Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-292
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)
En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :- de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
- de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.
En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- le nom de tout agent impliqué;
- le nom de tout agent témoin;
- le nom de tout témoin civil;
- les renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)
En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables.Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.Exercice du mandat
La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 30 ans lors de son arrestation le 7 octobre 2017.
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 30 ans lors de son arrestation le 7 octobre 2017.
L’enquête
Notification de l’UES
Vers 3 h 35, le 8 octobre 2017, la police régionale de Peel (PRP) a signalé une blessure subie par le plaignant pendant son arrestation.La PRP a signalé que le plaignant avait été arrêté à 22 h 08 le 7 octobre 2017, à la suite d’une brève poursuite à pied. Le plaignant était visé par un mandat d’arrestation et a été arrêté dans un petit parc situé près de Chamney Court à Brampton. Par la suite, le plaignant a été transporté à l’hôpital et, à 3 h, on a déterminé qu’il avait subi une fracture de la clavicule [droite].
L’équipe
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4 Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0
L’UES a envoyé deux enquêteurs pour interroger le plaignant au poste de police. Après quelques difficultés, les enquêteurs ont finalement réussi à trouver et à interroger les deux témoins civils (TC).
Plaignant :
Homme âgé de 30 ans; a participé à une entrevue, et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinésTémoins civils (TC)
TC no 1 A participé à une entrevue TC no 2 A participé à une entrevue
Agents témoins (AT)
AT no 1 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaireAT no 2 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 4 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 5 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
Les agents témoins (AT) nos 1 et 2 ont transporté le plaignant à l’hôpital et l’ont ensuite ramené au poste de police. Leurs notes de service ont été examinées, mais ils n’ont pas été interrogés, car ils n’avaient pas été impliqués dans l’incident à l’origine de la blessure du plaignant.
Agents impliqués (AI)
AI no 1 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliquéAI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué
Description de l’incident
Le 7 octobre 2017, l’agent impliqué (AI) no 1 et l’AI no 2 se sont rendus à Chamney Court dans la ville de Brampton. Leur but, selon l’AI no 1, était de parler aux résidents de la rue et d’assurer une présence policière à la suite de deux fusillades qui avaient eu lieu dans le quartier plus tôt durant l’année.
L’AI no 1 et l’AI no 2 se sont approchés du garage de la résidence du TC no 2, où ils ont parlé à ce dernier, ainsi qu’à la TC no 1 et à leur ami, dont il a été établi plus tard qu’il s’agissait du plaignant.
Le plaignant a donné un faux nom aux agents de police, et l’AI no 1, en raison du comportement du plaignant, a quitté la résidence pour enquêter davantage sur lui. L’AI no 1 est alors revenu et lui et l’AI no 2 ont informé le plaignant qu’il était visé par un mandat d’arrestation non exécuté. Le plaignant a pris la fuite et a couru dans un petit espace vert près de la résidence du TC no 2.
Les AI nos 1 et 2 ont réussi à rattraper le plaignant et ils ont lutté avec lui pour le maîtriser. Pendant cette lutte, l’AI no 2 a donné au moins deux coups de genou au côté gauche du plaignant.
Après son arrestation, le plaignant a été transporté au poste de police, où il s’est plaint de douleurs au bras, et il a été transporté à l’hôpital.
Nature de la blessure et traitement
Le plaignant a été évalué à l’hôpital, où l’on a déterminé qu’il avait subi une fracture de la clavicule droite.
L’AI no 1 et l’AI no 2 se sont approchés du garage de la résidence du TC no 2, où ils ont parlé à ce dernier, ainsi qu’à la TC no 1 et à leur ami, dont il a été établi plus tard qu’il s’agissait du plaignant.
Le plaignant a donné un faux nom aux agents de police, et l’AI no 1, en raison du comportement du plaignant, a quitté la résidence pour enquêter davantage sur lui. L’AI no 1 est alors revenu et lui et l’AI no 2 ont informé le plaignant qu’il était visé par un mandat d’arrestation non exécuté. Le plaignant a pris la fuite et a couru dans un petit espace vert près de la résidence du TC no 2.
Les AI nos 1 et 2 ont réussi à rattraper le plaignant et ils ont lutté avec lui pour le maîtriser. Pendant cette lutte, l’AI no 2 a donné au moins deux coups de genou au côté gauche du plaignant.
Après son arrestation, le plaignant a été transporté au poste de police, où il s’est plaint de douleurs au bras, et il a été transporté à l’hôpital.
