Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-OCI-333
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- des renseignements qui révèlent des
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet de la blessure grave subie par un homme de 36 ans (le plaignant).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 7 août 2024, à 8 h 14, l’Agence des plaintes contre les forces de l’ordre (APFO) a communiqué les renseignements suivants à l’UES.
L’APFO a reçu une plainte indiquant que le plaignant a téléphoné au 911, dans la soirée du 30 mai 2024, pour obtenir de l’aide chez lui, à Mississauga, car il était en proie à une psychose. Les services médicaux d’urgence (SMU) et la police se sont rendus à son appartement. Le plaignant a résisté aux tentatives des SMU pour le placer sur une civière et le transporter à l’hôpital. Un agent a donc saisi son bras gauche et le plaignant s’est retrouvé avec le bras cassé. Les agents ont ensuite menotté le plaignant derrière le dos. Il a été placé sur une civière et transporté en ambulance à l’Hôpital Credit Valley, où il a été admis pour une évaluation de santé mentale. Les radiographies ont révélé que son bras gauche était cassé.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 7 août 2024 à 11 h 29
Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 7 août 2024 à 11 h 35
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des
sciences judiciaires de l’UES assignés : 0
Personne concernée (le « plaignant ») :
Homme de 36 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés
Le plaignant a participé à une entrevue le 12 août 2024.
Témoins civils (TC)
TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
Les témoins civils ont participé à des entrevues le 12 août 2024.
Agent impliqué (AI)
AI A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
L’agent impliqué a participé à une entrevue le 16 septembre 2024.
Agent témoin (AT)
AT A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
L’agente témoin a participé à une entrevue le 16 août 2024.
Témoin employé du service (TES)
TES A participé à une entrevue
La témoin employée du service a participé à une entrevue le 16 août 2024.
Éléments de preuve
Les lieux
Les événements en question se sont déroulés dans l’une des chambres à coucher d’un appartement situé à Mississauga.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]
Vidéos captées par les caméras d’intervention de l’AT et de l’AI
Le 30 mai 2024, vers 23 h 8 min 8 s, l’AI et deux ambulanciers paramédicaux arrivent sur les lieux. L’AI cogne à la porte de l’appartement du plaignant. La porte s’ouvre et le TC no 1 dit : [Traduction[3]] « Il [le plaignant] ne va pas sortir ». L’AI demande : « Avez-vous besoin de la police ou d’une ambulance? » Le TC no 1 indique que le plaignant se trouve dans son lit. L’ambulancier paramédical informe le TC no 1 que le plaignant a téléphoné au 911 plus de 30 fois et qu’il veut vérifier comment il se porte. Le TC no 1 s’écarte et l’AT demande : « Si ça ne vous dérange pas, nous allons entrer avec eux pour nous assurer que tout se passe bien », ce à quoi le TC no 1 répond : « Oui ».
Un ambulancier paramédical entre dans la chambre du plaignant et lui demande : « Tout va bien? Avez-vous appelé le 911? » L’AT se tient près de la porte de la chambre du plaignant. Un ambulancier paramédical se tient au chevet du plaignant et un autre se tient dans l’embrasure de la porte. La tête de lit se trouve sur le mur latéral gauche et le pied du lit est au centre de la pièce. Le plaignant est couché sur le lit, sur son côté droit et fait face à la porte. Un ambulancier paramédical lui demande : « Vous voulez aller à l’hôpital? D’accord. Parce que vous vous sentez paranoïaque? » Le plaignant répond : « Non, ce n’est pas ça. » Le plaignant indique que tout cela a commencé le soir d’avant et qu’il avait consommé de l’alcool. L’AT informe l’ambulancier que le plaignant est atteint de schizophrénie. Les ambulanciers paramédicaux demandent au plaignant pourquoi il a téléphoné au 911 alors qu’ils sont juste là. Le plaignant tient son téléphone cellulaire dans sa main gauche. L’AT indique au plaignant qu’il peut raccrocher avec le 911 parce que les ambulanciers paramédicaux et la police sont là pour