Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCD-317
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)
En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :- de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
- de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.
En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- le nom de tout agent impliqué;
- le nom de tout agent témoin;
- le nom de tout témoin civil;
- les renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)
En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables.Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.Exercice du mandat
La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 44 ans (le plaignant) à la suite d’une interaction avec la police le 31 octobre 2017.
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 44 ans (le plaignant) à la suite d’une interaction avec la police le 31 octobre 2017.
L’enquête
Notification de l’UES
Le 31 octobre 2017, vers 11 h 10, la Police régionale de Peel (PRP) a avisé l’UES du décès sous garde du plaignant.La PRP a signalé que le 31 octobre 2017, à 8 h 44, le centre des communications de la PRP a reçu un appel du plaignant qui demandait de l’aide et que la police se présente à sa résidence. Lorsque le téléphoniste a demandé au plaignant pourquoi il avait besoin de la police, il lui a répondu qu’il était recherché en vertu de mandats non exécutés, qu’il avait bu et consommé de la cocaïne et que sa conjointe était avec lui.
À 9 h 19, la police s’est présentée chez le plaignant, a confirmé les mandats non exécutés et a par la suite procédé à son arrestation. Lors de l’arrestation, le plaignant a été plaqué au sol. Lorsqu’ils ont aidé le plaignant à se relever, les agents de police ont remarqué qu’il ne semblait pas bien aller. Les services médicaux d’urgence (SMU) se sont présentés sur les lieux et ont décidé de transporter le plaignant à l’hôpital. En route, le plaignant a eu une absence de signes vitaux (ASV). À 10 h 16, on a constaté son décès.
L’équipe
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4 Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2
Plaignant :
Homme de 44 ans, décédéTémoins civils (TC)
TC no 1 A participé à une entrevue TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue
TC no 5 A participé à une entrevue
TC no 6 A participé à une entrevue
Agents témoins (AT)
AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinéesAT no 2 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT no 3 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT no 4 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT no 5 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
Agents impliqués (AI)
AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué. Ses notes ont été reçues et examinées.AI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.
Description de l’incident
Le 26 juillet 2017, un mandat d’arrêt décerné sur le siège a été délivré par le tribunal en vue de l’arrestation du plaignant pour défaut de comparaître pour un certain nombre d’accusations criminelles.
Le 31 octobre 2017, vers 3 h, un appel au 911 a été reçu au centre d’appels 911 de la PRP de la part d’un homme indiquant qu’il était effrayé; il semblait très confus. Le téléphoniste du 911 a tenté à plusieurs reprises de rappeler au numéro d’où provenait l’appel au 911 et a fini par être en mesure d’entrer en contact avec le plaignant et de déterminer son emplacement; quatre agents de police ont ensuite été dépêchés pour répondre à l’appel.
Le plaignant, après avoir été repéré par les agents, leur a demandé de lui laisser terminer sa journée de travail, faute de quoi il perdrait son emploi. Le plaignant a promis qu’il se livrerait volontairement à la police plus tard ce jour-là. En dépit du mandat d’arrestation non exécuté contre le plaignant, l’AT no 2, en exerçant son pouvoir discrétionnaire, a décidé de ne pas procéder à l’arrestation du plaignant à ce moment-là, et les agents de police ont quitté les lieux.
Environ cinq heures plus tard, le centre d’appels 911 a reçu un autre appel de la part du plaignant lors duquel il a indiqué qu’il avait maintenant consommé de la cocaïne et qu’un mandat d’arrestation avait été délivré contre lui pour défaut de comparaître; les deux agents impliqués ont été dépêchés à l’endroit où se trouvait le plaignant.
À leur arrivée à l’endroit où se trouvait le plaignant et avant de le mettre sous garde en vertu du mandat non exécuté, les deux agents impliqués ont demandé aux SMU de se présenter sur les lieux pour évaluer l’état du plaignant, puisqu’il avait avoué avoir consommé des narcotiques.
Après que les ambulanciers paramédicaux ont évalué l’état du plaignant, il est devenu belliqueux et refusait de se conformer aux directives; on l’a donc plaqué au sol. Il a ensuite été menotté et les agents de police, de concert avec les ambulanciers paramédicaux, l’ont mis dans l’ambulance et il a été transporté à l’hôpital où on l’a amené dans l’aire de triage. Presque dès son arrivée à l’hôpital, le plaignant est entré dans un état de détresse médicale et un protocole de réanimation a été amorcé. Le personnel médical n’a pas été en mesure de réanimer le plaignant, et à 10 h 16, on a constaté son décès.
Cause de décès
Le 2 novembre 2017, une autopsie a été pratiquée sur le corps du plaignant par un pathologiste médicolégal; aucune cause de décès immédiate n’a pu être déterminée à ce moment-là, dans l’attente des résultats de l’examen toxicologique des échantillons de sang et d’urine prélevés chez le plaignant.
Le 17 octobre 2018, l’UES a reçu à la fois le rapport d’autopsie final et le rapport toxicologique se rattachant à l’autopsie du corps du plaignant. Dans les rapports, on a conclu que la cause de décès du plaignant était une intoxication à la cocaïne chez un homme atteint de cardiomégalie et de maladie coronarienne athérosclérotique.
Le 31 octobre 2017, vers 3 h, un appel au 911 a été reçu au centre d’appels 911 de la PRP de la part d’un homme indiquant qu’il était effrayé; il semblait très confus. Le téléphoniste du 911 a tenté à plusieurs reprises de rappeler au numéro d’où provenait l’appel au 911 et a fini par être en mesure d’entrer en contact avec le plaignant et de déterminer son emplacement; quatre agents de police ont ensuite été dépêchés pour répondre à l’appel.