Nature de la blessure et traitement
Le plaignant a été évalué à l’hôpital, où l’on a déterminé qu’il avait subi une fracture de la clavicule droite.Éléments de preuve
Les lieux
Les TC nos 2 et 1 habitent à une adresse sur Chamney Court dans la ville de Brampton. Au sud de leur propriété, entre leur maison et la maison voisine à l’ouest, se trouve un petit espace vert comprenant une allée menant au stationnement d’un immeuble d’habitation sur le chemin Kennedy. Des murs en briques longent l’espace vert au nord et à l’ouest et séparent l’espace vert des deux maisons. Le long du bord sud de l’espace vert, il y a une clôture à maillons et une ligne d’arbustes. Cette clôture à maillons sépare l’espace vert des cours arrière des maisons le long de la promenade Bartley Bull.Éléments de preuves médicolégaux
Aucun élément n’a été soumis pour analyse au Centre des sciences judiciaires.Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques
On n’a trouvé aucun enregistrement vidéo ou audio. Enregistrements de communications
Les enregistrements des transmissions radio de la police ont été reçus et écoutés. Ils commencent par un policier hors d’haleine signalant qu’il y a un homme qui court en direction nord dans le secteur de Chamney Court. De toute évidence, l’agent est aussi en train de courir, car il respire fort.Peu de temps après, l’agent envoie un nouveau message signalant qu’il a placé sous garde une personne visée par un mandat.
Éléments obtenus auprès du Service de police
Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les éléments suivants de la PRP :- Copie des enregistrements des communications;
- Rapport renfermant les copies audio – résumé des transmissions radio;
- Rapport chronologique des événements reliés à l’incident de violence familiale à l’origine du mandat d’arrestation lancé contre le plaignant;
- Copie d’un mandat autorisant l’arrestation du plaignant;
- Rapport chronologique des événements entourant l’arrestation du plaignant;
- Copie des enregistrements vidéo de l’aire de garde du poste de police;
- Notes entrées par les agents témoins (AT) dans leur calepin;
- Plan opérationnel du Programme stratégique d’intervention tactique (PSIT);
- Historique de l’unité en ce qui concerne les AI nos 1 et 2.
- Dossiers médicaux du plaignant relatifs à cet incident.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :a) soit à titre de particulierest, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
Article 129 du Code criminel -- Infractions relatives aux agents de la paix
129 Quiconque, selon le cas :a) volontairement entrave un fonctionnaire public ou un agent de la paix dans l’exécution de ses fonctions ou toute personne prêtant légalement main-forte à un tel fonctionnaire ou agent, ou lui résiste en pareil cas;est coupable :
b) omet, sans excuse raisonnable, de prêter main-forte à un fonctionnaire public ou à un agent de la paix qui exécute ses fonctions en arrêtant quelqu’un ou en préservant la paix, après un avis raisonnable portant qu’il est requis de le faire;
c) résiste à une personne ou volontairement l’entrave dans l’exécution légitime d’un acte judiciaire contre des terres ou biens meubles ou dans l’accomplissement d’une saisie légale,
d) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;
e) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Analyse et décision du directeur
Le 7 octobre 2017, l’agent impliqué (AI) no 1 et l’AI no 2 de la Police régionale de Peel (PRP) étaient de service en tant que membres d’une équipe du Programme stratégique d’intervention tactique (PSIT). Comme l’a expliqué l’AI no 1, le but du PSIT est d’assurer une présence visible de la police, d’établir de bons rapports avec la population et d’effectuer des vérifications du respect de la loi dans les secteurs problématiques de la région de Peel. Pendant qu’ils accomplissaient ce rôle le 7 octobre 2017, les AI nos 1 et 2 sont entrés en contact avec le plaignant, qui était visé par un mandat d’arrestation non exécuté. Après que les agents avaient apparemment identifié le plaignant comme étant la personne recherchée et après avoir tenté de l’arrêter, le plaignant a pris la fuite. Par la suite, il a été appréhendé et mis en état d’arrestation, après quoi il a été transporté à l’hôpital, où il a été évalué et où l’on a déterminé qu’il avait subi une fracture à la clavicule droite.
Au cours de cette enquête, trois témoins civils (TC), dont le plaignant, ont été interrogés, tout comme l’AI no 1, tandis que l’AI no 2 n’a pas consenti à subir une entrevue ou de fournir les notes qu’il avait entrées dans son calepin, comme la loi l’y autorise. Bien que trois autres témoins appartenant à la police aient également été interrogés durant l’enquête, aucun d’eux n’était présent durant l’interaction avec le plaignant. À part les déclarations des témoins, il n’y avait aucune preuve physique ni aucun enregistrement audio ou vidéo de l’incident. Toutefois, les faits ne sont pas vraiment contestés et le souvenir du plaignant semble correspondre à celui d’autres témoins en ce qui concerne de petits détails, et il semble donc qu’il constitue un témoin crédible et fiable.
Le 7 octobre 2017, le plaignant et ses amis, les TC nos 1 et 2, étaient à la résidence du TC no 2 dans la ville de Brampton. Les trois se trouvaient dans le garage du TC no 2 où ils écoutaient de la musique; la porte du garage a été décrite comme étant à moitié ouverte.
