Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-340
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)
En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :- de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
- de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.
En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- le nom de tout agent impliqué;
- le nom de tout agent témoin;
- le nom de tout témoin civil;
- les renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)
En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables.Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.Exercice du mandat
La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave qu’a subie un homme de 58 ans lors de son arrestation, le 18 novembre 2017.
On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.
Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave qu’a subie un homme de 58 ans lors de son arrestation, le 18 novembre 2017.
L’enquête
Notification de l’UES
Le samedi 18 novembre 2017, vers 12 h 50, l’UES a été avisée par le Service de police régional de Halton (SPRH) de la blessure grave subie par le plaignant. Selon le SPRH, le samedi 18 novembre 2017, à 9 h 54, la police a été appelée à une filiale de la Banque Royale du Canada, au 360, rue Pearl, dans la ville de Burlington, au sujet d’un homme [que l’on sait maintenant être le plaignant] qui essayait d’ouvrir un compte bancaire frauduleux. Le plaignant s’est enfui de la banque à pied. L’agent impliqué (AI) et l’agent témoin (AT) no 1 ont arrêté le plaignant après une poursuite à pied. L’AI a plaqué le plaignant au sol au cours de son arrestation. Le plaignant s’est plaint de douleurs à l’épaule et il a été transporté à l’hôpital, où on lui a diagnostiqué une fracture de l’épaule à 12 h 33. D’après le SPRH, les données de caméras de télévision en circuit fermé (TVCF) à la banque ont été sécurisées. Des agents de police ont poursuivi l’enquête sur les activités frauduleuses, mais n’ont pas mené d’entrevue avec le plaignant.
L’équipe
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2 Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
Les enquêteurs de l’UES ont mené des entrevues auprès de témoins potentiels et ont cherché d’autres témoins ainsi que des images de caméras de TVCF pertinentes pour l’incident. Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont documenté en détail les lieux où le plaignant a été arrêté par des photographies numériques et des enregistrements vidéo, et ont documenté les blessures aux tissus mous du plaignant par des photographies numériques.
Plaignant :
Homme de 58 ans; a participé à une entrevue, ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.Témoins civils
TC no 1 A participé à une entrevue.Agents témoins
AT no 1 A participé à une entrevue, ses notes ont été reçues et examinées.Employé de la police témoin
EPT no 1 A participé à une entrevue, ses notes ont été reçues et examinées.Agents impliqués
AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.Description de l’incident
Le samedi 18 novembre 2017, peu de temps avant 10 h 00, le plaignant est entré dans une filiale de la Banque Royale du Canada (BRC), au 360, rue Pearl, dans la ville de Burlington. Utilisant un faux nom et produisant de fausses pièces d’identité, le plaignant a demandé à un membre du personnel de la banque des renseignements en vue d’ouvrir un compte bancaire sous son faux nom.
Lorsque le personnel de la banque a commencé à avoir des soupçons à l’égard du plaignant, la banque a appelé le SPRH en demandant que des agents de police soient dépêchés immédiatement, car le plaignant se trouvait encore dans la banque. L’AI et l’AT no 1 sont arrivés à la banque et ont tenté de conduire le plaignant vers un bureau pour discuter de la situation, mais le plaignant a pris la fuite, se dirigeant en courant vers les portes de la banque. Il a parcouru une brève distance en courant, direction ouest. L’AI s’est lancé à la poursuite du plaignant, à pied, l’a rattrapé et l’a plaqué au sol, sur le trottoir en béton.
Le plaignant a immédiatement ressenti des douleurs à l’épaule gauche après être tombé par terre. Il a ensuite été placé sous garde et menotté, puis il a été transporté en ambulance à l’hôpital.
Nature des blessures et traitement
Le plaignant a subi une fracture comminutive, légèrement déplacée, de l’humérus proximal gauche (le long os dans le haut du bras qui relie l’épaule au coude). Son bras a été immobilisé dans une écharpe en attendant la poursuite de l’enquête et une éventuelle intervention chirurgicale de réduction/stabilisation.
