant dans le vol qui a précédé l’arrivée des agents et parce qu’on y dit, à tort, qu’il y avait plusieurs chiens de police sur les lieux. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.