Le plaignant s’est rappelé que deux agents de police s’étaient approchés du garage et s’étaient présentés à eux et leur avaient dit qu’ils effectuaient des patrouilles dans le quartier parce qu’il y avait eu beaucoup d’activité dans le secteur récemment. Le plaignant était en mesure de décrire avec exactitude les deux agents de police en ce qui concerne la taille, le poids, les tatouages, les cheveux faciaux et le port de l’uniforme de police. Bien que l’AI no 1, qui n’a été interrogé que quelques mois plus tard, a dit que lui-même et l’AI no 2 portaient la barbe à l’époque, je souligne qu’aussi bien le plaignant que la TC no 1, qui ont été interrogés au lendemain de l’incident, ont tous deux décrit l’AI no 1 comme portant une barbe et l’AI no 2, comme étant rasé de près. Cette preuve est également confirmée par le TC no 2 et j’accepte que les témoignages du plaignant et de la TC no 1 sont exacts à cet égard et que l’AI no 1 s’est fort probablement trompé en raison du temps qui s’était écoulé depuis l’incident. Pour ce motif, en me fiant à la preuve, j’ai déduit que l’agent à la barbe était l’AI no 1, tandis que l’agent rasé de près était l’AI no 2.
Il n’est pas contesté que les agents de police ont demandé aux trois personnes de leur fournir leur nom et une pièce d’identité, et même si elles n’étaient pas obligées de le faire, chacune d’elles s’est identifiée verbalement, le plaignant ayant donné un nom qui n’était pas le sien. Même s’il n’y avait aucune obligation pour le plaignant de s’identifier dans ces circonstances, ayant choisi de le faire, il a commis une infraction criminelle (art. 129, entrave d’un agent de la paix) en donnant un faux nom.
Malgré le faux nom fourni, en raison de son comportement, l’AI no 1 soupçonnait qu’il était en fait le plaignant, qui était apparemment recherché en vertu d’un mandat d’arrestation lancé contre lui à la suite d’un incident survenu la veille au soir. Par conséquent, l’AI no 1 s’est éloigné et est retourné à son véhicule de police pour examiner une photographie du plaignant. Une fois de retour, l’AI no 1 a informé le plaignant qu’il était en état d’arrestation en raison d’un mandat non exécuté et a pris ses menottes et a saisi les poignets du plaignant pour le mettre en état d’arrestation. Le plaignant a admis volontiers qu’il s’était alors enfui.
Le plaignant a couru vers une allée menant à un espace vert s’étendant entre et derrière deux maisons. Le plaignant a admis que durant sa tentative d’éviter son appréhension, il avait trébuché sur son propre pied et était tombé vers l’avant, atterrissant sur le ventre. Le plaignant a déclaré qu’il s’était cogné la jambe et s’était blessé au pied au cours de cette chute, mais qu’il s’était remis debout et s’était remis à courir.
D’après l’AI no 1, la chute du plaignant a permis aux deux agents de police de rattraper quelque peu le plaignant. L’AI no 1 a précisé que l’AI no 2 avait signalé, dans la radio de police, qu’ils avaient entamé une poursuite à pied, ce que confirme l’enregistrement des transmissions de la police, où l’on entend un agent de police, qui, de toute évidence respire fort et semble courir, dire par la radio [traduction] « Un homme court, (endroit), vers le nord ».
L’AI no 1 a indiqué que le plaignant avait alors trébuché une seconde fois, avant de courir vers l’est dans des buissons, tandis que le plaignant a indiqué qu’il n’était tombé qu’une seule fois, avant d’être poussé dans le dos par l’un des agents de police qui le pourchassait, et qu’il était tombé dans les haies du côté droit du sentier, tout comme l’agent de police qui l’avait poussé.
Le plaignant a précisé qu’il était tombé maladroitement dans la haie, mais qu’il ne croyait pas avoir atterri sur l’épaule droite. Le plaignant a dit qu’il faisait face aux agents de police à un angle inconfortable, alors qu’ils lui donnaient l’ordre de « ne pas bouger » et de « sortir ». Le plaignant a déclaré qu’il était incapable de se retourner, en raison de sa position inconfortable dans la haie, et qu’il n’était donc pas en mesure d’obéir aux ordres de la police.
L’AI no 1, quant à lui, a interprété le manque de coopération du plaignant comme une tentative de se retourner et de se débattre pour se libérer des agents, qui avaient saisi le plaignant de chaque côté. Étant donné la tentative de fuite antérieure du plaignant, j’estime que l’interprétation de l’AI no 1 est tout à fait raisonnable dans les circonstances.
L’AI no 1 a déclaré que lui et l’AI no 2 avaient tiré le plaignant hors des buissons, les deux agents tombant au sol avec lui, tandis que le plaignant était tombé vers l’avant sur le sol. L’AI no 1 a indiqué que le plaignant continuait d’agiter ses jambes dans tous les sens et essayait de s’échapper.
Le plaignant a déclaré qu’il n’était dans la haie que pendant quelques secondes lorsqu’il en a été sorti par les agents de police, qui ont tenté de le retourner, usant de force pour l’empêcher de s’échapper. Le plaignant a indiqué qu’il avait senti les genoux des agents de police dans le dos alors qu’ils tordaient son corps pour le mettre sur son côté droit.
Le plaignant et l’AT no 3 ont tous deux indiqué lors de leurs témoignages que l’AI no 1 avait fait un commentaire du genre [traduction] « Vous n’auriez pas dû obliger les deux gros gars que nous sommes à courir », ce qui, à mon avis, confirme que la version des événements fournie par le plaignant était relativement fiable.