Le plaignant, après avoir été repéré par les agents, leur a demandé de lui laisser terminer sa journée de travail, faute de quoi il perdrait son emploi. Le plaignant a promis qu’il se livrerait volontairement à la police plus tard ce jour-là. En dépit du mandat d’arrestation non exécuté contre le plaignant, l’AT no 2, en exerçant son pouvoir discrétionnaire, a décidé de ne pas procéder à l’arrestation du plaignant à ce moment-là, et les agents de police ont quitté les lieux.
Environ cinq heures plus tard, le centre d’appels 911 a reçu un autre appel de la part du plaignant lors duquel il a indiqué qu’il avait maintenant consommé de la cocaïne et qu’un mandat d’arrestation avait été délivré contre lui pour défaut de comparaître; les deux agents impliqués ont été dépêchés à l’endroit où se trouvait le plaignant.
À leur arrivée à l’endroit où se trouvait le plaignant et avant de le mettre sous garde en vertu du mandat non exécuté, les deux agents impliqués ont demandé aux SMU de se présenter sur les lieux pour évaluer l’état du plaignant, puisqu’il avait avoué avoir consommé des narcotiques.
Après que les ambulanciers paramédicaux ont évalué l’état du plaignant, il est devenu belliqueux et refusait de se conformer aux directives; on l’a donc plaqué au sol. Il a ensuite été menotté et les agents de police, de concert avec les ambulanciers paramédicaux, l’ont mis dans l’ambulance et il a été transporté à l’hôpital où on l’a amené dans l’aire de triage. Presque dès son arrivée à l’hôpital, le plaignant est entré dans un état de détresse médicale et un protocole de réanimation a été amorcé. Le personnel médical n’a pas été en mesure de réanimer le plaignant, et à 10 h 16, on a constaté son décès.
Cause de décès
Le 2 novembre 2017, une autopsie a été pratiquée sur le corps du plaignant par un pathologiste médicolégal; aucune cause de décès immédiate n’a pu être déterminée à ce moment-là, dans l’attente des résultats de l’examen toxicologique des échantillons de sang et d’urine prélevés chez le plaignant.Le 17 octobre 2018, l’UES a reçu à la fois le rapport d’autopsie final et le rapport toxicologique se rattachant à l’autopsie du corps du plaignant. Dans les rapports, on a conclu que la cause de décès du plaignant était une intoxication à la cocaïne chez un homme atteint de cardiomégalie et de maladie coronarienne athérosclérotique.
Éléments de preuve
Les lieux
Les lieux se trouvaient à l’extérieur d’une maison en rangée située au centre d’une rangée de maisons adjacentes, avec une allée et un garage attenant. Un trottoir menait de l’allée à la porte d’entrée. La voiture de police de la PRP était garée du côté sud de la chaussée devant la maison en rangée.Schéma des lieux
Éléments de preuves médicolégaux
Des échantillons du sang et de l’urine du plaignant ont été prélevés lors de l’autopsie le 2 novembre 2017, et ont par la suite été transmis au Centre des sciences judiciaires (CSJ) le 6 novembre 2017 aux fins d’analyses toxicologiques.Le 17 octobre 2018, l’UES a reçu le rapport d’autopsie final et le rapport toxicologique en annexe. Le rapport toxicologique précisait que les échantillons prélevés chez le plaignant indiquaient que les drogues suivantes étaient présentes dans son système, dans les quantités indiquées, au moment de son décès :
Dans le rapport, les résultats ont également été interprétés comme suit :
1. Les concentrations dans le sang à la suite de l’utilisation récréative de cocaïne chevauchent celles associées aux décès. Dans une étude sur les décès où l’on a déterminé que la cocaïne avait joué un rôle secondaire, les concentrations de cocaïne et de benzoylecgonine dans le sang variaient entre 0,04 et 0,5 mg/L et 0,24 et 2,4 mg/L respectivement. Toutefois, dans ce même rapport, dans le cas des décès attribuables à l’intoxication à la cocaïne, les concentrations de cocaïne et de benzoylecgonine détectées dans le sang variaient entre 0,05 et 3,4 mg/L et 0,8 et 9,1 mg/L, respectivement. La benzoylecgonine est le produit de fractionnement de la cocaïne tant in vivo qu’in vitro et ne présente aucune activité pharmacologique dans le système central.
2. Le tetrahydrocannabinol (THC) est le principal constituant psychoactif que l’on retrouve dans les produits de cannabis tels que la marijuana et le haschich. Le carboxy-THC est un métabolite inactif du TCH. La concentration de TCH détectée dans le sang est révélatrice de la consommation antérieure. À ce jour, il n’existe aucun rapport fiable sur les décès entièrement attribuables au THC.
Témoignage d’expert
Autopsie
Le 2 novembre 2017, un pathologiste médicolégal a pratiqué l’autopsie sur le corps du plaignant; aucune cause anatomique de décès n’a pu être déterminée à ce moment-là.Le 17 octobre 2018, l’UES a reçu le rapport d’autopsie final et le rapport toxicologique en annexe. Dans les rapports, on a conclu que la cause de décès du plaignant était une intoxication à la cocaïne chez un homme atteint de cardiomégalie et de maladie coronarienne athérosclérotique.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques
L’UES a obtenu une vidéo filmée par le TC no 2, d’une maison en rangée voisine, qui a révélé que le plaignant gisait sur le sol à côté d’une voiture de police, les deux agents se tenant près de lui, pendant que deux ambulanciers paramédicaux mettaient un drap sur une civière. La portière arrière du côté passager de la voiture de police est ouverte et il y a une civière sur le trottoir, au sud de la voiture de police. On voit un agent de police accroupi entre la civière et la voiture de police. Le deuxième agent de police est debout, penché à gauche du premier agent de police. Un ambulancier paramédical se tient debout à gauche de la civière, étendant un drap blanc sur cette dernière.On voit ensuite les agents de police soulever le plaignant du sol, qui est menotté les mains derrière le dos. Les agents semblent avoir de la difficulté, car le plaignant est un gros homme et il semble incapable de se tenir debout. La partie supérieure du corps du plaignant se trouve face contre terre au centre de la civière et il est ensuite soulevé par l’un des agents de police, à l’aide du drap sur lequel il est étendu, et poussé plus loin vers le centre de la civière.