Lorsque le personnel de la banque a commencé à avoir des soupçons à l’égard du plaignant, la banque a appelé le SPRH en demandant que des agents de police soient dépêchés immédiatement, car le plaignant se trouvait encore dans la banque. L’AI et l’AT no 1 sont arrivés à la banque et ont tenté de conduire le plaignant vers un bureau pour discuter de la situation, mais le plaignant a pris la fuite, se dirigeant en courant vers les portes de la banque. Il a parcouru une brève distance en courant, direction ouest. L’AI s’est lancé à la poursuite du plaignant, à pied, l’a rattrapé et l’a plaqué au sol, sur le trottoir en béton.
Le plaignant a immédiatement ressenti des douleurs à l’épaule gauche après être tombé par terre. Il a ensuite été placé sous garde et menotté, puis il a été transporté en ambulance à l’hôpital.
Nature des blessures et traitement
Le plaignant a subi une fracture comminutive, légèrement déplacée, de l’humérus proximal gauche (le long os dans le haut du bras qui relie l’épaule au coude). Son bras a été immobilisé dans une écharpe en attendant la poursuite de l’enquête et une éventuelle intervention chirurgicale de réduction/stabilisation. Éléments de preuve
Les lieux
Le bâtiment se trouvant à l’adresse concernée est un immeuble résidentiel de condominiums, portant le nom de « 360 on Pearl ». L’entrée principale de l’immeuble est située sur la Lakeshore Road, dans la ville de Burlington.
La rue Pearl se trouve à l’est de l’entrée principale de l’immeuble et a une orientation nord-sud au nord de Lakeshore Road.
Il y avait deux dômes de caméras de vidéosurveillance à l’extérieur de la façade de l’immeuble, devant l’entrée principale. Le spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est arrangé avec le concierge pour recevoir les données des caméras de TVCF pertinentes pour l’incident.
La filiale concernée de la BRC et son entrée principale se trouvaient à l’est de l’immeuble de condominiums et y étaient rattachées.
Éléments de preuves médicolégaux
Aucun élément n’a été soumis au Centre des sciences judiciaires. Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques
Données des caméras de TVCF
Voici un résumé des données des caméras de TVCF que les enquêteurs de l’UES ont trouvées et sécurisées à l’immeuble résidentiel de condominiums du 360, rue Pearl, à Burlington. L’immeuble est adjacent au côté ouest du bâtiment de la BRC. La caméra de TVCF est apposée sur la façade frontale du bâtiment, face à Lakeshore Road, et est tournée vers l’est. La caméra n’a pas filmé l’entrée principale de la banque RBC, car la vue était bloquée par un pilier de pierre situé à l’extrémité du coin ouest du bâtiment de la banque.
L’enregistrement vidéo portait la date du 18 novembre 2017. La séquence a commencé à 9 h 50 min 01 sec. et s’est terminée à 9 h 53 min 12 sec. le matin.
- 9 h 50 min 01 sec. La circulation routière est filmée, direction est-ouest sur la Lakeshore Road;
- 9 h 51 min 43 sec. Une femme passe à pied devant l’entrée de la banque BRC, se dirigeant vers l’ouest;
- 9 h 51 min 46 sec. Une personne [que l’on sait maintenant être l’EPT no 1] entre dans le champ de vision de la caméra. L’employé de la police témoin (EPT) no 1, qui portait un manteau sombre et des pantalons de couleur claire, s’est déplacé rapidement de la zone de l’entrée de la banque vers le milieu du trottoir. Il s’est baissé et semblait ramasser quelque chose par terre [ce que l’on sait maintenant être une matraque de police];
