Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-TCI-368
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)
En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :- de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
- de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.
En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- le nom de tout agent impliqué;
- le nom de tout agent témoin;
- le nom de tout témoin civil;
- les renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)
En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables.Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.Exercice du mandat
La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 25 ans pendant son arrestation le 19 décembre 2017.Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 25 ans pendant son arrestation le 19 décembre 2017.Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 25 ans pendant son arrestation le 19 décembre 2017.
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 25 ans pendant son arrestation le 19 décembre 2017.Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 25 ans pendant son arrestation le 19 décembre 2017.Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 25 ans pendant son arrestation le 19 décembre 2017.
L’enquête
Notification de l’UES
À 17 h 8 environ, le 19 décembre 2017, le Service de police de Toronto (SPT) a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant, âgé de 25 ans, alors qu’il était sous garde.Le SPT a fait savoir que le 19 décembre 2017, à 17 h approximativement, des membres de l’Unité de soutien mobile (USM) et de l’escouade antivol tentaient d’appréhender deux suspects dans une affaire de vol de banque. L’un des suspects a été arrêté sans incident à l’intersection des chemins Fairview et Hanson dans la ville de Mississauga. L’autre suspect [que l’on sait maintenant être le plaignant], qui conduisait une berline Mercedes de couleur argentée, a été poursuivi par la police alors qu’il se dirigeait vers le nord sur la rue Hurontario. Après un certain temps, plusieurs voitures de police banalisées ont encerclé la Mercedes du plaignant, forçant celui-ci à s’arrêter.
Le plaignant est sorti de la Mercedes et a tenté de fuir la police à pied. Pendant la poursuite à pied, le plaignant a brandi une arme à feu. L’un des agents en poursuite a tiré avec son arme à feu vers le plaignant, mais ne l’a pas atteint. Le plaignant s’est ensuite rendu à la police. On a déterminé que le plaignant avait subi une blessure au pied; il a ainsi été transporté à l’hôpital pour recevoir des traitements.
L’équipe
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 6 Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
Vers 18 h 24 le 19 décembre 2017, les enquêteurs et le spécialiste des sciences judiciaires de l’UES se sont présentés sur les lieux.
Les lieux en entier ont été photographiés et documentés au moyen d’une station totale Leica. Une tempête se déplaçant rapidement a provoqué une chute de neige importante sur les lieux; beaucoup de neige s’y est donc accumulée en très peu de temps, changeant immédiatement toute la dynamique de l’endroit. De plus, le lieu de l’accident même et les voitures ont été photographiés, et des éléments de preuve ont été saisis sur place, puis examinés.
Le 20 décembre 2017, à 11 h, on a demandé au spécialiste des sciences judiciaires de l’Unité de revenir sur les lieux pour tenter de trouver des douilles. On a informé le spécialiste qu’un membre de l’escouade antivol du SPT avait tiré deux fois en direction du plaignant; de même, à 13 h 20, le spécialiste s’est rendu au commissariat d’une division du SPT pour y prendre une arme de service du SPT. Cette arme a été remise à l’enquêteur par des membres du Bureau des normes professionnelles du SPT.
À 13 h 56, le spécialiste des sciences judiciaires est retourné sur les lieux pour chercher les douilles utilisées provenant de l’arme à feu du SPT. Encore une fois, il a ratissé l’endroit en entier, mais sans succès.
Plaignant :
Homme de 25 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinésTémoin civil (TC)
TC no 1 A participé à une entrevue Agents témoins (AT)
AT no 1 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinéesAT no 2 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 3 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 4 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 5 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 6 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 7 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 8 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
Agents impliqués (AI)
AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliquéAI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué
Ni l’un ni l’autre des agents impliqués n’a répondu aux demandes d’entrevue de l’UES.
Description de l’incident
Le 19 décembre 2017, l’USM du SPT et l’escouade antivol ont suivi deux suspects dans une affaire de vol à main armée jusqu’à une adresse située dans le secteur des chemins Fairview et Hanson, dans la ville de Mississauga. On croyait que les deux suspects – qu’on estimait pouvoir être armés – se trouvaient dans le stationnement intérieur d’un immeuble d’habitation de grande hauteur à cet emplacement. On savait que les deux suspects, le plaignant et un autre homme, étaient associés à une Mercedes argent et une BMW bleue.
Les membres de l’USM se sont placés à l’extérieur du stationnement pour attendre que les suspects en sortent, à bord d’une voiture ou à pied. L’Équipe d’intervention d’urgence (EIU) avait été avisée et était prête à intervenir, puisque le SPT savait que ces deux suspects, s’ils avaient bien commis les vols dont ils étaient soupçonnés, avaient utilisé des armes à feu pour ce faire et qu’ils pouvaient toujours être armés, et donc dangereux.
À 16 h 10 environ, deux voitures ont été aperçues sortant du stationnement intérieur, dont l’une était la Mercedes argent conduite par le plaignant; l’AI no 1 a donné le signal de coincer les voitures et d’arrêter les conducteurs.
On a intercepté la deuxième voiture et arrêté le suspect qui la conduisait; le plaignant, pour sa part, a tenté de fuir. Pendant la poursuite policière, cinq voitures de police banalisées différentes ont heurté la voiture du plaignant pour tenter de l’arrêter. Le plaignant est ensuite sorti de sa voiture et a tenté de fuir à pied, et certains agents de police l’ont poursuivi.
À un certain moment, on a vu le plaignant sortir une arme à feu qu’il portait sur lui, et l’AI no 1 a tiré deux fois en direction du plaignant, sans toutefois l’atteindre. Le plaignant a ensuite jeté son arme à feu dans un plan d’eau et a continué de courir, mais a été appréhendé rapidement.
Au moment de son arrestation, le plaignant a indiqué qu’il était blessé, et on l’a transporté à l’hôpital.
Nature des blessures/traitement
Le plaignant a subi une fracture dorso-latérale au pied gauche et une dislocation des deuxième à cinquième os cunéiformes (notamment les os médial et latéral) du pied, ce qui a nécessité une intervention chirurgicale; des fils et des vis ont été utilisés pour réparer la fracture.
Le plaignant a également subi une fracture de l’os nasal gauche; on a placé une attelle nasale, qui devait être enlevée une semaine plus tard.
Les membres de l’USM se sont placés à l’extérieur du stationnement pour attendre que les suspects en sortent, à bord d’une voiture ou à pied. L’Équipe d’intervention d’urgence (EIU) avait été avisée et était prête à intervenir, puisque le SPT savait que ces deux suspects, s’ils avaient bien commis les vols dont ils étaient soupçonnés, avaient utilisé des armes à feu pour ce faire et qu’ils pouvaient toujours être armés, et donc dangereux.
À 16 h 10 environ, deux voitures ont été aperçues sortant du stationnement intérieur, dont l’une était la Mercedes argent conduite par le plaignant; l’AI no 1 a donné le signal de coincer les voitures et d’arrêter les conducteurs.
On a intercepté la deuxième voiture et arrêté le suspect qui la conduisait; le plaignant, pour sa part, a tenté de fuir. Pendant la poursuite policière, cinq voitures de police banalisées différentes ont heurté la voiture du plaignant pour tenter de l’arrêter. Le plaignant est ensuite sorti de sa voiture et a tenté de fuir à pied, et certains agents de police l’ont poursuivi.
À un certain moment, on a vu le plaignant sortir une arme à feu qu’il portait sur lui, et l’AI no 1 a tiré deux fois en direction du plaignant, sans toutefois l’atteindre. Le plaignant a ensuite jeté son arme à feu dans un plan d’eau et a continué de courir, mais a été appréhendé rapidement.
Au moment de son arrestation, le plaignant a indiqué qu’il était blessé, et on l’a transporté à l’hôpital.
Nature des blessures/traitement
Le plaignant a subi une fracture dorso-latérale au pied gauche et une dislocation des deuxième à cinquième os cunéiformes (notamment les os médial et latéral) du pied, ce qui a nécessité une intervention chirurgicale; des fils et des vis ont été utilisés pour réparer la fracture.
Le plaignant a également subi une fracture de l’os nasal gauche; on a placé une attelle nasale, qui devait être enlevée une semaine plus tard.
Éléments de preuve
Les lieux
L’incident s’est produit sur les voies en direction nord de la rue Hurontario, sur le viaduc passant au-dessus du chemin Rathburn, dans la ville de Mississauga; il s’agit de l’endroit où de multiples voitures ont été impliquées dans une collision. Le véhicule no [maintenant désigné comme étant la voiture du plaignant] est une voiture Mercedes 2011 de couleur argent, qui était orientée vers le sud-est dans la voie du centre. Il y avait, un peu partout sur le véhicule, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Le véhicule no 2 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Volkswagen 2016 grise qui était orientée vers le nord, très près du côté passager du véhicule no 1. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Le véhicule no 3 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Toyota Sienna 2017 qui était orientée vers le nord, très près du coin avant droit du véhicule no 1. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Le véhicule no 4 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Toyota Camry 2017 noire qui était orientée vers le nord-nord-est, très près du devant du véhicule no 1. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Le véhicule no 5 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Nissan Murano grise qui était orientée vers l’ouest et se trouvait au nord-est des autres véhicules. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Sur les voies en direction sud de la rue Hurontario, légèrement au nord du lieu de la collision, se trouve une bretelle permettant aux véhicules d’accéder à la promenade Centreview. Au bas de cette bretelle, la route se divise pour permettre aux véhicules de se rendre sur la promenade Centreview ou de prendre une autre bretelle et de continuer jusqu’à la promenade City Centre. Le long de l’extrémité sud de cette bretelle se trouve un trottoir protégé par une barrière de béton. La bretelle de sortie est divisée par des bâtons jaunes pliables. Trois de ces bâtons ont été endommagés. Du côté nord de la route se trouve un terre-plein gazonné, suivi de broussailles épaisses, puis d’une clôture. Du côté nord de la clôture se trouvent un champ et un ruisseau. Le SPT a retrouvé une arme à feu (on croit qu’il s’agit de celle du plaignant) dans ce secteur.
Le véhicule no 2 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Volkswagen 2016 grise qui était orientée vers le nord, très près du côté passager du véhicule no 1. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Le véhicule no 3 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Toyota Sienna 2017 qui était orientée vers le nord, très près du coin avant droit du véhicule no 1. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Le véhicule no 4 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Toyota Camry 2017 noire qui était orientée vers le nord-nord-est, très près du devant du véhicule no 1. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Le véhicule no 5 [véhicule de surveillance du SPT] est une voiture Nissan Murano grise qui était orientée vers l’ouest et se trouvait au nord-est des autres véhicules. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Sur les voies en direction sud de la rue Hurontario, légèrement au nord du lieu de la collision, se trouve une bretelle permettant aux véhicules d’accéder à la promenade Centreview. Au bas de cette bretelle, la route se divise pour permettre aux véhicules de se rendre sur la promenade Centreview ou de prendre une autre bretelle et de continuer jusqu’à la promenade City Centre. Le long de l’extrémité sud de cette bretelle se trouve un trottoir protégé par une barrière de béton. La bretelle de sortie est divisée par des bâtons jaunes pliables. Trois de ces bâtons ont été endommagés. Du côté nord de la route se trouve un terre-plein gazonné, suivi de broussailles épaisses, puis d’une clôture. Du côté nord de la clôture se trouvent un champ et un ruisseau. Le SPT a retrouvé une arme à feu (on croit qu’il s’agit de celle du plaignant) dans ce secteur.
