Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OCI-236

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 54 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 24 septembre 2020, à 10 h 45 du matin, le Service de police de Hamilton (SPH) a avisé l’UES qu’un homme avait été blessé. Le SPH a donné le rapport suivant :

Le 24 septembre, à 1 h du matin, des membres de l’Équipe de maintien de l’ordre et d’intervention du SPH ont entendu des bris de verre au 700 Queenston Road, près de Nash Road. Ils ont vu deux personnes entrer dans un commerce puis s’enfuir dans un véhicule. Lorsque les agents du SPH ont tenté de l’arrêter, le véhicule a percuté les véhicules de police, mais a ensuite été immobilisé en tentant de franchir un trottoir. Comme les trois hommes dans la voiture refusaient de sortir, les agents ont cassé la vitre et les ont fait sortir. Le conducteur était le témoin civil (TC) no 1 et le passager arrière, le TC no 2. Les deux hommes ont été emmenés au poste et détenus en attendant leur libération sous caution. Le passager avant (maintenant connu pour être le plaignant) a été emmené à l’Hôpital général de Hamilton (HGH) pour des soins à une entaille à l’œil gauche et deux fractures au pied gauche.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2
Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés : 1
 

Plaignant 

Homme de 54 ans; n’a pas consenti à participer à une entrevue, mais ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés


Témoins civils

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue (a refusé)
TC no 2 N’a pas participé à une entrevue (a refusé)
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue
AT no 5 A participé à une entrevue
AT no 6 A participé à une entrevue


Agents impliqués

AI no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AI no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées


Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est déroulé dans le stationnement du centre commercial du 700 Queenston Road, devant l’unité 9, Signature Vape Plus. Le verre de la porte de l’unité 9 était brisé.

Une BMW 750i bleue était arrêtée sur une bordure en béton délimitant l’aire de stationnement de l’unité 9. Il y avait du sang sur le capot et le toit du véhicule. La vitre du conducteur était cassée et le pare-brise était fissuré du côté passager.

Il y avait du sang, des vêtements, des clés, un téléphone cellulaire, une sonde d’arme à impulsions et un fil d’arme à impulsions sur le sol, près du côté passager du véhicule, ainsi qu’un deuxième téléphone cellulaire sur le capot. Des sondes, du fil et des étiquettes d’identification anti-Felon d’arme à impulsions ont été trouvés sur les sièges avant du véhicule.

Un GMC Acadia argenté, endommagé à l’avant du côté conducteur, était garé à côté de la BMW; les portières côté conducteur des deux véhicules se faisaient face.

Figure 1 - Le GMC Acadia et la BMW 750i.

Figure 1 - Le GMC Acadia et la BMW 750i.


Un véhicule utilitaire sport (VUS) Ford Interceptor du SPH était de l’autre côté de la BMW par rapport au GMC Acadia; l’avant de ce VUS était en contact avec la BMW.


Figure 2 - Les pare-chocs à l’avantvants du Ford Explorer du SPH et de la BMW 750i.

Figure 2 - Les pare-chocs à l’avantvants du Ford Explorer du SPH et de la BMW 750i.


Une Hyundai Elantra noire était garée juste au sud de la BMW et du GMC.

Une Kia Sedona grise était garée à côté du bâtiment abritant l’unité 9, à l’est de la BMW.

Un Dodge Grand Caravan argenté était garé parallèlement à la Kia, juste au sud de celle-ci.

Schéma des lieux

Schéma des lieux

Témoignage d’expert


Résumé du rapport du spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES


Les véhicules impliqués dans la collision étaient un GMC Acadia gris (un véhicule banalisé du SPH conduit par l’AI no 1), un véhicule utilitaire sport Ford Explorer portant toutes les inscriptions du SPH et conduit par l’AT no 6 et une BMW bleue où se trouvaient trois personnes [y compris le plaignant, qui était le passager avant].