- 9 h 51 min 47 sec. Au moment où l’EPT no 1 se baissait, le plaignant est entré dans le champ de vision de la caméra, alors qu’il s’éloignait en courant, direction ouest, de la zone d’entrée de la banque. Le plaignant courait près de l’entrée du bâtiment de la banque. L’AI courait derrière lui, se tenant légèrement au sud du plaignant. L’AI s’est placé perpendiculairement au plaignant et s’est jeté sur lui, l’attrapant à la taille, comme au football américain. Ils sont tombés tous les deux en avant, sortant du champ de vision de la caméra, vers le pilier de pierre du bâtiment, puis ont rebondi du bâtiment sur le trottoir. Le plaignant a heurté le sol sur le côté gauche de son corps et l’AI est tombé sur lui. Le bras gauche de l’AI s’est trouvé coincé sous le corps du plaignant lorsqu’ils ont touché le sol. Le haut de la tête du plaignant était tourné vers l’ouest;
- 9 h 51 min 48 sec. L’AT no 1 est entré dans le champ de vision de la caméra, arrivant en courant depuis l’entrée de la banque. Il s’est mis à genoux du côté droit du plaignant;
- 9 h 51 min 49 sec. L’AI s’est relevé, mais est resté à genoux, par terre, du côté droit du plaignant. Le plaignant était couché sur le dos et l’AI et l’AT no 1 l’ont retourné sur le ventre. La tête du plaignant était tournée vers le sud;
- 9 h 51 min 51 sec. L’AI et l’AT no 1 semblaient maintenir en place les épaules du plaignant comme s’ils cherchaient à l’empêcher de bouger;
- 9 h 51 min 57 sec. L’EPT no 1 est arrivé à pied et s’est tenu près de l’endroit où le plaignant et les agents de police se trouvaient par terre;
- 9 h 52 min 17 sec. L’AI et l’AT no 1 ne touchaient plus le plaignant, qui se trouvait par terre, sur le ventre, sur le trottoir. Ses mains semblaient menottées derrière son dos;
- 9 h 52 min 19 sec. L’EPT no 1 a tendu à l’AI la matraque et est reparti vers l’entrée de la banque;
- 9 h 52 min 30 sec. L’AI et l’AT no 1 ont chacun placé une main sur la poitrine du plaignant et l’ont mis debout. L’AT no 1 se trouvait sur le côté droit du plaignant et l’AI se trouvait sur le côté gauche du plaignant;
- 9 h 52 min 45 sec. Le plaignant a été escorté par l’AI et l’AT no 1 vers la banque et ils sont sortis du champ de vision de la caméra.
Enregistrements de communications
L’appel au SPRH composé par la BRC et les enregistrements des communications de la police ont été obtenus et examinés.Éléments obtenus auprès du Service de police
Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants du SPRH :- Rapport d’arrestation;
- Enregistrements de communications audio;
- Schéma des lieux par l’AT no 1;
- Rapport sur la chronologie des événements;
- Carte Google ® marquée par l’AT no 1 et l’EPT no 1;
- Photos des lieux du SPRH;
- Rapport de l’AI détaillant l’incident;
- Rapport médical des blessures;
- Notes de l’AT no 1 et de l’EPT no 1;
- Dossier du placement sous garde du prisonnier;
- Procédure relative au recours à la force;
- Dossiers de formation de l’AI;
- Liste de témoins avec photographie des lieux en annexe.
- Données des caméras de TVCF du « 360 on Pearl »;
- Dossiers médicaux, y compris l’imagerie diagnostique, du plaignant en ce qui concerne l’incident du 18 novembre 2017 (obtenu avec son consentement).
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :a) soit à titre de particulierest, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
Analyse et décision du directeur
Le 18 novembre 2017, vers 9 h 48, un employé de la filiale de la Banque Royale du Canada (BRC) située à la rue Pearl, dans la ville de Burlington, a appelé le Service de police régional de Halton (SPRH) pour lui signaler qu’un homme se trouvait dans la banque en vue d’ouvrir un compte bancaire; l’employé de banque a eu l’impression que la transaction était suspecte et que l’homme utilisait de fausses pièces d’identité pour ouvrir le compte.
En réponse à l’appel, l’agent impliqué (AI) et l’agent témoin (AT) no 1 se sont rendus à la banque, arrivant à 9 h 51. Peu de temps après, l’homme, le plaignant, a été appréhendé et arrêté. Au cours de l’arrestation, le plaignant a été blessé et a été transporté à l’hôpital où il a été examiné. On lui a diagnostiqué une fracture comminutive, légèrement déplacée, de l’humérus proximal gauche (le long os dans le haut du bras qui relie l’épaule au coude).