Le plaignant a affirmé que l’AI no 1 lui avait dit de cesser de résister, mais le plaignant était d’avis qu’il n’avait pas obtempéré. Il a ensuite indiqué que l’un des agents de police avait poussé sa tête contre le sol et qu’il avait eu l’impression que les agents lui avaient donné environ trois ou quatre coups de poing à la tête, après quoi les agents de police l’avaient plaqué au sol, et il avait senti un genou dans le dos pour le maintenir dans cette position. De l’avis du plaignant, c’est pendant cette lutte qu’il avait été blessé à l’épaule (ou à la clavicule), ce qu’il a attribué à la position inconfortable dans laquelle il se trouvait, combinée à la pression exercée sur son épaule droite.
L’AI no 1 a précisé que le plaignant avait essayé de se relever en poussant sur le sol, de sorte que l’AI no 1 s’était placé sur son dos pour le forcer à plat au sol. L’AI no 1 a également indiqué que son bras droit se trouvait près de la tête du plaignant et qu’il était couché sur le dos de celui-ci et qu’il avait enveloppé les jambes du plaignant des siennes pour l’empêcher de les bouger dans tous les sens. L’AI no 1 a déclaré que l’AI no 2 avait donné deux coups de genou aux côtes gauches du plaignant pendant cette lutte.
Le plaignant, qui était couché sur le ventre à ce moment-là, croyait que l’AI no 1 avait alors appliqué une prise de tête ou d’étranglement, en plaçant le bras sous son menton et en serrant fortement son cou, coupant sa respiration. Le plaignant a également indiqué que l’AI no 1 lui aurait alors dit [traduction] « Je vais te forcer à dormir ». Ce n’est que cette partie de la preuve, c’est-à-dire cette affirmation et la prise d’étranglement, qui semble ne pas faire l’unanimité entre le plaignant et l’AI no 1. Le plaignant a expliqué que la prise d’étranglement avait duré une quinzaine de secondes et que le TC no 2 était arrivé après cela et avait tenu son téléphone cellulaire de telle manière qu’il avait l’impression qu’il était en train de filmer l’interaction alors qu’il ne le faisait pas. Le plaignant a indiqué que quelqu’un avait dit [traduction] « Il ne résiste pas, vous pouvez relâcher votre prise », et l’AI no 1 avait relâché sa prise et le plaignant avait été menotté et amené à une voiture de patrouille.
Ni le TC no 2 ni la TC no 1 n’ont jamais vu un agent de police frapper le plaignant, même si à leur arrivée, ils ont confirmé qu’on pouvait entendre le plaignant se débattre et avoir de la difficulté à respirer et dire à l’agent de police d’arrêter de se coucher sur lui et qu’il ne parvenait pas à respirer.
Le TC no 2 a vu un agent de police avec son genou gauche sur l’épaule droite et le bas du cou du plaignant, tandis que le tibia de l’autre agent de police était appuyé contre les côtes du plaignant. Le premier agent de police aurait également appliqué une ‘clé de bras’ au plaignant, dont le bras pointait vers le haut.
La TC no 1 a appuyé le témoignage du plaignant, en ce sens qu’elle a indiqué qu’à son arrivée, elle était la personne qui avait dit aux agents de police de relâcher leur prise, car ils contrôlaient déjà le plaignant, et qu’après cela l’AI no 1, qui, selon elle, maintenait le plaignant dans une sorte de prise d’étranglement, a relâché sa prise, mais a continué de maîtriser le plaignant. La TC no 1 a décrit les agents de police comme étant rudes avec le plaignant, ce qui l’a bouleversée, mais elle a admis qu’à aucun moment elle n’avait vu un agent de police frapper le plaignant.
Bien que ce ne soit pas particulièrement pertinent du point de vue des conclusions de fait dans la présente affaire, je tiens à souligner une fois de plus le souvenir exact du plaignant quant aux détails de l’incident, puisqu’il a indiqué dans sa déclaration que lorsqu’un autre agent s’était présenté pour le transporter, cet agent fumait un cigare. Bien que l’AT no 3, qui était l’agent chargé du transport, ait indiqué dans sa déclaration qu’il avait fumé un cigare avant son arrivée, mais pas sur les lieux, je note que cet élément de preuve fourni par plaignant est encore une fois confirmé indépendamment par l’AI no 1, qui a également décrit l’AT no 3 comme fumant un cigare à son arrivée, confirmant de nouveau la fiabilité du souvenir des événements du plaignant.
Compte tenu de cette preuve, je n’ai donc aucune hésitation à accepter la version des événements fournie par le plaignant, particulièrement à la lumière de la confirmation indépendante de cette preuve par divers autres témoins, dont l’AI no 1.
J’accepte que le plaignant, pendant que l’AI no 1 le plaçait en état d’arrestation et tentait de le menotter, se soit échappé à l’AI no 1 et se soit mis à courir. Par la suite, en l’absence de toute forme d’intervention, le plaignant est tombé au moins une fois, puis soit est tombé une deuxième fois, soit a été poussé par la police et s’est retrouvé dans la haie, après quoi les agents de police l’ont traîné hors du buisson, ce qui a fait tomber les deux agents au sol avec le plaignant. Je conclus qu’une fois au sol, les agents de police n’étaient pas trop doux avec le plaignant et j’accepte que, bien que le plaignant n’ait peut-être pas cru qu’il résistait, mais qu’il était incapable d’obtempérer, les agents de police n’étaient pas sur le point de lui accorder le bénéfice du doute à ce moment-là, après que le plaignant avait déjà évité son arrestation une première fois.