l’aider. L’AT demande au plaignant s’il songe à se faire du mal ou à faire du mal aux autres, ce à quoi il répond par la négative. Le plaignant dit qu’il est d’accord avec l’AT et qu’il pense qu’il est dans cet état parce qu’il a consommé des substances. Il indique également qu’il a pris ses médicaments. Le plaignant confirme qu’il a consommé des substances en même temps que ses médicaments. Le plaignant téléphone de nouveau au 911. L’AT dit : « Il faut lui enlever le téléphone. » L’AI entre dans la chambre et se place à côté du lit du plaignant, près de la tête de lit. L’AI parle avec le répartiteur du 911 sur haut-parleur. L’AI dit au plaignant : « Nous allons vous aider, d’accord? » L’AI se tourne vers l’AT et lui demande : « Motifs raisonnables et probables pour l’article 17? » L’AT répond : « Il n’est pas suicidaire, il ne veut pas faire de mal aux autres, il a juste pris ses médicaments avec de la drogue, il dit qu’il prend ses médicaments, il est juste paranoïaque, c’est ta décision. Je pense que nous avons tous les motifs nécessaires. »
Vers 23 h 16, l’AI dit : « [Nom du plaignant], je vais vous le redemander, voulez-vous aller à l’hôpital? » Le plaignant répond « oui » et l’AI lui demande d’éteindre le téléphone. L’AI désigne du doigt l’ambulancier paramédical et, alors que celui-ci revient dans la chambre, indique au plaignant qu’il s’agit d’un ambulancier paramédical. Les ambulanciers paramédicaux et l’AI demandent au plaignant de les suivre à plusieurs reprises. Le plaignant répond qu’il est paranoïaque et reste allongé.
Vers 23 h 17, l’AT entre dans la chambre, demande au plaignant de raccrocher le téléphone, l’informe qu’il peut les suivre et qu’ils vont le placer dans une ambulance. Le plaignant raccroche et téléphone de nouveau au 911. Le plaignant demande au répartiteur du 911 d’envoyer la police. L’AT parle par-dessus le plaignant et informe le répartiteur qu’il se trouve avec le plaignant. L’AI tend la main vers le téléphone du plaignant, mais ce dernier l’éloigne et le met hors de portée. L’AT se tourne vers le couloir et informe la TES : « Nous allons simplement l’appréhender. » L’AT se rend dans la cuisine et informe le TC no 1 qu’ils vont appréhender le plaignant et l’emmener à l’hôpital pour lui obtenir des soins.
Vers 23 h 19, le TC no 1 entre dans la chambre du plaignant et parle avec lui. Il téléphone au 911 à trois autres reprises alors que le TC no 1 et les agents tentent de le convaincre de les suivre.
Vers 23 h 20, le TC no 2 entre dans la chambre à coucher du plaignant depuis la gauche de l’image. L’AT tente de le mettre au fait de leurs tentatives de convaincre le plaignant de venir avec eux, car il n’arrêtait pas de téléphoner au 911. Le TC no 2 sort de la chambre. L’AI se rend sur le côté du lit situé près de la fenêtre. Pendant ce temps, le TC no 1 réussit à s’emparer du téléphone se trouvant dans la main gauche du plaignant, puis sort de la chambre. L’AT explique au plaignant qu’ils vont lui obtenir de l’aide et le placer sur une civière. Le plaignant demande qu’on lui redonne son téléphone et l’AT l’informe qu’ils vont le lui redonner dès qu’il sera sur la civière. L’AT se tient dans l’embrasure de la porte de la chambre, montre au plaignant son téléphone et tente de le faire sortir du lit en l’appâtant avec le téléphone. Le plaignant reste dans le lit et demande qu’on lui redonne son téléphone.
Vers 23 h 28, le TC no 1 entre dans la chambre à coucher et tente de convaincre le plaignant d’en sortir pour aller chercher son téléphone.
Vers 23 h 30, l’AT dit : « Je pense que nous allons devoir lui passer les menottes. » L’AI dit : « À l’arrière? » L’AT répond : « Oui ». L’AI dit : « [Prénom du plaignant], écoutez, nous allons vous passer les menottes maintenant, d’accord? » Le plaignant répond : « Non, ne faites pas ça. »
Vers 23 h 31, l’un des ambulanciers paramédicaux entre dans la chambre et s’adresse au plaignant. Le second ambulancier paramédical pointe vers la civière dans la cuisine, informe le plaignant qu’il n’est pas dans le pétrin et qu’ils vont l’aider à se rendre à l’hôpital. L’AT et l’AI se tiennent dans la cuisine et l’AT dit : « Si ça ne marche pas avec eux, nous allons devoir intervenir. » L’AI répond : « Oui ».