Par la suite, on voit les agents de police saisir les deux jambes du plaignant, les soulever et les balancer vers la droite et vers l’extérieur, puis sur le côté droit de la civière. La tête du plaignant se déplace du côté gauche de la civière et il se retrouve étendu sur la droite, le visage face à la caméra. L’ambulancière paramédicale soulève ensuite le drap et cache le visage et le corps du plaignant.
Les deux ambulanciers paramédicaux et l’un des agents de police soulèvent le drap et tirent le plaignant plus vers la gauche sur la civière. Les ambulanciers paramédicaux attachent le plaignant sur la civière, puis poussent celle-ci vers la droite, sur le trottoir, avec l’aide des deux agents de police. La civière est ensuite poussée dans l’ambulance.
À part aider le plaignant à se relever, puis le soulever et le placer sur la civière, on ne voit aucunement les agents de police ou les ambulanciers paramédicaux recourir à la force.
Enregistrements de communications
Les appels au 911 du plaignant le 31 octobre 2017, les tentatives de rappel du téléphoniste du 911 et les enregistrements des transmissions policières ont été obtenus et examinés, et ont révélé ce qui suit :Premier appel au 911 le 31 octobre 2017 à 2 h 51 min 42 s
L’appelant a dit : [traduction] « J’ai l’impression d’être en danger. » Le téléphoniste du 911 a demandé à l’appelant s’il avait besoin de la police ou d’une ambulance et sa réponse était inintelligible. La communication a été coupée et après plusieurs tentatives de rappel du téléphoniste du 911, qui a vu ses appels être acheminés directement à un service de messagerie vocale, un homme a répondu et a dit qu’il était le plaignant.Le téléphoniste a répété le nom du plaignant et lui a demandé : [traduction] « Bonjour, que faites-vous? » Le plaignant lui a répondu : « Oui, attendez un instant, il faut que j’appelle ma fille. » Le téléphoniste du 911 a dit : « Non, dites-moi où vous êtes (appelant le plaignant par son nom). » Le plaignant a dit : « Là où je suis d’habitude. » Le téléphoniste a dit : « Eh bien, je ne sais pas. Êtes-vous dans une maison? » Le plaignant a répondu : « Ah, oui. » Le téléphoniste a indiqué que le plaignant avait dit que sa vie était en danger. Le plaignant a dit : « Ouais », puis la communication a été coupée.
Appel ultérieur au 911 le 31 octobre 2017, à 8 h 43 min 9 s
Le plaignant a demandé que la police se présente chez lui et a indiqué qu’il voulait se livrer à la police et qu’il y avait un mandat d’arrêt contre lui. Le téléphoniste a demandé si quelqu’un avait consommé de la drogue et le plaignant lui a répondu qu’il avait consommé de la cocaïne. On peut entendre la TC no 1 parler à l’arrière-plan et le plaignant a dit : [traduction] « Quoi? D’accord, je vais me livrer à la police. C’est ce que je veux faire. Je vais obtenir de l’aide. » Le téléphoniste a ensuite demandé au plaignant s’il adopterait un comportement agressif lorsque la police se présenterait chez lui et il lui a répondu que non.Le téléphoniste a demandé au plaignant quelle était la quantité de cocaïne qu’il avait consommée aujourd’hui et il lui a répondu : [traduction] « Pas mal. » Le téléphoniste a demandé au plaignant de sortir dehors, car les agents de police étaient là.
Transmissions policières du 31 octobre 2017
Une transmission policière indiquait que l’AI no 1 et l’AI no 2 étaient arrivés à l’adresse du plaignant. L’AI no 2 a indiqué que les ambulanciers paramédicaux examinaient le plaignant et que ce dernier était sous garde.L’AI no 1 a indiqué que les SMU transportaient le plaignant à l’hôpital.
L’AT no 1 a ensuite indiqué que le patient avait eu une ASV et que les médecins avaient tenté de le réanimer, mais qu’on avait constaté son décès à 10 h 16.
Éléments obtenus auprès du Service de police
Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants de la PRP :- rapport sur la copie audio de l’appel au 911 et des tentatives de rappel du centre d’appels 911 de la PRP;
- rapport sur la copie audio des transmissions radio policières;
- registre de service;
- rapports sur la chronologie des événements (2);
- renseignements sur la personne – plaignant;
- notes de service des AT nos 1 à 5 et de l’AI no 1;
- rapports sur les détails de l’incident (2);
- procédure : recours à la force;
- procédure : mandats relatifs aux affaires criminelles;
- procédure : enquêtes criminelles;
- dossiers de formation des AI nos 1 et 2.
L’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants d’autres sources :
- rapport toxicologique du CSJ reçu par l’UES le 17 octobre 2018;
- rapport d’autopsie final reçu par l’UES le 17 octobre 2018;
- rapport d’appel d’ambulance des SMU;
- photos du plaignant à l’hôpital après son décès, prises par un membre de la famille;
- vidéo de l’arrestation du plaignant à l’extérieur de la voiture de police, après qu’on l’a pris et placé sur une civière, puis emmené en ambulance.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :a) soit à titre de particulierest, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
Analyse et décision du directeur
Le 31 octobre 2017, à 8 h 43 min 9 s, le centre d’appels 911 a reçu un appel du plaignant indiquant qu’il avait besoin de l’aide de la police, car il voulait se livrer à la police en vertu d’un mandat d’arrestation non exécuté contre lui. Le plaignant a confirmé qu’il avait bu et consommé de la cocaïne ce jour-là après qu’on le lui a demandé. Par conséquent, à 8 h 45 min 17 s, l’AI no 1 et l’AI no 2 ont été dépêchés dans deux voitures de police distinctes à l’adresse du plaignant dans la ville de Brampton; on a également demandé qu’une ambulance se présente sur les lieux, comme précaution.