L’arme à feu a été récupérée alors qu’elle était submergée dans un plan d’eau. Elle a été présentée au spécialiste des sciences judiciaires de l’UES dans un sac de plastique; elle était détrempée. Le spécialiste a photographié le sac. Compte tenu de l’état de l’arme à feu, le spécialiste a déterminé que l’on ne pourrait pas l’examiner pour vérifier si elle avait servi récemment ni tenter d’y prélever des empreintes digitales. De même, puisque le SPT avait besoin de l’arme à feu en tant qu’élément de preuve dans son enquête sur les vols à main armée, on a décidé de la remettre aux agents spécialistes des sciences judiciaires du SPT.
Au bas de la bretelle, là où se termine la barrière de béton, se trouvait le véhicule no 6 [véhicule de surveillance du SPT], une voiture Toyota Highlander 2015 de couleur brune. Ce véhicule était orienté vers l’ouest. Ce véhicule présentait, à l’avant, des dommages causés par une collision pouvant être attribués à cet incident.
Tout près de ce véhicule, sur le trottoir, se trouvait ce qui ressemblait à des taches de sang; il y avait aussi une paire de chaussures de sport et des chaussettes, que l’on croit appartenir au plaignant. On a examiné les chaussettes pour voir s’ils avaient été troués par balle, mais rien de tel n’a été relevé. Sur la chaussette gauche, il y avait du sang séché ainsi qu’une déchirure, près de l’endroit destiné à couvrir la cheville, à l’intérieur; cela ne correspondait pas à un trou qu’aurait causé une balle. Le spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a décidé que le SPT devait prendre possession des chaussures et chaussettes, le SPT ayant besoin de ces éléments de preuve pour réaliser son enquête criminelle.
Schéma des lieux
Éléments de preuves médicolégaux
Aucun élément de preuve médicolégal n’a été présenté au Centre des sciences judiciaires.Témoignage d’expert
Le 19 décembre 2017, à 17 h 59, le plaignant a été admis à l’hôpital, où on a diagnostiqué une fracture dorso-latérale au pied gauche et une dislocation des deuxième à cinquième os cunéiformes (notamment les os médial et latéral) du pied. Le plaignant a subi une intervention chirurgicale au pied; des fils et des vis ont été utilisés pour réparer la fracture.Le plaignant a également subi une fracture de l’os nasal gauche; on a placé une attelle nasale, qui devait être enlevée une semaine plus tard.
Le tomodensitogramme a confirmé que le plaignant a subi ce qui suit :
Fracture comminutive de la partie médiale de l’os naviculaire. Fracture dans le coin latéral proximal de l’os cunéiforme médial. Dislocation de l’articulation naviculaire et médiale. Dislocation de l’articulation cunéiforme médiale et intermédiaire. Fractures intra-articulaires de la deuxième et de la quatrième articulation tarso-métatarsienne avec dislocation dorso-latérale. Fracture comminutive de l’os cuboïde avec dislocation latérale de la cinquième articulation tarso-métatarsienne. De multiples petits fragments osseux dans l’articulation de Lisfranc et les articulations tarso métatarsiennes. Enflure importante des tissus mous. Tendons autour de la cheville généralement intacts.
Mécanisme de blessure
L’UES a communiqué avec un expert en médecine pour connaître son opinion au sujet du mécanisme de blessure. Le spécialiste consulté est actuellement coroner ainsi que professeur à l’Université de Toronto. Auparavant, il a assumé les fonctions de président et directeur général du Centre Sunnybrook des sciences de la santé, de coroner en chef de l’Ontario, de directeur du programme sur les traumatismes du Centre Sunnybrook, de directeur du programme des services d’urgence de la base hospitalière (ambulanciers paramédicaux) de ce même centre ainsi que de médecin et chef d’une équipe responsable des traumatismes; il est spécialiste des soins liés aux traumatismes, de même que des sciences judiciaires.
Le spécialiste a affirmé que la blessure subie par le plaignant était communément appelée blessure « de Lisfranc » et a fourni un lien vers un article médical concernant les blessures de Lisfranc « indirectes », dont les causes comprennent les collisions de véhicules à moteur, les chutes de bonne hauteur et la pratique de sports. Le mécanisme associé à une blessure de Lisfranc indirecte consiste habituellement en une force de rotation indirecte et en une charge axiale par hyperflexion sur l’avant-pied.
De plus, le spécialiste a expliqué qu’une blessure de Lisfranc « directe » pouvait être causée lorsque le pied est écrasé par une voiture ou un camion.
Selon le spécialiste, la blessure du plaignant était une fracture avec dislocation complexe nécessitant [traduction] « une force assez importante ».
Le spécialiste a affirmé que selon les caractéristiques de la blessure, il se peut que le pied du plaignant ait été écrasé par un véhicule, ou qu’il ait été coincé dans une portière de véhicule, soit une portière fermée sur le pied – partiellement sorti du véhicule – lorsque frappée par un autre véhicule en mouvement.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques
L’UES a ratissé le secteur pour recueillir des éléments de preuve sous forme d’enregistrements audio ou vidéo et de photographies; il a recueilli ce qui suit :Enregistrement du système de télévision en circuit fermé du 24, promenade Elm Ouest, Mississauga
15 h 45 min 39 s Début de l’enregistrement. La circulation en direction nord sur la rue Hurontario est plutôt fluide.16 h 9 min 50 s Une Mercedes argent [que l’on présume conduite par le plaignant] se dirigeant vers le nord traverse l’intersection de la rue Hurontario et de la promenade Elm à grande vitesse. Les feux de circulation sont verts pour les véhicules roulant en direction nord et en direction sud.
16 h 9 min 55 s Deux véhicules de couleur foncée et deux véhicules gris passent par la même intersection en direction nord, à grande vitesse. Les feux de circulation sont verts.
16 h 10 min 13 s Une camionnette noire traverse l’intersection, à grande vitesse.
16 h 11 min 5 s Trois véhicules utilitaires sport (VUS) noirs banalisés approchent de l’intersection avec leurs feux d’avertissement activés. Les feux de circulation sont rouges pour les véhicules roulant en direction nord et en direction sud. Les véhicules ralentissent à l’approche de l’intersection et poursuivent leur route vers le nord en passant par l’intersection sur un feu rouge, tout en s’assurant que les véhicules qui arrivent les laissent passer.
16 h 11 min 30 s Une berline grise banalisée, dont la lumière du tableau de bord est activée, ainsi qu’un VUS gris approchent de l’intersection. Les feux de circulation sont encore rouges pour les véhicules roulant en direction nord et en direction sud. Les véhicules ralentissent à l’approche de l’intersection et poursuivent leur route vers le nord en passant par l’intersection sur un feu rouge, tout en s’assurant que les véhicules qui arrivent les laissent passer. Une voiture de police identifiée et une ambulance suivent immédiatement les véhicules banalisés. Les feux d’urgence des deux véhicules sont activés tandis qu’ils traversent l’intersection en direction nord.
16 h 11 min 39 s La berline grise fait demi-tour à l’intersection pour permettre au VUS gris, à la voiture de police identifiée et à l’ambulance de passer. La berline grise suit ensuite l’ambulance en direction nord.
16 h 40 min 30 s Fin de l’enregistrement.
Enregistrement du système de télévision en circuit fermé d’un immeuble d’habitation situé au 3650, croissant Kaneff, Mississauga
Cet enregistrement n’a pas valeur de preuve et n’a pas fait avancer l’enquête.Enregistrement du système de télévision en circuit fermé de l’autobus 2590 de GO Transit
L’enregistrement débute à 16 h. À 16 h 18 min 53 s, l’autobus 2590 de GO Transit roulait en direction nord sur la rue Hurontario, à la hauteur de la route Rathburn, lorsqu’il est passé près de l’endroit où avait eu lieu une collision impliquant de multiples véhicules. Une berline grise était orientée vers le sud-est dans la voie en direction nord du viaduc de la rue Hurontario. Une Mercedes argent était également orientée vers le sud-est. Une fourgonnette grise et une berline foncée étaient en contact avec le côté passager de la Mercedes agent, et une berline foncée était en contact avec le devant de la Mercedes. La portière du côté conducteur de la Mercedes était ouverte. Un VUS gris était orienté vers l’ouest, non loin au nord de la Mercedes interceptée et à l’écart de la collision. Deux voitures de police de couleur foncée étaient immobiles dans la voie en direction sud de la rue Hurontario. L’enregistrement prend fin à 16 h 19 min 59 s.Enregistrement du système de télévision en circuit fermé de l’autobus urbain 8158
Cet enregistrement n’a pas valeur de preuve et n’a pas fait avancer l’enquête.Enregistrements de communications
L’enregistrement lié à l’incident du 19 décembre 2017 a été examiné. Il ne comportait pas d’horodatage. En voici un résumé :Un agent de l’Unité canine a signalé que l’on avait mené l’opération visant à intercepter les véhicules des suspects et que deux personnes avaient été mises en état d’arrestation; il a indiqué qu’il resterait sur les lieux pendant un certain temps.
Un agent de police a indiqué au répartiteur que l’une des personnes arrêtées [depuis désignée comme étant le plaignant] serait emmenée à l’hôpital. Le plaignant devait être transporté par ambulance et escorté par un agent de police. L’agent allait suivre l’ambulance jusqu’à l’hôpital.
Un agent de l’EIU a signalé que l’on plaçait la personne [depuis désignée comme étant le plaignant] à bord d’une ambulance pour la conduire à l’hôpital.
Un autre agent de police a indiqué que tout agent en uniforme pouvait monter dans l’ambulance avec le plaignant. Les agents ont alors convenu que n’importe lequel des agents de la Police régionale de Peel n’étant pas concerné par l’incident pouvait escorter le plaignant dans l’ambulance. On a demandé au répartiteur de l’EIU d’indiquer à un supérieur que deux personnes avaient été arrêtées et qu’une arme de poing avait été récupérée. On a ajouté que des coups de feu avaient été tirés, mais qu’aucun membre de l’EIU ne l’avait fait, et qu’il fallait aviser l’UES.
Éléments obtenus auprès du Service de police
Sur demande, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants du SPT, et les a examinés : - rapports sur les détails de l’événement (3);
- rapport sur les coups de feu tirés;
- rapport d’incident général;
- rapport de surveillance de l’USM;
- notes des AT nos 1 à 8;
- arme à feu de la police recueillie;
- procédure : usage de la force;
- procédure : poursuites visant l’appréhension de suspects;
- photos des lieux prises par le SPT;
- résumé des conversations;
- dossiers de formation des deux AI.