En outre, je n’ai absolument aucune hésitation à accepter que le plaignant ait pu tout simplement agiter ses membres parce qu’il n’était pas en mesure de respirer, et que le fait pour lui de chercher à respirer alors qu’il s’étouffait serait la conséquence naturelle de la présence de deux hommes de 250 livres qui étaient couchés, agenouillés ou assis sur lui. J’accepte également que, dans ses efforts pour maîtriser et contenir le plaignant, l’AI no 2 a donné deux coups de genou aux côtes du plaignant et que l’AI no 1 a placé son bras autour ou contre le cou du plaignant.
En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel du Canada, un agent de police, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, est fondé à employer la force nécessaire dans l’exécution d’une obligation légale. Par conséquent, pour que les agents impliqués aient droit à une protection contre des poursuites en vertu de l’art. 25, il doit être établi qu’ils s’acquittaient d’une obligation légale, qu’ils agissaient pour des motifs raisonnables et qu’ils n’ont pas employé plus de force que nécessaire.
En ce qui concerne d’abord les actions de l’AI no 1 et de l’AI no 2 au moment de leur tentative d’arrêter le plaignant en vertu du mandat d’arrestation non exécuté, il est clair qu’elles s’inscrivaient dans leurs fonctions légitimes et qu’ils agissaient donc légalement lorsqu’ils ont tenté initialement d’arrêter le plaignant, puis l’ont poursuivi et placé sous garde après qu’il avait résisté à son arrestation et s’était échappé à leur garde. Par conséquent, à moins que les actions des agents de police fussent excessives et déraisonnables dans ces circonstances, leurs actions sont exemptées de poursuites en vertu de l’article 25 du Code criminel.
En évaluant le bien-fondé de la force utilisée par l’AI no 2, mais plus encore par l’AI no 1, je suis conscient du fait que le plaignant avait déjà évité une fois son arrestation, qu’il tentait de s’échapper à tout prix, et que cet incident s’est produit dans un contexte fluide qui évoluait rapidement, dans l’obscurité, et sans que les agents aient l’occasion de soupeser soigneusement chaque action particulière envisagée. Pour en arriver à la conclusion que les actions de ces deux agents dans cette situation de fait particulière ne constituaient pas un recours excessif à la force, je me suis laissé guider par les directives de la Cour suprême du Canada énoncées dans l’arrêt R. c. Nasogaluak [2010] 1 R.C.S. 206, qui dit ceci :
Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux�'ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. v. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C. A. C.-B.) :
De plus, j’ai pris en considération la décision rendue par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire R. c. Baxter (1975), 27 C.C.C. (2d) 96 (C. A. de l’Ont.), selon laquelle on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention.
Bien que je ne sois pas en mesure de déterminer exactement à quel moment le plaignant a subi sa blessure grave, je note que la clavicule est l’un des os les plus souvent fracturés du corps humain et qu’elle survient fréquemment à la suite d’une chute sur l’épaule ou sur un bras tendu (source : https://orthoinfor.aaos.org; www.mayoclinic.org; www.webmd.boots.com). Pour cette raison, je conclus qu’il est fort probable que l’une ou l’autre des deux chutes du plaignant ait pu causer sa blessure, mais même s’il a été blessé pendant qu’il luttait avec l’AI no 1 et l’AI no 2, je ne crois pas que cela résultait d’un recours excessif à la force, mais était plutôt le résultat malheureux de l’intervention de deux hommes de 250 livres chacun qui tentaient de maîtriser le plaignant, alors qu’il résistait.
En conclusion, je rends que la preuve ne me fournit pas de motifs raisonnables de croire que l’AI no 2 ou l’AI no 1 a eu recours à un usage excessif de la force à l’endroit du plaignant ni les motifs nécessaires pour porter des accusations criminelles, et aucune ne sera portée.
Date : 12 septembre 2018
Original signé par
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Au cours de cette enquête, trois témoins civils (TC), dont le plaignant, ont été interrogés, tout comme l’AI no 1, tandis que l’AI no 2 n’a pas consenti à subir une entrevue ou de fournir les notes qu’il avait entrées dans son calepin, comme la loi l’y autorise. Bien que trois autres témoins appartenant à la police aient également été interrogés durant l’enquête, aucun d’eux n’était présent durant l’interaction avec le plaignant. À part les déclarations des témoins, il n’y avait aucune preuve physique ni aucun enregistrement audio ou vidéo de l’incident. Toutefois, les faits ne sont pas vraiment contestés et le souvenir du plaignant semble correspondre à celui d’autres témoins en ce qui concerne de petits détails, et il semble donc qu’il constitue un témoin crédible et fiable.