Peu après 8 h 57 min 2 s, les deux agents de police sont arrivés à la résidence et ont parlé avec le plaignant. Le résumé des transmissions policières, également appelé « rapport sur la chronologie des événements », indique qu’on a signalé qu’à 9 h 7 min 32 s, les ambulanciers paramédicaux examinaient le plaignant, qu’à 9 h 19 min 49 s, le plaignant a été mis sous garde policière et qu’à 9 h 24 min 9 s, le plaignant était dans l’ambulance en route pour l’hôpital accompagné de l’AI no 1, l’AI no 2 les suivant dans sa voiture de police. À 9 h 56 min 3 s, on a signalé que le plaignant était à l’hôpital, mais qu’il avait une ASV et que les médecins tentaient de le réanimer. À 10 h 16, on a constaté le décès du plaignant et l’UES a été avisée, puis une enquête a été lancée.
Le 2 novembre 2017, une autopsie a été pratiquée par un pathologiste médicolégal, mais aucune cause de décès immédiate n’a pu être déterminée à ce moment-là dans l’attente des résultats des analyses toxicologiques du sang et de l’urine du plaignant. Le 17 octobre 2018, l’UES a reçu le rapport d’autopsie final lié à l’examen du corps du plaignant, ainsi que le rapport toxicologique en annexe.
Le rapport toxicologique indiquait que le plaignant avait à la fois de la cocaïne et de la benzoylecgonine, le produit de fractionnement de la cocaïne, dans son système au moment de son décès et qu’on avait déterminé que la cause de son décès était une intoxication à la cocaïne chez un homme atteint de cardiomégalie (hypertrophie anormale du cœur) et de maladie coronarienne athérosclérotique (artères obstruées). Autrement dit, le décès du plaignant était attribuable à sa consommation de cocaïne, ce qui a entraîné un incident cardiaque, puis la mort. Bien que l’on ait constaté la présence d’abrasions superficielles sur le visage et le corps du plaignant, on a déterminé que celles-ci n’étaient pas liées à son décès et qu’elles n’y avaient contribué en rien.
Dans le cadre de cette enquête, quatre témoins civils qui étaient présents lors de l’intervention policière auprès du plaignant, ainsi qu’un membre de la famille et le médecin qui a traité le plaignant, ont participé à une entrevue. Bien que les deux agents impliqués, qui étaient avec le plaignant avant son décès, n’aient pas consenti à participer à une entrevue avec les enquêteurs de l’UES, comme la loi les y autorise, l’AI no 1 a fourni ses notes sur l’incident aux fins d’examen. Un agent témoin a également participé à une entrevue et cinq agents de police ont fourni leurs notes aux enquêteurs de l’UES. En outre, les enquêteurs de l’UES avaient accès à une vidéo filmée par un témoin civil indépendant de l’intervention policière, ainsi qu’au rapport d’autopsie final et au rapport toxicologique produits à la suite du décès du plaignant.
Le plaignant n’a jamais été seul avec l’AI no 1 ou l’AI no 2, au moins un témoin civil indépendant étant présent dès le premier contact, jusqu’à ce que l’on constate le décès du plaignant à l’hôpital. Pour cette raison, en dépit du fait qu’aucun des agents impliqués n’a fourni de déclaration verbale aux enquêteurs de l’UES, la totalité de l’interaction entre l’AI no 1 et l’AI no 2 est justifiée et les faits ne sont pas contestés.
Selon une témoin civile indépendante, la TC no 1, elle a jeté le plaignant dehors vers 8 h ce matin-là et lorsqu’il est revenu une demi-heure plus tard, elle savait immédiatement qu’il avait consommé de la cocaïne; elle était en mesure de le savoir parce qu’elle avait déjà eu affaire à lui lorsqu’il en avait consommé. Par conséquent, la TC no 1 refusait de faire entrer de nouveau le plaignant dans son domicile et elle l’a observé composer le 911, lorsqu’il était à l’extérieur de son domicile, pour demander l’aide de la police.
Lorsque les deux agents de police sont arrivés vers 8 h 45, la TC no 1 les a entendus demander au plaignant de s’identifier, ce qu’il a fait; la TC no 1 est ensuite entrée dans son domicile et a fermé la porte. Peu après, la TC no 1 a entendu le plaignant crier : [traduction] « Aidez-moi! » et elle a regardé dehors et l’a vu couché à plat ventre, les deux agents de police sur lui tentant de le menotter. La TC no 1 a ensuite ouvert sa porte pour demander ce qui se passait et l’un des agents a indiqué que le plaignant [traduction] « hallucinait ». La TC no 1 a observé que le plaignant résistait aux tentatives de le menotter en se tortillant et en se tordant sur le sol.