L’UES a obtenu les documents et éléments suivants d’autres sources, et les a examinés :
- dossier médical du plaignant en ce qui a trait à cet incident;
- enregistrement du système de télévision en circuit fermé de l’autobus urbain;
- enregistrement du système de télévision en circuit fermé de l’autobus de GO Transit;
- enregistrement du système de télévision en circuit fermé de l’immeuble situé au 3650, croissant Kaneff, Mississauga;
- enregistrement du système de télévision en circuit fermé du 24, promenade Elm Ouest, Mississauga.
Dispositions législatives pertinentes
Articles 1 à 3 du Règlement de l’Ontario 266/10 (intitulé « Poursuites visant l’appréhension de suspects ») pris en vertu de la Loi sur les services policiers de l’Ontario
1. (1) Pour l’application du présent règlement, une poursuite visant l’appréhension de suspects a lieu lorsqu’un agent de police tente d’ordonner au conducteur d’un véhicule automobile de s’immobiliser, que le conducteur refuse d’obtempérer et que l’agent poursuit, en véhicule automobile, le véhicule en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule(2) La poursuite visant l’appréhension de suspects est interrompue lorsque les agents de police ne poursuivent plus un véhicule automobile en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule.
2. (1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :
a) soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues dans la procédure écrite, selon le cas :
b) soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule
a) du corps de police de l’agent, établie en application du paragraphe 6 (1), si l’agent est membre d’un corps de police de l’Ontario au sens de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.
b) d’un corps de police dont le commandant local a été avisé de la nomination de l’agent en vertu du paragraphe 6 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie II de cette loi
c) du corps de police local du commandant local qui a nommé l’agent en vertu du paragraphe 15 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie III de cette loi
(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier.
(5) Nul agent de police ne doit amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle si l’identité d’un particulier à bord du véhicule automobile en fuite est connue.
(6) L’agent de police qui entreprend une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle interrompt la poursuite une fois que le véhicule automobile en fuite ou le particulier à bord du véhicule est identifié.
3. (1) Un agent de police avise un répartiteur lorsqu’il amorce une poursuite visant l’appréhension de suspects
(2) Le répartiteur avise un surveillant des communications ou un surveillant de la circulation, s’il y en a un de disponible, qu’une poursuite visant l’appréhension de suspects a été amorcée.
Paragraphe 91(1) du Code criminel -- Possession non autorisée d’une arme à feu
91 (1) Sous réserve du paragraphe (4), commet une infraction quiconque a en sa possession une arme à feu prohibée, une arme à feu à autorisation restreinte ou une arme à feu sans restriction sans être titulaire :a) d’une part, d’un permis qui l’y autorise;(2) Sous réserve du paragraphe (4), commet une infraction quiconque a en sa possession une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte, un dispositif prohibé — autre qu’une réplique — ou des munitions prohibées sans être titulaire d’un permis qui l’y autorise.
b) d’autre part, s’agissant d’une arme à feu prohibée ou d’une arme à feu à autorisation restreinte, du certificat d’enregistrement de cette arme.
(3) Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) ou (2) est coupable :
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans;
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Article 95 du Code criminel – Possession d’une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec des munitions
95(1) Sous réserve du paragraphe (3), commet une infraction quiconque a en sa possession dans un lieu quelconque soit une arme à feu prohibée ou une arme à feu à autorisation restreinte chargées, soit une telle arme non chargée avec des munitions facilement accessibles qui peuvent être utilisées avec celle ci, sans être titulaire à la fois :
a) d’une autorisation ou d’un permis qui l’y autorise dans ce lieu;b) du certificat d’enregistrement de l’arme.
(2) Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) est coupable :
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans;b) soit d’une infraction punissable, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’un emprisonnement maximal de un an.
Articles 219 et 221, Code criminel -- Négligence criminelle causant des lésions corporelles
219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :a) soit en faisant quelque chose;(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
221 Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.
Article 249 du Code criminel -- Conduite dangereuse
249 (1) Commet une infraction quiconque conduit, selon le cas :a) un véhicule à moteur d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu;
(3) Quiconque commet une infraction mentionnée au paragraphe (1) et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans.
Paragraphe 343 du Code criminel -- Vol qualifié et extorsion
343 Commet un vol qualifié quiconque, selon le cas :a) vole et, pour extorquer la chose volée ou empêcher ou maîtriser toute résistance au vol, emploie la violence ou des menaces de violence contre une personne ou des biens;
b) vole quelqu’un et, au moment où il vole, ou immédiatement avant ou après, blesse, bat ou frappe cette personne ou se porte à des actes de violence contre elle;
c) se livre à des voies de fait sur une personne avec l’intention de la voler;
d) vole une personne alors qu’il est muni d’une arme offensive ou d’une imitation d’une telle arme.
Paragraphe 344 du Code criminel -- Peine
344 (1) Quiconque commet un vol qualifié est coupable d’un acte criminel passible :
a) s’il y a usage d’une arme à feu à autorisation restreinte ou d’une arme à feu prohibée lors de la perpétration de l’infraction, ou s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction et que celle-ci est perpétrée au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou en association avec elle, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant :(i) de cinq ans, dans le cas d’une première infraction,(ii) de sept ans, en cas de récidive;a.1) dans les autres cas où il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans;b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.
Analyse et décision du directeur
Le 17 novembre 2017, à la succursale de la Banque Scotia sur la route Ellesmere, dans la ville de Toronto, un vol à main armée a été commis, pendant lequel l’un des voleurs a tiré un coup de feu. Grâce à son enquête et à un enregistrement vidéo de grande qualité montrant le vol, le SPT avait des motifs raisonnables de croire que le plaignant était l’un des voleurs impliqués et qu’il conduisait une Mercedes 2012 de couleur argent, dont on avait relevé le numéro d’immatriculation.
Le 19 décembre 2017, l’USM et l’escouade antivol du SPT avaient des motifs raisonnables de croire que le plaignant et son complice se trouvaient dans le stationnement intérieur d’un immeuble d’habitation de grande hauteur situé sur la route Hanson, dans la ville de Mississauga. Les membres de l’USM se sont rendus à cet immeuble à 12 h 30 et ont commencé à le surveiller, espérant apercevoir le plaignant.
Il y avait, dans le secteur de l’immeuble où l’on soupçonnait que le plaignant se trouvait, l’USM, l’EIU du SPT et des agents de l’unité tactique de la Police régionale de Peel. Les membres de l’USM s’étaient placés à divers endroits dans la rue et dans le stationnement intérieur.
À 16 h 10, les agents ont vu une Mercedes blanche quitter le stationnement, suivie de la Mercedes argent connue, conduite par le plaignant. À 16 h 12, une fois les deux véhicules, que l’on croyait conduits par les deux suspects du vol à main armée, sortis du stationnement, l’AI no 1 a donné le signal d’intercepter les conducteurs et de les arrêter; l’on jugeait que l’arrestation de ces deux personnes présentait un risque élevé en raison de la présence possible d’armes à feu. Les deux véhicules ont ensuite été aperçus se dirigeant vers le nord, sur la route Hanson.
Selon le plan qui avait été établi, lorsque le plaignant quitterait le stationnement, les agents de police devaient tenter d’immobiliser son véhicule le plus rapidement possible en entrant en collision avec celui-ci.
Pendant la tentative de mise en arrestation du plaignant, cinq voitures de police banalisées ont heurté la Mercedes de celui-ci. Ensuite, une poursuite à pied a eu lieu, soit après que le plaignant eut abandonné sa voiture, tenant de prendre la fuite à pied. Deux coups de feu ont été tirés en direction du plaignant, qui a ensuite grimpé par-dessus une barrière de béton d’une hauteur d’environ 1,2 mètre (4 pieds) se trouvant aux environs de la bretelle menant de la rue Hurontario au chemin Rathburn. De même, lors de l’arrestation du plaignant, un agent de police a donné un coup de poing à celui-ci. Plus tard, le plaignant a été emmené à l’hôpital, où l’on a établi qu’il avait subi une blessure au pied, ce dernier ayant été écrasé, ainsi qu’une fracture du nez.
Pendant l’enquête, un seul témoin civil, outre le plaignant, s’est présenté pour participer à une entrevue. Les déclarations de ce témoin portaient principalement sur la poursuite de la voiture du plaignant, qui n’est pas contestée.
Dans sa version des faits, le plaignant a indiqué qu’alors qu’il sortait du stationnement intérieur à bord de la Mercedes argent, une fourgonnette a percuté son véhicule de plein fouet, et que peu après, une deuxième fourgonnette a heurté sa Mercedes, du côté conducteur, la poussant sur un terre-plein gazonné, qu’il a ensuite traversé parce qu’il avait peur et qu’il ne savait pas que les véhicules qui l’avaient heurté étaient des véhicules de police, se demandant également si les conducteurs tentaient de le tuer. Le plaignant a ajouté que tandis qu’il s’éloignait, tournant à droite sur la route Hanson, puis à gauche sur la route Fairview Ouest, il a vu plusieurs voitures s’approchant rapidement derrière lui, précisant que certaines d’entre elles ont percuté la sienne à divers moments. Le plaignant a ensuite tourné à gauche sur la rue Hurontario, en direction nord. Il a vu une voiture à sa gauche, qui a frappé sa Mercedes près du devant et l’a poussée au milieu de la circulation. Puis, lorsque le plaignant s’est retrouvé du mauvais côté du terre-plein central, un autre véhicule est arrivé et a frappé sa Mercedes, après quoi le plaignant a pu revenir dans le bon sens de la circulation; une autre voiture a alors heurté la sienne, du côté droit, et le coussin gonflable de ce côté s’est déployé. Le plaignant a ensuite donné un grand coup de frein, amenant l’une des fourgonnettes à frapper quelque chose qui se trouvait devant lui.
Le plaignant a estimé qu’il roulait à environ 70 km/h et a indiqué que la circulation était dense. Lorsque le plaignant a vu une ouverture, il s’est faufilé devant les véhicules qui le poursuivaient. Il a affirmé qu’il pensait qu’il allait mourir et qu’il a donc continué d’appuyer sur l’accélérateur, tandis que d’autres véhicules heurtaient continuellement le sien. Le plaignant a déclaré qu’il a ensuite vu au moins trois véhicules tenter de le bloquer, après quoi il n’était plus en mesure de manœuvrer la Mercedes. Le plaignant se rappelait qu’à ce moment, il se trouvait sur une route à partir de laquelle, en tournant à gauche, on peut atteindre la route Kennedy, puis l’autoroute 410 en direction sud. Lorsque le plaignant a tenté de sortir de la Mercedes, un autre véhicule a foncé dans sa portière du côté conducteur, puis un deuxième véhicule a frappé le coffre, propulsant le plaignant vers l’avant.