Le 7 octobre 2017, le plaignant et ses amis, les TC nos 1 et 2, étaient à la résidence du TC no 2 dans la ville de Brampton. Les trois se trouvaient dans le garage du TC no 2 où ils écoutaient de la musique; la porte du garage a été décrite comme étant à moitié ouverte.
Le plaignant s’est rappelé que deux agents de police s’étaient approchés du garage et s’étaient présentés à eux et leur avaient dit qu’ils effectuaient des patrouilles dans le quartier parce qu’il y avait eu beaucoup d’activité dans le secteur récemment. Le plaignant était en mesure de décrire avec exactitude les deux agents de police en ce qui concerne la taille, le poids, les tatouages, les cheveux faciaux et le port de l’uniforme de police. Bien que l’AI no 1, qui n’a été interrogé que quelques mois plus tard, a dit que lui-même et l’AI no 2 portaient la barbe à l’époque, je souligne qu’aussi bien le plaignant que la TC no 1, qui ont été interrogés au lendemain de l’incident, ont tous deux décrit l’AI no 1 comme portant une barbe et l’AI no 2, comme étant rasé de près. Cette preuve est également confirmée par le TC no 2 et j’accepte que les témoignages du plaignant et de la TC no 1 sont exacts à cet égard et que l’AI no 1 s’est fort probablement trompé en raison du temps qui s’était écoulé depuis l’incident. Pour ce motif, en me fiant à la preuve, j’ai déduit que l’agent à la barbe était l’AI no 1, tandis que l’agent rasé de près était l’AI no 2.
Il n’est pas contesté que les agents de police ont demandé aux trois personnes de leur fournir leur nom et une pièce d’identité, et même si elles n’étaient pas obligées de le faire, chacune d’elles s’est identifiée verbalement, le plaignant ayant donné un nom qui n’était pas le sien. Même s’il n’y avait aucune obligation pour le plaignant de s’identifier dans ces circonstances, ayant choisi de le faire, il a commis une infraction criminelle (art. 129, entrave d’un agent de la paix) en donnant un faux nom.
Malgré le faux nom fourni, en raison de son comportement, l’AI no 1 soupçonnait qu’il était en fait le plaignant, qui était apparemment recherché en vertu d’un mandat d’arrestation lancé contre lui à la suite d’un incident survenu la veille au soir. Par conséquent, l’AI no 1 s’est éloigné et est retourné à son véhicule de police pour examiner une photographie du plaignant. Une fois de retour, l’AI no 1 a informé le plaignant qu’il était en état d’arrestation en raison d’un mandat non exécuté et a pris ses menottes et a saisi les poignets du plaignant pour le mettre en état d’arrestation. Le plaignant a admis volontiers qu’il s’était alors enfui.
Le plaignant a couru vers une allée menant à un espace vert s’étendant entre et derrière deux maisons. Le plaignant a admis que durant sa tentative d’éviter son appréhension, il avait trébuché sur son propre pied et était tombé vers l’avant, atterrissant sur le ventre. Le plaignant a déclaré qu’il s’était cogné la jambe et s’était blessé au pied au cours de cette chute, mais qu’il s’était remis debout et s’était remis à courir.
D’après l’AI no 1, la chute du plaignant a permis aux deux agents de police de rattraper quelque peu le plaignant. L’AI no 1 a précisé que l’AI no 2 avait signalé, dans la radio de police, qu’ils avaient entamé une poursuite à pied, ce que confirme l’enregistrement des transmissions de la police, où l’on entend un agent de police, qui, de toute évidence respire fort et semble courir, dire par la radio [traduction] « Un homme court, (endroit), vers le nord ».
L’AI no 1 a indiqué que le plaignant avait alors trébuché une seconde fois, avant de courir vers l’est dans des buissons, tandis que le plaignant a indiqué qu’il n’était tombé qu’une seule fois, avant d’être poussé dans le dos par l’un des agents de police qui le pourchassait, et qu’il était tombé dans les haies du côté droit du sentier, tout comme l’agent de police qui l’avait poussé.
Le plaignant a précisé qu’il était tombé maladroitement dans la haie, mais qu’il ne croyait pas avoir atterri sur l’épaule droite. Le plaignant a dit qu’il faisait face aux agents de police à un angle inconfortable, alors qu’ils lui donnaient l’ordre de « ne pas bouger » et de « sortir ». Le plaignant a déclaré qu’il était incapable de se retourner, en raison de sa position inconfortable dans la haie, et qu’il n’était donc pas en mesure d’obéir aux ordres de la police.
L’AI no 1, quant à lui, a interprété le manque de coopération du plaignant comme une tentative de se retourner et de se débattre pour se libérer des agents, qui avaient saisi le plaignant de chaque côté. Étant donné la tentative de fuite antérieure du plaignant, j’estime que l’interprétation de l’AI no 1 est tout à fait raisonnable dans les circonstances.
L’AI no 1 a déclaré que lui et l’AI no 2 avaient tiré le plaignant hors des buissons, les deux agents tombant au sol avec lui, tandis que le plaignant était tombé vers l’avant sur le sol. L’AI no 1 a indiqué que le plaignant continuait d’agiter ses jambes dans tous les sens et essayait de s’échapper.