Le TC no 2 a regardé par la fenêtre de sa résidence et a observé les deux agents de police tentant d’arrêter le plaignant, qu’il a décrit comme se débattant et résistant à l’arrestation. Le TC no 2 a observé la lutte se poursuivre de l’autre côté de la rue et sur le sol, et c’est à ce moment que le TC no 2 a commencé à filmer l’intervention avec son téléphone cellulaire. Le TC no 2 a indiqué que les agents de police tentaient de maintenir le plaignant au sol, pendant qu’il continuait de résister et qu’il criait : [traduction] « Aidez-moi! » De même, le TC no 2 a indiqué que le plaignant était étendu à plat ventre et qu’un agent était agenouillé à côté de lui, un genou reposant sur la jambe du plaignant, pendant qu’il utilisait son bras gauche pour tenter de maintenir le plaignant au sol, tandis qu’un deuxième agent, à l’aide de son bras droit, tentait de saisir le bras du plaignant pour le menotter, alors que le plaignant continuait d’essayer d’éloigner son bras. Le TC no 2 a indiqué qu’aucun des agents de police ne donnait de coups de poing ou de pied au plaignant, mais qu’ils tentaient simplement de le maîtriser et de le calmer pour le menotter; il n’y a eu aucun recours à la force. Le TC no 2 a observé que le plaignant a fini par être menotté les mains derrière le dos, pendant qu’il continuait de s’éloigner des agents. Le plaignant a ensuite été placé sur une civière, puis dans une ambulance qui attendait. L’enregistrement vidéo filmé par le TC no 2 confirme entièrement cette version des événements.
Le TC no 4, l’un des deux ambulanciers paramédicaux qui étaient présents pour évaluer l’état du plaignant, a indiqué qu’à son arrivée, le plaignant se tenait debout sur le trottoir face aux deux agents de police. Le TC no 4 a indiqué que le plaignant tenait son téléphone cellulaire d’une main et qu’il était très agité et grattait sa peau, pendant que les deux agents se tenaient près de lui, lui demandant ce qui se passait. Le plaignant a répondu qu’il ne savait pas ce qui se passait et bougeait constamment de gauche à droite en agitant les bras. Les agents de police ont ensuite dit aux ambulanciers paramédicaux que le plaignant avait consommé de la cocaïne et devait être évalué. Le plaignant est ensuite entré dans l’ambulance avec les deux ambulanciers paramédicaux tandis que les agents de police sont demeurés à l’extérieur.
Une fois dans l’ambulance, les deux ambulanciers paramédicaux, le TC no 4 et sa partenaire, la TC no 3, ont entendu le plaignant indiquer qu’il avait consommé de la cocaïne ce jour-là, mais qu’il l’avait achetée d’une personne autre que son fournisseur habituel; il ne voulait pas divulguer la quantité de cocaïne qu’il avait consommée. Bien que les ambulanciers paramédicaux aient constaté que la fréquence cardiaque du plaignant était élevée, ils lui ont donné le feu vert sur le plan médical et lui ont demandé de sortir de l’ambulance.
Lorsque le plaignant est sorti de l’ambulance, l’un des agents de police l’a tapé sur l’épaule et lui a dit qu’il était en état d’arrestation, et c’est à ce moment-là que le plaignant est devenu combatif et a crié : [traduction] « Aidez-moi! », en tentant de se débarrasser de l’agent de police, qui essayait de le saisir par le bras. On a entendu l’un des agents de police dire au plaignant de cesser de résister, mais il a continué à se débattre pendant environ 20 secondes. Le TC no 4 a indiqué que les deux agents de police maintenaient le bras droit du plaignant derrière son dos, puis l’ont fait s’agenouiller sur l’allée, après quoi ils l’ont fait se coucher à plat ventre sur le sol, où le plaignant s’est frotté le visage sur la chaussée en criant et en se défendant. Le TC no 4 a ensuite observé le plaignant donner des coups de poing, d’une immense force, à l’agent de police qui tentait de maîtriser et de menotter son bras droit, obligeant ainsi l’agent à reculer et à s’avancer vers le bas du dos du plaignant, et c’est à ce moment-là que le plaignant a tenté de donner des coups de talon à l’agent et que les deux ambulanciers paramédicaux sont intervenus pour aider l’agent à maintenir le plaignant au sol.
La TC no 3, la deuxième ambulancière paramédicale, a indiqué que l’interaction physique entre les deux agents de police et le plaignant devenait agressive et combative; le plaignant battait des bras et des coudes de gauche à droite en tentant d’échapper aux agents qui essayaient de l’arrêter. La TC no 3 a entendu le plaignant crier : [traduction] « Laissez-moi tranquille! » pendant que les deux agents de police, qui, selon sa description, étaient à la fois calmes et respectueux et ne juraient pas contre le plaignant ni ne criaient après lui, disaient au plaignant : « Monsieur, essayez de vous calmer, nous devons vous menotter et vous emmener avec nous dans la voiture de police. »
La TC no 3 a observé les deux agents de police faire agenouiller le plaignant, puis le faire se coucher à plat ventre sur l’allée asphaltée; elle a indiqué que le corps du plaignant s’est plié lorsque les agents l’ont fait se coucher à plat ventre, le plaignant criant à tue-tête tout au long de l’interaction. La TC no 3 a indiqué que le contact du plaignant avec l’asphalte ne l’a pas inquiétée. Après que le plaignant était couché à plat ventre, l’un des agents de police s’est mis à cheval sur le plaignant au niveau du creux des reins, tandis que le deuxième agent tentait de maîtriser sa main et son bras gauches. Le plaignant a continué de résister et a empoigné ses propres cheveux dans sa main, tout en se frottant le visage de gauche à droite et de bas en haut sur l’asphalte, s’éraflant et s’écorchant gravement le visage.
Les deux ambulanciers paramédicaux ont observé le plaignant finir par être menotté les deux mains derrière le dos à l’aide de deux paires de menottes. Lorsque le plaignant a ensuite donné un coup de talon dans le dos de l’un des agents de police, la TC no 3 a placé son pied gauche sur l’une de ses jambes et le TC no 4 a fait de même avec l’autre jambe, afin de maintenir ses jambes au sol. Les deux ambulanciers paramédicaux ont souligné qu’à aucun moment un agent de police ou un ambulancier paramédical n’a frappé le plaignant ou ne lui a donné de coups de pied et qu’aucun agent de police ne s’est servi d’équipement permettant un recours à la force. Lorsque les agents ont demandé poliment au plaignant de se lever, il a refusé et les agents ont dû le soulever; c’est à ce moment-là qu’on a pu observer que le plaignant s’était écorché le visage et que son nez saignait. En raison des blessures qu’il s’est infligées et de son comportement étrange, ce qui, selon les ambulanciers paramédicaux, était peut-être révélateur d’un état de délire agité, on ne considérait plus le plaignant comme étant en bonne santé et la décision a été prise de le transporter à l’hôpital en ambulance; on a donc placé le plaignant sur une civière pendant que les agents maîtrisaient ses bras et les ambulanciers paramédicaux ses jambes, le plaignant continuant de se défendre et de donner des coups de pied sans relâche.