Vers 23 h 33, l’AT demande au TC no 1 si le plaignant allait se montrer agressif s’ils intervenaient physiquement. Le TC no 1 répond que le plaignant va se débattre. L’AT informe l’AI : « Il va se débattre. » Les ambulanciers paramédicaux tentent de raisonner le plaignant et de le convaincre de venir avec eux jusqu’à la civière. Le plaignant ne bouge pas et demande qu’on lui redonne son téléphone.
Vers 23 h 36, l’AI se tient à droite de l’embrasure de la porte de la chambre et dit : « Bon, [prénom du plaignant], monsieur, je n’ai vraiment pas envie de vous passer les menottes, mais nous n’avons pas, nous avons épuisé toutes les options, n’est-ce pas? Nous devons vous obtenir de l’aide. » Un ambulancier paramédical tente de convaincre le plaignant de sortir de la chambre et le plaignant répond en redemandant son téléphone. Un autre ambulancier paramédical entre dans la chambre et tente de convaincre le plaignant de se rendre jusqu’à la civière, mais le plaignant redemande son téléphone.
Vers 23 h 38, l’AT dit : « Ok tout le monde, on va devoir le faire. » Un ambulancier paramédical sort de la chambre tandis que l’autre tente encore une fois de faire sortir le plaignant du lit. L’AI entre dans la chambre et retire la couverture du plaignant. Se tenant sur le côté du lit situé près de la fenêtre, l’AI place sa main droite sur l’épaule gauche du plaignant, agrippe son poignet gauche au moyen de sa main gauche, le plie afin de l’amener derrière son dos, et lui passe les menottes sur le poignet gauche. L’AT est au pied du lit et tient les deux pieds du plaignant et lui dit : « Ça va aller. » La TES s’agenouille sur le lit avec son genou droit, sur le côté du lit situé près de la porte. Le plaignant se tourne vers sa droite et la TES pose ses deux genoux sur la partie inférieure de la jambe gauche du plaignant, tandis que l’AI place son genou droit sur la hanche gauche du plaignant. L’AT contourne le lit vers la droite et se rend près de la tête du plaignant. Tandis que le plaignant se penche en avant sur son bras droit, l’AI continue de tenir le bras gauche du plaignant derrière son dos. Le poignet gauche du plaignant est menotté et l’AI tient la main gauche du plaignant de sa main droite. L’AI tient le bras menotté de sa main gauche et place son avant-bras gauche sur l’arrière de l’avant-bras gauche du plaignant. Le plaignant tire son bras gauche vers l’avant et l’AI utilise les menottes pour tirer son bras gauche derrière son dos. Le plaignant tire son bras gauche vers l’avant. L’AI essaie de pousser le bras gauche du plaignant derrière son dos, tandis que le plaignant le tire vers l’avant. L’AT demande au plaignant de lui donner son bras, ce à quoi il répond « Non ». Ensuite, le plaignant dit : « Arrêtez, pouvez-vous arrêter, s’il vous plaît? » Le plaignant se débat et se retourne afin d’amener sa main droite devant lui. Les deux mains du plaignant se trouvent maintenant devant lui et il est allongé sur le côté droit. Il annonce qu’il est prêt à se rendre à la civière. Il refuse de mettre ses mains derrière son dos et redemande son téléphone. De ses deux mains, l’AT tire le bras droit du plaignant vers l’arrière. Le plaignant glisse en bas du lit, sur le côté gauche du lit, tête première, jusqu’au sol, tandis que l’AI tient son bras gauche derrière son dos. L’AT dégage le bras droit du plaignant et l’amène derrière son dos. L’AT et l’AI lui menottent les mains derrière le dos. Le plaignant demande s’il peut utiliser son téléphone. La TES verrouille les menottes à double tour.
Vers 23 h 41, la TES, l’AT et l’AI aident le plaignant à se relever en le soutenant sur le côté droit. Le plaignant demande s’il peut utiliser le téléphone.
Vers 23 h 42, le plaignant s’assoit sur la civière et dit : « Je suis paranoïaque. »
Vers 23 h 44, on amène le plaignant dans le couloir. La main droite du plaignant est attachée sur le côté droit de la civière et il est retenu par des sangles.