Le plaignant a déclaré qu’il n’était dans la haie que pendant quelques secondes lorsqu’il en a été sorti par les agents de police, qui ont tenté de le retourner, usant de force pour l’empêcher de s’échapper. Le plaignant a indiqué qu’il avait senti les genoux des agents de police dans le dos alors qu’ils tordaient son corps pour le mettre sur son côté droit.
Le plaignant et l’AT no 3 ont tous deux indiqué lors de leurs témoignages que l’AI no 1 avait fait un commentaire du genre [traduction] « Vous n’auriez pas dû obliger les deux gros gars que nous sommes à courir », ce qui, à mon avis, confirme que la version des événements fournie par le plaignant était relativement fiable.
Le plaignant a affirmé que l’AI no 1 lui avait dit de cesser de résister, mais le plaignant était d’avis qu’il n’avait pas obtempéré. Il a ensuite indiqué que l’un des agents de police avait poussé sa tête contre le sol et qu’il avait eu l’impression que les agents lui avaient donné environ trois ou quatre coups de poing à la tête, après quoi les agents de police l’avaient plaqué au sol, et il avait senti un genou dans le dos pour le maintenir dans cette position. De l’avis du plaignant, c’est pendant cette lutte qu’il avait été blessé à l’épaule (ou à la clavicule), ce qu’il a attribué à la position inconfortable dans laquelle il se trouvait, combinée à la pression exercée sur son épaule droite.
L’AI no 1 a précisé que le plaignant avait essayé de se relever en poussant sur le sol, de sorte que l’AI no 1 s’était placé sur son dos pour le forcer à plat au sol. L’AI no 1 a également indiqué que son bras droit se trouvait près de la tête du plaignant et qu’il était couché sur le dos de celui-ci et qu’il avait enveloppé les jambes du plaignant des siennes pour l’empêcher de les bouger dans tous les sens. L’AI no 1 a déclaré que l’AI no 2 avait donné deux coups de genou aux côtes gauches du plaignant pendant cette lutte.
Le plaignant, qui était couché sur le ventre à ce moment-là, croyait que l’AI no 1 avait alors appliqué une prise de tête ou d’étranglement, en plaçant le bras sous son menton et en serrant fortement son cou, coupant sa respiration. Le plaignant a également indiqué que l’AI no 1 lui aurait alors dit [traduction] « Je vais te forcer à dormir ». Ce n’est que cette partie de la preuve, c’est-à-dire cette affirmation et la prise d’étranglement, qui semble ne pas faire l’unanimité entre le plaignant et l’AI no 1. Le plaignant a expliqué que la prise d’étranglement avait duré une quinzaine de secondes et que le TC no 2 était arrivé après cela et avait tenu son téléphone cellulaire de telle manière qu’il avait l’impression qu’il était en train de filmer l’interaction alors qu’il ne le faisait pas. Le plaignant a indiqué que quelqu’un avait dit [traduction] « Il ne résiste pas, vous pouvez relâcher votre prise », et l’AI no 1 avait relâché sa prise et le plaignant avait été menotté et amené à une voiture de patrouille.
Ni le TC no 2 ni la TC no 1 n’ont jamais vu un agent de police frapper le plaignant, même si à leur arrivée, ils ont confirmé qu’on pouvait entendre le plaignant se débattre et avoir de la difficulté à respirer et dire à l’agent de police d’arrêter de se coucher sur lui et qu’il ne parvenait pas à respirer.
Le TC no 2 a vu un agent de police avec son genou gauche sur l’épaule droite et le bas du cou du plaignant, tandis que le tibia de l’autre agent de police était appuyé contre les côtes du plaignant. Le premier agent de police aurait également appliqué une ‘clé de bras’ au plaignant, dont le bras pointait vers le haut.
La TC no 1 a appuyé le témoignage du plaignant, en ce sens qu’elle a indiqué qu’à son arrivée, elle était la personne qui avait dit aux agents de police de relâcher leur prise, car ils contrôlaient déjà le plaignant, et qu’après cela l’AI no 1, qui, selon elle, maintenait le plaignant dans une sorte de prise d’étranglement, a relâché sa prise, mais a continué de maîtriser le plaignant. La TC no 1 a décrit les agents de police comme étant rudes avec le plaignant, ce qui l’a bouleversée, mais elle a admis qu’à aucun moment elle n’avait vu un agent de police frapper le plaignant.
Bien que ce ne soit pas particulièrement pertinent du point de vue des conclusions de fait dans la présente affaire, je tiens à souligner une fois de plus le souvenir exact du plaignant quant aux détails de l’incident, puisqu’il a indiqué dans sa déclaration que lorsqu’un autre agent s’était présenté pour le transporter, cet agent fumait un cigare. Bien que l’AT no 3, qui était l’agent chargé du transport, ait indiqué dans sa déclaration qu’il avait fumé un cigare avant son arrivée, mais pas sur les lieux, je note que cet élément de preuve fourni par plaignant est encore une fois confirmé indépendamment par l’AI no 1, qui a également décrit l’AT no 3 comme fumant un cigare à son arrivée, confirmant de nouveau la fiabilité du souvenir des événements du plaignant.