Je dois admettre que lorsque j’ai entendu pour la première fois la version des événements du plaignant, j’ai eu du mal à y croire. Toutefois, les éléments de preuve matériels et ceux tirés des témoignages des policiers correspondent effectivement à sa version des faits, c’est-à-dire qu’au moins cinq véhicules de police banalisés ont heurté la voiture du plaignant une fois celui-ci sorti du stationnement intérieur, le tout à l’heure de pointe et dans une circulation dense, un jour de semaine, entre 16 h 10 et 16 h 15 environ, dans un secteur relativement achalandé de Mississauga.
Afin qu’il soit possible de bien comprendre la séquence des événements, je dois préciser quel agent conduisait quel véhicule pendant que l’on tentait d’immobiliser et d’arrêter le plaignant :
L’AT no 2, dans sa déclaration aux enquêteurs de l’UES, a indiqué qu’il se trouvait au nord de l’entrée menant au stationnement intérieur et qu’il avait pour tâche de heurter le côté passager de la Mercedes argent si celle-ci venait dans sa direction. Après avoir entendu, par la radio de la police, qu’une Mercedes blanche et une Mercedes argent étaient sorties du stationnement, il a vu ces véhicules se rendre au bout de la route Hanson.
L’AT no 3 a indiqué que la Mercedes argent est passée à côté de lui et qu’il a heurté le côté conducteur de celle-ci à une vitesse de 15 à 20 km/h environ, mais que la Mercedes a poursuivi son chemin.
L’AT no 2 a fait savoir qu’il y avait un véhicule de police devant la Mercedes argent, un deuxième véhicule du côté passager de celle-ci et un troisième derrière. Les agents de police ont tenté d’encercler la Mercedes du plaignant au moyen de leurs véhicules, mais n’ont pas réussi.
L’AT no 3 a ensuite vu un autre véhicule de police banalisé frapper la voiture du plaignant, la poussant sur le terrain d’une résidence; par la suite, le plaignant a poursuivi son chemin, d’abord vers l’est, puis vers le nord, sur la rue Hurontario, à grande vitesse, après avoir traversé l’intersection au feu rouge sans s’arrêter.
À l’intersection de la route Burnhamthorpe et de la rue Hurontario, on a effectué une deuxième tentative d’interception de la voiture du plaignant. L’AT no 2 a déclaré que plusieurs véhicules de l’USM ont heurté la Mercedes argent à la hauteur de la route Burnhamthorpe et qu’après avoir été frappée par derrière par l’un des véhicules de police banalisés, la voiture a roulé lentement vers l’ouest. L’AT no 2 a ensuite entrepris de rejoindre la Mercedes pour bloquer la portière du côté conducteur et empêcher le plaignant de sortir de la voiture. Tandis qu’il s’approchait, l’AT no 2 a remarqué que cette portière commençait à s’ouvrir, et il a donc dirigé son véhicule contre celle-ci.
L’AT no 3 a également été témoin de la scène : il a expliqué que le plaignant a ouvert la portière du côté conducteur et que, soudainement, un véhicule de police banalisé a foncé dans celle-ci, qui s’est alors refermée brusquement.
On a ensuite vu le plaignant changer de voie et partir rapidement vers le nord en empruntant les voies en direction sud de la rue Hurontario, suivi de l’AT no 2. L’AT no 2 a indiqué que le plaignant est retourné dans les bonnes voies de circulation aux environs de la promenade Robert Speck, et qu’il avait fait de même.
À l’intersection de la route Rathburn et de la rue Hurontario, l’AI no 1 a procédé à la manœuvre d’interception finale, heurtant le véhicule du plaignant de derrière et le faisant tourner sur lui-même; le véhicule s’est retrouvé orienté vers le sud dans les voies en direction nord. Plusieurs véhicules de l’USM se sont alors dirigés vers la Mercedes pour la coincer; l’AT no 1 a percuté le côté passager de la voiture du plaignant, l’AT no 3 l’a percutée de derrière et l’AI no 2 l’a également heurtée du côté passager.
À leur arrivée sur les lieux, les enquêteurs de l’UES ont vu trois véhicules qui étaient directement en contact avec la Mercedes du plaignant, tandis que la Toyota Highlander conduite par l’AI no 1 se trouvait un peu plus loin, où elle s’était arrêtée après avoir heurté la Mercedes et l’avoir poussée vers l’avant. Les trois autres véhicules qui étaient toujours en contact direct avec la Mercedes étaient : la Volkswagen Jetta grise, conduite par l’AT no 3, la fourgonnette de marque Toyota Sienna – dont les coussins gonflables étaient déployés –, conduite par l’AI no 2, et la Toyota Camry noire, conduite par l’AT no 1.
Le plaignant a affirmé qu’une fois qu’il lui est devenu impossible de conduire sa Mercedes, il est sorti par la portière du côté conducteur et a fui en courant. Tandis qu’il courait, le plaignant a regardé à sa droite et a vu une fourgonnette qui s’approchait rapidement de lui; il s’est déplacé pour l’éviter. Peu après, il a vu une autre fourgonnette s’approcher de lui – il croit que les deux roues du côté conducteur ont écrasé son pied gauche.
L’AT no 2 a indiqué qu’après que la Mercedes eut été coincée, il a contourné les voitures arrêtées et a vu le plaignant traverser, en courant, les voies du côté sud et se diriger vers le nord-ouest. L’AT no 2 a ensuite dirigé son véhicule par-dessus le terre-plein central de la rue Hurontario et traversé trois voies pour dépasser le plaignant. Il a affirmé qu’il a bloqué le chemin au plaignant, en haut de la bretelle, au moyen de son véhicule pour l’empêcher de poursuivre sa course et que le plaignant a couru droit dans celui-ci, se heurtant contre le véhicule du côté passager. L’AT no 2 croit que cela pourrait être la cause de la blessure du plaignant. Je souligne par ailleurs que contrairement aux affirmations du plaignant, l’AT no 2 conduisait un VUS gris et non une fourgonnette.
L’AT no 8, comme l’AT no 2, a ensuite traversé le terre-plein central et a emprunté les voies allant vers le sud dans la direction vers laquelle le plaignant courait.
L’AT no 2 est ensuite sorti de son véhicule avec sa carabine C-8 et a poursuivi le plaignant à pied, descendant ainsi la bretelle menant à la route Rathburn Ouest. L’AT no 2 se trouvait 6 à 9 mètres (20 à 30 pieds) environ derrière le plaignant; il a affirmé que celui-ci semblait courir normalement et que rien ne portait à croire qu’il était blessé au pied.
L’AT no 8 a indiqué que lorsque le plaignant descendait la bretelle en courant, avec l’AI no 1 et l’AT no 2 à sa poursuite, il l’a vu sortir la main droite de son manteau, puis tourner son épaule droite vers l’AI no 1 et l’AT no 2. L’AT no 8 a dit croire qu’à ce moment, le plaignant a lancé une arme à feu par-dessus une clôture.
L’AI no 1 a refusé de fournir une déclaration; néanmoins, l’AT no 1 a indiqué que l’AI no 1 lui avait dit, après coup, que le plaignant avait sorti une arme à feu pendant la poursuite à pied et l’avait jetée par-dessus une clôture.
L’AT no 3 a fait savoir qu’il a vu le plaignant jeter une arme à feu en direction nord vers un ruisseau et qu’au même moment, il a entendu deux coups de feu, qu’il croyait provenir de l’arme de AI no 1; le plaignant, pour sa part, a continué de courir.
L’AT no 3 a également indiqué qu’une fois que le plaignant a atteint le bas de la bretelle, il s’est arrêté et, incapable de se tenir debout sur ses deux pieds, a roulé par-dessus la barrière de béton.
À 17 h 7, l’AT no 4 a trouvé un revolver noir, dont la chambre contenait deux balles, submergé dans l’eau. L’arme à feu a été photographiée sur les lieux, puis saisie et examinée.
L’AT no 8 a indiqué qu’une fois que le plaignant est arrivé au bas de la bretelle, il s’est retourné pour faire face au véhicule de l’AT no 8, puis a roulé par-dessus une barrière de béton séparant la bretelle de la route Rathburn. L’AT no 8 a fait savoir que le plaignant est passé par-dessus la barrière, les pieds en premier, puis qu’il s’est retrouvé de 1,2 à 1,5 mètre (4 à 5 pieds) plus bas, environ, sur la route Rathburn. Il a ajouté que le plaignant n’a pas bougé de l’endroit où il était tombé, et qu’à son arrivée, l’AI no 1 était déjà sur le plaignant, aidé de l’AT no 2 et de l’AT no 1.
Dans sa version des faits, le plaignant a indiqué qu’il a été jeté au sol, mais qu’il n’a pas vu par qui, et qu’il s’est retrouvé couché sur le ventre. Il a ajouté qu’ensuite, il a été jeté par-dessus une barrière de béton d’une hauteur de 1,2 mètre (4 pieds), mais qu’il n’a pu déterminer qui l’avait fait.
L’AT no 1 a indiqué qu’une fois que le plaignant est sorti de son véhicule, il a été poursuivi à pied par l’AI no 1 et l’AT no 2, ajoutant qu’il suivait derrière. L’AT no 1 a fait savoir que lorsque le plaignant est arrivé au bas de la bretelle, il a ralenti et s’est balancé par-dessus la barrière de béton, après quoi l’AT no 1 a vu l’AI no 1 et l’AT no 2 l’ont rejoint et l’ont mis en état d’arrestation. Quelques secondes plus tard, l’AT no 1 est arrivé sur les lieux de l’arrestation, suivi de l’AI no 2 et de l’AT no 8, qui étaient dans un véhicule de police banalisé.
L’AT no 2 a affirmé qu’il a vu le plaignant commencer à grimper par-dessus la barrière en s’aidant de son bras droit, puis de sa jambe droite, et qu’il est ensuite tombé sur le sol. L’AT no 2 croyait à ce moment que le plaignant s’était effondré.
Le plaignant a indiqué qu’il a alors vu cinq ou six agents de police de race blanche, vêtus en civil et portant de l’équipement tactique noir et gris. Le plaignant a affirmé qu’il a dit aux agents que son pied était cassé, mais qu’on lui a répondu [traduction] « ferme-la, sinon on va te casser la jambe », puis qu’un agent a agrippé sa jambe et serré son pied.
Selon le plaignant, à un certain moment, un agent lui a donné un coup de poing au visage; il a indiqué qu’après cela, il a placé ses mains devant son visage et crié [traduction] « J’arrête. Je ne savais pas que c’était la police. J’arrête! » Il a ajouté que lorsqu’il a retiré ses mains du devant de son visage, il a senti que son nez était cassé; à son avis, cela était attribuable au coup de poing du policier. De même, le plaignant a indiqué qu’un des agents lui a ensuite cogné le dos de la tête contre le sol.