Au cours de l’enquête, à part le plaignant, un agent spécial qui n’était pas de service, mais qui entrait dans la banque pour des affaires personnelles, par hasard au moment où le plaignant sortait de la banque, et le témoin civil (TC) no 1, ont subi une entrevue, ainsi que le médecin qui a examiné le plaignant. Par ailleurs, des enquêteurs de l’UES ont retrouvé et examiné l’enregistrement des caméras de télévision en circuit fermé (TVCF), qui ont filmé l’arrestation du plaignant. Les faits ont soulevé très peu de contestation.
Lorsque l’AI et l’AT no 1 sont entrés dans la BRC pour donner suite à l’appel concernant le comportement suspect du plaignant, ce dernier les a aperçus et a décidé de quitter la banque. Alors qu’il se dirigeait vers la sortie de la banque, l’AT no 1 l’a interpellé et les deux agents lui ont demandé de les accompagner vers un bureau de la banque pour discuter. Bien que les policiers ne lui aient pas précisé de quoi ils voulaient lui parler, le plaignant a reconnu qu’il avait une bonne idée de ce dont il s’agissait. Un des agents de police a placé sa main sous le coude du plaignant pour le diriger vers le bureau.
Pendant qu’ils marchaient en direction du bureau, l’AT no 1 se trouvait légèrement derrière le plaignant et l’AI légèrement devant le plaignant. Voyant une possibilité de fuite, le plaignant s’est mis à courir en direction de la porte de sortie de la banque, juste au moment où, par hasard, l’employé de la police témoin (EPT) no 1, qui n’était pas en service à ce moment-là et venait à la banque pour des affaires personnelles, entrait dans la banque. Comme l’EPT no 1 était sur le point d’entrer dans la banque, il bloquait la porte et le plaignant a alors tenté de sortir par une autre porte, sur la droite, mais celle-ci était verrouillée, ce qui a retardé la sortie du plaignant et a permis aux policiers de réduire la distance entre eux et le plaignant.
Alors que le plaignant sortait de la banque par la porte d’entrée, il a remarqué que l’un des agents de police essayait de l’attraper.
Une fois hors du vestibule de la banque, le plaignant s’est dirigé vers la droite, les deux agents de police à ses trousses. Après avoir parcouru en courant environ 30 pieds, l’AI a tendu les bras et s’est jeté sur le plaignant, lui attrapant la taille avec ses deux bras comme s’il voulait l’enlacer. Ils sont tous les deux tombés par terre, l’AI atterrissant sur le corps du plaignant. Le plaignant pense qu’il a tendu son bras gauche pour essayer d’amortir sa chute.
Une fois par terre, sur le ventre, l’AI, qui se trouvait sur le dos du plaignant, a attrapé le bras gauche du plaignant et l’a placé derrière son dos pour le menotter. Le plaignant n’a commencé à ressentir de la douleur dans son bras gauche que lorsque l’AI lui a tiré le bras. Le plaignant croyait que sa blessure avait été causée par ce mouvement. Toutefois, les preuves médicales ont confirmé que la blessure au bras gauche du plaignant ne semblait pas avoir été causée par les mouvements de l’AI en vue de placer le bras du plaignant derrière son dos, mais qu’elle découlait plutôt de la chute ou du heurt de l’humérus contre une surface dure, comme la chaussée. Le médecin a souligné que la blessure n’avait certainement pas été causée par des coups ou un membre tordu ou déchiré, car la fracture se serait présentée différemment. Cette blessure a été causée par un traumatisme contondant par suite d’un coup sur une surface dure, immobile, comme le trottoir.
Selon les preuves, il ne peut donc pas être contesté que la blessure subie par le plaignant a été causée par le heurt du bras du plaignant contre la chaussée, lorsque l’AI l’a attrapé et plaqué au sol. La seule question qu’il reste à trancher est celle de savoir si la manœuvre de l’agent exercée pour attraper le plaignant constitue un usage excessif de la force de la part de l’AI.
En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, un agent de police qui s’appuie sur des motifs raisonnables est fondé à employer la force nécessaire pour exercer ses fonctions légales. En conséquence, pour que l’AI puisse se prévaloir de la protection contre des poursuites que prévoit l’article 25, il faut établir qu’il exerçait ses fonctions légales, qu’il s’appuyait sur des motifs raisonnables et qu’il n’a pas employé plus que la force nécessaire.