Compte tenu de cette preuve, je n’ai donc aucune hésitation à accepter la version des événements fournie par le plaignant, particulièrement à la lumière de la confirmation indépendante de cette preuve par divers autres témoins, dont l’AI no 1.
J’accepte que le plaignant, pendant que l’AI no 1 le plaçait en état d’arrestation et tentait de le menotter, se soit échappé à l’AI no 1 et se soit mis à courir. Par la suite, en l’absence de toute forme d’intervention, le plaignant est tombé au moins une fois, puis soit est tombé une deuxième fois, soit a été poussé par la police et s’est retrouvé dans la haie, après quoi les agents de police l’ont traîné hors du buisson, ce qui a fait tomber les deux agents au sol avec le plaignant. Je conclus qu’une fois au sol, les agents de police n’étaient pas trop doux avec le plaignant et j’accepte que, bien que le plaignant n’ait peut-être pas cru qu’il résistait, mais qu’il était incapable d’obtempérer, les agents de police n’étaient pas sur le point de lui accorder le bénéfice du doute à ce moment-là, après que le plaignant avait déjà évité son arrestation une première fois.
En outre, je n’ai absolument aucune hésitation à accepter que le plaignant ait pu tout simplement agiter ses membres parce qu’il n’était pas en mesure de respirer, et que le fait pour lui de chercher à respirer alors qu’il s’étouffait serait la conséquence naturelle de la présence de deux hommes de 250 livres qui étaient couchés, agenouillés ou assis sur lui. J’accepte également que, dans ses efforts pour maîtriser et contenir le plaignant, l’AI no 2 a donné deux coups de genou aux côtes du plaignant et que l’AI no 1 a placé son bras autour ou contre le cou du plaignant.
En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel du Canada, un agent de police, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, est fondé à employer la force nécessaire dans l’exécution d’une obligation légale. Par conséquent, pour que les agents impliqués aient droit à une protection contre des poursuites en vertu de l’art. 25, il doit être établi qu’ils s’acquittaient d’une obligation légale, qu’ils agissaient pour des motifs raisonnables et qu’ils n’ont pas employé plus de force que nécessaire.
En ce qui concerne d’abord les actions de l’AI no 1 et de l’AI no 2 au moment de leur tentative d’arrêter le plaignant en vertu du mandat d’arrestation non exécuté, il est clair qu’elles s’inscrivaient dans leurs fonctions légitimes et qu’ils agissaient donc légalement lorsqu’ils ont tenté initialement d’arrêter le plaignant, puis l’ont poursuivi et placé sous garde après qu’il avait résisté à son arrestation et s’était échappé à leur garde. Par conséquent, à moins que les actions des agents de police fussent excessives et déraisonnables dans ces circonstances, leurs actions sont exemptées de poursuites en vertu de l’article 25 du Code criminel.
En évaluant le bien-fondé de la force utilisée par l’AI no 2, mais plus encore par l’AI no 1, je suis conscient du fait que le plaignant avait déjà évité une fois son arrestation, qu’il tentait de s’échapper à tout prix, et que cet incident s’est produit dans un contexte fluide qui évoluait rapidement, dans l’obscurité, et sans que les agents aient l’occasion de soupeser soigneusement chaque action particulière envisagée. Pour en arriver à la conclusion que les actions de ces deux agents dans cette situation de fait particulière ne constituaient pas un recours excessif à la force, je me suis laissé guider par les directives de la Cour suprême du Canada énoncées dans l’arrêt R. c. Nasogaluak [2010] 1 R.C.S. 206, qui dit ceci :
Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux�'ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. v. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C. A. C.-B.) :
Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218]
De plus, j’ai pris en considération la décision rendue par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire R. c. Baxter (1975), 27 C.C.C. (2d) 96 (C. A. de l’Ont.), selon laquelle on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention.
Bien que je ne sois pas en mesure de déterminer exactement à quel moment le plaignant a subi sa blessure grave, je note que la clavicule est l’un des os les plus souvent fracturés du corps humain et qu’elle survient fréquemment à la suite d’une chute sur l’épaule ou sur un bras tendu (source : https://orthoinfor.aaos.org; www.mayoclinic.org; www.webmd.boots.com). Pour cette raison, je conclus qu’il est fort probable que l’une ou l’autre des deux chutes du plaignant ait pu causer sa blessure, mais même s’il a été blessé pendant qu’il luttait avec l’AI no 1 et l’AI no 2, je ne crois pas que cela résultait d’un recours excessif à la force, mais était plutôt le résultat malheureux de l’intervention de deux hommes de 250 livres chacun qui tentaient de maîtriser le plaignant, alors qu’il résistait.
En conclusion, je rends que la preuve ne me fournit pas de motifs raisonnables de croire que l’AI no 2 ou l’AI no 1 a eu recours à un usage excessif de la force à l’endroit du plaignant ni les motifs nécessaires pour porter des accusations criminelles, et aucune ne sera portée.
Date : 12 septembre 2018
Original signé par
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.