L’AT no 8 a déclaré qu’il a vu l’AT no 1 retenir les jambes du plaignant pour l’empêcher de donner des coups de pieds, tandis que l’AT no 8 maîtrisait le haut du corps de celui-ci. L’AT no 8 a ordonné au plaignant de cesser de résister et de montrer ses mains; toutefois, puisque le plaignant n’avait pas répondu, l’AT no 8 lui a donné, de la main droite, un coup de poing sur le dessus de la tête, de toutes ses forces. L’AT no 8 a affirmé qu’il évaluait le degré de résistance dont faisait preuve le plaignant à 10 sur une échelle de 10. Après avoir donné un coup de poing au plaignant, l’AT no 8 a ramené les bras de celui-ci derrière son dos; le plaignant a ainsi été menotté.
En ce qui a trait à la cause de ses blessures, le plaignant n’a pas affirmé croire qu’il a été blessé pendant la poursuite en véhicule, lors de laquelle cinq véhicules de police ont percuté sa voiture, à différents moments. Toutefois, il allègue que deux des pneus d’une fourgonnette ont roulé sur son pied, écrasant et blessant celui-ci. Il allègue également que pendant son arrestation, un agent de police lui a donné un coup de poing au visage, ce qui, selon lui, lui a cassé le nez. De plus, le plaignant a indiqué qu’avant son arrestation, il a été lancé par-dessus une barrière de béton de 1,2 mètre (4 pieds), et que pendant celle-ci, sa tête a été frappée contre le sol et un agent de police a attrapé sa jambe, menaçant de casser celle-ci, et serré son pied fracturé. Le plaignant n’a pas été en mesure de bien distinguer les nombreux agents ayant pris part à la poursuite et à son arrestation; il n’a donc pu désigner un agent de police en particulier comme étant responsable de ses blessures.
Même si la description qu’a donnée le plaignant de la poursuite policière et de la façon dont les véhicules ont percuté sa voiture est corroborée dans une grande mesure par ce qu’ont dit les agents de police concernés et par les éléments de preuve matériels recueillis sur les lieux, sa déclaration selon laquelle il n’a été en aucun moment en possession d’une arme à feu me fait douter de sa fiabilité, sinon de sa crédibilité; en effet, au moins trois agents de police ont clairement vu le plaignant sortir une arme qu’il portait sur lui et la jeter dans un plan d’eau en dessous de lui. De même, cette arme à feu a plus tard été trouvée et photographiée à cet endroit précis. Ainsi, si je me suis fié à la version des événements donnée par le plaignant dans les cas où elle est fortement corroborée par les éléments de preuve matériels ou les déclarations d’autres témoins, je ne peux fonder ma décision sur les déclarations non corroborées faites par le plaignant seulement.
En outre, je ne reconnais pas comme vraie l’allégation du plaignant selon laquelle les agents l’ont lancé par-dessus la barrière de béton, puisque bien des agents présents l’ont vu passer par-dessus cette barrière de son plein gré et sans l’intervention des policiers lorsqu’il tentait de s’enfuir.
Selon ce qu’a dit le plaignant, il est évident qu’il n’a pas été blessé lors de la poursuite policière ou pendant que l’on heurtait son véhicule, mais bien après qu’il eut quitté celui-ci, lorsqu’une fourgonnette a écrasé son pied avec les deux roues du côté conducteur.
Étant donné que dans ce qu’il a rapporté – et qui a été confirmé par les éléments de preuve matériels recueillis sur les lieux –, l’AT no 1 indique que l’AI no 1, l’AT no 3, l’AI no 2 et lui-même ont percuté la Mercedes du plaignant au moyen de leurs véhicules respectifs pendant la tentative d’immobilisation finale, que ces quatre véhicules étaient encore sur les lieux de la collision lorsque les enquêteurs de l’UES sont arrivés sur place et que trois de ces véhicules étaient toujours en contact avec le véhicule du plaignant, tandis que le quatrième véhicule, soit la Toyota Highlander de l’AI no 1, se trouvait tout près de l’endroit où le véhicule du plaignant s’était arrêté, il est évident qu’aucun de ces quatre agents ne peut avoir conduit le véhicule qui aurait écrasé le pied du plaignant, puisqu’ils sont tous sortis de leur véhicule pour poursuivre le plaignant à pied avant que celui-ci subisse sa blessure.
En outre, même si le plaignant a affirmé que deux fourgonnettes le poursuivaient lorsqu’il tentait de fuir en courant, et qu’il a dit avoir pu en éviter une, mais que l’autre avait écrasé son pied gauche, rien ne permet de savoir qui conduisait l’un ou l’autre de ces véhicules, puisque le plaignant n’a pas été en mesure d’indiquer la couleur ni la marque de ceux-ci. Selon ce qui a été constaté sur les lieux de la collision, seule une fourgonnette, soit la Toyota Sienna qui était conduite par l’AI no 2, semblait endommagée, en plus du VUS de grande taille, de marque Toyota Highlander, qui était conduit par l’AI no 1; ni l’un ni l’autre de ces véhicules n’aurait pu écraser le pied du plaignant, puisqu’ils sont demeurés sur les lieux de la collision finale.
Selon ce qu’on révélé les éléments de preuve, les seuls véhicules ayant poursuivi le plaignant dans la direction dans laquelle il a fui une fois à pied sont celui de l’AT no 2, un VUS gris de marque Nissan Murano [1], et celui de l’AT no 8, un VUS de couleur dorée qui ne s’est jamais approché du plaignant. Ainsi, si le pied du plaignant a effectivement été écrasé par une fourgonnette, il m’est impossible de déterminer quel véhicule – conduit par qui – pourrait être celui qui a été impliqué dans la blessure du plaignant.
De plus, il semble peu probable qu’une fourgonnette puisse avoir écrasé le pied gauche du plaignant avec la roue avant et la roue arrière du côté conducteur pendant que le plaignant courait; on pourrait croire que pour que cela soit possible, le plaignant aurait dû faire face au côté du véhicule, et non être en train de courir parallèlement au véhicule ou devant celui-ci [2].
Même si les éléments de preuve médicaux indiquent que la blessure au pied du plaignant pourrait avoir été provoquée par écrasement [3], c’est-à-dire que le pied du plaignant aurait effectivement été blessé par l’application d’une force qui a écrasé ses os, il m’est impossible, sans me livrer à des spéculations importantes à partir des éléments de preuve à ma disposition, de déterminer qui aurait pu causer cette blessure ni comment elle aurait pu survenir. En l’absence d’éléments de preuve suffisants, je n’ai aucun motif raisonnable de croire qu’un agent de police en particulier parmi les agents concernés a conduit son véhicule d’une manière qui aurait pu blesser le plaignant.
L’infraction appropriée à envisager, s’il était possible de déterminer qui était le conducteur du véhicule en cause, serait celle de conduite dangereuse causant des lésions corporelles, dont la définition a été établie par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Beatty, [2008] 1 R.C.S. 49, à savoir que la conduite doit être dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu, et qu’elle doit constituer « un écart marqué par rapport à la norme de diligence raisonnable que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé ». Cependant, en l’absence d’éléments de preuve permettant d’établir l’identité du conducteur du véhicule qui aurait écrasé le pied du plaignant, je ne dispose pas des renseignements nécessaires pour évaluer la conduite dans son ensemble et ainsi déterminer si celle-ci était dangereuse dans le contexte global de l’incident.
Bien que le seul témoin civil ayant vu la poursuite policière ait aperçu deux camionnettes et quatre berlines traverser une intersection, au feu rouge, à la poursuite du véhicule du plaignant, klaxonnant pour alerter les autres automobilistes, aucun élément de preuve n’indique que ce groupe de six véhicules comprenait la fourgonnette qui aurait écrasé le pied du plaignant.
En outre, étant donné qu’aucun des véhicules banalisés n’avait de GPS, de système de localisation automatique de véhicules ou de système de caméra à bord, il n’y a aucun élément de preuve pouvant montrer la vitesse à laquelle roulaient les véhicules de police impliqués dans la poursuite. Le plaignant a estimé sa propre vitesse à 70 km/h alors qu’il fuyait la police. Cependant, il semble qu’il y ait que peu d’éléments de preuve selon lesquels les véhicules de police auraient roulé à une vitesse excessive; il en serait ainsi même si je pouvais cerner la fourgonnette que l’on présume avoir écrasé le pied du plaignant parmi les véhicules en cause.
Ainsi, en l’absence d’éléments de preuve permettant d’établir l’identité du conducteur de la fourgonnette qui, selon le plaignant, a écrasé son pied, je ne suis pas convaincu qu’il existe des motifs raisonnables de croire que la blessure au pied du plaignant a été causée par la conduite dangereuse d’un policier dont l’identité n’est pas connue.
En ce qui a trait à l’allégation du plaignant selon laquelle un agent de police – dont l’identité n’a pu, encore une fois, être établie – lui aurait donné un coup de poing au visage, lui cassant ainsi le nez, je suis là aussi incapable d’affirmer, sur la base des éléments de preuve à ma disposition, qu’il y a des motifs raisonnables de croire que cela s’est produit, étant donné également les doutes mentionnés précédemment quant à la fiabilité et à la crédibilité du plaignant.
Je dois toutefois noter que l’AT no 8 a bien indiqué qu’il avait frappé le plaignant sur le dessus de la tête alors que ce dernier résistait à son arrestation, et ce, dans une mesure qui atteignait 10 sur une échelle de 10 selon l’agent. Il semble peu probable que ce coup de poing ait cassé le nez du plaignant; d’ailleurs, même si cela était le cas, je ne peux pas conclure que ce geste constituait un usage excessif de la force dans les circonstances. En prenant en considération les divers facteurs en cause, à savoir que l’on savait que le plaignant avait précédemment été en possession d’une arme à feu, qu’il est parvenu à échapper à la police lors de trois tentatives d’interception consécutives, qu’il a ensuite pris la fuite à pied, puis qu’il a été vu tenant une arme à feu – que seulement quelques-uns des agents l’ont vu jeter –, je n’ai aucun doute que les agents estimaient qu’il était de la première importance de menotter le plaignant le plus rapidement possible, afin d’éliminer le risque qu’il allait continuer de poser tant qu’il était en liberté et qu’il pouvait être en possession d’une arme à feu [4].
Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, un agent de police, s’il s’appuie sur des motifs raisonnables, est fondé à employer la force nécessaire pour accomplir ce qu’il lui est enjoint de faire. Ainsi, pour que l’AT no 8 bénéficie d’une protection en vertu de l’article 25, il doit être établi que l’agent exécutait ses fonctions telles qu’elles sont prévues par la loi, qu’il agissait sur la base de motifs raisonnables et qu’il n’a pas employé plus de force que ce qui était requis.