Premièrement, en ce qui concerne la légalité de l’appréhension du plaignant, il ressort clairement des renseignements fournis par la BRC, lors de l’appel téléphonique au poste de police et plus tard aux agents de police lors de leur arrivée à la banque, que les agents de police avaient des motifs raisonnables d’appréhender le plaignant et de mener une enquête sur un soupçon de fraude en cours. Même si les agents de police ne détenaient pas suffisamment de preuves pour arrêter le plaignant en se fondant uniquement sur les soupçons d’employés de la banque, ils avaient certainement des motifs raisonnables de détenir le plaignant et de faire enquête sur lui. Lorsque le plaignant a pris la fuite, cela a renforcé les soupçons des policiers et confirmé leurs motifs raisonnables.
Par conséquent, les actions initiales des policiers en vue de tenter de mener une enquête sur le plaignant étaient légales et raisonnables. Après que le plaignant a pris la fuite, les policiers avaient des motifs raisonnables de se lancer à sa poursuite pour l’appréhender et le placer en état d’arrestation pour fraude. Ainsi, en vertu des exigences prévues par le paragraphe 25 (1) du Code criminel, étant donné que les policiers exécutaient des fonctions légales et qu’ils s’appuyaient sur des motifs raisonnables, ils ne doivent pas faire l’objet de poursuites, tant qu’ils ont employé la force nécessaire pour cette fin légale.
Au vu de tous les éléments de preuve et comme l’a confirmé l’enregistrement vidéo des caméras de TVCF, il n’est pas contesté que la seule force que l’AI a employée pour appréhender le plaignant était de l’attraper en entourant sa taille de ses deux bras pour le projeter à terre; aucune autre force n’a été utilisée après que le plaignant a été immobilisé, autre que de lui tirer les mains derrière le dos pour le menotter. Il est également évident que le plaignant n’a laissé aucune autre option aux agents de police lorsqu’il a décidé de prendre la fuite en courant et qu’il était de la responsabilité de la police, après avoir reçu une plainte pour fraude, d’appréhender le plaignant et de faire enquête sur la plainte.
En vertu de ces faits et en dépit de la blessure malheureuse que le plaignant a subie, je ne peux pas conclure que les actions de l’AI constituaient plus que ce qui était nécessaire et justifié dans les circonstances. Pour arriver à cette conclusion, je tiens compte de l’interprétation de la loi énoncée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R c. Nasogaluak [2010] 1 R.C.S. 206, en ces termes :
Par ailleurs, j’ai tenu compte de la décision de la Cour d’appel de l’Ontario, dans l’affaire R. v. Baxter (1975) 27 C.C.C. (2d) 96 (Ont. C.A.), selon laquelle on n’attend pas des agents de police qu’ils évaluent avec précision la mesure exacte de la force qu’ils emploient. En l’espèce, il est évident que la force employée par l’AI pour appréhender le plaignant était la seule option possible pour l’empêcher de s’enfuir. Si le plaignant n’avait pas décidé de prendre la fuite pour échapper à la police, l’AI n’aurait pas eu besoin de recourir à la force pour l’appréhender et le plaignant n’aurait jamais été blessé. Au vu de ces faits, je conclus que ce sont les actions du plaignant lui-même qui ont malheureusement conduit à sa blessure.
En conclusion, selon les faits devant moi, qui ne sont pas réellement contestés et qui sont entièrement confirmés par l’enregistrement vidéo des caméras de TVCF, je ne suis pas d’avis que les preuves sont suffisantes pour me donner des motifs raisonnables de croire que les actions de l’AI étaient excessives ni qu’elles sont suffisantes pour justifier le dépôt d’accusations criminelles. Aucune accusation criminelle ne sera donc déposée.
Date : 16 octobre 2018
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
En réponse à l’appel, l’agent impliqué (AI) et l’agent témoin (AT) no 1 se sont rendus à la banque, arrivant à 9 h 51. Peu de temps après, l’homme, le plaignant, a été appréhendé et arrêté. Au cours de l’arrestation, le plaignant a été blessé et a été transporté à l’hôpital où il a été examiné. On lui a diagnostiqué une fracture comminutive, légèrement déplacée, de l’humérus proximal gauche (le long os dans le haut du bras qui relie l’épaule au coude).