Le plaignant a ensuite été transporté à l’hôpital en ambulance, escorté par l’AI no 1. À son arrivée, on a emmené le plaignant dans l’hôpital sur la civière où il est entré dans un état de détresse médical et a eu une ASV. On a ensuite commencé à faire des compressions thoraciques et emmené le plaignant dans la salle de réanimation, où ses menottes lui ont été retirées. Malheureusement, il a été impossible de réanimer le plaignant et l’on a constaté son décès à 10 h 16.
Le médecin traitant qui a soigné le plaignant a indiqué que ses observations jusqu’au décès du plaignant étaient conformes au fait que le décès du plaignant était attribuable à une surdose de cocaïne provoquant l’arythmie ou une crise cardiaque. Le médecin n’avait aucune préoccupation quant aux écorchures sur le visage et le corps du plaignant et était d’avis que celles-ci n’ont pas contribué à son décès; l’avis médical du médecin traitant a par la suite été confirmé dans le rapport d’autopsie final et le rapport toxicologique.
Les notes de service fournies par l’AI no 1 concernant son rôle dans l’arrestation et le transport du plaignant ont été confirmées par l’ensemble des autres éléments de preuve et y étaient entièrement conformes.
Après avoir examiné l’ensemble de la preuve dans cette affaire, il est clair qu’il n’existe aucun lien causal entre le décès du plaignant et les actions de l’AI no 1 et de l’AI no 2. En outre, selon les observations de tous les témoins civils présents, il est clair que la réaction de l’AI no 1 et de l’AI no 2 à la résistance et au caractère combatif du plaignant était de ne recourir qu’à la force minimale requise pour menotter le plaignant et le placer sur la civière afin qu’il puisse recevoir les soins médicaux dont il avait besoin. De plus, le témoignage de tous les témoins civils présents a confirmé que les agents ont fait preuve de calme, de courtoisie et de professionnalisme en tout temps à l’endroit du plaignant.
Au vu du dossier devant moi, je conclus qu’il n’existe absolument aucune preuve du fait que les agents qui ont procédé à l’arrestation ont eu recours à une force excessive dans leur intervention auprès du plaignant ni du fait que leurs actions ont entraîné son décès malheureux ou y ont contribué de quelque façon que ce soit. Ainsi, étant donné que je n’ai pas les motifs nécessaires pour porter des accusations criminelles, aucune accusation ne sera donc portée.
Date : 30 novembre 2018
Original signé par
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Peu après 8 h 57 min 2 s, les deux agents de police sont arrivés à la résidence et ont parlé avec le plaignant. Le résumé des transmissions policières, également appelé « rapport sur la chronologie des événements », indique qu’on a signalé qu’à 9 h 7 min 32 s, les ambulanciers paramédicaux examinaient le plaignant, qu’à 9 h 19 min 49 s, le plaignant a été mis sous garde policière et qu’à 9 h 24 min 9 s, le plaignant était dans l’ambulance en route pour l’hôpital accompagné de l’AI no 1, l’AI no 2 les suivant dans sa voiture de police. À 9 h 56 min 3 s, on a signalé que le plaignant était à l’hôpital, mais qu’il avait une ASV et que les médecins tentaient de le réanimer. À 10 h 16, on a constaté le décès du plaignant et l’UES a été avisée, puis une enquête a été lancée.
Le 2 novembre 2017, une autopsie a été pratiquée par un pathologiste médicolégal, mais aucune cause de décès immédiate n’a pu être déterminée à ce moment-là dans l’attente des résultats des analyses toxicologiques du sang et de l’urine du plaignant. Le 17 octobre 2018, l’UES a reçu le rapport d’autopsie final lié à l’examen du corps du plaignant, ainsi que le rapport toxicologique en annexe.
Le rapport toxicologique indiquait que le plaignant avait à la fois de la cocaïne et de la benzoylecgonine, le produit de fractionnement de la cocaïne, dans son système au moment de son décès et qu’on avait déterminé que la cause de son décès était une intoxication à la cocaïne chez un homme atteint de cardiomégalie (hypertrophie anormale du cœur) et de maladie coronarienne athérosclérotique (artères obstruées). Autrement dit, le décès du plaignant était attribuable à sa consommation de cocaïne, ce qui a entraîné un incident cardiaque, puis la mort. Bien que l’on ait constaté la présence d’abrasions superficielles sur le visage et le corps du plaignant, on a déterminé que celles-ci n’étaient pas liées à son décès et qu’elles n’y avaient contribué en rien.
Dans le cadre de cette enquête, quatre témoins civils qui étaient présents lors de l’intervention policière auprès du plaignant, ainsi qu’un membre de la famille et le médecin qui a traité le plaignant, ont participé à une entrevue. Bien que les deux agents impliqués, qui étaient avec le plaignant avant son décès, n’aient pas consenti à participer à une entrevue avec les enquêteurs de l’UES, comme la loi les y autorise, l’AI no 1 a fourni ses notes sur l’incident aux fins d’examen. Un agent témoin a également participé à une entrevue et cinq agents de police ont fourni leurs notes aux enquêteurs de l’UES. En outre, les enquêteurs de l’UES avaient accès à une vidéo filmée par un témoin civil indépendant de l’intervention policière, ainsi qu’au rapport d’autopsie final et au rapport toxicologique produits à la suite du décès du plaignant.