Il y a eu deux collisions. La première s’est produite lorsque le coin avant de la BMW, côté conducteur, a heurté le coin avant de l’Acadia, côté conducteur. La deuxième collision s’est produite lorsque l’avant du Ford Explorer de police a heurté le coin de la BMW, côté passager. Les dommages subis par les trois véhicules impliqués dans ces collisions étaient relativement mineurs. Les véhicules étaient dans la même position qu’après la collision, près du magasin Signature Vape, le commerce le plus au sud du centre commercial.

La BMW Série 7 était orientée vers l’ouest. Le châssis de la voiture reposait sur la bordure de trottoir en ciment au sud du magasin Signature Vape, et la voiture était « accrochée » à la bordure. Le devant de la BMW, côté passager, était en contact avec le pare-chocs poussoir du Ford Explorer de police. La BMW avait des dommages à l’avant, côté conducteur, compatibles avec la collision avec l’Acadia, ainsi que des dommages au coin avant, côté passager, compatibles avec la collision avec le pare-chocs poussoir sur le devant du Ford Explorer du SPH. Le coin supérieur droit du pare-brise de la BMW était endommagé, ce qui correspond au fait que le plaignant ne portait pas sa ceinture de sécurité et s’est cogné la tête contre le pare-brise lors de l’impact de la BMW avec l’Acadia. Les coussins gonflables de la BMW n’étaient pas déployés. Aucune des ceintures de sécurité de la BMW ne montrait d’indices révélant qu’elle avait été bouclée lors des impacts.

Comme la BMW n’était pas équipée d’un système d’extraction de données après accident (EDA), il n’a pas été possible d’obtenir des données électroniques (comme la vitesse et le freinage) à partir du module électronique des coussins gonflables.


Le GMC Acadia

L’Acadia était juste au sud de la BMW, face à l’est; sa portière, côté conducteur, était parallèle à celle du conducteur de la BMW et presque à la même hauteur. Le coin avant gauche (côté conducteur) de l’Acadia était endommagé, ce qui est compatible avec la collision avec la BMW. Ses roues avant étaient complètement tournées vers la gauche et la roue gauche semblait avoir été endommagée lors de la collision avec la BMW. Aucun coussin gonflable n’était déployé dans l’Acadia, et il n’y avait rien de particulier à noter à l’intérieur.


Le véhicule utilitaire sport Ford Explorer 2018

Le VUS Ford Explorer 2018 était noir et blanc et portait tout le marquage d’identification du SPH. Il faisait face au sud avec son pare-chocs poussoir à l’avant contre le panneau latéral avant droit de la BMW. Le poussoir était enfoncé vers l’arrière dans le couvercle du pare-chocs du véhicule, côté passager, ce qui correspond à une collision avec la BMW. Aucun coussin gonflable n’était déployé dans ce véhicule, et il n’y avait rien de particulier à noter à l’intérieur.


Calculs et rapport d’analyse d’extraction de données après accident (EDA)

Le module de commande des coussins gonflables de l’Acadia que conduisait l’AI no 1 a capturé un événement de « non-déploiement », c’est-à-dire une collision d’une force insuffisante pour déployer les coussins gonflables du véhicule. Cinq secondes avant la collision, la pédale d’accélérateur était à 10 % de sa course totale, les freins étaient desserrés et l’Acadia roulait à 24 km/h. Quatre secondes avant la collision, la pédale d’accélérateur était à 99 % de sa course totale, les freins étaient desserrés et l’Acadia roulait à 26 km/h. Trois secondes avant la collision, la pédale d’accélérateur était à 99 % de sa course totale, les freins étaient desserrés et l’Acadia roulait à 34 km/h. Deux secondes avant la collision, la pédale d’accélérateur était à 0 % de sa course totale, les freins étaient serrés et l’Acadia roulait à 41 km/h, puis a commencé à ralentir. Une demi-seconde avant la collision, la pédale d’accélérateur était toujours à 0 %, les freins étaient serrés et l’Acadia avait ralenti à 19 km/h. La vitesse de l’Acadia au moment de la collision n’a pas été enregistrée dans le rapport EDA. Étant donné le taux de décélération au cours des deux secondes précédant la collision, l’Acadia était probablement immobile au moment de la collision.