Vers 23 h 52, le plaignant informe le premier ambulancier paramédical qu’il a mal. L’ambulancier dit : « Vous vous êtes débattu, alors je suis sûr que vous êtes fatigué, que vous avez mal aux bras et tout ça. » Le plaignant répond : « Oui ».
Enregistrement des communications de la police
Le 30 mai 2024, le plaignant a téléphoné au 911 à plusieurs reprises. Il a demandé qu’une ambulance soit envoyée et, lorsque le répartiteur d’ambulances l’a mis en attente, il a raccroché. En travaillant ensemble, les préposés aux appels et répartiteurs du 911 ont déterminé que le plaignant avait téléphoné depuis un immeuble d’habitation situé à Mississauga. Le plaignant a été informé qu’il pourrait s’attirer des ennuis s’il abusait du 911, car il n’avait pas fourni son adresse et avait téléphoné à plusieurs reprises. Le plaignant a demandé si une ambulance était en route. Les répartiteurs l’ont informé que, pour envoyer une ambulance, ils avaient besoin de l’adresse. Le plaignant a fourni le nom de la rue, mais a fourni le numéro d’un autre appartement situé sur son étage. Le plaignant a été informé qu’on allait appeler sa compagnie de téléphone pour connaître son adresse exacte et que la police allait être dépêchée sur les lieux. Il leur a demandé de ne pas faire cela. Le plaignant a été informé que l’ambulance venait d’arriver à son immeuble d’habitation.
Le SPRP a contacté TELUS pour obtenir le nom et l’adresse du plaignant. Le répartiteur a demandé à l’AI et à l’AT de se rendre au domicile du plaignant, car il avait demandé une ambulance. Le plaignant a téléphoné plusieurs fois au 911 pour obtenir une aide médicale de nature inconnue. Un répartiteur a informé l’AI qu’ils avaient sondé par PING le téléphone du plaignant et avaient déterminé son adresse. L’AI a informé le répartiteur qu’il avait trouvé le plaignant. Le répartiteur a informé l’AI que le plaignant faisait l’objet d’un avertissement dans le système, car il était schizophrène. Le plaignant a téléphoné au 911 pendant que l’AI, l’AT et le TES étaient avec lui. Il a demandé qu’une ambulance soit envoyée et l’AI a informé le répartiteur du 911 qu’ils étaient déjà avec lui.
Le plaignant a téléphoné au 911 et l’AT a informé le répartiteur qu’ils étaient avec lui. Le répartiteur a demandé à l’AT d’éloigner le téléphone du plaignant, si possible.
Le plaignant a téléphoné au 911. L’AI a informé le répartiteur que la police et l’ambulance étaient sur les lieux, que le plaignant avait les facultés affaiblies et qu’ils s’occupaient de lui. Le répartiteur lui a demandé s’ils pouvaient mettre fin aux appels. Une voix masculine [on sait maintenant qu’il s’agissait d’un ambulancier paramédical] a demandé au plaignant pourquoi il avait téléphoné au 911. Il a répondu qu’il était paranoïaque. Après de nombreux appels au 911, l’AI a annoncé au répartiteur qu’ils avaient confisqué le téléphone du plaignant. L’AI a informé le répartiteur que le plaignant pouvait être appréhendé en vertu de la Loi sur la santé mentale.
À 23 h 41 min, l’AI a informé le répartiteur que le plaignant était maintenant en garde à vue.
Éléments obtenus auprès du service de police
Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants auprès du SPRP entre le 7 juillet 2024 et le 16 septembre 2024 :
- Vidéos captées par les caméras d’intervention de l’AT et de l’AI
- Rapport sur les détails de l’incident
- Historique de l’incident
- Rapport d’incident
- Rapport — renseignements sur la personne — le plaignant
- Rapport — renseignements sur la personne (antécédents criminels) — le plaignant
- Politique relative à la santé mentale et à la dépendance
- Politique sur les enquêtes criminelles
- Politique sur les interventions en cas d’incident
- Notes de l’AI, de l’AT et de la TES
- Enregistrements des communications
Éléments obtenus auprès d’autres sources
L’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources entre le 7 août 2024 et le 15 août 2024 :
- Plainte déposée par le plaignant auprès de l’APFO
- Rapport sur la demande d’ambulance, fourni par les SMU de Peel
- Dossiers médicaux, fournis par Trillium Health Partners
Description de l’incident
La preuve recueillie par l’UES brosse un portrait clair des événements, lesquels peuvent être résumés succinctement comme suit.