Au cours de l’enquête, à part le plaignant, un agent spécial qui n’était pas de service, mais qui entrait dans la banque pour des affaires personnelles, par hasard au moment où le plaignant sortait de la banque, et le témoin civil (TC) no 1, ont subi une entrevue, ainsi que le médecin qui a examiné le plaignant. Par ailleurs, des enquêteurs de l’UES ont retrouvé et examiné l’enregistrement des caméras de télévision en circuit fermé (TVCF), qui ont filmé l’arrestation du plaignant. Les faits ont soulevé très peu de contestation.
Lorsque l’AI et l’AT no 1 sont entrés dans la BRC pour donner suite à l’appel concernant le comportement suspect du plaignant, ce dernier les a aperçus et a décidé de quitter la banque. Alors qu’il se dirigeait vers la sortie de la banque, l’AT no 1 l’a interpellé et les deux agents lui ont demandé de les accompagner vers un bureau de la banque pour discuter. Bien que les policiers ne lui aient pas précisé de quoi ils voulaient lui parler, le plaignant a reconnu qu’il avait une bonne idée de ce dont il s’agissait. Un des agents de police a placé sa main sous le coude du plaignant pour le diriger vers le bureau.
Pendant qu’ils marchaient en direction du bureau, l’AT no 1 se trouvait légèrement derrière le plaignant et l’AI légèrement devant le plaignant. Voyant une possibilité de fuite, le plaignant s’est mis à courir en direction de la porte de sortie de la banque, juste au moment où, par hasard, l’employé de la police témoin (EPT) no 1, qui n’était pas en service à ce moment-là et venait à la banque pour des affaires personnelles, entrait dans la banque. Comme l’EPT no 1 était sur le point d’entrer dans la banque, il bloquait la porte et le plaignant a alors tenté de sortir par une autre porte, sur la droite, mais celle-ci était verrouillée, ce qui a retardé la sortie du plaignant et a permis aux policiers de réduire la distance entre eux et le plaignant.
Alors que le plaignant sortait de la banque par la porte d’entrée, il a remarqué que l’un des agents de police essayait de l’attraper.
Une fois hors du vestibule de la banque, le plaignant s’est dirigé vers la droite, les deux agents de police à ses trousses. Après avoir parcouru en courant environ 30 pieds, l’AI a tendu les bras et s’est jeté sur le plaignant, lui attrapant la taille avec ses deux bras comme s’il voulait l’enlacer. Ils sont tous les deux tombés par terre, l’AI atterrissant sur le corps du plaignant. Le plaignant pense qu’il a tendu son bras gauche pour essayer d’amortir sa chute.
Une fois par terre, sur le ventre, l’AI, qui se trouvait sur le dos du plaignant, a attrapé le bras gauche du plaignant et l’a placé derrière son dos pour le menotter. Le plaignant n’a commencé à ressentir de la douleur dans son bras gauche que lorsque l’AI lui a tiré le bras. Le plaignant croyait que sa blessure avait été causée par ce mouvement. Toutefois, les preuves médicales ont confirmé que la blessure au bras gauche du plaignant ne semblait pas avoir été causée par les mouvements de l’AI en vue de placer le bras du plaignant derrière son dos, mais qu’elle découlait plutôt de la chute ou du heurt de l’humérus contre une surface dure, comme la chaussée. Le médecin a souligné que la blessure n’avait certainement pas été causée par des coups ou un membre tordu ou déchiré, car la fracture se serait présentée différemment. Cette blessure a été causée par un traumatisme contondant par suite d’un coup sur une surface dure, immobile, comme le trottoir.
Selon les preuves, il ne peut donc pas être contesté que la blessure subie par le plaignant a été causée par le heurt du bras du plaignant contre la chaussée, lorsque l’AI l’a attrapé et plaqué au sol. La seule question qu’il reste à trancher est celle de savoir si la manœuvre de l’agent exercée pour attraper le plaignant constitue un usage excessif de la force de la part de l’AI.