L’ensemble de la preuve dont je dispose montre clairement qu’il y avait suffisamment d’éléments de preuve pour arrêter le plaignant en raison des infractions de vol à main armée; ainsi, la poursuite et les actions subséquentes liées à son arrestation correspondaient à l’exercice de fonctions légitimes. Toutefois, il reste la question à savoir si le coup de poing sur la tête du plaignant était une action raisonnable et justifiée dans les circonstances. Comme susmentionné, étant donné que l’on savait que le plaignant avait été en possession d’une arme à feu, et compte tenu des nombreuses tentatives de fuite de celui-ci, je n’hésite aucunement à établir que l’unique coup de poing infligé par l’AT no 8 était justifié, dans ces circonstances, pour maîtriser et menotter le plaignant le plus rapidement possible, et le fouiller afin de voir s’il portait d’autres armes.
Pour établir cette conclusion, j’ai pris en considération ce qu’a énoncé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c Nasogaluak [2010] 1 RCS 206, soit :
De plus, j’ai tenu compte de la décision de la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire R. c. Baxter (1975), 27 C.C.C. (2d) 96 (C.A. Ont.), selon laquelle on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention.
Ainsi, je ne peux établir que le coup de poing donné par l’AT no 8 a été la cause de la blessure au nez du plaignant – estimant qu’il est beaucoup plus probable que le plaignant se soit blessé lorsqu’il a roulé par-dessus la barrière de béton, puis qu’il est tombé sur le sol; quoi qu’il en soit, même si je pouvais le faire, je ne suis pas convaincu, à la lumière de ces faits, qu’il existe des motifs raisonnables de croire que l’AT no 8 a outrepassé ce que permet le droit criminel dans ces circonstances.
En ce qui concerne la blessure au pied du plaignant, en l’absence d’éléments de preuve pouvant indiquer la cause de cette blessure et la personne qui en est responsable, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que cette blessure a été causée par tout agent de police qui aurait conduit son véhicule dangereusement. D’ailleurs, même si la blessure est survenue, comme le croit l’AT no 2, lorsqu’il a placé son véhicule de manière à bloquer la fuite du plaignant et que ce dernier a heurté le véhicule, je ne crois pas que les actions de l’AT no 2, dans cette situation dynamique et dangereuse, sortaient des limites établies par le droit criminel. Ainsi, en l’absence de motifs le justifiant, je ne porterai pas d’accusation criminelle.
Date : 8 novembre 2018
Original signé par
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Le 19 décembre 2017, l’USM et l’escouade antivol du SPT avaient des motifs raisonnables de croire que le plaignant et son complice se trouvaient dans le stationnement intérieur d’un immeuble d’habitation de grande hauteur situé sur la route Hanson, dans la ville de Mississauga. Les membres de l’USM se sont rendus à cet immeuble à 12 h 30 et ont commencé à le surveiller, espérant apercevoir le plaignant.
Il y avait, dans le secteur de l’immeuble où l’on soupçonnait que le plaignant se trouvait, l’USM, l’EIU du SPT et des agents de l’unité tactique de la Police régionale de Peel. Les membres de l’USM s’étaient placés à divers endroits dans la rue et dans le stationnement intérieur.
À 16 h 10, les agents ont vu une Mercedes blanche quitter le stationnement, suivie de la Mercedes argent connue, conduite par le plaignant. À 16 h 12, une fois les deux véhicules, que l’on croyait conduits par les deux suspects du vol à main armée, sortis du stationnement, l’AI no 1 a donné le signal d’intercepter les conducteurs et de les arrêter; l’on jugeait que l’arrestation de ces deux personnes présentait un risque élevé en raison de la présence possible d’armes à feu. Les deux véhicules ont ensuite été aperçus se dirigeant vers le nord, sur la route Hanson.
Selon le plan qui avait été établi, lorsque le plaignant quitterait le stationnement, les agents de police devaient tenter d’immobiliser son véhicule le plus rapidement possible en entrant en collision avec celui-ci.
Pendant la tentative de mise en arrestation du plaignant, cinq voitures de police banalisées ont heurté la Mercedes de celui-ci. Ensuite, une poursuite à pied a eu lieu, soit après que le plaignant eut abandonné sa voiture, tenant de prendre la fuite à pied. Deux coups de feu ont été tirés en direction du plaignant, qui a ensuite grimpé par-dessus une barrière de béton d’une hauteur d’environ 1,2 mètre (4 pieds) se trouvant aux environs de la bretelle menant de la rue Hurontario au chemin Rathburn. De même, lors de l’arrestation du plaignant, un agent de police a donné un coup de poing à celui-ci. Plus tard, le plaignant a été emmené à l’hôpital, où l’on a établi qu’il avait subi une blessure au pied, ce dernier ayant été écrasé, ainsi qu’une fracture du nez.
Pendant l’enquête, un seul témoin civil, outre le plaignant, s’est présenté pour participer à une entrevue. Les déclarations de ce témoin portaient principalement sur la poursuite de la voiture du plaignant, qui n’est pas contestée.
Dans sa version des faits, le plaignant a indiqué qu’alors qu’il sortait du stationnement intérieur à bord de la Mercedes argent, une fourgonnette a percuté son véhicule de plein fouet, et que peu après, une deuxième fourgonnette a heurté sa Mercedes, du côté conducteur, la poussant sur un terre-plein gazonné, qu’il a ensuite traversé parce qu’il avait peur et qu’il ne savait pas que les véhicules qui l’avaient heurté étaient des véhicules de police, se demandant également si les conducteurs tentaient de le tuer. Le plaignant a ajouté que tandis qu’il s’éloignait, tournant à droite sur la route Hanson, puis à gauche sur la route Fairview Ouest, il a vu plusieurs voitures s’approchant rapidement derrière lui, précisant que certaines d’entre elles ont percuté la sienne à divers moments. Le plaignant a ensuite tourné à gauche sur la rue Hurontario, en direction nord. Il a vu une voiture à sa gauche, qui a frappé sa Mercedes près du devant et l’a poussée au milieu de la circulation. Puis, lorsque le plaignant s’est retrouvé du mauvais côté du terre-plein central, un autre véhicule est arrivé et a frappé sa Mercedes, après quoi le plaignant a pu revenir dans le bon sens de la circulation; une autre voiture a alors heurté la sienne, du côté droit, et le coussin gonflable de ce côté s’est déployé. Le plaignant a ensuite donné un grand coup de frein, amenant l’une des fourgonnettes à frapper quelque chose qui se trouvait devant lui.
Le plaignant a estimé qu’il roulait à environ 70 km/h et a indiqué que la circulation était dense. Lorsque le plaignant a vu une ouverture, il s’est faufilé devant les véhicules qui le poursuivaient. Il a affirmé qu’il pensait qu’il allait mourir et qu’il a donc continué d’appuyer sur l’accélérateur, tandis que d’autres véhicules heurtaient continuellement le sien. Le plaignant a déclaré qu’il a ensuite vu au moins trois véhicules tenter de le bloquer, après quoi il n’était plus en mesure de manœuvrer la Mercedes. Le plaignant se rappelait qu’à ce moment, il se trouvait sur une route à partir de laquelle, en tournant à gauche, on peut atteindre la route Kennedy, puis l’autoroute 410 en direction sud. Lorsque le plaignant a tenté de sortir de la Mercedes, un autre véhicule a foncé dans sa portière du côté conducteur, puis un deuxième véhicule a frappé le coffre, propulsant le plaignant vers l’avant.
Je dois admettre que lorsque j’ai entendu pour la première fois la version des événements du plaignant, j’ai eu du mal à y croire. Toutefois, les éléments de preuve matériels et ceux tirés des témoignages des policiers correspondent effectivement à sa version des faits, c’est-à-dire qu’au moins cinq véhicules de police banalisés ont heurté la voiture du plaignant une fois celui-ci sorti du stationnement intérieur, le tout à l’heure de pointe et dans une circulation dense, un jour de semaine, entre 16 h 10 et 16 h 15 environ, dans un secteur relativement achalandé de Mississauga.
Afin qu’il soit possible de bien comprendre la séquence des événements, je dois préciser quel agent conduisait quel véhicule pendant que l’on tentait d’immobiliser et d’arrêter le plaignant :
- L’AI no 1 conduisait une Toyota Highlander 2015;
- L’AT no 1 conduisait une Toyota Camry noire;
- L’AI no 2 conduisait une fourgonnette argent de marque Toyota Sienna;
- L’AT no 3 conduisait une Volkswagen Jetta grise;
- L’AT no 8 conduisait un VUS doré;
- L’AT no 2 conduisait un VUS gris de marque Nissan Murano.
L’AT no 2, dans sa déclaration aux enquêteurs de l’UES, a indiqué qu’il se trouvait au nord de l’entrée menant au stationnement intérieur et qu’il avait pour tâche de heurter le côté passager de la Mercedes argent si celle-ci venait dans sa direction. Après avoir entendu, par la radio de la police, qu’une Mercedes blanche et une Mercedes argent étaient sorties du stationnement, il a vu ces véhicules se rendre au bout de la route Hanson.
L’AT no 3 a indiqué que la Mercedes argent est passée à côté de lui et qu’il a heurté le côté conducteur de celle-ci à une vitesse de 15 à 20 km/h environ, mais que la Mercedes a poursuivi son chemin.
L’AT no 2 a fait savoir qu’il y avait un véhicule de police devant la Mercedes argent, un deuxième véhicule du côté passager de celle-ci et un troisième derrière. Les agents de police ont tenté d’encercler la Mercedes du plaignant au moyen de leurs véhicules, mais n’ont pas réussi.
L’AT no 3 a ensuite vu un autre véhicule de police banalisé frapper la voiture du plaignant, la poussant sur le terrain d’une résidence; par la suite, le plaignant a poursuivi son chemin, d’abord vers l’est, puis vers le nord, sur la rue Hurontario, à grande vitesse, après avoir traversé l’intersection au feu rouge sans s’arrêter.
À l’intersection de la route Burnhamthorpe et de la rue Hurontario, on a effectué une deuxième tentative d’interception de la voiture du plaignant. L’AT no 2 a déclaré que plusieurs véhicules de l’USM ont heurté la Mercedes argent à la hauteur de la route Burnhamthorpe et qu’après avoir été frappée par derrière par l’un des véhicules de police banalisés, la voiture a roulé lentement vers l’ouest. L’AT no 2 a ensuite entrepris de rejoindre la Mercedes pour bloquer la portière du côté conducteur et empêcher le plaignant de sortir de la voiture. Tandis qu’il s’approchait, l’AT no 2 a remarqué que cette portière commençait à s’ouvrir, et il a donc dirigé son véhicule contre celle-ci.
L’AT no 3 a également été témoin de la scène : il a expliqué que le plaignant a ouvert la portière du côté conducteur et que, soudainement, un véhicule de police banalisé a foncé dans celle-ci, qui s’est alors refermée brusquement.
On a ensuite vu le plaignant changer de voie et partir rapidement vers le nord en empruntant les voies en direction sud de la rue Hurontario, suivi de l’AT no 2. L’AT no 2 a indiqué que le plaignant est retourné dans les bonnes voies de circulation aux environs de la promenade Robert Speck, et qu’il avait fait de même.