Résultats de l’analyse des éléments de preuve sur les lieux de l’incident et du rapport EDA

Trois à quatre secondes avant la collision, l’AI no 1 a accéléré fortement vers l’avant. Il est passé de 24 à 41 km/h en environ deux secondes, puis a freiné et a ralenti à moins de 19 km/h et probablement à un arrêt complet lorsque la BMW a percuté son véhicule, l’Acadia. Comme l’Acadia était probablement immobile au moment de la collision, les dommages causés à l’Acadia et à la BMW à la suite de la première collision étaient entièrement le résultat du mouvement vers l’avant de la BMW.

Si le plaignant, assis dans la BMW, n’avait pas bouclé sa ceinture de sécurité, il peut avoir été éjecté de son siège durant la collision avec l’Acadia avec une force suffisante pour se heurter la tête contre le pare-brise, causant les dommages précédemment constatés au pare-brise et une blessure à la tête. Il est aussi possible que l’éjection partielle de son siège lors de la collision avec l’Acadia ait causé au plaignant une blessure à la jambe quand son corps a continué d’être poussé vers l’avant pendant la collision et est entré en contact avec le plancher et/ou le tableau de bord.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies


Résumé de l’enregistrement de vidéosurveillance du Canadian Tire


Les enquêteurs de l’UES ont reçu une copie de l’enregistrement de vidéosurveillance du Canadian Tire. Le champ de vision de la caméra comprenait une partie clôturée du magasin et le stationnement entre cette partie et la rangée de commerces. Le magasin Signature Vape n’était pas visible dans cet enregistrement vidéo.

D’après la vidéo :

Entre environ 00 h 31 min 19 s et 00 h 33 min 28 s, un véhicule de couleur sombre entre dans le champ de vision de la caméra depuis le nord, roule vers l’est et s’arrête brièvement. Un véhicule blanc entre dans le champ de vision depuis le nord et se dirige vers l’autre véhicule qui le croise en direction nord.

À 0 h 35 min 54 s, les deux véhicules partent en direction nord.

À 0 h 37 min 16 s, il est possible qu’un véhicule de couleur claire roule depuis le côté sud de Canadian Tire vers le magasin Signature Vape et semble s’arrêter; on ne voit pas le véhicule partir.

Entre 0 h 44 min 42 s et 00 h 44 min 46 s, un véhicule [maintenant connu comme étant celui conduit par l’AI no 1] approche du magasin Signature Vape depuis le nord. Un deuxième véhicule [maintenant connu pour être un véhicule de police] approche également du magasin Signature Vape depuis le nord et semble se garer au sud du véhicule de l’AI no 1.

À 0 h 45 min 14 s, plusieurs autres véhicules de police, dont certains portent les inscriptions du SPH, arrivent dans le secteur.

À 0 h 46 min 37 s, une personne en uniforme avec le mot CADET imprimé au dos de sa veste se met en position de sécurité sur le côté ouest d’un véhicule de patrouille et n’a aucune interaction physique avec qui que ce soit.

À 0 h 47 min 3 s, un homme est plaqué à terre par des agents.

À 0 h 49 min 8 s, un homme est escorté jusqu’à un véhicule de police.

À 0 h 50 min 16 s, deux ou trois agents de police aident l’homme qui était plaqué à terre à se relever et l’escortent vers un endroit hors du champ de vision de la caméra.

Résumé de séquences de vidéosurveillance du magasin Vape


L’UES a obtenu deux clips vidéo du magasin Signature Vape. Les deux clips vidéo (dont aucun n’a d’audio) durent environ trois minutes et 12 secondes chacun. Ces vidéos étaient horodatées. Les deux horodatages étaient synchronisés et semblaient correspondre à l’heure réelle enregistrée dans le rapport de répartition assistée par ordinateur du SPH. Les deux caméras étaient à l’intérieur du magasin Signature Vape.

La caméra 1 était fixée en hauteur dans le coin nord-ouest, près de la devanture du magasin et faisait face au sud-est. Dans cette vidéo, on peut voir quelques mouvements (essentiellement des ombres) vers le sud, à l’extérieur du magasin, à l’endroit où l’interaction a eu lieu.