Dans la soirée du 30 mai 2024, l’AI, en compagnie de l’AT et de la TES, s’est rendu dans un appartement situé à Mississauga pour donner suite à un appel. Des ambulanciers paramédicaux étaient également présents. Le plaignant, qui habitait dans l’appartement, avait téléphoné au 911 à plusieurs reprises, car il se sentait très paranoïaque et voulait aller à l’hôpital.
Un membre de la famille du plaignant a laissé entrer les premiers intervenants. Ils ont trouvé le plaignant allongé dans son lit, dans une chambre. Au cours de la demi-heure qui a suivi, ils ont parlé avec le plaignant pour tenter de le convaincre de les accompagner jusqu’à une civière qui attendait non loin de là.
Le plaignant avait les facultés altérées à ce moment-là en raison d’un trouble mental et parce qu’il avait consommé des drogues illicites et les avait possiblement mélangées avec des médicaments sur ordonnance. Bien que les ambulanciers paramédicaux étaient chez lui, il a continué de téléphoner au 911 et a refusé de sortir du lit.
Après un certain temps, les agents ont conclu qu’ils allaient devoir l’appréhender afin de le placer sur la civière et l’emmener à l’hôpital. L’AI s’est approché du plaignant sur le lit, a saisi son bras gauche et a fini par lui passer les menottes sur ce bras. Le plaignant a résisté au menottage. L’AT a tenté de dégager son bras droit afin de le menotter lui aussi, mais le plaignant a refusé de sortir son bras de sous son corps. Les agents ont fini par lui menotter les deux bras derrière le dos.
Le plaignant a été escorté hors de la chambre, placé sur une civière et transporté à l’hôpital, où l’on a constaté que son coude gauche était cassé.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1) du Code criminel — Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier;
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;
d) soit en raison de ses fonctions,
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
Article 17 de la Loi sur la santé mentale — intervention de l’agent de police
17. Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :
a) soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire;
b) soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles;
c) soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même,
et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :
d) elle s’infligera des lésions corporelles graves;
e) elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne;
f) elle subira un affaiblissement physique grave,
et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.
Analyse et décision du directeur
Le 30 mai 2024, le plaignant a été grièvement blessé lors de son appréhension par des agents du SPRP. L’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête dans laquelle l’AI a été désigné comme étant l’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation de la preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation du plaignant et la blessure qu’il a subie.
En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.
Compte tenu de la façon dont se comportait le plaignant et des renseignements fournis par des membres de sa famille, les agents étaient fondés à appréhender le plaignant en vertu de l’article 17 de la Loi sur la santé mentale. Il était manifeste que le plaignant souffrait d’un trouble mental et n’était pas en mesure de s’occuper de lui-même à ce moment-là.
Je suis également convaincu que l’AI n’a utilisé que la force nécessaire pour placer le plaignant en garde à vue, sans plus. Le plaignant n’a pas agressé les agents, mais il a résisté physiquement à leurs efforts pour lui passer les menottes. Les agents ont seulement décidé de menotter le plaignant après que les agents et les ambulanciers paramédicaux aient tenté, pendant une longue période, de convaincre le plaignant de sortir de son lit. Bien que l’AI ait réussi à passer les menottes au bras gauche du plaignant, le plaignant s’est débattu contre les efforts des agents pour lui menotter le bras droit. Il semblerait effectivement que la fracture se soit produite au cours de la lutte qui s’est ensuivie après le menottage du bras gauche, jusqu’à ce que les deux bras soient menottés derrière son dos. Cependant, cette blessure n’est pas le résultat d’une force excessive de la part de l’AI, mais plutôt le malheureux résultat de forces opposées exercées au cours d’une situation dynamique. Aucun coup n’a été porté.
Pour les motifs qui précèdent, j’en conclus qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.
Date : 23 octobre 2024
Approuvé électroniquement par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) Sauf indication contraire, les renseignements fournis dans cette section reflètent les renseignements fournis à l’UES au moment de la notification. Ils ne reflètent pas nécessairement les faits constatés par l’UES dans le cadre de son enquête. [Retour au texte]
- 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
- 3) NdT: Tous les dialogues sont des traductions. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.