À l’intersection de la route Rathburn et de la rue Hurontario, l’AI no 1 a procédé à la manœuvre d’interception finale, heurtant le véhicule du plaignant de derrière et le faisant tourner sur lui-même; le véhicule s’est retrouvé orienté vers le sud dans les voies en direction nord. Plusieurs véhicules de l’USM se sont alors dirigés vers la Mercedes pour la coincer; l’AT no 1 a percuté le côté passager de la voiture du plaignant, l’AT no 3 l’a percutée de derrière et l’AI no 2 l’a également heurtée du côté passager.
À leur arrivée sur les lieux, les enquêteurs de l’UES ont vu trois véhicules qui étaient directement en contact avec la Mercedes du plaignant, tandis que la Toyota Highlander conduite par l’AI no 1 se trouvait un peu plus loin, où elle s’était arrêtée après avoir heurté la Mercedes et l’avoir poussée vers l’avant. Les trois autres véhicules qui étaient toujours en contact direct avec la Mercedes étaient : la Volkswagen Jetta grise, conduite par l’AT no 3, la fourgonnette de marque Toyota Sienna – dont les coussins gonflables étaient déployés –, conduite par l’AI no 2, et la Toyota Camry noire, conduite par l’AT no 1.
Le plaignant a affirmé qu’une fois qu’il lui est devenu impossible de conduire sa Mercedes, il est sorti par la portière du côté conducteur et a fui en courant. Tandis qu’il courait, le plaignant a regardé à sa droite et a vu une fourgonnette qui s’approchait rapidement de lui; il s’est déplacé pour l’éviter. Peu après, il a vu une autre fourgonnette s’approcher de lui – il croit que les deux roues du côté conducteur ont écrasé son pied gauche.
L’AT no 2 a indiqué qu’après que la Mercedes eut été coincée, il a contourné les voitures arrêtées et a vu le plaignant traverser, en courant, les voies du côté sud et se diriger vers le nord-ouest. L’AT no 2 a ensuite dirigé son véhicule par-dessus le terre-plein central de la rue Hurontario et traversé trois voies pour dépasser le plaignant. Il a affirmé qu’il a bloqué le chemin au plaignant, en haut de la bretelle, au moyen de son véhicule pour l’empêcher de poursuivre sa course et que le plaignant a couru droit dans celui-ci, se heurtant contre le véhicule du côté passager. L’AT no 2 croit que cela pourrait être la cause de la blessure du plaignant. Je souligne par ailleurs que contrairement aux affirmations du plaignant, l’AT no 2 conduisait un VUS gris et non une fourgonnette.
L’AT no 8, comme l’AT no 2, a ensuite traversé le terre-plein central et a emprunté les voies allant vers le sud dans la direction vers laquelle le plaignant courait.
L’AT no 2 est ensuite sorti de son véhicule avec sa carabine C-8 et a poursuivi le plaignant à pied, descendant ainsi la bretelle menant à la route Rathburn Ouest. L’AT no 2 se trouvait 6 à 9 mètres (20 à 30 pieds) environ derrière le plaignant; il a affirmé que celui-ci semblait courir normalement et que rien ne portait à croire qu’il était blessé au pied.
L’AT no 8 a indiqué que lorsque le plaignant descendait la bretelle en courant, avec l’AI no 1 et l’AT no 2 à sa poursuite, il l’a vu sortir la main droite de son manteau, puis tourner son épaule droite vers l’AI no 1 et l’AT no 2. L’AT no 8 a dit croire qu’à ce moment, le plaignant a lancé une arme à feu par-dessus une clôture.
L’AI no 1 a refusé de fournir une déclaration; néanmoins, l’AT no 1 a indiqué que l’AI no 1 lui avait dit, après coup, que le plaignant avait sorti une arme à feu pendant la poursuite à pied et l’avait jetée par-dessus une clôture.
L’AT no 3 a fait savoir qu’il a vu le plaignant jeter une arme à feu en direction nord vers un ruisseau et qu’au même moment, il a entendu deux coups de feu, qu’il croyait provenir de l’arme de AI no 1; le plaignant, pour sa part, a continué de courir.
L’AT no 3 a également indiqué qu’une fois que le plaignant a atteint le bas de la bretelle, il s’est arrêté et, incapable de se tenir debout sur ses deux pieds, a roulé par-dessus la barrière de béton.
À 17 h 7, l’AT no 4 a trouvé un revolver noir, dont la chambre contenait deux balles, submergé dans l’eau. L’arme à feu a été photographiée sur les lieux, puis saisie et examinée.
L’AT no 8 a indiqué qu’une fois que le plaignant est arrivé au bas de la bretelle, il s’est retourné pour faire face au véhicule de l’AT no 8, puis a roulé par-dessus une barrière de béton séparant la bretelle de la route Rathburn. L’AT no 8 a fait savoir que le plaignant est passé par-dessus la barrière, les pieds en premier, puis qu’il s’est retrouvé de 1,2 à 1,5 mètre (4 à 5 pieds) plus bas, environ, sur la route Rathburn. Il a ajouté que le plaignant n’a pas bougé de l’endroit où il était tombé, et qu’à son arrivée, l’AI no 1 était déjà sur le plaignant, aidé de l’AT no 2 et de l’AT no 1.
Dans sa version des faits, le plaignant a indiqué qu’il a été jeté au sol, mais qu’il n’a pas vu par qui, et qu’il s’est retrouvé couché sur le ventre. Il a ajouté qu’ensuite, il a été jeté par-dessus une barrière de béton d’une hauteur de 1,2 mètre (4 pieds), mais qu’il n’a pu déterminer qui l’avait fait.
L’AT no 1 a indiqué qu’une fois que le plaignant est sorti de son véhicule, il a été poursuivi à pied par l’AI no 1 et l’AT no 2, ajoutant qu’il suivait derrière. L’AT no 1 a fait savoir que lorsque le plaignant est arrivé au bas de la bretelle, il a ralenti et s’est balancé par-dessus la barrière de béton, après quoi l’AT no 1 a vu l’AI no 1 et l’AT no 2 l’ont rejoint et l’ont mis en état d’arrestation. Quelques secondes plus tard, l’AT no 1 est arrivé sur les lieux de l’arrestation, suivi de l’AI no 2 et de l’AT no 8, qui étaient dans un véhicule de police banalisé.
L’AT no 2 a affirmé qu’il a vu le plaignant commencer à grimper par-dessus la barrière en s’aidant de son bras droit, puis de sa jambe droite, et qu’il est ensuite tombé sur le sol. L’AT no 2 croyait à ce moment que le plaignant s’était effondré.
Le plaignant a indiqué qu’il a alors vu cinq ou six agents de police de race blanche, vêtus en civil et portant de l’équipement tactique noir et gris. Le plaignant a affirmé qu’il a dit aux agents que son pied était cassé, mais qu’on lui a répondu [traduction] « ferme-la, sinon on va te casser la jambe », puis qu’un agent a agrippé sa jambe et serré son pied.
Selon le plaignant, à un certain moment, un agent lui a donné un coup de poing au visage; il a indiqué qu’après cela, il a placé ses mains devant son visage et crié [traduction] « J’arrête. Je ne savais pas que c’était la police. J’arrête! » Il a ajouté que lorsqu’il a retiré ses mains du devant de son visage, il a senti que son nez était cassé; à son avis, cela était attribuable au coup de poing du policier. De même, le plaignant a indiqué qu’un des agents lui a ensuite cogné le dos de la tête contre le sol.
L’AT no 8 a déclaré qu’il a vu l’AT no 1 retenir les jambes du plaignant pour l’empêcher de donner des coups de pieds, tandis que l’AT no 8 maîtrisait le haut du corps de celui-ci. L’AT no 8 a ordonné au plaignant de cesser de résister et de montrer ses mains; toutefois, puisque le plaignant n’avait pas répondu, l’AT no 8 lui a donné, de la main droite, un coup de poing sur le dessus de la tête, de toutes ses forces. L’AT no 8 a affirmé qu’il évaluait le degré de résistance dont faisait preuve le plaignant à 10 sur une échelle de 10. Après avoir donné un coup de poing au plaignant, l’AT no 8 a ramené les bras de celui-ci derrière son dos; le plaignant a ainsi été menotté.
En ce qui a trait à la cause de ses blessures, le plaignant n’a pas affirmé croire qu’il a été blessé pendant la poursuite en véhicule, lors de laquelle cinq véhicules de police ont percuté sa voiture, à différents moments. Toutefois, il allègue que deux des pneus d’une fourgonnette ont roulé sur son pied, écrasant et blessant celui-ci. Il allègue également que pendant son arrestation, un agent de police lui a donné un coup de poing au visage, ce qui, selon lui, lui a cassé le nez. De plus, le plaignant a indiqué qu’avant son arrestation, il a été lancé par-dessus une barrière de béton de 1,2 mètre (4 pieds), et que pendant celle-ci, sa tête a été frappée contre le sol et un agent de police a attrapé sa jambe, menaçant de casser celle-ci, et serré son pied fracturé. Le plaignant n’a pas été en mesure de bien distinguer les nombreux agents ayant pris part à la poursuite et à son arrestation; il n’a donc pu désigner un agent de police en particulier comme étant responsable de ses blessures.
Même si la description qu’a donnée le plaignant de la poursuite policière et de la façon dont les véhicules ont percuté sa voiture est corroborée dans une grande mesure par ce qu’ont dit les agents de police concernés et par les éléments de preuve matériels recueillis sur les lieux, sa déclaration selon laquelle il n’a été en aucun moment en possession d’une arme à feu me fait douter de sa fiabilité, sinon de sa crédibilité; en effet, au moins trois agents de police ont clairement vu le plaignant sortir une arme qu’il portait sur lui et la jeter dans un plan d’eau en dessous de lui. De même, cette arme à feu a plus tard été trouvée et photographiée à cet endroit précis. Ainsi, si je me suis fié à la version des événements donnée par le plaignant dans les cas où elle est fortement corroborée par les éléments de preuve matériels ou les déclarations d’autres témoins, je ne peux fonder ma décision sur les déclarations non corroborées faites par le plaignant seulement.
En outre, je ne reconnais pas comme vraie l’allégation du plaignant selon laquelle les agents l’ont lancé par-dessus la barrière de béton, puisque bien des agents présents l’ont vu passer par-dessus cette barrière de son plein gré et sans l’intervention des policiers lorsqu’il tentait de s’enfuir.
Selon ce qu’a dit le plaignant, il est évident qu’il n’a pas été blessé lors de la poursuite policière ou pendant que l’on heurtait son véhicule, mais bien après qu’il eut quitté celui-ci, lorsqu’une fourgonnette a écrasé son pied avec les deux roues du côté conducteur.