La caméra 2 était fixée en hauteur dans le coin sud-ouest, près de la devanture du magasin et faisait face au nord-est. Elle était inclinée de telle sorte que sur cette vidéo, on peut voir davantage l’extérieur que sur celle de la caméra 1, mais on n’y voit que le nord-ouest du stationnement, dans la direction opposée à l’interaction.

Voici un résumé des images de surveillance pertinentes pour l’enquête :

Entre environ 0 h 43 min 25 s et 0 h 44 min 50 s, deux hommes sont devant la porte d’entrée du magasin et commencent à briser le verre. Les deux hommes entrent dans le magasin. Le premier porte des vêtements de couleur unie et une casquette de baseball. Le deuxième porte un chandail à capuche à rayures horizontales, avec la capuche relevée. Les deux hommes ouvrent plusieurs tiroirs de vitrines le long du mur sud du magasin. Ils prennent des articles. Le premier homme place ces articles dans une boîte et le deuxième en dépose dans un seau de forme cylindrique, probablement un seau à ordures qu’il a récupéré dans le magasin.

À 0 h 44 min 41 s, le premier homme sort du magasin par la porte principale et se dirige vers le sud, suivi, à 0 h 44 min 50 s, du deuxième homme.

À 0 h 45 h 25 s, on voit les phares d’un VUS de la police [maintenant connu pour être un véhicule du SPH conduit par l’AT no 6] s’approcher et se diriger vers le sud dans le stationnement devant les magasins. Le véhicule du SPH passe devant le magasin Signature Vape mais on ne voit pas où il s’arrête (soit l’endroit où l’interaction a lieu). On peut seulement voir le reflet de certaines lumières pendant l’interaction.

À 0 h 46 min 9 s, on voit une lumière, vraisemblablement le phare avant, côté passager, de la BMW, se déplacer de quelques mètres vers l’ouest.

Enregistrements des communications de la police

L’UES a obtenu et examiné les enregistrements des communications audio et le rapport chronologique de l’incident des du SPH.

Transmissions du centre de répartition, 24 septembre 2020


0 h 44 min 34 s : Depuis un véhicule de police, un agent [connu pour être l’AI no 1] signale une introduction par effraction en cours au magasin Signature Vape. Une voiture est garée à l’extérieur; deux hommes sont à l’intérieur.

0 h 45 min 31 s : Plusieurs unités proposent de venir en aide à l’AI no 1; sept unités sont chargées d’intervenir.

0 h 48 min 39 s : Trois individus sont arrêtés.

0 h 49 min 10 s : [Un code de police indiquant que les policiers doivent limiter les transmissions] est levé.

0 h 49 min 50 s à 0 h 50 min 42 s : Trois ambulances sont demandées pour deux personnes qui sont conscientes, respirent et saignent. Un saigne au visage, il a une coupure au visage; l’autre a une coupure au visage. Un ou deux agents ont des coupures causées par du verre.

0 h 51 min 8 s : Tous les saignements sont contrôlés sauf pour une personne; on s’efforce d’arrêter ce saignement.

Un appel au 9-1-1 reçu le 24 septembre 2020


0 h 44 : Un homme appelle et demande qu’on envoie la police à Queenston Road et Nash Road, au Signature Vape, où quelqu’un vient de briser la vitrine en façade. L’homme qui appelle a entendu un fracas et une voiture s’est écrasée contre une autre voiture; il n’est pas sûr de ce qui se passe.