Le plaignant n’a jamais été seul avec l’AI no 1 ou l’AI no 2, au moins un témoin civil indépendant étant présent dès le premier contact, jusqu’à ce que l’on constate le décès du plaignant à l’hôpital. Pour cette raison, en dépit du fait qu’aucun des agents impliqués n’a fourni de déclaration verbale aux enquêteurs de l’UES, la totalité de l’interaction entre l’AI no 1 et l’AI no 2 est justifiée et les faits ne sont pas contestés.
Selon une témoin civile indépendante, la TC no 1, elle a jeté le plaignant dehors vers 8 h ce matin-là et lorsqu’il est revenu une demi-heure plus tard, elle savait immédiatement qu’il avait consommé de la cocaïne; elle était en mesure de le savoir parce qu’elle avait déjà eu affaire à lui lorsqu’il en avait consommé. Par conséquent, la TC no 1 refusait de faire entrer de nouveau le plaignant dans son domicile et elle l’a observé composer le 911, lorsqu’il était à l’extérieur de son domicile, pour demander l’aide de la police.
Lorsque les deux agents de police sont arrivés vers 8 h 45, la TC no 1 les a entendus demander au plaignant de s’identifier, ce qu’il a fait; la TC no 1 est ensuite entrée dans son domicile et a fermé la porte. Peu après, la TC no 1 a entendu le plaignant crier : [traduction] « Aidez-moi! » et elle a regardé dehors et l’a vu couché à plat ventre, les deux agents de police sur lui tentant de le menotter. La TC no 1 a ensuite ouvert sa porte pour demander ce qui se passait et l’un des agents a indiqué que le plaignant [traduction] « hallucinait ». La TC no 1 a observé que le plaignant résistait aux tentatives de le menotter en se tortillant et en se tordant sur le sol.
Le TC no 2 a regardé par la fenêtre de sa résidence et a observé les deux agents de police tentant d’arrêter le plaignant, qu’il a décrit comme se débattant et résistant à l’arrestation. Le TC no 2 a observé la lutte se poursuivre de l’autre côté de la rue et sur le sol, et c’est à ce moment que le TC no 2 a commencé à filmer l’intervention avec son téléphone cellulaire. Le TC no 2 a indiqué que les agents de police tentaient de maintenir le plaignant au sol, pendant qu’il continuait de résister et qu’il criait : [traduction] « Aidez-moi! » De même, le TC no 2 a indiqué que le plaignant était étendu à plat ventre et qu’un agent était agenouillé à côté de lui, un genou reposant sur la jambe du plaignant, pendant qu’il utilisait son bras gauche pour tenter de maintenir le plaignant au sol, tandis qu’un deuxième agent, à l’aide de son bras droit, tentait de saisir le bras du plaignant pour le menotter, alors que le plaignant continuait d’essayer d’éloigner son bras. Le TC no 2 a indiqué qu’aucun des agents de police ne donnait de coups de poing ou de pied au plaignant, mais qu’ils tentaient simplement de le maîtriser et de le calmer pour le menotter; il n’y a eu aucun recours à la force. Le TC no 2 a observé que le plaignant a fini par être menotté les mains derrière le dos, pendant qu’il continuait de s’éloigner des agents. Le plaignant a ensuite été placé sur une civière, puis dans une ambulance qui attendait. L’enregistrement vidéo filmé par le TC no 2 confirme entièrement cette version des événements.
Le TC no 4, l’un des deux ambulanciers paramédicaux qui étaient présents pour évaluer l’état du plaignant, a indiqué qu’à son arrivée, le plaignant se tenait debout sur le trottoir face aux deux agents de police. Le TC no 4 a indiqué que le plaignant tenait son téléphone cellulaire d’une main et qu’il était très agité et grattait sa peau, pendant que les deux agents se tenaient près de lui, lui demandant ce qui se passait. Le plaignant a répondu qu’il ne savait pas ce qui se passait et bougeait constamment de gauche à droite en agitant les bras. Les agents de police ont ensuite dit aux ambulanciers paramédicaux que le plaignant avait consommé de la cocaïne et devait être évalué. Le plaignant est ensuite entré dans l’ambulance avec les deux ambulanciers paramédicaux tandis que les agents de police sont demeurés à l’extérieur.
Une fois dans l’ambulance, les deux ambulanciers paramédicaux, le TC no 4 et sa partenaire, la TC no 3, ont entendu le plaignant indiquer qu’il avait consommé de la cocaïne ce jour-là, mais qu’il l’avait achetée d’une personne autre que son fournisseur habituel; il ne voulait pas divulguer la quantité de cocaïne qu’il avait consommée. Bien que les ambulanciers paramédicaux aient constaté que la fréquence cardiaque du plaignant était élevée, ils lui ont donné le feu vert sur le plan médical et lui ont demandé de sortir de l’ambulance.
Lorsque le plaignant est sorti de l’ambulance, l’un des agents de police l’a tapé sur l’épaule et lui a dit qu’il était en état d’arrestation, et c’est à ce moment-là que le plaignant est devenu combatif et a crié : [traduction] « Aidez-moi! », en tentant de se débarrasser de l’agent de police, qui essayait de le saisir par le bras. On a entendu l’un des agents de police dire au plaignant de cesser de résister, mais il a continué à se débattre pendant environ 20 secondes. Le TC no 4 a indiqué que les deux agents de police maintenaient le bras droit du plaignant derrière son dos, puis l’ont fait s’agenouiller sur l’allée, après quoi ils l’ont fait se coucher à plat ventre sur le sol, où le plaignant s’est frotté le visage sur la chaussée en criant et en se défendant. Le TC no 4 a ensuite observé le plaignant donner des coups de poing, d’une immense force, à l’agent de police qui tentait de maîtriser et de menotter son bras droit, obligeant ainsi l’agent à reculer et à s’avancer vers le bas du dos du plaignant, et c’est à ce moment-là que le plaignant a tenté de donner des coups de talon à l’agent et que les deux ambulanciers paramédicaux sont intervenus pour aider l’agent à maintenir le plaignant au sol.