Étant donné que dans ce qu’il a rapporté – et qui a été confirmé par les éléments de preuve matériels recueillis sur les lieux –, l’AT no 1 indique que l’AI no 1, l’AT no 3, l’AI no 2 et lui-même ont percuté la Mercedes du plaignant au moyen de leurs véhicules respectifs pendant la tentative d’immobilisation finale, que ces quatre véhicules étaient encore sur les lieux de la collision lorsque les enquêteurs de l’UES sont arrivés sur place et que trois de ces véhicules étaient toujours en contact avec le véhicule du plaignant, tandis que le quatrième véhicule, soit la Toyota Highlander de l’AI no 1, se trouvait tout près de l’endroit où le véhicule du plaignant s’était arrêté, il est évident qu’aucun de ces quatre agents ne peut avoir conduit le véhicule qui aurait écrasé le pied du plaignant, puisqu’ils sont tous sortis de leur véhicule pour poursuivre le plaignant à pied avant que celui-ci subisse sa blessure.
En outre, même si le plaignant a affirmé que deux fourgonnettes le poursuivaient lorsqu’il tentait de fuir en courant, et qu’il a dit avoir pu en éviter une, mais que l’autre avait écrasé son pied gauche, rien ne permet de savoir qui conduisait l’un ou l’autre de ces véhicules, puisque le plaignant n’a pas été en mesure d’indiquer la couleur ni la marque de ceux-ci. Selon ce qui a été constaté sur les lieux de la collision, seule une fourgonnette, soit la Toyota Sienna qui était conduite par l’AI no 2, semblait endommagée, en plus du VUS de grande taille, de marque Toyota Highlander, qui était conduit par l’AI no 1; ni l’un ni l’autre de ces véhicules n’aurait pu écraser le pied du plaignant, puisqu’ils sont demeurés sur les lieux de la collision finale.
Selon ce qu’on révélé les éléments de preuve, les seuls véhicules ayant poursuivi le plaignant dans la direction dans laquelle il a fui une fois à pied sont celui de l’AT no 2, un VUS gris de marque Nissan Murano [1], et celui de l’AT no 8, un VUS de couleur dorée qui ne s’est jamais approché du plaignant. Ainsi, si le pied du plaignant a effectivement été écrasé par une fourgonnette, il m’est impossible de déterminer quel véhicule – conduit par qui – pourrait être celui qui a été impliqué dans la blessure du plaignant.
De plus, il semble peu probable qu’une fourgonnette puisse avoir écrasé le pied gauche du plaignant avec la roue avant et la roue arrière du côté conducteur pendant que le plaignant courait; on pourrait croire que pour que cela soit possible, le plaignant aurait dû faire face au côté du véhicule, et non être en train de courir parallèlement au véhicule ou devant celui-ci [2].
Même si les éléments de preuve médicaux indiquent que la blessure au pied du plaignant pourrait avoir été provoquée par écrasement [3], c’est-à-dire que le pied du plaignant aurait effectivement été blessé par l’application d’une force qui a écrasé ses os, il m’est impossible, sans me livrer à des spéculations importantes à partir des éléments de preuve à ma disposition, de déterminer qui aurait pu causer cette blessure ni comment elle aurait pu survenir. En l’absence d’éléments de preuve suffisants, je n’ai aucun motif raisonnable de croire qu’un agent de police en particulier parmi les agents concernés a conduit son véhicule d’une manière qui aurait pu blesser le plaignant.
L’infraction appropriée à envisager, s’il était possible de déterminer qui était le conducteur du véhicule en cause, serait celle de conduite dangereuse causant des lésions corporelles, dont la définition a été établie par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Beatty, [2008] 1 R.C.S. 49, à savoir que la conduite doit être dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu, et qu’elle doit constituer « un écart marqué par rapport à la norme de diligence raisonnable que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé ». Cependant, en l’absence d’éléments de preuve permettant d’établir l’identité du conducteur du véhicule qui aurait écrasé le pied du plaignant, je ne dispose pas des renseignements nécessaires pour évaluer la conduite dans son ensemble et ainsi déterminer si celle-ci était dangereuse dans le contexte global de l’incident.
Bien que le seul témoin civil ayant vu la poursuite policière ait aperçu deux camionnettes et quatre berlines traverser une intersection, au feu rouge, à la poursuite du véhicule du plaignant, klaxonnant pour alerter les autres automobilistes, aucun élément de preuve n’indique que ce groupe de six véhicules comprenait la fourgonnette qui aurait écrasé le pied du plaignant.
En outre, étant donné qu’aucun des véhicules banalisés n’avait de GPS, de système de localisation automatique de véhicules ou de système de caméra à bord, il n’y a aucun élément de preuve pouvant montrer la vitesse à laquelle roulaient les véhicules de police impliqués dans la poursuite. Le plaignant a estimé sa propre vitesse à 70 km/h alors qu’il fuyait la police. Cependant, il semble qu’il y ait que peu d’éléments de preuve selon lesquels les véhicules de police auraient roulé à une vitesse excessive; il en serait ainsi même si je pouvais cerner la fourgonnette que l’on présume avoir écrasé le pied du plaignant parmi les véhicules en cause.
Ainsi, en l’absence d’éléments de preuve permettant d’établir l’identité du conducteur de la fourgonnette qui, selon le plaignant, a écrasé son pied, je ne suis pas convaincu qu’il existe des motifs raisonnables de croire que la blessure au pied du plaignant a été causée par la conduite dangereuse d’un policier dont l’identité n’est pas connue.
En ce qui a trait à l’allégation du plaignant selon laquelle un agent de police – dont l’identité n’a pu, encore une fois, être établie – lui aurait donné un coup de poing au visage, lui cassant ainsi le nez, je suis là aussi incapable d’affirmer, sur la base des éléments de preuve à ma disposition, qu’il y a des motifs raisonnables de croire que cela s’est produit, étant donné également les doutes mentionnés précédemment quant à la fiabilité et à la crédibilité du plaignant.
Je dois toutefois noter que l’AT no 8 a bien indiqué qu’il avait frappé le plaignant sur le dessus de la tête alors que ce dernier résistait à son arrestation, et ce, dans une mesure qui atteignait 10 sur une échelle de 10 selon l’agent. Il semble peu probable que ce coup de poing ait cassé le nez du plaignant; d’ailleurs, même si cela était le cas, je ne peux pas conclure que ce geste constituait un usage excessif de la force dans les circonstances. En prenant en considération les divers facteurs en cause, à savoir que l’on savait que le plaignant avait précédemment été en possession d’une arme à feu, qu’il est parvenu à échapper à la police lors de trois tentatives d’interception consécutives, qu’il a ensuite pris la fuite à pied, puis qu’il a été vu tenant une arme à feu – que seulement quelques-uns des agents l’ont vu jeter –, je n’ai aucun doute que les agents estimaient qu’il était de la première importance de menotter le plaignant le plus rapidement possible, afin d’éliminer le risque qu’il allait continuer de poser tant qu’il était en liberté et qu’il pouvait être en possession d’une arme à feu [4].
Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, un agent de police, s’il s’appuie sur des motifs raisonnables, est fondé à employer la force nécessaire pour accomplir ce qu’il lui est enjoint de faire. Ainsi, pour que l’AT no 8 bénéficie d’une protection en vertu de l’article 25, il doit être établi que l’agent exécutait ses fonctions telles qu’elles sont prévues par la loi, qu’il agissait sur la base de motifs raisonnables et qu’il n’a pas employé plus de force que ce qui était requis.
L’ensemble de la preuve dont je dispose montre clairement qu’il y avait suffisamment d’éléments de preuve pour arrêter le plaignant en raison des infractions de vol à main armée; ainsi, la poursuite et les actions subséquentes liées à son arrestation correspondaient à l’exercice de fonctions légitimes. Toutefois, il reste la question à savoir si le coup de poing sur la tête du plaignant était une action raisonnable et justifiée dans les circonstances. Comme susmentionné, étant donné que l’on savait que le plaignant avait été en possession d’une arme à feu, et compte tenu des nombreuses tentatives de fuite de celui-ci, je n’hésite aucunement à établir que l’unique coup de poing infligé par l’AT no 8 était justifié, dans ces circonstances, pour maîtriser et menotter le plaignant le plus rapidement possible, et le fouiller afin de voir s’il portait d’autres armes.
Pour établir cette conclusion, j’ai pris en considération ce qu’a énoncé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c Nasogaluak [2010] 1 RCS 206, soit :
Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux-ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. c. Bottrell (1981), 1981 CanLII 339 (BC CA), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C.-B.) :
[TRADUCTION] Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218]
De plus, j’ai tenu compte de la décision de la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire R. c. Baxter (1975), 27 C.C.C. (2d) 96 (C.A. Ont.), selon laquelle on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention.
Ainsi, je ne peux établir que le coup de poing donné par l’AT no 8 a été la cause de la blessure au nez du plaignant – estimant qu’il est beaucoup plus probable que le plaignant se soit blessé lorsqu’il a roulé par-dessus la barrière de béton, puis qu’il est tombé sur le sol; quoi qu’il en soit, même si je pouvais le faire, je ne suis pas convaincu, à la lumière de ces faits, qu’il existe des motifs raisonnables de croire que l’AT no 8 a outrepassé ce que permet le droit criminel dans ces circonstances.
En ce qui concerne la blessure au pied du plaignant, en l’absence d’éléments de preuve pouvant indiquer la cause de cette blessure et la personne qui en est responsable, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que cette blessure a été causée par tout agent de police qui aurait conduit son véhicule dangereusement. D’ailleurs, même si la blessure est survenue, comme le croit l’AT no 2, lorsqu’il a placé son véhicule de manière à bloquer la fuite du plaignant et que ce dernier a heurté le véhicule, je ne crois pas que les actions de l’AT no 2, dans cette situation dynamique et dangereuse, sortaient des limites établies par le droit criminel. Ainsi, en l’absence de motifs le justifiant, je ne porterai pas d’accusation criminelle.
Date : 8 novembre 2018
Original signé par
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) On a décrit ce véhicule comme étant un VUS de taille moyenne comptant cinq places. [Retour au texte]
- 2) Si son pied a été blessé à l’endroit où il le dit, cela suppose que le plaignant a ensuite couru sur une distance de 170 mètres avec un pied très sérieusement blessé. Si ce n’est pas impossible, cela demeure tout de même difficile à imaginer. [Retour au texte]
- 3) Le spécialiste du domaine médical qui a été consulté a dit à l’UES que ce type de blessure pouvait être causé par les collisions de véhicules à moteur, les chutes de bonne hauteur et la pratique de sports, et que le mécanisme qui y est associé consiste habituellement en une force de rotation indirecte et en une charge axiale par hyperflexion sur l’avant-pied. Il a ajouté que la fracture avec dislocation est vraisemblablement le résultat d’une force assez importante et qu’elle aurait donc pu être causée par une fourgonnette ou un camion ayant écrasé le pied. [Retour au texte]
- 4) De nombreux agents ont entendu l’avertissement selon lequel le plaignant était en possession d’une arme à feu, mais seulement quelques-uns l’ont vu jeter son arme. Cela dit, l’AT no 8, qui a admis avoir donné un coup de poing au plaignant, est l’un des agents l’ayant vu jeter l’arme à feu. [Retour au texte]
Note:
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