Transmissions de voiture à voiture le 24 septembre 2020


Il s’agit d’une transmission de voiture à voiture sans précisions identifiant les voix, dont certaines sont des murmures. La transmission commence à 0 h 43 et porte sur le cambriolage en cours au 700 Queenston Road. Elle n’a pas d’horodatage :

[traduction]

  • Je suis juste derrière toi
  • J’y suis
  • Ouais, il y a un cambriolage à Signature Vape
  • C’est quoi le plan?
  • Dans une voiture de l’autre côté du poteau électrique là-haut
  • J’en vois 3 à l’intérieur, il y a un gars qui vient juste d’entrer, je vais peut-être aller par derrière
  • Ouais, je vais prendre l’arrière
  • Je suis aussi à l’arrière…
  • … appel pour B & E [introduction par effraction] en cours.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande au SPH, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants qu’elle a examinés :
  • Rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
  • Rapport d’extraction de données après accident (EDA) du GMC Acadia conduit par l’AI no 1;
  • Communication – SPH;
  • Courriel du SPH concernant les armes à impulsions et les numéros de badge;
  • Courriel du SPH – Information sur le cas et pièces jointes;
  • Courriel du SPH – Formation sur le recours à la force;
  • Chronologie de l’incident;
  • Rapport général (x2);
  • Rapport de collision de véhicule automobile (x2);
  • Notes de tous les AIs et ATs;
  • Politique relative au matériel et à l’usage de la force;
  • Politique relative aux arrestations;
  • Usage de la force et maniement des armes à feu dans le cadre de la prestation des services policiers, Règlement de l’Ontario 132/20;
  • Rapports supplémentaires (x8);
  • Déclarations anticipées des agents témoins.

Éléments obtenus auprès d’autres sources :

Sur demande à l’Hôpital général de Hamilton, l’UES a obtenu le document suivant qu’elle a examiné :
  • Dossier médical du plaignant

Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les éléments de preuve suivants sous forme d’enregistrements audios/vidéos :
  • Séquences de vidéosurveillance ¬– 700 Queenston Road;
  • Séquences de vidéosurveillance – Canadian Tire.

Description de l’incident

Pour reconstituer le déroulement de cet incident, l’UES s’est appuyée sur ses entrevues avec de nombreux témoins – tant de la police que civils – ainsi que sur l’examen des vidéos de certaines parties de l’incident. L’AI no 2 et l’AI no 1 – les agents impliqués – ont consenti à participer à une entrevue avec l’UES et à lui communiquer leurs notes. Le plaignant, le TC no 1 et le TC no 2 ont refusé de participer à une entrevue avec l’UES, comme c’était leur droit légal.

Sur la base des sources susmentionnées et d’autres analyses, le récit suivant émerge. Le 24 septembre 2020 à 0 h 44, un membre de l’Équipe de maintien de l’ordre et d’intervention du SPH – l’AI no 1 – a entendu un bris de verre au 700 Queenston Road, à l’intersection de Nash Road. Alors qu’il approchait des lieux au volant de son véhicule, l’AI no 1 a vu deux personnes entrer dans un magasin Signature Vape puis, avec une troisième personne, s’enfuir dans une BMW. L’AI no 1 a signalé l’introduction par effraction en cours par radio, et a été rapidement rejoint par d’autres agents dans leurs véhicules respectifs convergeant vers la BMW.

À 0 h 45, plusieurs voitures de police avaient répondu au signalement de l’introduction par effraction en cours et se trouvaient près de la BMW, mais le TC no 1 – le conducteur de la BMW – a tenté de percuter les voitures de police qui étaient arrivées et s’étaient positionnées pour empêcher la BMW de prendre la fuite. Le conducteur de la BMW a continué de tenter de s’enfuir, mais a échoué lorsque la BMW est montée sur une bordure de trottoir où elle est restée coincée. Les trois hommes dans la BMW refusant de sortir, les agents ont cassé la vitre pour les faire sortir de force.