La TC no 3, la deuxième ambulancière paramédicale, a indiqué que l’interaction physique entre les deux agents de police et le plaignant devenait agressive et combative; le plaignant battait des bras et des coudes de gauche à droite en tentant d’échapper aux agents qui essayaient de l’arrêter. La TC no 3 a entendu le plaignant crier : [traduction] « Laissez-moi tranquille! » pendant que les deux agents de police, qui, selon sa description, étaient à la fois calmes et respectueux et ne juraient pas contre le plaignant ni ne criaient après lui, disaient au plaignant : « Monsieur, essayez de vous calmer, nous devons vous menotter et vous emmener avec nous dans la voiture de police. »
La TC no 3 a observé les deux agents de police faire agenouiller le plaignant, puis le faire se coucher à plat ventre sur l’allée asphaltée; elle a indiqué que le corps du plaignant s’est plié lorsque les agents l’ont fait se coucher à plat ventre, le plaignant criant à tue-tête tout au long de l’interaction. La TC no 3 a indiqué que le contact du plaignant avec l’asphalte ne l’a pas inquiétée. Après que le plaignant était couché à plat ventre, l’un des agents de police s’est mis à cheval sur le plaignant au niveau du creux des reins, tandis que le deuxième agent tentait de maîtriser sa main et son bras gauches. Le plaignant a continué de résister et a empoigné ses propres cheveux dans sa main, tout en se frottant le visage de gauche à droite et de bas en haut sur l’asphalte, s’éraflant et s’écorchant gravement le visage.
Les deux ambulanciers paramédicaux ont observé le plaignant finir par être menotté les deux mains derrière le dos à l’aide de deux paires de menottes. Lorsque le plaignant a ensuite donné un coup de talon dans le dos de l’un des agents de police, la TC no 3 a placé son pied gauche sur l’une de ses jambes et le TC no 4 a fait de même avec l’autre jambe, afin de maintenir ses jambes au sol. Les deux ambulanciers paramédicaux ont souligné qu’à aucun moment un agent de police ou un ambulancier paramédical n’a frappé le plaignant ou ne lui a donné de coups de pied et qu’aucun agent de police ne s’est servi d’équipement permettant un recours à la force. Lorsque les agents ont demandé poliment au plaignant de se lever, il a refusé et les agents ont dû le soulever; c’est à ce moment-là qu’on a pu observer que le plaignant s’était écorché le visage et que son nez saignait. En raison des blessures qu’il s’est infligées et de son comportement étrange, ce qui, selon les ambulanciers paramédicaux, était peut-être révélateur d’un état de délire agité, on ne considérait plus le plaignant comme étant en bonne santé et la décision a été prise de le transporter à l’hôpital en ambulance; on a donc placé le plaignant sur une civière pendant que les agents maîtrisaient ses bras et les ambulanciers paramédicaux ses jambes, le plaignant continuant de se défendre et de donner des coups de pied sans relâche.
Le plaignant a ensuite été transporté à l’hôpital en ambulance, escorté par l’AI no 1. À son arrivée, on a emmené le plaignant dans l’hôpital sur la civière où il est entré dans un état de détresse médical et a eu une ASV. On a ensuite commencé à faire des compressions thoraciques et emmené le plaignant dans la salle de réanimation, où ses menottes lui ont été retirées. Malheureusement, il a été impossible de réanimer le plaignant et l’on a constaté son décès à 10 h 16.
Le médecin traitant qui a soigné le plaignant a indiqué que ses observations jusqu’au décès du plaignant étaient conformes au fait que le décès du plaignant était attribuable à une surdose de cocaïne provoquant l’arythmie ou une crise cardiaque. Le médecin n’avait aucune préoccupation quant aux écorchures sur le visage et le corps du plaignant et était d’avis que celles-ci n’ont pas contribué à son décès; l’avis médical du médecin traitant a par la suite été confirmé dans le rapport d’autopsie final et le rapport toxicologique.
Les notes de service fournies par l’AI no 1 concernant son rôle dans l’arrestation et le transport du plaignant ont été confirmées par l’ensemble des autres éléments de preuve et y étaient entièrement conformes.
Après avoir examiné l’ensemble de la preuve dans cette affaire, il est clair qu’il n’existe aucun lien causal entre le décès du plaignant et les actions de l’AI no 1 et de l’AI no 2. En outre, selon les observations de tous les témoins civils présents, il est clair que la réaction de l’AI no 1 et de l’AI no 2 à la résistance et au caractère combatif du plaignant était de ne recourir qu’à la force minimale requise pour menotter le plaignant et le placer sur la civière afin qu’il puisse recevoir les soins médicaux dont il avait besoin. De plus, le témoignage de tous les témoins civils présents a confirmé que les agents ont fait preuve de calme, de courtoisie et de professionnalisme en tout temps à l’endroit du plaignant.
Au vu du dossier devant moi, je conclus qu’il n’existe absolument aucune preuve du fait que les agents qui ont procédé à l’arrestation ont eu recours à une force excessive dans leur intervention auprès du plaignant ni du fait que leurs actions ont entraîné son décès malheureux ou y ont contribué de quelque façon que ce soit. Ainsi, étant donné que je n’ai pas les motifs nécessaires pour porter des accusations criminelles, aucune accusation ne sera donc portée.
Date : 30 novembre 2018
Original signé par
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.