En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, un agent de police qui s’appuie sur des motifs raisonnables est fondé à employer la force nécessaire pour exercer ses fonctions légales. En conséquence, pour que l’AI puisse se prévaloir de la protection contre des poursuites que prévoit l’article 25, il faut établir qu’il exerçait ses fonctions légales, qu’il s’appuyait sur des motifs raisonnables et qu’il n’a pas employé plus que la force nécessaire.
Premièrement, en ce qui concerne la légalité de l’appréhension du plaignant, il ressort clairement des renseignements fournis par la BRC, lors de l’appel téléphonique au poste de police et plus tard aux agents de police lors de leur arrivée à la banque, que les agents de police avaient des motifs raisonnables d’appréhender le plaignant et de mener une enquête sur un soupçon de fraude en cours. Même si les agents de police ne détenaient pas suffisamment de preuves pour arrêter le plaignant en se fondant uniquement sur les soupçons d’employés de la banque, ils avaient certainement des motifs raisonnables de détenir le plaignant et de faire enquête sur lui. Lorsque le plaignant a pris la fuite, cela a renforcé les soupçons des policiers et confirmé leurs motifs raisonnables.
Par conséquent, les actions initiales des policiers en vue de tenter de mener une enquête sur le plaignant étaient légales et raisonnables. Après que le plaignant a pris la fuite, les policiers avaient des motifs raisonnables de se lancer à sa poursuite pour l’appréhender et le placer en état d’arrestation pour fraude. Ainsi, en vertu des exigences prévues par le paragraphe 25 (1) du Code criminel, étant donné que les policiers exécutaient des fonctions légales et qu’ils s’appuyaient sur des motifs raisonnables, ils ne doivent pas faire l’objet de poursuites, tant qu’ils ont employé la force nécessaire pour cette fin légale.
Au vu de tous les éléments de preuve et comme l’a confirmé l’enregistrement vidéo des caméras de TVCF, il n’est pas contesté que la seule force que l’AI a employée pour appréhender le plaignant était de l’attraper en entourant sa taille de ses deux bras pour le projeter à terre; aucune autre force n’a été utilisée après que le plaignant a été immobilisé, autre que de lui tirer les mains derrière le dos pour le menotter. Il est également évident que le plaignant n’a laissé aucune autre option aux agents de police lorsqu’il a décidé de prendre la fuite en courant et qu’il était de la responsabilité de la police, après avoir reçu une plainte pour fraude, d’appréhender le plaignant et de faire enquête sur la plainte.
En vertu de ces faits et en dépit de la blessure malheureuse que le plaignant a subie, je ne peux pas conclure que les actions de l’AI constituaient plus que ce qui était nécessaire et justifié dans les circonstances. Pour arriver à cette conclusion, je tiens compte de l’interprétation de la loi énoncée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R c. Nasogaluak [2010] 1 R.C.S. 206, en ces termes :
Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d'une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux-ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu'ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l'explique dans R. c. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C. -B.) :
[traduction] Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu'on ne pouvait s'attendre à ce que l'appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218]
Par ailleurs, j’ai tenu compte de la décision de la Cour d’appel de l’Ontario, dans l’affaire R. v. Baxter (1975) 27 C.C.C. (2d) 96 (Ont. C.A.), selon laquelle on n’attend pas des agents de police qu’ils évaluent avec précision la mesure exacte de la force qu’ils emploient. En l’espèce, il est évident que la force employée par l’AI pour appréhender le plaignant était la seule option possible pour l’empêcher de s’enfuir. Si le plaignant n’avait pas décidé de prendre la fuite pour échapper à la police, l’AI n’aurait pas eu besoin de recourir à la force pour l’appréhender et le plaignant n’aurait jamais été blessé. Au vu de ces faits, je conclus que ce sont les actions du plaignant lui-même qui ont malheureusement conduit à sa blessure.
En conclusion, selon les faits devant moi, qui ne sont pas réellement contestés et qui sont entièrement confirmés par l’enregistrement vidéo des caméras de TVCF, je ne suis pas d’avis que les preuves sont suffisantes pour me donner des motifs raisonnables de croire que les actions de l’AI étaient excessives ni qu’elles sont suffisantes pour justifier le dépôt d’accusations criminelles. Aucune accusation criminelle ne sera donc déposée.
Date : 16 octobre 2018
Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
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