Il a fallu plusieurs agents pour extraire chaque homme de la BMW, et le plaignant – le passager du siège avant – encourageait vivement le TC no 1 à remettre la BMW en marche. Même après que le TC no 1 et le TC no 2 soient sortis de la BMW et se soient rendus, le plaignant a continué de résister. Il donnait des coups de poing et des coups de pied aux agents qui tentaient de le faire sortir par l’ouverture de la vitre de la porte côté passager. Les agents lui ont asséné des coups de poing et des coups de pied, l’ont empoigné, lui ont donné des coups de bâton télescopique une pulvérisation de gaz poivré et ont pointé une arme à feu sur lui pour tenter de maîtriser le plaignant, mais sans réussir à le contrôler pour le placer sous garde. Ce n’est qu’après la décharge d’une arme à impulsions par l’AT no 4 que les agents ont finalement réussi à vaincre sa résistance et à le sortir du véhicule. Même à ce moment-là, le plaignant a refusé de tendre les bras et n’a été menotté qu’à la suite d’un coup de pied dans le dos par l’AI no 2. Au cours de ses luttes contre les agents qui tentaient de l’arrêter – soit pendant environ trois minutes au total – le plaignant a été frappé une fois au pied gauche avec un bâton télescopique par l’AI no 2 et au moins 15 fois au bas du corps par l’AI no 1.

Après son arrestation, le plaignant a été emmené à l’Hôpital général de Hamilton pour une coupure à l’œil gauche et a reçu des soins pour des fractures au pied gauche.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Aux premières heures du 24 septembre 2020, des agents de police ont surpris le plaignant, le TC no 1 et le TC no 2 en train de sortir d’un magasin Signature Vape qu’ils venaient de cambrioler. Les agents ont arrêté les trois hommes, mais une fois l’arrestation terminée, il a été constaté que le plaignant avait des fractures au pied gauche. En me fondant sur les résultats de l’enquête de l’UES sur cet incident, je suis convaincu qu’aucun agent n’a commis d’infraction criminelle en lien avec l’arrestation et les blessures du plaignant.

Avant toute analyse plus approfondie des questions juridiques soulevées dans ce cas, il est important de noter qu’il y a une question liée au lien de causalité en l’espèce. Étant donné que le plaignant était assis, sans porter sa ceinture de sécurité, à l’avant d’une BMW lorsque celle-ci a délibérément percuté d’autres véhicules, il est possible que toutes les blessures graves du plaignant aient été causées par ces manœuvres de la BMW. Néanmoins, une analyse plus poussée d’une telle conclusion n’est pas nécessaire parce que dans cette affaire, les blessures graves du plaignant, même si elles résultent entièrement des gestes des policiers, n’ont pas été causées illégalement, comme je l’explique ci-dessous.

Comme le plaignant venait d’être surpris en train de s’introduire par effraction, la police avait légalement le droit de l’arrêter sans mandat. Le plaignant, en s’opposant à cette arrestation légale par une résistance physique extrême, a, à son tour, donné aux agents le droit, conformément au paragraphe 25 (1) du Code criminel, d’avoir recours à une force raisonnable pour le maîtriser.

Par conséquent, peut-on dire qu’un agent, dans sa lutte avec le plaignant, a utilisé une force déraisonnable – et donc illégale – contre lui? À mon avis, il n’y a pas suffisamment de preuves pour parvenir raisonnablement à une telle conclusion. Bien qu’il ne fasse aucun doute que la force cumulative utilisée contre le plaignant était considérable, à savoir de multiples frappes à la main et coups de bâton, une pulvérisation de gaz poivré et la décharge d’une arme à impulsions, il ne fait aucun doute que le plaignant a vigoureusement résisté à son arrestation, en frappant même les agents avec les bras et les jambes. Au cours de cette mêlée, il est évident que les agents n’ont intensifié leur recours à la force que lorsqu’il s’est avéré qu’une force modérée ne conduirait pas au résultat recherché, à savoir l’arrestation du plaignant. Il est également important de garder à l’esprit le contexte plus large dans lequel les agents ont été confrontés à des personnes qui venaient d’être surprises en flagrant délit d’une infraction grave et décidées à s’enfuir. Dans les circonstances, les agents se devaient de placer le plaignant et ses complices en détention le plus rapidement possible dans l’intérêt de la sécurité publique. Au vu de ce dossier, je suis convaincu, pour des motifs raisonnables, que la force utilisée par les agents était mesurée, proportionnée et, en fin de compte, légale.

Pour les motifs qui précèdent, Il n’y a donc aucune raison de porter des accusations criminelles contre l’agent, et le dossier est clos.


Date : 6 janvier 2021


Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.